ENCYCLOPÉDIE OU DICTIONNAIRE RAISONNÉ
DES SCIENCES, DES ARTS ET DES MÉTIERS
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de l'air ou la répulsion de ses parties, est produite
par une cause méchanique, dont l'effort tend à écarter chaque particule de la particule voisine, & non
par une force mathématique inhérente à chacune
d'elles, qui tendroit à les éloigner toutes les unes
des autres, comme l'attraction tend à les rapprocher,
soit en vertu de quelque propriété inconnue
de la matiere, soit en vertu des lois primitives du
Ciéateur: en effet, si l'attraction est un fait démontré
en Physique, comme nous nous croyons en droit
de le supposer, il est impossible que les parties de l'air
se repoussent par une force inhérente & mathématique.
C'est un fait que les corps s'attirent à des
distances auxquelles jusqu'à présent on ne connoît
point de bornes; Saturne & les cometes, en tournant
autour du Soleil, obéissent à la loi de l'attraction: le Soleil les attire en raison inverse du quarré
des distances; ce qui est vrai du Soleil, est vrai des
plus petites parties du Soleil, dont chacune pour sa
part, & proportionnellement à sa masse, attire aussi
Saturne suivant la même loi. Les autres planetes,
leurs plus petites parties & les particules de notre
air, sont doüées d'une force attractive semblable,
qui dans les distances éloignées, surpasse tellement
toute force agissante suivant une autre loi, qu'elle
entre seule dans le calcul des mouvemens de tous les
corps célestes: or il est évident que si les parties de l'air
se repoussoient par une force mathématique, l'attraction
bien loin d'être la force dominante dans les espaces
célestes, seroit au contraire prodigieusement surpassée
par la répulsion; car c'est un point de fait, que
dans la distance actuelle qui se trouve entre les parties
de l'air, leur répulsion surpasse incomparablement leur
attraction: c'est encore un fait que les condensations
de l'air sont proportionnelles aux poids, &
que par conséquent la répulsion des particules décroît
en raison inverse des distances, & même, comme
Newton l'a remarqué, dans une raison beaucoup
moindre, si c'est une loi purement mathématique:
donc les décroissemens de l'attraction sont bien plus
rapides, puisqu'ils suivent la raison inverse du quarré
des distances; donc si la répulsion a commencé à
surpasser l'attraction, elle continuera de la surpasser,
d'autant plus que la distance deviendra plus grande;
donc si la répulsion des parties de l'air étoit une force
mathématique, cette force agiroit à plus forte raison
à la distance des planetes.
On n'a pas même la ressource de supposer que les
particules de l'air sont des corps d'une nature différente
des autres, & assujettis à d'autres lois; car l'expérience
nous apprend que l'air a une pesanteur pro
pre; qu'il obéit à la même loi qui précipite les autres
corps sur la terre, & qu'il fait équilibre avec eux
dans la balance. Voyez Air. La répulsion des parties
de l'air a donc une cause méchanique, dont l'effort
suit la raison inverse de leurs distances: or l'exemple
des autres corps rendus expansibles par la
chaleur, nous montre dans la nature une cause méchanique
d'une répulsion toute semblable: cette cause
est sans cesse appliquée à l'air; son effet sur l'air,
sensiblement analogue à celui qu'elle produit sur les
autres corps, est précisément l'augmentation de cette
force d'expansibilité ou de répulsion, dont nous
cherchons la cause; & de plus, cette augmentation
de force est exactement assujettie aux mêmes lois que
suivoit la force avant que d'être augmentée. Il est certain
que l'application d'un degré de chaleur plus considérable
à une masse d'air, augmente son expansibilité; cependant les physiciens qui ont comparé les
condensations de l'air aux poids qui les compriment,
ont toûjours trouvé ces deux choses exactement proportionnelles,
quoiqu'ils n'ayent eu dans leurs expériences
aucun égard au degré de chaleur, & quel
qu'ait été ce degré. Lorsque M. Amontons s'est assûré
(Mém. de l'Acad. des Scienc. 1702.) que deux masses
d'air, chargées dans le rapport d'un à deux, soûtiendroient,
si on leur appliquoit un égal degré de
chaleur, des poids qui seroient encore dans le rapport
d'un à deux; ce n'étoit pas, comme on le dit
alors, une nouvelle propriété de l'air qu'il découvroit
aux Physiciens; il prouvoit seulement que la
loi des condensations proportionelles aux poids,
avoit lieu dans tous les degrés de chaleur; & que
par conséquent, l'accroissement qui survient par la
chaleur à la répulsion, suit toûjours la raison inverse
des distances.
Si nous regardons maintenant la répulsion totale
qui répond au plus grand degré de chaleur connu,
comme une quantité formée par l'addition d'un certain
nombre de parties a, b, c, e, f, g, h, i, &c.
qui soit le même dans toutes les distances, il est clair
que chaque partie de la répulsion croît & décroît en
même raison que la répulsion totale, c'est - à - dire en
raison inverse des distances, & que chacun des termes
sera [omission: formula; to see, consult fac-similé version], &c. or il est certain qu'une partie
de ces termes, dont la somme est égale à la différence
de la répulsion du grand froid au plus grand chaud
connu, répondent à autant de degrés de chaleur; ce
seront, si l'on veut, les termes a, b, c, e: or comme
le dernier froid connu peut certainement être encore
fort augmenté; je demande si, en supposant qu'il
survienne un nouveau degré de froid, la somme des
termes qui composent la répulsion totale, ne sera
pas encore diminuée de la quantité [omission: formula; to see, consult fac-similé version], & successivement
par de nouveaux degrés de froid des quantités
[omission: formula; to see, consult fac-similé version] & [omission: formula; to see, consult fac-similé version]: je demande à quel terme s'arrêtera
cette diminution de la force répulsive toûjours correspondante
à une dertaine diminution de la chaleur,
& toûjours assujettie à la loi des distances inverses,
comme la partie de la force qui subsiste après
la diminution: je demande en quoi les termes g, h, i,
different des termes a, b, c; pourquoi différentes
parties de la force répulsive, égales en quantité, &
reglées par la même loi, seroient attribuées à des
causes d'une nature différente; & par quelle rencontre
fortuite des causes entierement différentes produiroient
sur le même corps des effets entierement
semblables & assujettis à la même loi. Conclure de
ces réflexions, que l'expansibilité de l'air n'a pas d'autre
cause que la chaleur, ce n'est pas seulement appliquer
à l'expansibilité d'une substance la cause qui
rend une autre substance expansible; c'est suivre une
analogie pius rapprochée, c'est dire que les causes
de deux effets de même nature, & qui ne different
que du plus au moins, ne sont aussi que la même
cause dans un degré différent: prétendre au contraire
que l'expansibilité est essentielle à l'air, parce que
le plus grand froid que nous connoissions, ne peut
la lui faire perdre; c'est ressembler à ces peuples de
la zone torride, qui croyent que l'eau ne peut cesser
d'être fluide, parce qu'ils n'ont jamais éprouvé
le degré de froid qui la convertit en glace.
Il y a plus: l'expérience met tous les jours sous les
yeux des Physiciens, de l'air qui n'est en aucune maniere
expansible; c'est cet air que les Chimistes ont
démontré dans une infinité de corps, soit liquides, soit
durs, qui a contracté avec leurs élémens une véritable
union, qui entre comme un principe essentiel
dans la combinaison de plusieurs mixtes, & qui s'en
dégage, ou par des décompositions & des combinaisons
nouvelles dans les fermentations & les mélanges
chimiques, ou par la violence du feu: cet air
ainsi retenu dans les corps les plus durs, & privé de
toute expansibilité, n'est - il pas précisément dans le
cas de l'eau, qui combinée dans les corps n'est plus
fluide, & cesse d'être expansible à des degrés de
chaleur très - supérieurs au degré de l'eau bouillante,
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comme l'air cesse de l'être à des degrés de chaleur
très - supérieurs à celle de l'atmosphere? Qu'au degré
de chaleur de l'eau bouillante, l'eau soit dégagée des
autres principes par de nouvelles combinaisons,
elle passera immédiatement à l'état d'expansibilité:
de même dégagé & rendu à lui même dans la décomposition
des mixtes, n'a besoin que du plus petit
degré de chaleur connu, pour devenir expansible: il le deviendra encore, sans l'application d'un
intermode chimique, par l'effet de la seule chaleur,
lorsqu'elle sera assez forte pour vaincre l'union
qu'il a contractée avec les principes du mixte:
c'est précisément de la même maniere que l'eau se
sépare dans la distillation des principes avec lesquels
elle est combinée, parce que malgré son union avec
eux, elle est encore réduite en vapeurs par un degré
de chaleur bien inférieur à celui qui pourroit élever les autres principes: or dans l'un & l'autre phénomene,
c'est également la chaleur qui donne à l'air
& à l'eau toute leur expansibilité, & il n'y a aucune
différence que dans le degré de chaleur qui vaporise
l'une & l'autre substance; degré qui dépend bien
moins de leur nature particuliere, que de l'obstacle
qu'oppose à l'action de la chaleur l'union qu'elles
ont contractée avec les autres principes, ensorte que
presque toûjours l'air a besoin, pour devenir expansible,
d'un degré de chaleur fort supérieur à celui
qui vaporise l'eau. Il résulte de ces faits, 1°. que
l'air perd son expansibilité par son union avec d'autres
corps, comme l'eau perd, dans le même cas, son
expansibilité & sa liquidité; 2°. qu'ainsi, ni l'expansibilité, ni la fluidité n'appartiennent aux élémens de
ces deux substances, mais seulement à la masse ou
à l'aggrégation formée de la réunion de ces élémens,
comme l'a remarqué M. Venel dans son mémoire sur
l'analyse des eaux de Selters (Mém. des corresp. de
l'acad. des Sciences, tome II.); 3°. que la chaleur
donne également à ces deux substances l'expansibilité,
par laquelle leur union, avec les principes des mixtes,
est rompue; 4°. enfin, que l'analogie entre l'expansibilité de l'air & celle de l'eau, est complete à tous
égards; que par conséquent, nous avons eu raison de
regarder l'air comme un fluide actuellement dans l'état
de vapeur, & qui n'a besoin, pour y persévérer,
que d'un degré de chaleur fort au - dessous du plus
grand froid connu. Si je me suis un peu étendu sur
cette matiere, c'est afin de porter le dernier coup à
ces suppositions gratuites de corpuseules branchus,
de lames spirales, dont on composoit notre air, &
afin de substituer à ces rêveries, honorées si mal - à - propos du nom de méchanisme, une théorie simple, qui
rappelle tous les phénomenes de l'expansibilité dans
différentes substances, à ce seul fait général, que la
chaleur tend à écarter les unes des autres les parties
de tous les corps. Je n'entreprends point d'expliquer
ici la nature de la chaleur ni la maniere dont elle
agit: le peu que nous savons sur l'élément qui paroît
être le milieu de la chaleur, appartient à d'autres
articles. V.
Chaleur, Feu, Froid
, & Température. Nous ignoronssi cet élément est, ou n'est
pas lui même un fluide expansible, & qu'elles pourroient
être en ce dernier cas les causes de son expansibilité; car je n'ai prétendu assigner la cause de cette
propriété, que dans les corps où elle est sensible pour
nous. Quant à ces fluides qui se dérobent à nos sens,
& dont l'existence n'est constatée que par leurs effets,
comme le fluide magnétique, le fluide électrique, & l'élément même de la chaleur, nous connoissons
trop peu leur nature, & nous ne pouvons en
parler autrement que par des conjectures; à la vérité,
ces conjectures semblent nous conduire à penser
qu'au moins le fluide électrique est éminemment
expansible. Voyez les articles
Feu électrique, Magnétisme, Ether , & Température.
Quoique l'expansibilité des vapeurs & de l'air, doive
être attribuée à la chaleur comme à sa véritable cause,
ainsi que nous l'avons prouvé, l'expérience nous
montre une autre cause capable, comme la chaleur
d'écarter les parties du corps, de produire une véritable
répulsion, & d'augmenter du moins l'expansibilité, si elle ne suffit pas seule pour donner aux
corps cette propriété; ce qui ne paroît effectivement
pas par l'expérience. Je parle de l'électricité: on sait
que deux corps également électrisés se repoussent
mutuellement, & qu'ainsi un système de corps électriques fourniroit un tout expansible: on sait que
l'eau électrisée sort par un jet continu de la branche
capillaire d'un syphon, d'où elle ne tomboit auparavant
que goutte à goutte; l'électricité augmente
donc la fluidité des liqueurs, & diminue l'attiaction
de leurs parties, puisque c'est par cette attraction
que l'eau se soûtient dans les tuyaux capillaires
(voyez Tuyaux capillaires): on ne peut donc
douter que l'électricité ne soit une cause de répulsion
entre les parties de certains corps, & qu'elle ne soit
capable de produire un certain degré d'expansibilité;
soit qu'on lui attribue une action particuliere, indépendante
de celle du fluide de la chaleur, soit qu'on
imagine, ce qui est peut - être plus vraissemblable,
qu'elle produit cette répulsion par l'expansibilité que
le fluide électrique reçoit lui - même du fluide de la
chaleur, comme les autres corps de la nature.
Plusieurs personnes seront peut - être étonnées de
me voir distinguer ici la répulsion produite par l'électricité,
de celle dont la chaleur est la véritable
cause; & peut - être regarderont - elles cette ressemblance
dans les effets de l'une & de l'autre, comme
une nouvelle preuve de l'identité qu'elles imaginent
entre le fluide électrique & le fluide de la chaleur,
qu'elles confondent très - mal à - propos avec le feu,
avec la matiere du feu, & avec la lumiere, toutes
choses cependant très différentes. Voyez Feu, Lumiere, & Phlogistique. Mais rien n'est plus mal
fondé que cette identité prétendue entre le fluide
électrique & l'élément de la chaleur. Indépendamment de la diversité des effets, il suffit pour se convaincre
que l'un de ces élémens est très - distingué de
l'autre, de faire réflexion que le fluide de la chaleur
pénetre toutes les substances, & se met en équilibre
dans tous les corps, qui se communiquent tous réciproquement
les uns par les autres, sans que jamais
cette communication puisse être interrompue par
aucun obstacle: le fluide électrique, au contraire,
reste accumulé dans les corps électrisés & autour de
leur surface, s'ils ne sont environnés que des corps
qu'on a appellés électriçues par eux - mêmes, c'est - à - dire qui ne transmettent pas l'électricité, du moins
de la même maniere que les autres corps; comme
l'air est de ce nombre, le fluide électrique a besoin,
pour se porter d'un corps dans un autre, & s'y mettre
en équilibre, de ce qu'on appelle un conducteur
(voyez Conducteur); & c'est à la promptitude du
rétablissement de l'équilibre, dûe peut - être à la prodigieuse
expansibilité de ce fluide, qu'il faut attribuer
l'étincelle, la commotion, & les autres phénomenes
qui accompagnent le rétablissement subit de la
communication entre le corps électrisé en plus, & le
corps électrisé en moins. Voyez Elec Iricité &
Coup foudroyant. J'ajoûte que si le fluide électrique communiquoit universellement d'un corps à
l'autre, comme le fluide de la chaleur, ou même s'il
traversoit l'air aussi librement qu'il traverse l'eau,
il seroit resté à jamais inconnu, comme il le seroit
nécessairement pour un peuple de poissons, quelque
philosophes qu'on pût les supposer; le fluide existeroit,
mais aucun des phénomenes de l'électricité ne
seroit produit, puisqu'ils se réduisent tous à l'accumulation
du fluide électrique aux environs de cer<pb->
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