ENCYCLOPÉDIE OU DICTIONNAIRE RAISONNÉ
DES SCIENCES, DES ARTS ET DES MÉTIERS

RECHERCHE Accueil Mises en garde Documentation ATILF ARTFL Courriel

Previous page

"276"> du décroissement de la force; correction qui la modifie peut - être à quelque distance qu'elle agisse, & qui fait de la loi des décroissemens une loi complexe, formée de deux ou même de plusieurs progressions différentes, tellement inégales dans leur marche, que la partie de la force qui suit la raison inverse des distances, surpasse incomparablement dans toutes les distances moyennes les forces reglées par les autres lois, dont l'effet sera insensible alors; & qu'au contraire ces dernieres l'emportent dans les distances extrèmes, & peut - être aussi dans les extrèmes proximités?

Les observations prouvent effectivement que la loi des condensations proportionnelles aux poids dont l'air est chargé, cesse d'avoir lieu dans les degrés extrèmes de compression & d'expansion. On peut consulter là - dessus les physiciens qui ont fait beaucoup d'expériences sur la compression de l'air, & ceux qui ont travaillé sur le rapport des hauteurs du barometre à la hauteur des montagnes. Voyez Air, Machine Pneumatique , & Barometre. On a de plus remarqué avec raison à l'article Atmosphere, que si les condensations de l'air étoient exactement proportionnelles aux poids qui le compriment, la hauteur de l'atmosphere devroit être infinie; ce qui ne sauroit s'accorder avec les phénomenes. Voyez Atmosphere.

Quelle que soit la loi, suivant laquelle les parties d'un corps expansible se repoussent les unes les autres, c'est une suite de cette répulsion que ce corps forcé par la compression à occuper un espace moindre, se rétablisse dans son premier état, quand la compression cesse, avec une force égale à la force comprimante. Un corps expansible est donc élastique par cela même (voyez Elasticité), mais tout corps élastique n'est point pour cela expansible; témoin une lame d'acier. L'élasticité est donc le genre. L'expansibilité & le ressort sont deux especes; ce qui les caractérise essentiellement, c'est que le corps expansible tend toûjours à s'étendre, & n'est retenu que par des obstacles étrangers: le corps à ressort ne tend qu'à se rétablir dans un état déterminé; la force comprimante est dans le premier un obstacle au mouvement, & dans l'autre un obstacle au repos. Je donne le nom de ressort à une espece particuliere d'élasticité, quoique les Physiciens ayent jusqu'ici employé ces deux mots indifféremment l'un pour l'autre, & qu'ils ayent dit également le ressort de l'air & l'élasticité d'un arc; & je choisis pour nommer l'espece le mot de ressort, plus populaire que celui d'élasticité, quoiqu'en général, quand de deux mots jusque - là synonymes, on veut restraindre l'un à une signification particuliere, on doive faire attention à conserver au genre le nom dont l'usage est le plus commun, & à désigner l'espece par le mot scientifique. Voyez Synonymes. Mais dans cette occasion, il se trouve que le nom de ressort n'a jamais été donné par le peuple, qu'aux corps auxquels je veux en limiter l'application; parce que le peuplene connoît guere ni l'expansibilité ni l'élasticité de l'air: ensorte que les savans seuls ont ici confondu deux idées sous les mêmes dénominations. Or le mot d'élasticité est le plus familier aux savans.

Il est d'autant plus nécessaire de distinguer ces deux especes d'élasticité, qu'à la réserve d'un petit nombre d'effets, elles n'ont presque rien de commun, & que la confusion de deux choses aussi différentes, ne pourroit manquer d'engager les Physiciens qui voudroient chercher la cause de l'élasticité en général dans un labyrinthe d'erreurs & d'obscurités. En effet, l'expansibilité est produite par une cause qui tend à écarter les unes des autres les parties des corps; dés - lors elle ne peut appartenir qu'à des corps actuellement fluides, & son action s'étend à toutes les distances, sans pouvoir être bornée que par la cessation absolue de la cause qui l'a produite. Le ressort, au contraire, est l'effet d'une force qui tend à rapprocher les parties des corps, écartées les unes des autres; il ne peut appartenir qu'à des corps durs; & nous montrerons ailleurs qu'il est une suite nécessaire de la cause qui les constitue dans l'état de dureté. Voyez Glace, Induration, & Ressort. Par cela même que cette cause tend à rapprocher les parties des corps, la nature des choses établit pour borne de son action le contact de ces parties, & elle cesse de produire aucun effet sensible, précisément lorsqu'elle est la plus forte.

On pourroit pousser plus loin ce parallele; mais il nous suffit d'avoir montré que l'expansibilité est une espece particuliere d'élasticité, qui n'a presque rien de commun avec le ressort. J'observerai seulement qu'il n'y a & ne peut y avoir dans la nature que ces deux especes d'élasticité; parce que les parties d'un corps, considérées les unes par rapport aux autres, ne peuvent se rétablir dans leurs anciennes situations, qu'en s'approchant ou en s'éloignant mutuellement. Il est vrai que la tendance qu'ont les parties d'un fluide pesant à se mettre de niveau, les rétablit aussi dans leur premier état lorsqu'elles ont perdu ce niveau; mais ce rétablissement est moins un changement d'état du fluide, & un retour des parties à leur ancienne situation respective, qu'un transport local d'une certaine quantité de parties du fluide en masse par l'effet de la pesanteur; transport absolument analogue au mouvement d'une balance qui se met en équilibre. Or, quoique ce mouvement ait aussi des lois qui lui sont communes avec les mouvemens des corps élastiques, ou plûtôt avec tous les mouvemens produits par une tendance quelconque (Voyez Tendance), il n'a jamais été compris sous le nom d'élasticité; parce que ce dernier mot n'a jamais été entendu que du rétablissement de la situation respective des parties d'un corps, & non du retour local d'un corps entier dans la place qu'il avoit occupé.

L'expansibilité ou la force par laquelle les parties des fluides expansibles se repoussent les unes les autres, est le principe des lois qui s'observent soit dans la retardation du mouvement des corps qui traversent des milieux élastiques, soit dans la naissance & la transmission du mouvement vibratoire excité dans ces mêmes milieux. La recherche de ces lois n'appartient point à cet article. Voy. Résistance des Fluides & Son.

De l'expansibilité considérée physiquement, des substances auxquelles elle appartient, des causes qui la produisent ou qui l'augmentent. L'expansibilité appartient à l'air; voyez Air: elle appartient aussi à tous les corps dans l'état de vapeur; voyez Vapeur: ainsi l'esprit - de - vin, le mercure, les acides les plus pesans, & un très - grand nombre de liquides très - différens par leur nature & par leur gravité spécifique, peuvent cesser d'être incompressibles, acquérir la propriété de s'étendre comme l'air en tout sens & sans bornes, de soûtenir comme lui le mercure dans le barometre, & de vaincre des résistances & des poids énormes. Voy. Explosion & Pompe à feu. Plusieurs corps solides même, après avoir été liquéfiés par la chaleur, sont susceptibles d'acquérir aussi l'état de vapeur & d'expansibilité, si l'on pousse la chaleur plus loin: tels sont le sousre, le cinnabre plus pesant encore que le soufre, & beaucoup d'autres corps. Il en est même très - peu qui, si on augmente toûjours la chaleur, ne deviennent à la fin expansibles, soit en tout, soit en partie: car dans la plûpart des mixtes, une partie des principes devenus expansibles à un certain degré de chaleur, abandonnent les autres principes, tandis que ceux - ci restent fixes; soit qu'ils ne soient pas susceptibles [p. 277] de l'expansibilité, soit qu'ils ayent besoin pour l'acquérir d'un degré de chaleur plus considérable.

L'énumération des différens corps expansibles, & l'examen des circonstances dans lesquelles ils acquierent cette propriété, nous présentent plusieurs faits généraux. Premierement, de tous les corps qui nous sont connus (car je ne parle point ici des fluides électriques & magnétiques, ni de l'élément de la chaleur ou éther dont la nature est trop ignorée), l'air est le seul auquel l'expansibilité paroisse au premier coupd'oeil appartenir constamment; & cette propriété, dans tous les autres corps, paroît moins une qualité attachée à leur substance, & un caractere particulier de leur nature, qu'un état accidentel & dépenpendant de circonstances étrangeres. Secondement, tous les corps, qui de solides ou de liquides deviennent expansibles, ne le deviennent que lorsqu'on leur applique un certain degré de chaleur. Troisiemement, il est très - peu de corps qui ne deviennent expansibles à quelque degré de chaleur: mais ce degré n'est pas le même pour les différens corps. Quatriemement, aucun corps solide ne devient expansible par la chaleur, sans avoir passé auparavant par l'état de liquidité. Cinquiemement, c'est une observation constante, que le degré de chaleur auquel une substance particuliere devient ex pansible, est un point fixe & qui ne varie jamais lor sque la force qui presse la surface du liquide n'éprou ve aucune variation. Ainsi le terme de l'eau bouillarite, qui n'est autre que le degré de chaleur nécessai re pour la vaporisation de l'eau (Voyez le mémoire de M. l'abbé Nollet sur le bouillonnement des liquides, mém. de l'acad. des Sc. 1748.), reste toûjours le même, lorsque l'air comprime également la sui face de l'eau. Sixiemement, si l'on examine les effei s de l'application successive des différens degrés de rempérature à une même substance, telle par exemp le que l'eau, on la verra d'abord, si le degré de tei npérature est au - dessous du terme zéro du thermometre de M. de Reaumur, dans un état de glace ou de so lidité. Quand le thermometre monte au - dessus du zér, cette glace fond & devient un liquide. Ce liquide l'augmente de volume comme la liqueur du thermometre elle - même, à mesure que la chaleur augmente; & cette augmentation a pour terme la dissipation même de l'eau, qui réduite en vapeur, fait effort en toutsens pour s'étendre, & brise souvent les vaisseaux où elle se trouveresserrée: alors si la chaleur reçoit de no uveaux accroissemens, la force d'expansion augmemtera encore, & la vapeur comprimée par la même force occuperoit un plus grand espace. Ainsi l'eau appliquée successivement à tous les degrés de tempénature connus, passe successivement par les trois états de corps solide (Voyez Glacf), de liquide (Voyez Liquide), & de vapeur ou de corps expansible. Voy. Vapeur. Chacun des passages d'un de ces états à l'autre, répond à une époque fixe dans la succession des différentes nuances de température; les interv alles d'une époque à l'autre, ne sont remplis que par de simples augmentations de volume; mais à chacune de ces époques, la progression des augment ations du volume s'arrête pour changer de loi, & pour recommencer une marche relative à la nature nouvelle que le corps semble avoir revêtue. Septiemement, si de la considération d'un seul corps, & des changemens successifs qu'il éprouve par l'application de tous les degrés de température, nous passons à la considération de tous les corps comparés entre eux & appliqués aux mêmes degrés de tempéra ture, nous en recueillons qu'à chacun de ces degrésré pond dans chacun des corps un des trois états de solide, de liquide, ou de vapeur, & dans ces états un volume déterminé: qu'on peut ainsi regarder tous les corps de la nature comme autant de thermometres dont tous les états & les volumes possibles marquent un certain degré de chaleur; que ces thermometres sont construits sur une infinité d'échelles & suivent des marches entierement différentes; mais qu'on peut toûjours rapporter ces échelles les unes aux autres, par le moyen des observations qui nous apprennent que tel état d'un corps & tel autre état d'un autre corps, répondent au même degré de chaleur; ensorte que le degré qui augmente le volume de certains solides, en convertit d'autres en liquides, augmente seulement le volume d'autres liquides, rend expansibles des corps qui n'étoient que dans l'état de liquidité, & augmente l'expansibilité des fluides déjà expansibles.

Il résulte de ces derniers faits, que la chaleur rend fluides des corps, qui sans son action seroient restés solides; qu'elle rend expansibles des corps qui resteroient simplement liquides, si son action étoit moindre; & qu'elle augmente le volume de tous les corps tant solides que liquides & expansibles. Dans quelque état que soient les corps, c'est donc un fait général que la chaleur tend à en écarter les parties, & que les augmentations de leur volume, leur fusion & leur vaporisation, ne sont que des nuances de l'action de cette cause, appliquée sans cesse à tous les corps, mais dans des degrés variables. Cette tendance ne produit pas les mêmes effets sensibles dans tous les corps; il faut en conclure qu'elle est inégalement contre - balancée par l'action des forces qui en retiennent les parties les unes auprès des autres, & qui constituent leur dureté ou leur liquidité, lorsqu'elles ne sont pas entierement surpassées par la répulsion que produit la chaleur. Je n'examine point ici quelle est cette force, ni comment elle varie dans tous les corps. Voyez Glace & Induration. Il me suffit qu'on puisse toûjours la regarder comme une quantité d'action, comparable à la répulsion dans chaque distance déterminée des particules entr'elles, & agissant dans une direction contraire.

Cette théorie a toute l'évidence d'un fait, si on ne veut l'appliquer qu'aux corps qui passent sous nos yeux d'un état à l'autre; nous ne pouvons douter que leur expansibilité, ou la répulsion de leurs parties, ne soit produite par la chaleur, & par conséquent par une cause méchanique au sens des Cartésiens, c'est - à - dire dépendante des lois de l'impulsion, puisque la chaleur qui n'est jamais produite originairement que par la chûte des rayons de lumiere, ou par un frotement rapide, ou par des agitations violentes dans les parties internes des corps, a toûjours pour cause un mouvement actuel. Il est encore évident que la même théorie peut s'appliquer également à l'expansibilité du seul corps que nous ne voyons jamais privé de cette propriété, je veux dire de l'air. L'analogie qui nous porte à expliquer toûjours les effets semblables par des causes semblables, donne à cette idée l'apparence la plus séduisante; mais l'analogie est quelquefois trompeuse: les explications qu'elle nous présente ont besoin, pour sortir du rang des simples hypothèses, d'être développées, afin que le nombre & la force des inductions suppléent au défaut des preuves directes. Nous allons donc détailler les raisons qui nous persuadent que l'expansibilité de l'air n'a pas d'autre cause que celle des vapeurs, c'est - à - dire la chaleur; que l'air ne differe de l'eau à cet égard, qu'en ce que le dégré, qui réduit les vapeurs aqueuses en eau & même en glace, ne suffit pas pour faire perdre à l'air son expansibilité; & qu'ainsi, l'air est un corps que le plus petit degré de chaleur connu met dans l'état de vapeur: comme l'eau est un fluide que le plus petit degré de chaleur connu au - dessus du terme de la glace met dans l'état de fluidité, & que le degré de l'ébullition met dans l'état d'expansibilité.

Il n'est pas difficile de prouver que l'expansibilité

Next page


The Project for American and French Research on the Treasury of the French Language (ARTFL) is a cooperative enterprise of Analyse et Traitement Informatique de la Langue Française (ATILF) of the Centre National de la Recherche Scientifique (CNRS), the Division of the Humanities, the Division of the Social Sciences, and Electronic Text Services (ETS) of the University of Chicago.

PhiloLogic Software, Copyright © 2001 The University of Chicago.