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D'ailleurs, quand bien même on accorderoit pour un moment la possibilité de cette supposition, il n'en seroit pas plus difficile de faire voir que la nature n'est point d'accord avec ce sentiment: en effet, cette opinion exclut toute idée d'uniformité dans la répartition des vapeurs sur toute l'étendue de l'atmosphere. Elle suppose nécessairement qu'en été, dans les grandes chaleurs, les particules d'eau très raréfiées devroient s'élever fort haut, & abandonner la partie de l'atmosphere qui avoisine la terre; qu'au contraire en hyver, ces mêmes particules condensées & plus pesantes, devroient se trouver en beaucoup plus grande quantité proche de la terre, qu'en été: or tout le contraire a lieu, comme je l'ai prouvé dans le mémoire que j'ai déjà cité. Ces remarques me paroissent suffisantes pour faire voir que si les molécules d'eau s'élevent dans l'air, ce n'est pas parce qu'elles deviennent spécifiquement plus legeres que celles de ce fluide, & qu'on ne doit pas croire que les particules, en s'élevant & se soûtenant dans l'atmosphere, suivent les mêmes lois qu'un corps solide répandu dans ce fluide. Je ne m'arrêterai pas davantage à combattre cette opinion, croyant qu'il seroit inutile de s'attacher à entasser un grand nombre d'argumens contre ces sortes de suppositions, que les Physiciens négligent de plus en plus, & que leurs auteurs même défendent avec peu de chaleur.
M. Hamberger a senti le défaut de vraissemblance
de l'hypothèse que nous venons de combattre; &
l'ayant réfutée solidement dans ses élémens de Physique, & dans sa belle dissertation sur les causes de
l'élévation des vapeurs, il lui substitue une autre
hypothèse qui lui paroît plus conforme aux observations,
mais qui examinée suivant les lois de la
saine Physique, me semble souffrir pour le moins autant
de difficultés que la premiere.
M. Hamberger paroît lui - même reconnoître tacitement le peu de vraissemblance de cette explication; puisque dans l'édition de 1750 de ses Elémens de Physique, que j'ai entre les mains, il n'avance plus que cette élévation des particules évaporables soit dûe à leur adhésion plus grande à l'air qui est au - dessus, qu'aux molécules ignées qui les ceignent inférieurement. Il se contente de dire en général, que les molécules ignées passant des corps chauds dans l'air, plus froid que les corps, elles entraînent avec elles les particules évaporables. Mais malgré cette modification, l'hypothèse n'en est pas plus d'accord avec les observations. Si on suppose avec M. Hamberger, que l'évaporation se fait par le passage des particules ignées des corps évaporables, dans l'air plus froid que ces corps, il s'ensuivra nécessairement qu'il n'y aura point d'évaporation toutes les fois que les corps qui en sont susceptibles seront aussi froids ou plus froids que l'air; ce qui est évidemment contraire à l'observation.
Dans l'ouvrage que nous venons de citer, M.
Hamberger fait encore une addition plus essentielle
à sa premiere hypothèse; il y avance que les particules
évaporables qui sont à la superficie des corps,
passent dans l'air par voie de dissolution, modo solutionis
(Elémens de Physique, §. 477.) & à cette
occasion, il cite le paragraphe 242. où il se propose
d'expliquer le méchanisme de la dissolution,
& où il détermine la maniere dont les particules du
corps dissous s'arrangent dans les interstices des molécules
du dissolvant. M. Hamberger n'est pas le seul
qui ait dit que l'évaporation se faisoit par une espece
de dissolution: plusieurs physiciens ayant adopté,
comme lui, une hypothèse sur la dissolution, ont
crû expliquer le méchanisme de l'évaporation, en disant
qu'il étoit semblable à celui de la dissolution.
Pour combattre les systèmes de ces auteurs sur l'évaporation, il faudroit donc commencer par examiner
les différentes hypothèses qu'ils ont adoptées sur le
méchanisme de la dissolution; mais cet examen appartient
proprement à la Chimie, & sera fait par M.
Venel à l'article
Après avoir expliqué la maniere dont les particules evaporables se détachent de la superficie des corps, & passent dans l'air, M. Hamberger se sert d'une nouvelle supposition, pour expliquer le méchanisme par lequel les molecules s'élevent dans l'atmosphere: il pense que l'air est échauffé par les vapeurs; que cet air chargé de vapeurs, devenu plus chaud, & par conséquent plus rare & plus leger que l'air environnant, s'éleve nécessairement, & par son mouvement entraîne avec lui les vapeurs: mais cette seconde partie de son hypothese a encore le défaut de supposer que les molécules évaporables ne s'élevent dans l'atmosphere qu'autant que les corps desquels elles se détachent sont plus chauds que l'air environnant; ce qui est, comme nous l'avons déjà remarqué, contraire à l'observation journahere.
Après cet examen des principales hypothèses que les Physiciens nous ont données sur l'évaporation, je crois, comme je l'ai déjà dit, devoir rendre compte de ce que j'ai donne moi - même sur cette matiere. C'est ce que je vais faire en transcrivant une partie de mon memoire, pour en expliquer clairement le dessem: je commence par quelques remarques sur le mot dissolution.
Nous n'avons jusqu'ici aucune connoissance certaine
sur le méchanisme de la dissolution, considérée
comme l'action du dissolvant. Les meilleurs
Chimistes prétendent que la nature du mélange
singulier du dissolvant, & du corps dissous qui constitue
l'état de dissolution, est mieux connue, &
qu'il consiste dans l'union intime des dernieres molécules
de ces deux corps. Mais comme cette considération
n'est point essentielle à mon objet, je
ne m'arrêterai point à examiner les expériences
qui semblent démontrer la vérité de ce sentiment.
Il me suffira de remarquer que ce mélange singulier,
qui constitue l'état de dissolution, est caractérité
par une proprieté sensible à laquelle on peut
le reconnoître.
Cette qualité sensible, c'est la transparence.
Ainsi, de l'aveu de tous les Chimistes, lorsqu'un
corps solide ou fluide est suspendu dans un fluide,
de sorte que du mélange de ses deux corps, il en
résulte un fluide homogene & transparent, alors
on pent dire que les deux corps sont mêlés dans
l'état d'une véritable dissolution. Si au contraire
un corps solide divisé en molécules très - subtiles,
est suspendu dans un fluide transparent, de sorte
que du mélange de ces deux corps, il résulte un
Après ce que je viens de dire sur la dissolution,
on concevra aisément le dessein de ce mémoire.
Le voici en peu de mots. Personne n'ignore que
l'eau peut se charger de sel, & le soûtenir dans
l'état de véritable dissolution. On sait de plus que
le mélange d'eau & de sel a certaines propriétés
particulieres; que, par exemple, une certaine
quantité d'eau à un degré de chaleur donné, ne
peut tenir en dissolution qu'une quantité de sel
déterminée; qu'étant saoulée de sel à un degré
de chaleur donné, elle en pourroit dissoudre de
nouveau, si on l'échauffoit d'avantage; qu'au contraire,
si elle venoit à se refroidir, elle laisseroit
nécessairement précipiter une partie du sel qu'elle
tenoit en dissolution. Appliquez au mélange d'air
& d'eau, qui constitue notre atmosphere, ce que
je viens de dire sur les dissolutions des sels dans
l'eau, c'est - là le principal objet de la premiere partie
de ce mémoire. Je me propose donc de faire
voir que l'air de notre atmosphere contient toûjours
de l'eau dans l'état de véritable dissolution;
qu'une quantité d'air déterminée à un degré de
chaleur donné, ne peut tenir en dissolution qu'une
certaine quantité d'eau; qu'étant saoulé d'eau à un
degré de chaleur donné, il en pourroit dissoudre
de nouvelle, si on l'échauffoit davantage; qu'au
contraire, si étant saoulé d'eau à un degré de chaleur
donné, il vient à se refroidir, il laisse nécessairement
précipiter une partie de l'eau qu'il tenoit
en dissolution ».
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