ENCYCLOPÉDIE OU DICTIONNAIRE RAISONNÉ
DES SCIENCES, DES ARTS ET DES MÉTIERS

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"227"> ont toûjours été en grande considération chez tous les princes chrétiens, & singulierement en France, où on leur a accordé plusieurs honneurs, distinctions, & priviléges, tant au clergé en corps, qu'à chacun des membres qui le composent.

Le second concile de Macon tenu en 585, porte que les laïcs honoreront les clercs majeurs, c'est - à - dire ceux qui avoient reçû le sous - diaconat ou un autre ordre supérieur; que quand ils se rencontreroient, si l'un & l'autre étoient à cheval, le laïc ôteroit son chapeau; que si le clerc étoit à pié, le laïc descendroit de cheval pour le saluer.

Une des principales prérogatives que les ecclésias<-> tiques ont dans l'état, c'est de former le premier des trois ordres qui le composent, & de précéder la noblesse dans les assemblées qui leur sont communes; quoique dans l'origine la noblesse fût le premier ordre, & même proprement le seul ordre considéré dans l'état.

Pour bien entendre comment les ecclésiastiques ont obtenu cette prérogative, il faut observer que les évêques eurent beaucoup de crédit dans le royaume, depuis que Clovis eut embrassé la religion chrétienne; ils furent admis dans ses conseils, & eurent beaucoup de part au gouvernement des affaires temporelles.

On croit aussi que tous les ecclésiastiques francs & tous ceux qui étoient ingénus & libres, furent admis de bonne - heure dans les assemblées de la nation; mais c'étoit d'abord sans aucune distinction, c'est - à - dire sans y former un ordre à part.

Ils ne tenoient point non plus alors d'assemblées reglées pour leurs affaires temporelles; s'ils s'assem bloient quelquefois en pareil cas, l'affaire étoit terminée en une ou deux séances. Les assemblées que le clergé tient présentement de tems en tems, n'ont commencé à devenir fréquentes & à prendre une forme reglée, que depuis le contrat de Poissy en 1561. Voyez ce qui en a été dit aux mots Clerge, Décime, Don gratuit .

Mais si les ecclésiastiques n'étoient pas alors auvorisés à tenir de telles assemblées, ils eurent l'avantage d'être admis dans les assemblées de la nation ou parlemens généraux.

Il y avoit trente - quatre évêques au parlement, où Clotaire fit resoudre la loi des Allemands. Les abbés étoient aussi admis dans ces assemblées. Le nombre des ecclésiastiques y étoit quelquefois supérieur à celui des laïcs: c'est de - là que les historiens ecclésiasti<-> ques, comme Grégoire de Tours, donnent souvent à ces assemblées le nom de synodes ou conciles.

Mais il paroît que dès le tems de Gontran, on n'appelloit plus aux assemblées que ceux que l'on jugeoit à propos: en effet, quoiqu'il fût question de juger deux ducs, on n'y appella que quatre évêques. Il est probable qu'on ne les appelloit tous à ces assemblées, que quand quelqu'un d'eux y étoit intéressé.

Ces assemblées ne subsisterent pas long - tems dans la même forme, tant à cause des partages de la monarchie, qu'à cause des entreprises de Charles Martel, lequel irrité contre les ecclésiastiques, abolit ces assemblées pendant les vingt - deux ans de sa domination. Elles furent rétablies par Pepin - le - Bref, lequel y fit de nouveau recevoir les prélats, leur y donna le premier rang; & par leur suffrage, il gagna tout le monde. Il confia à ces assemblées le soin de la police extérieure; emploi que les prélats saisirent avec avidité, & qui changea la plûpart des parlemens en conciles.

On distinguoit cependant dès le tems de Charlemagne deux chambres.

L'une pour les ecclésiastiques, où les évêques, les abbés, & les vénérables clercs, étoient reçûs sans que les laïcs y eussent d'entrée: c'étoit - là que l'on traitoit toutes les affaires ecclésiastiques ou réputées telles, dont les ecclésiastiques affecterent de ne point donner connoissance aux laïcs.

L'autre chambre où se traitoient les affaires du gouvernement civil & militaire, étoit pour les comtes & autres principaux seigneurs laïcs, lesquels de leur part n'y admettoient pas non plus les ecclésiastiques; quoique probablement ceux - ci consultassent, du moins comme casuistes ou jurisconsultes, pour la décision des affaires capitales, mais sans avoir part aux jugemens.

Ces deux chambres se réunissoient quand elles jugeoient à - propos, selon la nature des affaires qui paroissoient mixtes, c'est - à - dire ecclésiastiques & civiles.

Les ecclésiastiques, tant du premier que du second ordre, s'étant ainsi par leur crédit attribué la séance avant les plus hauts barons, ils siégeoient même au - dessus du chancelier; mais le parlement, par un arrêt de 1287, rendit aux barons la séance qui leur appartenoit, & renvoya les prélats & autres gens d'église, dans un rang qui ne devoit point tirer à conséquence.

Philippe V. rendit une ordonnance le 3 Décembre 1319, portant qu'il n'y auroit dorénavant aucuns prélats députés au parlement, le roi se faisant conscience de les empêcher de vaquer au gouvernement de leur spiritualité. Il paroît néanmoins que cette ordonnance ne fut pas toûjours ponctuellement exécutée; car le parlement, toutes les chambres assemblées le 28 Janvier 1471, ordonna que dorénavant les archevêques & évêques n'entreroient point au conseil de la cour sans le congé d'icelle, ou s'ils n'y étoient mandés, excepté les pairs de France, & ceux qui par privilége ancien y doivent & ont accoûtumé y venir & entrer.

Les évêques qui possedent les six anciennes pairies ecclesiastiques, siegent encore au parlement après les princes du sang, au - dessus de tous les autres pairs laics.

Pour ce qui est des conseillers - clercs qui sont admis au conseil du roi, dans les parlemens & dans plusieurs autres tribunaux, ils n'y ont rang & séance que suivant l'ordre de leur réception, excepté en la grand - chambre du parlement de Paris, où ils ont une séance particuliere du côté des présidens à mortier.

Indépendamment de l'entrée & séance qui fut donnée aux ecclésiastiques dans les assemblées de la nation & parlemens, comme ils étoient presque les seuls dans les siecles d'ignorance qui eussent quelque connoissance des lettres, ils remplissoient aussi presque seuls les premieres places de l'état, & celles des autres cours & tribunaux, & généralement presque toutes les fonctions qui avoient rapport à l'administration de la justice.

Tandis qu'ils s'occupoient ainsi des affaires temporelles, le relâchement de la discipline ecclésiastique s'introduisit bien - tôt parmi eux; ils devinrent la plûpart chasseurs, guerriers, quelques - uns même concubinaires: ils prirent ainsi les moeurs des seigneurs qu'ils avoient supplantés dans l'administration & le crédit. Grégoire de Tours dit lui - même qu'il avoit peu étudié, & on le voit bien à son style.

Quand les ecclésiastiques de quelque ville ou autre lieu, ne pouvoient obtenir des laïcs ce qu'ils vouloient, ils portoient dans un champ les croix, les vases sacrés, les ornemens, & les reliques, formoient autour une enceinte de ronces & d'épines, & s'en alloient. La terreur que cet appareil inspiroit aux laïcs, les engageoit à rappeller les gens d'église & à leur accorder ce qu'ils demandoient. Cet usage ne fut aboli qu'au concile de Lyon, tenu sous Grégoire X. vers l'an 1274.

En France, les ecclésiastiques séculiers étoient en [p. 228] si petit nombre dans les xij. & xiij. siecles, que les évêques étoient obligés de demander aux abbés des moines pour desservir les églises; ce que les abbés n'accordoient qu'après de grandes instances, & souvent ils rappelloient leurs religieux sans en avertir l'évêque.

On ne parle pas ici des biens d'église ni de leur aliénation, étant plus convenable de traiter ces objets sous le mot Eglise.

Pour ce qui est des priviléges des ecclésiastiques dont on a déjà touché quelques points, ils consistent:

1°. Dans ce qu'on appelle le privilége de clérica<-> ture proprement dit, ou le droit de porter devant le juge d'église les causes où ils sont défendeurs. Voyez Cléricature, Juge d'Eglise, Jurisdiction ecclésiastique , & Privilége.

2°. Ils ne sont point justiciables des juges de seigneur en matiere de délits, mais seulement du juge d'église pour le délit commun, & du juge toyal pour le cas privilégié. Voyez Cas privilégié & Délit commun.

3°. Ils sont assimilés aux nobles pour l'exemption de la taille, & pour plusieurs autres exemptions qui leur sont communes; ils sont exempts de logement de gens de guerre, de guet, & garde, &c.

4°. Les ecclésiastiques constitués aux ordres sacrés de prêtrise, diaconat, & sous - diaconat, ne peuvent être exécutés en leurs meubles destinés au service divin ou servant à leur usage nécessaire, de quelque valeur qu'ils puissent être, ni même en leurs livres qui doivent leur être laissés jusqu'à la somme de cent cinquante livres. Ordonn. de 1667, tit. xxxiij. art. 15.

5°. La déclaration du 5 Juillet 1696, fait défense d'emprisonner les prêtres & autres ecclésiastiques pour dettes & choses civiles; & celle du mois de Juillet 1710, ordonne, à l'égard de ceux qui sont dans les ordres sacres, qu'ils ne pourront être contraints par corps au payement des dépens des procès dans lesquels ils succomberont.

Le 32e canon du concile d'Agde, tenu en 506, excommunie les laïcs qui auront intenté quelque procès à un ecclésiastique, s'ils perdent leur cause: mais cela ne s'observe point.

Les canons défendent aussi aux ecclésiastiques de se mêler d'aucune affaire séculiere; & en conséquence ils ne peuvent faire aucune fonction militaire, ni de finance, ni faire commerce d'aucunes marchandises: mais ils peuvent, suivant notre usage, faire les fonctions de juge tant dans les tribunaux ecclésiastiques, que dans les tribunaux séculiers, nonobstant une loi contraire faite par Arcadius, & insérée au code de Justinien, laquelle n'est point observée, non plus que la disposition des decrétales, qui leur défend de faire la fonction de juges dans les tribunaux séculiers.

Ils peuvent aussi faire la fonction d'avocats dans tous les tribunaux séculiers ou ecclésiastiques, en quoi notre usage est encore contraire au droit canon.

On n'observe pas non plus parmi nous les decrets des papes, qui détendent aux ecclésiastiques d'étudier en droit civil, les magistrats qui sont ecclésiastiques devant auparavant être reçûs avocats, & par conséquent gradués in utroque jure.

Aucun de ceux qui sont engagés dans l'état ecclé<-> siastique, ne peut présentement être marié; mais pour savoir les progrès de la discipline à ce sujet, on renvoye au mot Célibat, où cette matiere a été savamment traitée.

On peut aussi voir au mot Clerc ce qui concerne l'habillement des ecclésiastiques, & plusieurs autres points de leur discipline.

Il y a eu beaucoup de réglemens faits par rapport aux moeurs des ecclésiastiques, & à la pureté qu'ils doivent observer, jusque - là que S. Lucius pape leur défendit d'aller seuls au domicile d'une femme.

Aux états de Languedoc en 1303, le tiers état fit de grandes plaintes sur certaines jeunes femmes que les curés retenoient auprès d'eux, sous le nom de comeres. Annales de Toulouse, par la Faille; hist, des ouv. des Sav. Septemb. 1688. Pour prévenir tous les abus & les scandales, les conciles ont défendu aux ecclésiastiques d'avoir chez eux des personnes du sexe qu'elles ne soient âgées au moins de 50 ans.

Le concile de Bordeaux, tenu en 1583, est un de ceux qui entre dans le plus grand détail sur ce qui concerne la modestie & la régularité des ecclésiasti<-> ques dans leurs habits, les jeux dont ils doivent s'abstenir, les professions & fonctions peu convenables à leur état; le grand soin qu'ils doivent avoir de ne point garder chez eux des personnes du sexe, capables de faire naître des soupçons sur leur conduite. Il décerne plusieurs peines contre les ecclésiastiques qui après en avoir été avertis, persisteront à retenir chez eux ces sortes de femmes.

Pour ce qui concerne le jeu spécialement, le droit canon, les conciles de Sens en 1460, 1485, & 1528, ceux de Toulouse & de Narbonne, & les statuts bynodaux de plusieurs diocèses, leur défendent expressément de joüer avec les laïcs à quelque jeu que ce soit; de joüer en public à la paume, au mail, à la boule, au billard, ni autre jeu qui puisse blesser la gravité de leur état, même d'entrer dans aucun lieu public pour y voir joüer. Ceux qui n'ont d'autre revenu que celui de leur bénéfice, ne doivent point joüer du tout, attendu que ce seroit dissiper le bien des pauvres.

Les honoraires des ecclésiastiques ont été fixés par plusieurs réglemens, qui sont rapportés par Bruneau en son traité des criées, pag. 503.

L'article 27 de l'édit de 1695, dit que le reglement de l'honoraire des ecclésiastiques appartiendra aux archevêques & évêques, & que les juges d'église connoîtront des procès qui pourront naître sur ce sujet entre des personnes ecclésiastiques. Ce même article exhorte les prélats, & néanmoins leur enjoint d'y apporter toute la modération convenable, de même qu'aux rétributions de leurs officiaux, secrétaires, & greffiers des officialités.

Il y a eu un réglement fait par M. l'archevêque de Paris, pour l'honoraire des curés & autres ecclésias<-> tiques de la ville & fauxbourgs de Paris; ce réglement a été homologué par un arrêt du 10 Juin 1693. Voyez Clerc, Clergé, Cléricature, Curés & ci - après Eglise, Evêques, Prélats, Prêtre &c. (A)

Ecclésiastiques (Page 5:228)

Ecclésiastiques (bénéfices), voyez Bénéfices.

Ecclésiastiques (Page 5:228)

Ecclésiastiques (biens), voyez Eglise.

Ecclésiastiques (Page 5:228)

Ecclésiastiques (cas ou délits), voyez Délit commun.

Ecclésiastiques (Page 5:228)

Ecclésiastiques (censures), voyez Censure.

Ecclésiastiques (Page 5:228)

Ecclésiastiques (chambres), sont les chambres des décimes ou bureaux diocésains, & les chambres souveraines du clergé ou des décimes. Voyez Décimes.

Ecclésiastique (Page 5:228)

Ecclésiastique (comput), voyez Comput.

Ecclésiastique (Page 5:228)

Ecclésiastique (délit), voyez Délit commun.

Ecclésiastique (Page 5:228)

Ecclésiastique (discipline), voyez Discipline, Clerc, Cléricature, Clergé.

Ecclésiastique (Page 5:228)

Ecclésiastique (dixme), voyez Dixme.

Ecclésiastique (Page 5:228)

Ecclésiastique (état), voyez ci - après Etat.

Ecclésiastique (Page 5:228)

Ecclésiastique (habit), voyez Clerc & Habit.

Ecclésiastique (Page 5:228)

Ecclésiastique (jurisdiction), voyez Jurisdiction.

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