ENCYCLOPÉDIE OU DICTIONNAIRE RAISONNÉ
DES SCIENCES, DES ARTS ET DES MÉTIERS

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"456"> qu'ayant appris la mort d'un tel évêque, il a résolu, de l'avis des évêques & des grands, de lui donner un tel pour successeur. La seconde est une lettre pour un des évêques de la province. La troisieme est la requête des citoyens de la ville épiscopale, qui demandent au roi de leur donner pour évêque un tel dont ils connoissent le merite; ce qui suppose que l'on attendoit le consentement du peuple, mais que ce n'étoit pas par forme d'élection.

Il y eut même sous la premiere race plusieurs évêques nommés par le roi sans aucune élection précédente, comme S. Amant d'Utrecht & S. Leger d'Autun. La formule du mandement que le roi faisoit expédier sur cette nomination, est rapportée par Marculphe. Il y est dit que le roi ayant conféré avec les évêques & principaux officiers de sa cour, avoit choisi un tel pour remplir le siége vacant.

Cette maniere de pourvoir aux évêchés étoit quelquefois nécessaire, pour empêcher les brigues & la simonie: c'étoit aussi souvent la faveur seule qui déterminoit la nomination.

Charlemagne & Louis le Débonnaire firent tous leurs efforts pour rétablir l'ancienne discipline sur les élections. Le premier disposa néanmoins de plusieurs évêchés, par le conseil des prélats & des grands de sa cour, sans attendre l'élection du clergé & du peuple. Plusieurs croyent qu'il en usa ainsi du consentement de l'Eglise, pour remédier aux maux dont elle étoit alors affligée: il rendit même à plusieurs églises la liberté des élections, par des actes exprès.

Il y eut sous cette seconde race plusieurs canons & capitulaires, faits pour conserver l'usage des élections; mais ce fut toûjours sans donner atteinte aux droits. On tenoit alors pour principe qu'en cas de trouble & d'abus le roi pouvoit nommer à l'évêché; tellement que l'évêque - visiteur avertissoit ceux qui devoient élire, que s'ils se laissoient séduire par quelque moyen injuste, l'empereur nommeroit sans contrevenir aux canons.

Les choses changerent bien de forme sous la troisieme race; les chapitres des cathédrales s'attribuerent le droit d'élire seuls les évêques, privativement au reste du clergé & au peuple. Au commencement du xiij. siecle ils étoient déjà en possession d'élire ainsi seuls l'évêque & les métropolitains; de confirmer seuls l'élection, sans appeller leurs suffragans, comme il paroît par le concile de Latran, tenu en 1215. Les papes, auxquels on s'adressoit ordinairement lorsqu'il y avoit contestation sur la confirmation des évêques, firent de ce droit une cause majeure réservée au saint siége: les droits du roi furent cependant toûjours conservés.

Lorsque Philippe Auguste partit pour son expédition d'outre - mer, entre les pouvoirs qu'il laissa pour la régence du royaume à sa mere & à l'archevêque de Reims, il marqua spécialement celui d'accorder aux chapitres des cathédrales la permission d'élire un évêque.

S. Louis accorda le même pouvoir à la reine sa mere, lorsqu'il l'établit régente du royaume. Il ordonna cependant par la pragmatique sanction qu'il fit dans le même tems, en 1268, que les églises cathédrales & autres auroient la liberté des élections.

L'élection des abbés étoit reglée sur les mêmes principes que celle des évêques. Les abbés étoient élûs par les moines du monastere qu'ils devoient gouverner. Ils étoient ordinairement choisis entre les moines de ce monastere; quelquefois néanmoins on les choisissoit dans un monastere voisin, ou ailleurs. Avant de procéder à l'élection, il falloit obtenir le consentement du roi; & celui qui étoit élû abbé, ne pouvoit aussi avoir l'agrément du roi, avant d'être confirmé & beni par l'évêque.

Les autres bénéfices, offices & dignités étoient conférés par les supérieurs ecclésiastiques; savoir les bénéfices séculiers par l'évêque, & les réguliers par les abbés, chacun dans leur dépendance. Les uns & les autres n'agissoient dans leur choix qu'avec connoissance de cause, & ne se déterminoient que par le mérite du sujet. L'évêque choisissoit ordinairement des prêtres & des clercs entre les plus saints moines; les abbés y consentoient pour le bien général de l'église, qu'ils préféroient à l'avantage particulier de leur monastere.

Il y avoit dans le xij. siecle une grande confusion dans les élections pour les prélatures; chaque église avoit ses regles & ses usages, qu'elle changeoit selon les brigues qui prévaloient.

Ce fut pour remédier à ces desordres, que le quatrieme concile de Latran, tenu en 1215, fit une regle genérale, suivant laquelle on reconnoît trois formes différentes d'élections, qui sont rapportées aux decrétales, liv. I. tit. vj. capit. quia propter.

La premiere est celle qui se fait par scrutin.

La seconde est de nommer des commissaires, auxquels tout le chapitre donne pouvoir d'élire en son lieu & place.

La troisieme forme d'élection est celle qui se fait par une espece d'inspiration divine, lorsque par acclamation tous les électeurs se réunissent pour le choix d'un même sujet.

Ce même concile de Latran, celui de Bourges en 1276, celui d'Ausch en 1300; les conciles provinciaux de Narbonne & de Toulouse, tenus à Lavaur en 1368, déclarent nulle toute élection faite par abus de l'autorité séculiere ou ecclésiastique.

La liberté des élections ayant encore été troublée en France par les entreprises des papes, sur - tout depuis que Clément V. eut transféré le saint siége à Avignon, le concile de Constance en 1418, & celui de Basle en 1431, tenterent toutes sortes de voies pour rétablir l'ancienne discipline.

Les difficultés qu'il y eut par rapport à ces conciles, firent que Charles VII. convoqua à Bourges en 1438 une assemblée de tous les ordres du royaume, dans laquelle fut dressée la pragmatique sanction, laquelle entr'autres choses rétablit les élections dans leur ancienne pureté. L'assemblée de Bourges permit aux rois & aux princes de leur sang, d'employer leurs recommandations auprès des électeurs, en faveur des personnes qui auroient rendu service à l'état.

Nos rois continuerent en effet d'écrire des lettres de cette nature, & de nommer des commissaires pour assister à l'élection.

Les papes cependant firent tous leurs efforts pour obtenir la révocation de la pragmatique, ainsi qu'on le dira au mot Pragmatique.

Enfin en 1516 François I. voulant prévenir les suites fâcheuses que les différends de la cour de France avec celle de Rome pouvoient occasionner, fit avec Léon X. une espece de transaction, connue sous le nom de concordat.

On y fait mention des fraudes & des brigues qui se pratiquoient dans les élections, & il est dit que les chapitres des églises cathédrales de France ne procéderont plus à l'avenir, le siége vacant, à l'élection de leurs évêques; mais que le roi sera tenu de nommer au pape, dans les six mois de la vacance, un docteur ou licentié en Théologie ou en Droit canonique, âgé de 27 ans au moins, pour en être pourvû par le pape; que si la personne nommée par le roi n'a pas les qualités requises, le roi aura encore trois mois pour en nommer une autre, à compter du jour que le pape aura fait connoître les causes de récusation; qu'apres ces trois mois il y sera pourvû par le pape; que les élections qui se feront au préjudice de ce traité, [p. 457] seront nulles; que les parens du roi, les personnes éminentes en savoir & en doctrine, & les religieux mandians, ne sont point compris dans la rigueur de cet article; que pour les abbayes & prieurés conventuels vraiment électifs, il en sera usé comme aux évêchés, à l'exception de l'âge, qui sera fixé à vingt - trois ans; que si le roi nomme aux prieurés un séculier ou un religieux d'un autre ordre, ou un mineur de vingt - trois ans, le pape se réserve le droit de le refuser, & d'en nommer un autre après les neuf mois passés, en deux termes, comme dans les évêchés. Il est dit que l'on n'entend pas néanmoins déroger par cet article, aux priviléges dont joüissent quelques chapitres & quelques monasteres qui se sont maintenus en possession d'élire leurs prélats & leurs supérieurs, en gardant la forme prescrite par le chapitre quia propter.

Sur la maniere dont le Roi en use pour les nominations, voyez Evêchés & Nomination royale.

Le clergé de France a renouvellé en plusieurs occasions ses voeux pour le rétablissement des élections à l'égard des évêchés, abbayes & autres prélatures, comme on le voit dans le cahier qu'il présenta aux états d'Orléans en 1560; dans celui qu'il dressa pour être présenté aux états de Blois; dans le concile de Roüen en 1581, celui de Reims en 1583, le cahier de l'assemblée générale du clergé en 1595, & celui de l'assemblée de 1605.

L'article 1. de l'ordonnance d'Orléans, en 1560, porte que les archevêques & évêques seront desormais élûs & nommés; savoir, les archevêques par les évêques de la province & par le chapitre de la métropcle; les évêques, par l'archevêque, les évêques de la province, & les chanoines de l'église cathédrale appellés avec eux; douze gentilshommes qui seront élûs par la noblesse du diocèse, & douze notables bourgeois élûs en l'hôtel de la ville archiépiscopale ou épiscopale: tous lesquels s'accorderont de trois personnages de qualités requises, âgés au moins de trente ans, qu'ils présenteront à Sa Majesté, qui choisira l'un des trois.

L'exécution de cette ordonnance a été commandée par l'art. 36 de celle de Roussillon; cependant cet article de l'ordonnance d'Orléans & plusieurs autres ne s'observent point.

Ainsi les évêchés ne sont plus électifs.

A l'égard des abbayes, toutes celles qui étoient électives, sont assujetties par le concordat à la nomination royale, à l'exception seulement des chefs d'ordre & des quatre filles de Cîteaux. On suit encore dans ces abbayes, pour les élections, les regles prescrites par la pragmatique sanction.

Pour ce qui est des dignités des chapitres, qui sont électives, des généraux d'ordres réguliers qui n'ont pas le titre d'abbés, & des abbayes triennales électives, les élections dépendent en partie des usages & statuts particuliers de chaque églisé, congrégation ou communauté.

Il y a néanmoins plusieurs regles tirées du droit canonique, qui sont communes a toutes les élections.

On ne peut valablement faire aucun acte tendant à l'élection d'un nouvel abbé, ou autre bénéficier ou officier, jusqu'à ce que la place soit vacante, soit par mort ou autrement.

Avant de procéder à l'élection dans les abbayes qui sont électives, il faut que le chapitre obtienne le consentement du roi, lequel peut nommer un commissaire pour assister à l'élection, à l'effet d'empêcher les brigues, & de faire observer ce qui est prescrit par les canons & les ordonnances du royaume.

Pour que l'élection soit canonique, il faut y appeller tous ceux qui ont droit de suffrage; les absens doivent être avertis, pourvû qu'ils ne soient pas hors du royaume.

Ceux qui sont retenus ailleurs par quelqu'empêchement légitime, ne peuvent donner leur suffrage par lettres; mais ils peuvent donner leur procuration à cet effet à un ou plusieurs des capitulans, pourvû néanmoins qu'ils donnent à chacun d'eux solidairement le droit de suffrage; & dans ce cas le chapitre peut choisir entr'eux celui qu'il juge à - propos, pour représenter l'absent. Celui - ci peut aussi donner pouvoir à quelqu'un qui n'est pas de gremio, si le chapitre veut bien l'agréer. Le fondé de procuration ne peut nommer qu'une seule personne, soit que la procuration marque le nom de la personne qu'il doit nommer, ou qu'elle soit laissée à son choix.

Si l'on omettoit d'appeller un seul capitulant, ou qu'il n'eût pas été valablement appellé, l'élection seroit nulle, à moins que pour le bien de la paix il n'approuvât l'élection.

Il suffit au reste d'avoir appellé à l'élection ceux qui y ont droit de suffrage; s'ils négligent de s'y trouver, ou si après y avoir assisté, ils se retirent avant que l'élection soit consommée, & même avant d'avoir donné leur suffrage, ils ne peuvent sous ce prétexte contester l'élection.

Les chapitres des monasteres doivent procéder à l'élection de l'abbé dans les trois mois de la vacance, à moins qu'il n'y ait quelqu'empêchement légitime; autrement le droit d'y pourvoir est dévolu au supérieur immédiat.

Le tems fixé par les canons pour procéder à l'élection, court contre les électeurs, du jour qu'ils négligent de faire lever l'empêchement qui les arrête.

Le concile de Basle veut que les électeurs, pour obtenir du ciel les lumieres & les graces dont ils ont besoin, entendent avant l'élection la messe du saint Esprit; qu'ils se confessent & communient; & que ceux qui ne satisferont pas à ces devoirs, soient privés de plein droit de la faculté d'élire, pour cette fois.

Chaque électeur doit faire serment entre les mains de celui qui préside, qu'il choisira celui qu'il croira en conscience pouvoir être le plus utile à l'Eglise pour le spirituel & le temporel, & qu'il ne donnera point son suffrage à ceux qu'il saura avoir promis ou donné directement ou indirectement quelque chose de temporel pour se faire élire. L'abus ne seroit pas moins grand de donner ou promettre dans la même vûe quelque chose de spirituel.

Ceux qui procedent à l'élection, doivent faire choix d'une personne de bonnes moeurs, qui ait l'âge, & les autres qualités & capacités prescrites par les canons, & par les autres lois de l'église & de l'état.

Il est également défendu par les canons, d'élire ou d'être élû par simonie: outre l'excommunication que les uns & les autres encourent par le seul fait, les électeurs perdent pour toûjours le droit d'élire; & ceux qui sont ainsi élûs, sont incapables de remplir jamais la dignité, le bénéfice ou office auxquels ils ont aspiré.

Lorsque les suffrages ont été entraînés par l'impression de quelque puissance séculiere, l'élection est nulle: les électeurs doivent même être suspens pendant trois années de leur ordre & bénéfices, même du droit d'élire; & si celui qui a été ainsi élû, accepte sa nomination, il ne peut sans dispense être élû pour une autre dignité, office ou bénéfice ecclésiastique. Mais on ne regarde point comme un abus les lettres que le roi peut écrire aux électeurs, pour leur recommander quelque personne affectionnée au service de l'église, du roi & de l'état.

Les novices ni les freres convers ne donnent point ordinairement leurs voix pour l'élection d'un abbé ou autre supérieur: il y a néanmoins des monasteres de filles, tels que ceux des Cordelieres, où les soeurs

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