ENCYCLOPÉDIE OU DICTIONNAIRE RAISONNÉ
DES SCIENCES, DES ARTS ET DES MÉTIERS

RECHERCHE Accueil Mises en garde Documentation ATILF ARTFL Courriel

Previous page

"420"> crimes; Wiclef, que les prédestinés; Luther, que les saints, qui croyent & qui obéissent à Jesus - Christ. Calvin & ses sectateurs ont admis tantôt une Eglise extérieure & visible, tantôt une Eglise invisible, composée des élûs. Jurieu l'a composée de toutes les sectes chrétiennes qui n'errent pas dans les articles fondamentaux. Tous se sont accordés à en exclure le gouvernement hiérarchique du pape & des évêques. L'hérésie fut toûjours ennemie de la subordination.

Les Anglicans conviennent pourtant avec nous de la nécessité d'un chef visible dans l'Eglise. Mais au lieu que nous reconnoissons le pape en cette qualité, ils la déferent à leur roi, qui en effet dans ses titres prend celui de chef de l'église anglicane. Voyez Suprématie.

Le mot Eglise vient originairement du grec E/KKLHSI/A, qu'on a dit en géneral pour une assemblée publique, quelle qu'elle fût, & quelquefois aussi pour le lieu même de l'assemblée. On le trouve employé en ce dernier sens par les écrivains sacrés & ecclésiastiques, mais plus ordinairement ils le restraignent à l'assemblée des Chrétiens; de même que le terme synagogue, qui d'abord signifioit une assemblée en général, a été ensuite consacré par l'usage à signifier une assemblée de Juifs. Voyez Synagogue.

Ainsi dans le nouveau Testament le mot Eglise n'est guere employé qu'en parlant des Chrétiens, tantôt pour le lieu où ils s'assemblent pour prier, comme dans la premiere épitre aux Corinthiens, ch. xjv. V. 34. tantôt pour l'assemblée des fideles répandus par toute la terre, comme dans l'épitre aux Ephésiens, ch. v. 24. & 26. quelquefois pour les fideles d'une ville ou d'une province en particulier, comme dans la premiere épitre aux Corinthiens, ch. j. 1. & 2. & dans la seconde aux Corinthiens, ch. viij. 1. quelquefois pour une seule famille, comme dans l'épitre aux Romains, ch. xvj. 5. & enfin pour les pasteurs & les ministres de l'Eglise, comme dans S. Matthieu, ch. xviij. 17.

L'Eglise universelle est la société de toutes les églises particulieres unies par la même profession de foi, la participation aux mêmes sacremens, & la même soûmission à la voix des pasteurs légitimes, c'est - à - dire, du pape & des évêques. On y distingue deux parties; l'une extérieure & visible, qu'on nomme son corps; l'autre intérieure & invisible, qu'on appelle son ame. Le corps est la profession extérieure de la foi & la communion des sacremens. L'ame, ce sont les dons intérieurs du S. Esprit, la foi, l'espérance, la charité, &c. De cette distinction, l'on conclut que les hérétiques qui font profession ouverte d'une doctrine contraire à celle de Jesus - Christ, les infideles, les schismatiques, les excommuniés, ne sont ni de l'ame ni du corps de l'Eglise. Mais les pécheurs, les méchans, les infideles & les hérétiques cachés, les réprouvés même sont de son corps. Les justes & les élûs appartiennent seuls proprement à son ame; les cathécumenes & les pénitens sont de son corps, mais imparfaitement, parce qu'ils aspirent ou à y être reçûs, ou à y rentrer.

Les qualités ou caracteres de l'Eglise marqués dans le symbole du concile de Constantinople, sont qu'elle est une, sainte, catholique, & apostolique. Une, par l'union de tous ses membres sous un même chef invisible qui est Jesus - Christ, & sous un même chef visible qui est le pape, & par l'unité de sa doctrine qu'elle tient de Jesus - Christ & des apôtres, & par la tradition des peres. L'Eglise est sainte par la sainteté de sa doctrine, de ses sacremens, & parce qu'il n'y a & ne peut y avoir de saints que dans sa société. Catholique, c'est - à - dire, qu'elle n'est bornée ni par les tems ni par les lieux, & qu'elle est plus étendue qu'aucune des sectes qui se sont séparées d'elle; & enfin apostolique, tant parce qu'elle professe la doctrine qu'elle a reçûe des apôtres, que parce que ses pasteurs sont par une suite non interrompue les légitimes successeurs des apôtres. A quoi il faut ajoûter trois autres avantages fondés sur les promesses de Jesus - Christ; savoir, 1°. sa visibilité, 2°. son indéfectibilité ou sa perpétuité, 3°. son infaillibilité dans ses décisions, soit qu'elle soit dispersée, soit qu'elle soit assemblée. Nos plus habiles théologiens & controversistes ont prouvé contre les Protestans, que ces caracteres & ces avantages convenoient parfaitement à l'Eglise romaine, & ne convenoient qu'à elle seule. On peut en voir les preuves dans les savans ouvrages de MM. Bossuet, Nicole, de Wallembourg, Pelisson, &c. Voyez Apostolique, Catholicité, Unité , &c.

Quoique toutes les églises catholiques ayent toûjours été considérées comme une seule & même Eglise, cependant les églises particulieres ont eu leur dénomination propre, comme l'église d'Orient, l'église d'Occident, l'église d'Afrique, l'église gallicane, &c.

L'église d'Orient ou l'église greque signifioit autrefois simplement les églises des Grecs ou d'Orient, & non pas une église particuliere & séparée de communion de l'église latine, & elle comprenoit toutes les provinces qui étoient anciennement soûmises à l'empire grec ou empire d'Orient, & dans lesquelles on parloit grec, c'est - à - dire tout l'espace depuis l'lllyrie jusqu'à la Mésopotamie & la Perse, y compris l'Egypte. Le schisme commencé par Photius, consommé par Michel Cerularius, a séparé de l'église latine cette partie de l'Orient, autrefois si féconde en grands hommes; & quoiqu'on en ait tenté la r<-> nion en divers conciles, elle n'a jamais réussi, à l'exception du patriarchat de Jérusalem: ceux d'Antioche & d'Alexandrie sont demeurés dans le schisme avec celui de Constantinople, que le grand - seigneur confere ordinairement au plus offrant, & dont par cette raison les titulaires sont souvent destitués, soit par l'avarice des Turcs, soit par l'avidité du premier concurrent qui donne au grand - visir ou aux autres ministres de la Porte des sommes plus considérables que celles qu'ils ont reçûes du patriarche qui est en place.

L'église d'Occident comprenoit autrefois les églises d'Italie, d'Espagne, d'Afrique, des Gaules, & du Nord, en un mot de toutes les provinces où l'on parloit la langue des Romains. La Grande Bretagne, une partie des Pays - bas, de l'Allemagne, & du Nord, s'en sont séparées depuis plus d'un siecle, & forment des sociétés à part, que leurs sectateurs appellent églises réformées, mais qui dans le vrai font un schisme aussi réel que celui des Grecs. Voyez Réformation & Schisme. Cette église réformée se divise elle - même en église luthérienne, calviniste, & anglicane, qui n'ont aucun point fixe de créance & de communion uniforme entr'elles que leur déchaînement contre l'Eglise catholique. Tandis que celle - ci souffroit ces pertes en Europe, elle faisoit de nouvelles conquêtes dans les Indes, le Japon, la Chine, & le nouveau Monde, où la religion a fait des établissemens très - considérables. Au reste l'indésectibilité n'est promise à aucune église en particulier, même nationale. Les églises d'Afrique & d'Angleterre n'en fournissent qu'une trop triste expérience. Voy. Indéfectibilité, Infaillibilité, &c.

L'église romaine est la société des Catholiques unis de communion avec le pape, successeur de S. Pierre. On l'a appellée la mere & le maitresse des autres églises dès le tems de S. Irénée au second siecle, parce qu'en effet presque toutes celles de l'Occident sont émanées d'elle, & qu'on l'a regardée comme le centre de l'unité catholique. Quiconque ne commu<pb-> [p. 421] nique pas avec l'évêque de Rome, est comme séparé de cette unité: ç'a toûjours été la marque distinctive du schisme que de rompre avec l'église de Rome, soit dans l'unité de doctrine, soit dans l'ordre de la hiérarchie ecclésiastique. Voyez Schisme, Primauté, Pape, Unité , &c.

L'église d'Afrique avoit un grand nombre de chaires épiscopales, comme il paroît par l'histoire des Donatistes. Quelques - uns en comptent jusqu'à huit cents; elle la donné à l'Eglise des docteurs illustres. Il suffit de nommer S. Cyprien, S. Augustin, S. Fulgence, pour rappeller au lecteur l'idée du génie sublime réuni à celle de la plus éminente piété. L'irruption des Goths & des Vandales attachés à l'Arianisme, & chassés à leur tour de cette partie du monde par les Sarrasins, y a aboli la véritable religion. Dieu retranche à son gré les lumieres, & permet les ténebres, sur - tout quand on rejette les unes, & qu'on appelle les autres.

L'église gallicane a de tout tems été une des portions des plus florissantes de l'Eglise universelle. Son attachement constant au S. Siege, sans altérer celui qu'elle devoit à l'ancienne discipline de l'Eglise; son zele contre les hérésies, égal à celui qu'elle a témoigné contre les innovations, contraires à l'esprit des conciles & des canons; sa fidélité pour nos rois; la protection qu'elle a accordée aux bonnes lettres, & le nombre infini d'hommes célebres par leur savoir & par leur piété qu'elle a produits dans tous les tems, seront à jamais des monumens de sa gloire. Le P. de Longueval, jésuite, nous en a donné une histoire, continuée par les PP. de Fontenay, Brumoy, Berthier, ses confreres. Voyez Bible.

Eglise (Page 5:421)

Eglise, considérée par rapport à l'Architecture, est un grand édifice oblong, destiné parmi les Chrétiens à la priere publique. Elle est ordinairement en forme de vaisseau, & a un choeur, un autel, une nef, des bas côtés, des chapelles, une tour ou clocher. Voyez chacun de ces mots à sa place.

Les anciens ont mis quelque différence entre l'Eglise prise pour l'assemblée de la société des fideles, & le lieu de cette assemblée; & ils appeiloient la premiere E)KKLHSI/A, & l'autre E)KKLHSIASTHI/ON. Aliud est, dit Isidore de Pelisse, E)KKLHSI/A, aliud E)KKLHSIASTH<-> RI/ON; nam ea ex immaculatis animis constat, hoec autem ex lapidibus & lignis exoedificatur. Ils dcnnoient aussi différens noms aux églises; les Grecs les nommoient KURI/AKON, d'où les Latins ont fait dominium & domus Dei; les Saxons, kyrik ou kyrch; les Ecossois & les Anglois, kyrk ou church, noms fort approchans du grec. Tertullien appelle l'Eglise la maison de la colombe, domus columboe, pour marquer la simplicité & la pureté des mysteres qu'on y célébroit au grand jour, par opposition aux abominations que commettoient les Valentiniens dans leurs assemblées. On les appelloit aussi oratoires ou maisons de priere; basiliques ou palais du Roi des rois. On ne leur donna jamais le nom de temples avant le quatrieme siecle, parce que ce titre étoit affecté aux lieux où les Payens adoroient leurs idoles; encore moins ceux de delubrum ou de sanum, si particulierement affectés au paganisme. On trouve dans plusieurs peres les églises désignées par les noms de synodi, concilia, conciliabula, conventicula, termes relatifs aux assemblées qu'y tenoient les Chrétiens. Dans d'autres elles sont nommées martyria, memorioe, aposlolea, prophetea, soit parce que les corps des martyrs, des apôtres ou des prophetes y étoient inhumés, soit parce qu'elles étoient dédiées sous leur nom: on les trouve aussi, mais plus rarement, appellées cimetieres, coemeteria; & tables, mensoe; & aires ou places, areoe. Le premier de ces noms vient de ce que dans la persécution les fideles s'assembloient dans des cavernes ou soûterreins où l'on avoit déjà en<cb-> terré des martyrs. Le second tire son origine de là table ou de l'autel destiné au sacrifice; & le troisieme signifie encore un lieu destiné aux sépultures, areoe sepulturarum, dit Tertullien, ad Scapul. c. iij. On les appelloit encore cases, casoe, parce que les premieres églises étoient souvent des maisons particulieres, & situées à l'écart ou à la campagne; tropoea, trophées des apôtres & des martyrs qui avoient courageusement défendu la foi; titres, tituli, parce que, dit Baronius, étant marquées du signe de la croix, elles appartenoient à ce titre à Jesus Christ; ou, selon Joseph Mede, parce qu'en les dédiant on y inscrivoit le nom de Jesus - Christ, comme on désignoit les maisons & autres biens temporels, par les noms de leurs possesseurs. Enfin on les trouve, mais beaucoup plus rarement, nommés monasteres & tabernacles, monasteria & tabernacula. Bingham, crig. ecclesiastiq. tom. III. lib. VIII. cap. j. 1. 2. 3. 4. & seq.

Une église simple, est celle qui consiste uniquement en une nef & un choeur.

Une église à bas côtés, est celle qui a à droite & à gauche une ou plusieurs rangs de portiques en maniere de galeries voûtées, avec des chapelles dans son pourtour.

Eglise en croix greque, est celle dont la longueur de la croisée est égale à celle de la nef. On la nomme ainsi, parce que la plûpart des églises greques sont bâties de cette maniere.

Eglise en croix latine, est celle dont la nef est plus longue que la croisée, telles que sont la plûpart des églises gothiques.

Eglise en rotonde, est celle dont le plan est un cercle parfait, à l'imitation du panthéon. Voyez Rotonde.

Pour la forme des anciennes églises des Grecs, voici quelles étoient leurs parties, lorsqu'il n'en manquoit aucune. Voyez la Planc. parmi celles d'antiquités. L'église étoit séparée, autant qu'il se pouvoit, de tous les édifices profanes; éloignée du bruit, & environnée de tous côtés de cours, de jardins, ou de bâtimens dépendans de l'église même, qui tous étoient renfermés dans une enceinte de murailles. D'abord on trouvoit un portail ou premier vestibule, par où l'on entroit dans un pérystile, c'est - à - dire une cour quarrée, environnée de galeries ouvertes, comme sont les cloîtres des monasteres. Sous ces galeries se tenoient les pauvres, à qui l'on permettoit de mandier à la porte des églises; & au milieu de la cour étoit une ou plusieurs fontaines, pour se laver les mains & le visage avant la priere: les benitiers y ont succédé. Au fond étoit le porche ou portique, qu'ils appelloient W=RONAO/S2, qui étoit orné de colomnes en - dehors, & fermé en - dedans d'une muraille, au milieu de laquelle étoit une porte par laquelle on entroit dans un second portique. Le premier étoit destiné pour les énergumenes & les pénitens qui étoient encore dans la premiere classe. Le second étoit beaucoup plus large, & destiné pour les pénitens de la seconde classe. & pour les catéchumenes: on l'appelloit NARQH\C, ferula, parce que ceux qui étoient dans ce portique, commençoient à être sujets à la discipline de l'église. Ces deux portiques prenoient à - peu - près le tiers de la longueur totale de l'église. Près de la basilique, en - dehors, étoient deux bâtimens séparés; savoir le baptistere & le diaconium, sacristie, ou thresor. Du narthex on entroit par trois portes dans l'église, qui étoit partagée en trois, selon la largeur, par deux rangs de colonnes qui soûtenoient des galeries des deux côtés, & dont le milieu formoit la nef: c'étoit où se plaçoit le peuple, les hommes d'un côté & les femmes de l'autre. Avant que d'arriver à l'autel, étoit un retranchement de bois qu'on nommoit en grec XO/ROS2, & en

Next page


The Project for American and French Research on the Treasury of the French Language (ARTFL) is a cooperative enterprise of Analyse et Traitement Informatique de la Langue Française (ATILF) of the Centre National de la Recherche Scientifique (CNRS), the Division of the Humanities, the Division of the Social Sciences, and Electronic Text Services (ETS) of the University of Chicago.

PhiloLogic Software, Copyright © 2001 The University of Chicago.