ENCYCLOPÉDIE OU DICTIONNAIRE RAISONNÉ
DES SCIENCES, DES ARTS ET DES MÉTIERS

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"236"> rien qui vaille dans son chemin, on ne devient rien qui vaille soi - même. Il faut un grand courage pour se soûtenir seul dans les sentiers de la vertu, quand on est entouré de gens qui ne les suivent point. D'ailleurs dans les états où les moeurs sont corrompues, la plûpart des hommes ne tirent point de fruit du petit nombre de bons exemples qu'ils voyent; & dans l'éloignement ils se contentent de rendre avec froideur quelque justice au mérite.

Dans les divers gouvernemens, les principes de leur constitution étant entierement différens, non seulement les exemples de bien & de mal ne sont pas les mêmes, mais les souverains ne sauroient se modeler les uns sur les autres d'une maniere utile, fixe & durable; c'est ce que Corneille fait si bien dire à Auguste:

Les exemples d'autrui suffiroient pour m'instruire, Si par l'exemple seul on pouvoit se conduire; Mais souvent l'un se perd où l'autre s'est sauvé, Et par où l'un périt, un autre est conservé.

Enfin dans toutes les conjonctures de la vie, avant que de prendre les exemples pour modeles, il faut toûjours les examiner sur la loi, c'est - à - dire sur la droite raison: c'est aux actions à se former sur elle, & non pas à elle à se plier pour être conforme aux actions. Article de M. le Chevalier de Jaucourt.

Exemple (Page 6:236)

Exemple, (Belles - Lettr.) argument propre à la Rhétorique, par lequel on montre qu'une chose arrivera ou se fera d'une telle maniere, en apportant pour preuve un ou plusieurs évenemens semblables arrivés en pareille occasion.

Si je voulois montrer, dit Aristote, livre II. de la Rhétorique, que Denis de Syracuse ne demande des gardes que pour devenir le tyran de sa patrie, je dirois que Pisistrate demanda des gardes; & que dès qu'on lui en eut accordé, il s'empara du gouvernement d'Athenes; j'ajoûterois que Théagene fit la même chose à Mégare: j'alléguerois ensuite les autres exemples de ceux qui sont parvenus à la tyrannie par cette voie, & j'en conclurois que quiconque demande des gardes, en veut à la liberté de sa patrie.

On résout cet argument en montrant la disparité qui se rencontre entre les exemples & la chose à laquelle on veut les appliquer. (G)

EXEMPT (Page 6:236)

* EXEMPT, adj. (Gramm.) terme relatif à quelque loi commune, qui n'oblige point celui qu'on en dit exempt.

Exempt de l'Ordinaire (Page 6:236)

Exempt de l'Ordinaire, (Jurispr.) se dit de certains monasteres, chapitres & autres ecclésiastiques, soit séculiers ou réguliers, qui ne sont pas soûmis à la jurisdiction de l'évêque diocésain, & relevent de quelqu'autre supérieur ecclésiastique, tel que le métropolitain ou le pape. Voyez ci - après Exemption. (A)

Exempt (Page 6:236)

Exempt, (Jurispr.) est aussi un officier dans certains corps de cavalerie, qui commande en l'absence du capitaine & des lieutenans. Ces officiers ont sans doute été appellés exempts, parce qu'étant au - dessus des simples cavaliers, ils sont dispensés de faire le même service. Les exempts, pour marque de leur autorité, portent un bâton de commandement qui est d'ébene, garni d'yvoire par les deux bouts; c'est ce que l'on appelle le bâton d'exempt. Quelquefois par ce terme, bâton d'exempt, on entend la place même d'exempt.

Il y a des exempts dans les compagnies des gardes du corps, qui sont des places considérables.

Il y a aussi des exempts dans la compagnie de la connétablie, lesquels sont chargés, avec les autres officiers de cette compagnie, de notifier les ordres de MM. les maréchaux de France pour les affaires du point d'honneur, & d'arrêter ceux qui sont dans le cas de l'être, en vertu des ordres qui leur sont donnés pour cet effet.

Il y a pareillement des exempts dans le corps des maréchaussées, dans la compagnie de robe - courte, dans la compagnie du guet à cheval, & même dans celle du guet à pié. Ces exempts sont ordinairement chargés de notifier les ordres du roi & de faire les captures, soit en exécution d'ordres du roi directement, ou en vertu de quelque decret ou contrainte par corps. Les exempts de maréchaussée n'ont pas le pouvoir d'informer, comme il fut jugé par arrêt du grand - conseil du 2 Avril 1616. (A)

EXEMPTION (Page 6:236)

EXEMPTION, (Jurisprud.) est un privilége qui dispense de la regle générale.

Exemption de Tailles (Page 6:236)

Exemption de Tailles, c'est le privilége de ne point payer de tailles, qui appartient aux ecclésiastiques, aux nobles & autres privilégiés. Voyez Tailles.

Exemption de Tutelle (Page 6:236)

Exemption de Tutelle, c'est la décharge de la fonction de tuteur. (A)

Exemption de l'Ordinaire (Page 6:236)

Exemption de l'Ordinaire, est le droit que quelques monasteres, chapitres & autres ecclésiastiques, tant séculiers que réguliers, ont de n'être point soûmis à la jurisdiction spirituelle de l'ordinaire, c'est - à - dire de leur évêque diocésain.

Dans les premiers siecles de l'Eglise tous les ecclésiastiques de chaque diocèse étoient soûmis à leur évêque diocésain, comme ils le sont encore de droit commun. Personne alors n'étoit exempt de la jurisdiction spirituelle de l'évêque; monasteres, religieux, abbés, chanoines réguliers & autres, tout étoit soûmis à l'évêque.

On trouve dès le v. siecle plusieurs priviléges accordés aux grands monasteres, qui ont quelque rapport avec les exemptions proprement dites. Ces monasteres étoient la plûpart fondés, ou du moins gouvernés par des abbés d'une grande réputation, qui s'attiroient la vénération des fideles; les évêques en devinrent jaloux, ce qui donna lieu aux abbés de se soustraire à l'autorité de leur évêque: les uns ne voulurent reconnoître pour supérieur que le métropolitain, patriarche ou primat; d'autres eurent recours au pape, qui les prit sous sa protection.

Les chapitres, qui étoient pour la plûpart composés dè réguliers, voulurent aussi avoir part à ces exemptions; ce qui eut lieu beaucoup plus tard par rapport aux chapitres séculiers.

La plus ancienne exemption connue en France, est celle du monastere de Lerins, qui fut faite par le concile d'Arles en 455.

Les évèques eux - mêmes ont accordé quelques exemptions; témoin celle de l'abbaye de S. Denis en 657, qui fut faite par Landry, évêque de Paris, du consentement de son chapitre & des évêques de la province. Il paroît néanmoins que l'usage ne fut pas toûjours uniforme sur ce point en France; car les, exemptions, tant des chapitres que des monasteres, étoient inconnues sous le regne de Pepin, comme il paroît par le concile de Vernon, tenu en 755.

En Orient les exemptions de l'ordinaire, avec soûmission au patriarche ou au métropolitain, furent très - communes: on en trouve des exemples dès le vj. siecle.

Les priviléges ou exemptions ainsi accordés à quelques monasteres, étoient confirmés en France par les rois; on en trouve les formules dans Marculphe, où l'on voit que ces exemptions n'avoient pas alors pour but de soustraire les monasteres à la jurisdiction spirituelle de l'évêque, mais seulement d'empêcher que l'évêque allant trop souvent dans le monastere avec une suite nombreuse, ne troublât le silence & la solitude qui y doivent regner, ut quieta sint monasteria: c'est le motif ordinaire des anciennes chartes d'exemptions. C'est aussi pour empêcher les évêques de se mêler du temporel du monastere, & afin de permettre aux religieux de se choisir un abbé, pourvû [p. 237] qu'il fût béni par l'évêque du lieu; d'ordonner que l'évêque ne pourroit punir les fautes commises dans le cloître par les religieux, que quand les abbés auroient négligé de le faire; & de ne pas permettre que l'on exigeât de l'argent pour l'ordinaire, ou pour la consécration des autels.

On rapporte à la vérité quelques chartes des vij. viij. & jx. siecles, par lesquelles des monasteres paroissent avoir été entierement affranchis par les papes de la jurisdiction spirituelle de l'évêque; mais les plus habiles critiques regardent ces concessions comme supposées, & ce ne fut guere que vers le xj. siecle que les papes commencerent à exempter quelques monasteres de la jurisdiction spirituelle des évêques.

Ces exemptions furent révoquées au concile de Lyon en 1025, & blâmées par saint Bernard, qui vivoit sur la fin du xj. siecle & au commencement du xij. & par saint François, qui vivoit peu de tems après; ce qui suppose qu'elles n'étoient point ordinaires en France: il n'est même point parlé alors d'exemptions pour les chapitres séculiers; & en effet ceux qui sont exempts ne rapportent pour la plûpart que des titres posterieurs au xij. siecle.

Quelque purs qu'ayent pû être les motifs qui ont donné lieu à ces exemptions, il est certain que les exemptions perpétuelles sont contraires à l'ordre naturel & au droit commun; & que si on les a faites pour un bien, elles produisent aussi souvent de grands mconvéniens, sur - tout lorsque les exempts ne sont soûmis à aucune puissance dans le royaume, comme au métropolitain ou au primat, & qu'ils sont soûmis immédiatement au saint siége.

Les premiers fondateurs des ordres mendians firent gloire d'être soûmis à tous leurs supérieurs ecclésiastiques; ceux qui sont venus ensuite, guidés par d'autres vûes, ont obtenu des exemptions.

Elles furent sur - tout multipliées pendant le schisme d'Avignon; les papes & les antipapes en accordoient chacun de leur part, pour attirer ou conserver les monasteres ou les chapitres dans leur parti.

Toutes ces exemptions accordées depuis le commencement du schisme, furent révoquée, par Martin V. avec l'approbation du concile de Constance.

Les évêques tenterent inutilement au concile de Latran de faire réduire tous les moines au droit commun: on révoqua seulement quelques priviléges des mendians.

On demanda aussi la révocation des exemptions au concile de Trente; mais le concile se contenta de réprimer quelques abus, sans abolir les exemptions.

L'ordonnance d'Orléans avoit déclaré tous les chapitres séculiers & réguliers soûmis à l'évêque, nonobstant toute exemption ou privilége; mais l'ordonnance de Blois, & les édits postérieurs qui y sont conformes, paroissent avoir autorisé les exemptions, lorsqu'elles sont fondées sur des titres valables.

La possession seule, quoiqu'ancienne & paisible, est insuffisante pour établir une exemption. Cette maxime est fondée sur l'autorité des papes S. Grégoire le Grand, de Nicolas I. & Innocent III. sur celle des conciles, entr'autres du troisieme concile de Ravenne, en 1314; de ceux de Tours, en 1236; & de Vorcester, en 1240; sur les textes du droit canon & l'autorité des glossateurs. Elle a été aussi établie par Cujas & Dumolin. & par MM. les avocats généraux Capel, Servin, Bignon, Talon.

Mais quoique la possession ne suffise pas seule pour établir une exemption, elle suffit seule pour détruire une exemption, parce que le retour au droit commun est toûjours favorable.

Les actes énonciatifs du titre d'exemption, & ceux même qui paroissent le confirmer, sont pareillement insuffisans pour établir seuls l'exemption; il faut rapporter le titre primordial.

Les conditions nécessaires pour la validité de ce titre, sont qu'il soit en forme authentique, selon l'usage du tems où il été fait; que l'évêque y ait consenti, ou du moins qu'il y ait été appellé, & que le roi ait approuvé l'exemption: enfin qu'il n'y ait aucune clause abusive dans la bulle d'exemption.

Si les clauses abusives touchent la substance de l'acte, elles le rendent entierement nul: si au contraire la clause ne touche pas le fond, elle est nulle, sans vicier le reste de l'acte.

On distingue deux sortes d'exemptions, les unes personnelles, les autres réelles. Les premieres sont celles accordées à un particulier, ou aux inembres d'une communauté. Les exemptions réelles sont celles qui sont accordées en faveur d'une église séculiere ou réguliere. Ces deux sortes d'exemptions sont ordinairement réunies dans le même titre.

Toute exemption étant contraire au droit commun, doit être renfermée strictement dans les termes de l'acte, & ne peut recevoir aucune extension.

En France, lorsque les chapitres séculiers qui sont exempts de l'ordinaire, sont en possession d'exercer sur leurs membres une jurisdiction contentieuse, & d'avoir pour cet effet un official, on les maintient ordinairement dans leur droit & possession, & en ce cas l'appel de l'official du chapitre ressortit à l'officialité de l'évêque.

Du reste les chapitres exempts sont sujets à la jurisdiction de l'évêque, pour la visite & pour tout ce qui dépend de sa jurisdiction volontaire.

Ils ne peuvent aussi refuser à l'évêque les droits honorifiques qui sont dûs à sa dignité, comme d'avoir un siege élevé près de l'autel, de donner la bénédictior. dans l'église, & d'obliger les chanoines à s'incliner pour recevoir la bénédiction.

Quelques chapitres ont été maintenus dans le droit de visiter les paroisses de leur dépendance, à la charge de faire porter à l'évêque leurs procès - verbaux de visite, pour ordonner sur ces procès - verbaux ce qu'il jugeroit à - propos.

Lorsque l'official de ces chapitres séculiers ne fait pas de poursuites contre les délinquans dans le tems prescrit par le titre du chapitre, la connoissance des délits est dévolue à l'official de l'évêque.

La jurisdiction des réguliers est toûjours bornée à l'étendue de leur cloître; & ceux qui commettent quelque délit hors du cloître, sont sujets à la jurisdiction de l'ordinaire.

L'évêque peut contraindre les religieux vagabonds, même ceux qui se disent exempts, de rentrer dans leur couvent; il peut même employer contr'eux à cet effet les censures ecclésiastiques, s'ils refusent de lui obéir.

Les cures qui se trouvent dans l'enclos des monasteres, chapitres ou autres églises exemptes, sont sujettes à la visite de l'ordinaire; & le religieux ou prêtre commis à la desserte des sacremens, & chargé de faire les fonctions curiales, dépend de l'évêque en tout ce qui concerne ces fonctions & l'administration des sacremens.

Quelqu'exemption que puissent avoir les séculiers & réguliers, ils ront toûjours soûmis aux ordonnances de l'évêque pour tout ce qui regarde l'ordre général de la police ecclésiastique, comme l'observation des jeûnes & des fêtes, les processions publiques & autres choses semblables, que l'évêque peut ordonner ou retrancher dans son diocèse, suivant le pouvoir qu'il en a par les canons.

Les exempts séculiers ou réguliers ne peuvent confesser les séculiers sans la permission de l'évêque diocésain, qui peut limiter le lieu, les personnes, le tems & les cas, & révoquer les pouvoirs quand il le juge à - propos.

Les exempts ne peuvent aussi prêcher, même dans

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