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Quand nous sommes en état de refléchir sur nos sensations, nous nous appercevons que nous avons des sentimens dont les uns sont agréables, & les autres plus ou moins douloureux; & nous ne pouvons pas douter que ces sentimens ou sensations ne soient excités en nous par une cause différente de nous - mêmes, puisque nous ne pouvons ni les faire naître, ni les suspendre, ni les faire cesser précisément à notre gré. L'expérience & notre sentiment intime ne nous apprennent - ils pas que ces sentimens nous viennent d'une cause étrangere, & qu'ils sont excités en nous à l'occasion des impressions que les objets font sur nos sens, selon un certain ordre immuable établi dans toute la nature, & reconnu par - tout où il y a des hommes?
C'est encore d'après ces impressions que nous jugeons des objets & de leurs propriétés; ces premieres impressions nous donnent lieu de faire ensuite différentes réflexions qui supposent toûjours ces impressions, & qui se font indépendamment de la disposition habituelle ou actuelle du cerveau, & selon les lois de l'union de l'ame avec le corps. Il faut toûjours supposer l'ame dans l'état de la veille, où elle sent bien qu'elle n'est pas ensevelie dans les ténebres du sommeil; il faut la supposer dans l'état de santé, en un mot dans cet état où dégagée de toute passion & de tout préjugé, elle exerce ses fonctions avec lumiere & avec liberté: puisque pendant le sommeil, ou même pendant la veille, nous ne pouvons penser à aucun objet, à moins qu'il n'ait fait quelque impression sur nous depuis que nous sommes au monde.
Puisque nous ne pouvons par notre seule volonté empêcher l'effet d'une sensation, par exemple, nous empêcher de voir pendant le jour, lorsque nos yeux sont ouverts, ni exciter, ni conserver ni faire cesser la moindre sensation: Puisque c'est un axiome constant en Philosophie que notre pensée n'ajoûte rien à ce que les objets sont en eux - mêmes, cogitare tuum nil ponit in re: Puisque tout effet suppose une cause: Puisque nul être ne peut se modifier lui - même, & que tout ce qui change, change par autrui: Puisque nos connoissances ne sont point des êtres particuliers, & que ce n'est que nous connoissant, comme chaque regard de nos yeux n'est que nous regardant, & que tous ces mots, connoissance, idée, pensée, jugement, vie, mort, néant, maladie, santé, vûe, &c. ne sont que des termes abstraits que nous avons inventés sur le modele & à l'imitation des mots qui marquent des êtres réels, tels que Soleil, Lune, Terre, Etoiles, &c. & que ces termes abstraits nous ont paru commodes pour faire entendre ce que nous pensons aux autres hommes, qui en font le même usage que nous, ce qui nous dispense de recourir à des périphrases & à des circonlocutions qui feroient languir le discours; par toutes ces considérations, il paroît évident que chaque connoissance individuelle doit avoir sa cause particuliere, ou son motif propre.
Ce motif doit avoir deux conditions également essentielles & inséparables.
1°. Il doit être extérieur, c'est - à - dire qu'il ne doit pas venir de notre propre imagination, comme il en vient dans le sommeil: cogitare tuum nil ponit in re.
2°. Il doit être le motif propre, c'est - à - dire celui que telle connoissance particuliere suppose, celui sans lequel cette pensée ne seroit jamais venue dans l'esprit.
Quelques philosophes de l'antiquité avoient imaginé qu'il y avoit des Antipodes; les preuves qu'ils
Ce Grec qui s'imaginoit que tous les vaisseaux qui arrivoient au port de Pyrée lui appartenoient, ne jugeoit que sur ce qui se passoit dans son imagination & dans le sens interne, qui est l'organe du consentement de l'esprit; il n'avoit point de motif extérieur & propre: ce qu'il pensoit n'étoit point en rapport avec la réalité des choses: cogitare tuum nil ponit in re. Une montre marque toûjours quelqu'heure; mais elle ne va bien que lorsqu'elle est en rapport avec la situation du Soleil: notre sentiment intime, aidé par les circonstances, nous fait sentir le rapport de notre jugement avec la réalité des choses. Quand nous sommes éveillés, nous sentons bien que nous ne dormons pas; quand nous sommes en bonne santé, nous sommes persuadés que nous ne sommes pas malades: ainsi lorsque nous jugeons d'après un motif légitime, nous sommes convaincus que notre jugement est bien fondé, & que nous aurions tort de porter un jugement différent. Les ames qui ont le bonheur d'être unies à des têtes bien faites, passent de l'état de la passion, ou de celui de l'erreur & du préjugé, à l'état tranquille de la raison, où elles exercent leurs fonctions avec lumiere & avec liberté.
Il seroit aisé de rapporter un grand nombre d'exemples,
pour faire voir la nécessité d'un motif extérieur,
propre, & légitime dans tous nos jugemens,
même de ceux qui regardent la foi: Fides ex auditu,
auditus autem per verbum Christi, dit S. Paul. (Rom.
c. x. 17.)
Ce seroit donc une pratique très - utile de demander souvent à un jeune homme le motif de son jugement, dans des occasions même très - communes, sur - tout quand on s'apperçoit qu'il imagine, & que ce qu'il dit n'est pas fondé.
Quand les jeunes gens sont en état d'entrer dans des études sérieuses, c'est une pratique très - utile, après qu'on leur a appris les différentes sortes de gouvernemens, de leur faire lire les gazettes, avec des cartes de géographie & des dictionnaires qui expliquent certains mots que souvent même le maître n'entend pas. Cette pratique est d'abord desagréable aux jeunes gens; parce qu'ils ne sont encore au fait de rien, & que ce qu'ils lisent ne trouve pas à se lier dans leur esprit avec des idées acquises: mais peu - à - peu cette lecture les intéresse, sur - tout lorsque leur vanité en est flatée par les loüanges que des personnes avancées en âge leur donnent à - propos sur ce point.
Je connois des maîtres judicieux qui pour donner aux jeunes gens certaines connoissances d'usage, leur font lire & leur expliquent l'état de la France & l'almanach royal: & je crois cette pratique très utile.
Il resteroit à parler des moeurs & des qualités so<pb-> [p. 403]
Nous avons dans l'école militaire un modele d'éducation, auquel toutes les personnes qui sont chargées d'élever des jeunes gens, devroient tâcher de se rapprocher; soit à l'égard de ce qui concerne la santé, les alimens, la propreté, la décence, &c. foit par rapport à ce qui regarde la culture de l'esprit. On n'y perd jamais de vûe l'objet principal de l'établissement, & l'on travaille en des tems marqués à acquérir les connoissances qui ont rapport à cet objet: telles sont les Langues, la Géométrie, les Fortifications, la science des Nombres, &c. ce sont des maîtres habiles en chacune de ces parties, qui ont été choisis pour les enseigner.
A l'égard des moeurs, elles y sont en sûreté, tant
par les bons exemples, que par l'impossibilité où les
jeunes gens se trouvent de contracter des liaisons
qui pourroient les écarter de leur devoir. Ils sont
éclairés en tout tems & en tout lieu. Une vigilance
perpétuelle ne les perd jamais de vûe: cette vigilance
est exercée pendant le jour & pendant la nuit,
par des personnes sages qui se succedent en des tems
marqués. Heureux les jeunes gens qui ont le bonheur
d'être reçûs à cette école! ils en sortiront avec un
tempérament fortifié, avec l'esprit de leur état, &
un esprit cultivé, avec des moeurs qu'une habitude
de plusieurs années aura mises à l'abri de la
séduction: enfin avec les sentimens de reconnoissance,
dont on voit qu'ils sont déjà pénétrés; premierement
à l'égard du Roi puissant, qui leur procure en
pere tendre de si grands avantages; en second lieu
envers le ministre éclairé, qui favorise l'exécution
d'un si beau projet; 3°. enfin à l'égard des personnes
zélées qui président immédiatement à cette exécution,
qui la conduisent avec lumiere, avec sagesse,
avec fermeté, & avec un desintéressement qu'on ne
peut assez loüer. Voyez
EDULCORATION (Page 5:403)
EDULCORATION, s. s. (Chimie.) on entend en Chimie par le mot d'édulcoration, la lotion de certaines matieres pulvérulentes & insolubles, ou du moins très - peu solubles, par l'eau, pour leur enlever différens sels avec lesquels elles sont confonoues.
Les sujets de cette opération sont les précipités, soit vrais, soit spontanés; les chaux métalliques, préparées par le moyen du nitre; celles qui sont fournies par la calcination, ou la distillation des sels métalliques ou terreux; les crystaux des sels peu solubles, formés dans la dissolution d'un sel beaucoup plus soluble, &c.
Les regles du manuel de cette opération se réduisent à deux. 1°. Il faut laver avec le plus grand soint toutes les chaux & tous les précipités véritablement insolubles, & dans ce cas on peut employer l'eau bouillante. 2°. Dans l'édulcoration des matieres solubles au contraire, comme dans celle du tartre vitriolé séparé d'une dissolution de potasse, celle du précipité blanc, &c. il ne faut laver qu'une ou deux fois, & employer de l'eau froide; sans cette précaution, & si l'on répete trop souvent les lotions, on perd inutilement une partie de la matiere qu'on se proposoit de purifier: comme il arrive assez souvent aux apothicaires ignorans & dirigés par des mauvaises lois, qui y perdent seuls à la vérité, ce qui fait par conséquent un fort petit malheur, & tel même qu'il seroit à souhaiter pour le bien de la société, qu'il fût une suite inévitable de l'ignorance & de l'inexactitude: car ces artistes apprendroient apparemment leur métier, s'ils étoient obligés de le savoir sous peine de se ruiner.
Voici la description détaillée de cette opération: on met la matiere à édulcorer dans une terrine, ou tel autre vaisseau commode de terre ou de verre: on
Au reste il ne faut pas confondre l'édulcoration
avec la dulcification. Voyez
Edulcoration philosophique (Page 5:403)
EDULCORER (Page 5:403)
EDULCORER, v. act. (Pharm.) signifie ajoû>er du sucre ou un sirop à certains remedes liquides destinés pour l'usage intérieur, dans la vûe de les rendre plus agréables au goût.
On édulcore des tisanes, des infusions, des décoctions, des émulsions, des potions, &c. L'édulcoration du petit - lait se fait très - souvent avec le sirop de violette; celle des émulsions avec le sirop des cinq racines apéritives, de nymphea, &c. Les potions anti - hystériques s'édulcorent presque toûjours avec le sirop d'armoise; les béchiques avec celui de capillaire ou de guimauve, de pas - d'âne, &c. (b)
EDUSIE, EDULIE, EDUQUE, EDUSE (Page 5:403)
* EDUSIE, EDULIE, EDUQUE, EDUSE, s. f. (Myth.) déesse dont la fonction étoit d'apprendre à manger aux enfans lorsqu'on les sevroit. On se concilioit sa protection, en lui offrant des premiers mets qu'on destinoit à l'enfant, après qu'on l'avoit privé du lait. Il y a des mythologistes qui font deux déesses différentes, d'Eduque & d'Edulie. Ils prétendent que la premiere présidoit à l'éducation, & la seconde au sevrage.
EEN - TOL - BRIEF (Page 5:403)
EEN - TOL - BRIEF, (Commerce.) On nomme ainsi
à Amsterdam & dans les autres villes des Provinces - Unies, des lettres de franchise que les bourgeois de
quelques - unes de ces villes obtiennent de leurs bourguemestres,
par lesquelles ces magistrats certifient
que tels ou tels sont en cette qualité exempts de quelques
droits de péage. Ces lettres ne durent qu'un an
& six semaines, & après ce terme on est obligé de les
renouveller. Voyez
EFAUFILER (Page 5:403)
EFAUFILER, v. act. (Rubann.) c'est tirer d'un bout de ruban entamé quelques brins de la trame, pour en connoître la qualité. Il se dit aussi des étoffes en soie, des draps en laine, &c. C'est un terme commun à tout ouvrage ourdi.
EFFACER, RATURER, RAYER, BIFFER (Page 5:403)
EFFACER, RATURER, RAYER, BIFFER,
syn. (Gram.) Ces mots signifient l'action de faire disparoître de dessus un papier ce qui est adhérent à sa
surface. Les trois derniers ne s'appliquent qu'à ce
qui est écrit ou imprimé: le premier peut se dire
d'autre chose, comme des taches d'encre, &c. Rayer
est moins fort qu'effacer; & effacer, que raturer. On
raye un mot en passant simplement une ligne dessus;
on l'efface lorsque la ligne passée dessus est assez forte
pour empêcher qu'on ne lise ce mot aisément; on
le rature, lorsqu'on l'efface si absolument qu'on ne
peut plus lire, ou même lorsqu'on se sert d'un autre
moyen que la plume, comme d'un canif, grattoir,
&c. On se sert plus souvent du mot rayer, que du
mot effacer, lorsqu'il est question de plusieurs lignes;
on dit aussi qu'un écrit est fort raturé, pour dire qu'il
est plein de ratures, c'est - à - dire de mots effacés. Le
mot rayer s'employe en parlant des mots supprimés
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