ENCYCLOPÉDIE OU DICTIONNAIRE RAISONNÉ
DES SCIENCES, DES ARTS ET DES MÉTIERS

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"514"> tre chronologie n'atteint point, dans les siecles des héros, que Melampe berger, poëte, devin, & fils de roi, guérit les filles de Pratus devenues folles par la colere de Bacchus, ou par celle de Junon, en leur faisant prendre du lait de ses chevres, auxquelles il avoit fait manger de l'ellébore peu auparavant; & qu'il s'avisa de cette ressource, parce qu'il avoit observé que ces chevres étoient purgées après avoir brouté cette plante. M. Leclerc remarque, dans son histoire de la Medecine, que c'est - là le plus ancien exemple que nous ayons de la purgation, & qu'on pourroit croire que c'est ce qui fit donner à Melampe le surnom de *KAQARTHS2, celui qui purge ou purifie, qui semble marquer qu'il est le premier qui ait donné des purgatifs; c'est de - là aussi que l'ellébore fut appellé melampodium. Voyez Dioscoride, liv. IV. c. clxxxj. Galien parle de cette cure de Melampe dans son livre de atrabile, c. vij; & Pline, l. XXV. c. v.

Aulugelle nous a transmis une anecdote bien plus singuliere sur l'usage de l'ellébore. Il rapporte (c. xv. l. XVII.) que Carnéade l'académicien se disposant à écrire contre Zénon, se fit vomir vigoureusement avec de l'ellébore, de peur que les humeurs corrompues dans son estomac, ne laissassent échapper quelque chose qui parvînt jusqu'au siége de son ame, & en altérât les fonctions. (b)

Valere Maxime raconte cette histoire d'une maniere encore plus merveilleuse qu'Aulugelle. Il dit que Carnéade prenoit de l'ellébore toutes les fois qu'il devoit disputer avec Chrysippe, & il ajoûte que le succès de Càrnéade fit rechercher ce purgatif par tous ceux qui aimoient les loüanges solides. Pline rapporte que Drusus, le plus renommé d'entre les tribuns du peuple, fut guéri de l'épilepsie dans l'île d'Anticyre, où l'on avoit coûtume d'aller pour le prendre avec plus de succès & de sûreté.

Encore est - il bon d'indiquer ici entre trois ou quatre Anticyres, ce que c'est aujourd'hui que l'Anticyre si fameuse, où tant de poëtes assignent aux fous un logement. Il faut donc distinguer Anticyre & Anticyrrhe. La premiere est une île du golfe de Zeiton, entre la Janna & la Livadie, d'où l'on tiroit le plus excellent ellébore. La seconde étoit une ville de la Livadie méridionale, sur le golfe de Lépante. On portoit à cette ville l'ellébore de l'île, & les Romains alloient l'y prendre. C'étoit là qu'on préparoit & qu'on corrigeoit ce remede de différentes manieres, nous connoissons même quelques - unes de ces corrections & de ces préparations. Actuarius rapporte celle - ci: on faisoit un peu macérer dans l'eau la partie fibreuse de la racine d'ellébore, en rejettant la tête; ensuite on séchoit à l'ombre l'écorce que l'on avoit séparée de la petite moëlle qu'elle renferme: on donnoit cette préparation avec des raisins secs ou de l'oximel, mêlé quelquefois avec des graines odoriférantes, afin que ce remede fût plus agréable.

Pline dit aussi, qu'on mêloit à Anticyre l'ellébore avec une certaine graine qui croissoit aux environs de la ville; que l'on mettoit dans du vin doux une pincée de la graine avec une obole & demie d'ellébore blanc, & que ce remede purgeoit toute sorte de bile.

Les anciens employoient l'ellébore, non - seulement pour la bile, c'est - à - dire la mélancholie noire & pour la folie, mais encore, comme on l'a remarqué ci - dessus, pour l'hystérisme, la goutte, l'apoplexie, l'épilepsie, la ladrerie, la leucoflegmatie, l'hydropisie, en un mot pour toutes les maladies graves de l'ame & du corps.

Ce remede fut en usage dès la naissance de la Medecine: quelquefois Hippocrate le faisoit prendre à jeun; mais il l'ordonnoit plus ordinairement après le souper, parce que, suivant M. le Clerc, l'ellébore mêlé avec les alimens dans l'estomac, y perdoit une partie de sa force stimulante: dans plusieurs cas Hippoc rate donnoit le MALQA*ZO\S2 E)LLE/BOROS2; ce qui, selon le mê me savant, étoit une sorte de préparation d'ellébore, qui affoiblissoit son activité violente.

Her ophile, Actuarius, Arétée, Celse, étoient fort prévenus en faveur de ce remede; Dioscoride, qui en parle fort au long; nous instruit particulierement des cérémonies superstitieuses qu'observoient ceux qui le cueilloient en le tirant de terre.

On appliquoit extérieurement l'ellébore noir dans les maladies cutanées opiniâtres; & Galien prétend que quand on en mettoit dans une fistule calleuse, il emportoit la callosité en deux ou trois jours.

Cependant malgré l'usage que les anciens faisoient de l'ellébore, les plus sages medecins n'avoient coûtume de l'employer qu'avec une très - grande précaution. Avant que de le donner aux adultes mêmes, qui étoient en état de le supporter, ils examinoient principalement deux choses; l'une, si la maladie étoit in vétérée; l'autre, si les forces du malade se soûtenoient. Lorsque l'ellébore leur paroissoit convenir, ils ne l'administroient encore qu'après avoir préparé soigneusement le malade & le remede.

Ils préparoient le malade pendant sept jours, soit par la diette, soit par des remedes minoratifs; Pline nous en instruit fort au long. De son tems, la préparation du remede, à Rome, consistoit à introduire les racines d'ellébore noir dans des morceaux de raifort, & de les faire cuire ensemble pour dissiper la trop grande force de l'ellébore. Alors les uns donnoient ces racines adoucies par l'ébullition, les autres faisoient manger les raiforts, & rejettoient les racines; d'autres enfin faisoient boire au malade cette décoction qui purgeoit suffisamment.

Quoique les anciens ayent fait grand usage de leur ellébore, pour les maladies du corps & de l'ame, & que les plus sages l'ayent donné très - prudemment, ils l'ont décrit si obscurément, que nous ne reconnoissons plus celui qu'ils employoient. La description de Théophraste est en particulier trop tronquée & trop défectueuse, pour nous servir à découvrir l'ellébore dont il parle. Nous ne retrouvons point dans aucune de nos especes d'ellébore noir, celui de Dioscoride. Enfin l'oriental noir actuel d'Anticyre, ne quadre avec aucune des descriptions anciennes: c'étoit cependant le leur selon toute apparence, du moins a - t - il la même violence dans son action. Tournefort, qui en a fait l'épreuve, avoue que tous ceux à qui il en a donné l'extrait, étoient tourmentés de nausées, de pesanteur d'estomac avec acrimonie, jointe au soupçon de phlogose, qui menaçoit la gorge & les intestins: il ajoûte encore qu'ils avoient des douleurs de tête pendant plusieurs jours, avec des élancemens, & le tremblement de tous les membres, de sorte qu'il se vit obligé de s'abstenir de ce remede. La force de celui de notre pays, est bien moindre que dans l'Orient.

Mais quelle qu'elle soit, puisque nous possédons des purgatifs & des émétiques également efficaces, & beaucoup plus sûrs, tels que sont les préparations purgatives & vomitives de l'antimoine, il vaut mieux nous abstenir de l'usage de tout ellébore, outre que les corps des hommes qui vivent dans nos climats, ont de la peine à en supporter les effets. Qu'on ne dise point qu'on peut l'adoucir, le corriger avec des aromates, ou bien avec la creme de tartre, le sel de prunelle, les tamarins, l'oxymel, le suc de coing, & autres semblables; il est bien plus simple de ne pas songer aux correctifs, dès qu'il est aisé de se passer de la plante même.

Concluons de ce principe, qu'il faut également proscrire toutes les préparations d'ellébore qui se trouvent dans les pharmacopées, sans dire ici que toutes les préparations galéniques & arabesques sont misérables en elles - mêmes. [p. 515]

Comme tout le monde sait que l'ellébore blanc est le plus fort, il est encore plus digne de la proscription que le noir. Cette plante a un suc caustique & brûlant, qui, respiré par les narines, excite un éternuement forcé, & c'est un des plus puissans sternutatoires dans les maladies soporeuses. Si l'on met de cette poudre à la source d'une sontaine, l'eau qui en découle purge violemment. Les feuilles, les tiges, les fleurs, & les racines de l'ellébore blanc appliquées sur la peau d'une personne vivante, excorient la partie, & y produisent une exulcération.

La seule saveur nauséabonde de l'ellébore, est un signe de sa vertu émétique ou purgative: celle de l'ellebore blanc, qui est fort âcre & fort amere, indique un purgatif très - actif; aussi l'on place avec raison l'un & l'autre genre parmi les mochliques. Voy. Mochlique.

Vous trouverez dans les mém. de l'acad. des Scienc. année 1701, quelques expériences chimiques de M. Boulduc, sur la racine de l'ellébore noir. L'extrait de cette racine fait avec de l'eau, donne tout ce qu'on peut en tirer, & le résidu ne donne plus rien par l'esprit - de - vin.

Enfin, les curieux peuvent consulter, s'ils le jugent à propos, Holzemii (Petr.) essentia hellebori rediviva; Coloniae, 1616. 8. Manelphi (Joan.) disceptatio de helleboro; Romae, 1622. 8. Scobingeri (Joh. Casp.) dissert. de helleboro nigro; Basil. 1721. in - 4°. Castellus (Petrus) de elleboro apud Hippocratem & alios autores; Romae, 1628. in - 4°. Ce dernier ouvrage est rare, curieux, & savant. Article de M. le Chevalier de Jaucourt.

ELLEBORINE, BELLEBORINE (Page 5:515)

ELLEBORINE, BELLEBORINE, sub. f. (Hist. nat. bot.) genre de plante à fleur anomale, composée de six pétales différens les uns des autres: les cinq du dessus sont disposés en rond; celui du dessous est fait en forme de gouttiere. Le calice devient dans la suite un fruit qui ressemble en quelque façon à une lanterne ouverte de trois côtés, dont les panneaux sont chargés de semences aussi menues que de la sciure de bois. Ajoûtez aux caracteres de ce genre, que les racines sont fibreuses. Tournefort, insi. rei herb. Voyez Plante. (I)

ELLERENA (Page 5:515)

ELLERENA, (Géog. mod.) ville de l'Estramadure de Léon, en Espagne. Long. 12. 45. lat. 38. 8.

ELLIPSE (Page 5:515)

ELLIPSE, s. f. terme de Grammaire; c'est une figure de construction, ainsi appellée du grec E)/LLEIYIS2, manquement, omission: on parle par ellipse, lorsque l'on retranche des mots qui seroient nécessaires pour rendre la construction pleine. Ce retranchement est en usage dans la construction usuelle de toutes les langues; il abrege le discours, & le rend plus vif & plus soûtenu: mais il doit être autorisé par l'usage; ce qui arrive quand le retranchement n'apporte ni équivoque ni obscurité dans le discours, & qu'il ne donne pas à l'esprit la peine de deviner ce qu'on veut dire, & ne l'expose pas à se méprendre. Dans une phrase elliptique, les mots exprimés doivent réveiller l'idée de ceux qui sont sous - entendus, afin que l'esprit puisse par analogie faire la construction de toute la phrase, & appercevoir les divers rapports que les mots ont entr'eux: par exemple, lorsque nous lisons qu'un Romain demandoit à un autre, où allez - vous? & que celui - ci répondoit ad castoris, la terminaison de castoris fait voir que ce génitif ne sauroit être le complément de la préposition ad, qu'ainsi il y a quelque mot de sous - entendu; les circonstances font connoître que ce mot est aedem, & que par conséquent la construction pleine est eo ad aedem Castoris, je vais au temple de Castor.

L'ellipse fait bien voir la vérité de ce que nous avons dit de la pensée au mot Déclinaison & au mot Construction. La pensée n'a qu'un instant, c'est un point de vûe de l'esprit; mais il faut des mots pour la faire passer dans l'esprit des autres: or on retranche souvent ceux qui peuvent être aisément suppléés, & c'est l'ellipse. Voyez Elliptique. (F)

Ellipse (Page 5:515)

Ellipse, s. f. en Géométrie, est une des sections coniques qu'on appelle vulgairement ovale. Voyez Conique & Ovale.

L'ellipse s'engendre dans le cone, en coupant un cone droit par un plan qui traverse ce cone obliquement, c'est - à - dire non parallelement à la base, qui ne passe point par le sommet, & qui ne rencontre la base qu'étant prolongé hors du cone, ou qui ne fasse tout - au - plus que raser cette base. La condition que le cone soit droit, est nécessaire pour que la courbe formée comme on vient de le dire, soit toûjours une ellipse; car si le cone est oblique, en coupant ce cone obliquement, on peut quelquefois y former un cercle (voyez la fin de l'article Conique, & Souscontraire ou Anti - parallele, au mot Parallele); or la nature de l'ellipse est d'être ovale, c'est - à - dire d'avoir deux axes inégaux.

Ce mot est formé du grec E)/LLEIYIS2, défaut; les anciens géometres grecs ont donné ce nom à cette figure, parce que entr'autres propriétés elle a celle - ci, que les quarrés des ordonnées sont moindres que les rectangles formés sous les parametres & les abscisses, ou leur sont inégaux par défaut.

En effet l'équation de l'ellipse, en prenant les abscisses au sommet, est celle - ci [omission: formula; to see, consult fac-similé version], a étant l'axe, & b son parametre. (voyez Parametre, Courbe, & Equation; voyez aussi la suite de cet article.); donc y y < b x; donc, &c. Voy. enfin Parabole & Hyperbole.

L'ellipse, pour la définir par sa forme, est une ligne courbe, rentrante, continue, réguliere, qui renferme un espace plus long que large, & dans laquelle se trouvent deux points également distans des deux extrémités de sa longueur, & tels, que si on tire de ces points deux lignes à un point quelconque de l'ellipse, leur somme est égale à la longueur de l'ellipse. Ces deux points sont éloignés de l'extrémité du petit axe d'une quantité égale à la moitié du grand axe.

Ainsi dans l'ellipse A E B D A (Planche de sect. conique, fig. 21.) les lignes F a & F a, tirées des deux points F, f, également distans des deux points A & B, forment une somme égale à A B; & la distance des points F, f, au point E, est=C A.

Souvent les Géometres prennent l'ellipse pour l'espace contenu ou renfermé dans cette courbe. Elle a, comme on vient de le dire, deux axes inégaux A B & E D. Le grand axe A B s'appelle quelquefois axe ou diametre transverse, & le petit axe D E s'appelle quelquefois l'axe conjugué ou second axe. Mais on appelle en général diametres conjugués ceux dont l'un est parallele à la tangente menée à l'extrémité de l'autre, & réciproquement, soit que leurs angles soient droits, ou non. Les deux axes se coupent toûjours à angles dro ts. Voyez Axe.

Les deux axes sont le plus grand & le moindre des diametres de l'ellipse; mais l'ellipse a une infinité d'autres diametres différens. Voyez Diametre, &c.

Le centre d'une ellipse est le point C dans lequel se coupent les deux axes. Voyez Centre.

Les deux points F, f, pris dans le grand axe, également distans de ses deux extrémités A & B, & distans chacun du point D de la valeur de A C, sont nommés foyers de l'ellipse, ou en latin umbilici. Voy. Foyer.

Mais l'ellipse considérée comme une section conique, cest - à - dire comme une courbe provenant de la section d'un cone, se définit encore mieux par sa génération dans ce solide, que par la maniere dont elle peut être produite sur un plan. C'est la ligne courbe D Q E qu'on forme en coupant le cone droit A B C

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