ENCYCLOPÉDIE OU DICTIONNAIRE RAISONNÉ
DES SCIENCES, DES ARTS ET DES MÉTIERS

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"997"> étoit du tems de Justinien. Le P. Mabillon, mieux versé dans la connoissance de ces anciennes écritures, tient que celle - ci est du sixieme siecle; & suivant le caractere, il paroît que c'est l'ouvrage d'un copiste grec, qui les a écrites à Constantinople ou à Benyte.

L'empereur Lothaire voulant récompenser les habitans de Pife qui l'avoient secondé dans ses desseins, leur fit présent du manuscrit des pandectes, & ordonna que cette loi seroit observée dans tout l'empire. Les habitans de Pise conserverent long - tems avec soin ce manuscrit; c'est de - là que dans quelques anciennes gloses le digeste est appellé pandectoe pisanoe; & que quand les interpretes des autres pays étoient divisés sur la véritable teneur de quelqu'endroit du texte des pandectes, ils avoient coûtume de se renvoyer ironiquement les uns les autres à Pise, où étoit le manuscrit original.

Mais l'année 1406 les Florentins s'étant rendus maîtres de la ville de Pise, le général des Florentins enleva le manuscrit des pandectes, & le fit porter à Florence; ce qui fit depuis ce tems donner au digeste le nom de pandectoe ftorentinoe. Ce manuscrit est en deux volumes, dont les Florentins firent enrichir la couverture de plusieurs ornemens: ils firent aussi construire exprès un petit cabinet ou armoire dans le palais de la république, pour déposer ce manuscrit, qui est toûjours dans le même endroit; & jusqu'au dix - septieme siecle, quand on le montroit à des étrangers, c'étoit avec beaucoup de cérémonies: le premier magistrat de la ville y assistoit nud tête, & des religieux Bernardins tenoient des flambeaux allumés.

On conserve encore dans diverses bibliotheques plusieurs anciens manuscrits du digeste, & entr'autres dans celle du Roi, & dans les bibliotheques Vaticane, Urbine, Palatine, Barberine & Otobonienne, qui sont à Rome; dans celle de Venise & autres, dont on peut voir le détail dans M. Terrasson, hist. de la jurisp. rom. mais aucun de ces manuserits ne remonte au - delà du douzieme siecle; & celui de Florence est regardé par tous les auteurs comme le plus ancien, le plus authentique, & celui dont tous les autres sont émanés.

Depuis l'invention de l'Imprimerie, le digeste a été imprimé un grand nombre de fois, & presque toûjours avec les autres livres de Justinien; ce qui forme le corps de droit, dont l'édition la plus estimée est celle faite à Amsterdam en 1663, en deux volumes in - folio, avec des notes des plus célebres commentateurs.

Le digeste paroît avoir été observé en France, de même que les autres livres de Justinien, depuis le tems de Louis le jeune, du moins dans les provinces appellées de droit écrit.

Les jurisconsultes modernes qui ont travaillé sur le digeste, sont en trop grand nombre pour en faire une énumération complete: nous parlerons seulement ici de quelques - uns des plus célebres.

Irnerius, Allemand de naissance, qui s'employa pour le rétablissement du digeste & autres livres de Justinien, fit de petites scholies qui donnerent lieu dans la suite à des gloses plus étendues.

Haloander donna vers l'année 1500 une nouvelle édition du digeste, plus correcte que les précédentes, & qui fut appellée norique, parce qu'elle est dédiée au sénat de Nuremberg.

Barthole, Balde, Paul de Castre, Alexandre de Imola, Décius, Alciat, Pacius, Perecius, Guillaume Budée, Duaren, Dumoulin, Fernand, Hotman, Cujas, Mornac, & plusieurs autres encore plus récens, & qui sont connus, ont fait des commentaires sur le digeste; les uns ont embrassé la totalité de l'ou<cb-> vrage; d'autres se sont bornés à expliquer quelques livres, ou même seulement quelques titres.

On se sert ordinairement pour citer le digeste, d'une abbréviation composée de deux f liées en cette forme, ff; ce qui vient de la lettre greque P dont on se servoit pour citer les pandectes, & que les copistes latins prirent pour deux ff jointes. On se sert aussi quelquefois de la lettre d pour citer le digeste.

Quelques jurisconsultes du seizieme siecle commencerent à critiquer la compilation du digeste, & singulierement l'ordre des matieres, & l'arrangement que l'on a donné aux fragmens tirés des anciens jurisconsultes.

Cujas au contraire a taxé d'ignorance ceux qui blâmoient l'ordre du digeste; il engagea cependant Jacques Labitte son disciple à composer un ouvrage contenant le plan du digeste dans un nouvel ordre, pour mieux pénétrer le sens des lois, en rapprochant les divers fragmens qui sont d'un même jurisconsulte. Ce livre a pour titre, index omnium quoe in pandectis continentur, in quo, &c. il fut publié à Paris en 1577. C'est un volume in - 4°. qui a trois parties: la premiere a pour objet de rassembler les divers fragmens de chaque jurisconsulte, qui appartiennent au même ouvrage; la seconde contient une table des jurisconsultes dont il n'y a aucunes lois dans le digeste, mais qui y sont cités; la troisieme est une dissertation sur l'usage que l'on doit faire des deux premieres parties.

L'exemple de Labitte a excité plusieurs autres jurisconsultes à donner aussi de nouveaux plans du digeste.

Volfangus Freymonius en donna un en 1574, intitulé symphonia juris utriusque chronologica, in quá, &c. Cet ouvrage concerne tout le corps de droit; & pour ce qui concerne le digeste en particulier, l'auteur a perfectionné le travail de Labitte.

Antoine - Augustin archevêque de Tarragone, donna en 1579 un ouvrage intitulé de nominibus propriis, *T*O*G *P*A*N*D*E*K*T*O*G, Florentini cum notis, où il enchérit encore sur Labitte & sur Freymonius, en ce qu'à côté de chaque portion qu'il rapproche de son tout, il marque le chiffre du livre, du titre & de la loi.

Loysel avoit aussi fait un index dans le goût de celui de Labitte.

Ces auteurs n'avoient fait que tracer un plan pour mettre le digeste dans un nouvel ordre; mais personne n'avoit encore entrepris l'exécution de ce plan.

Après le décès de M. Dugone avocat au parlement, & docteur honoraire de la faculté de Droit de Paris, on trouva dans ses papiers un digeste arrangé suivant le plan de Labitte & des autres auteurs dont on vient de parler. Cet ouvrage est actuellement entre les mains de M. Boullenois avocat, qui en a donné au public une description en forme d'avis. Ce nouveau digeste n'est point manuserit, & on ne sait si on peut dire qu'il est imprimé, n'étant composé que de lois découpées de plusieurs exemplaires du corps de Droit, que l'on a collées & arrangées sous chaque jurisconsulte, avec un petit abregé de sa vie, & l'index chifsré de Labitte: le tout forme trois volumes in - fol.

M. Terrasson, sans blâmer l'exécution du projet de Labitte & autres semblables, fait sentir que cela n'est pas seul capable de donner une parfaite connoissance de l'esprit & des vûes de chaque jurisconsulte, parce qu'entre les fragmens que l'on peut rapprocher, il en manque beaucoup d'autres que l'on n'a plus.

Il auroit sans doute reconnu que l'on doit trouver beaucoup plus d'avantage dans l'ouvrage que M. Potier conseiller au présidial d'Orléans, vient de donner au public en trois volumes in - fol. ce sont les pandectes de Justinien mises dans un nouvel ordre, [p. 998] avec les lois du code & des novelles qui confirment le droit du digeste, qui l'expliquent ou l'abrogent.

Le but de cet ouvrage est de rétablir l'ordre qui manque dans le digeste, & de rendre par ce moyen les lois plus intelligibles, & l'étude du Droit plus facile.

Il eût été facile de donner aux livres & aux titres du digeste un meilleur ordre que celui qu'ils ont; mais M. Potier n'a pas crû devoir s'en écarter, afin que l'on retrouve plus aisément dans son ouvrage les titres du digeste dont on veut étudier le véritable sens. Il a rangé sous chaque titre les lois qui en dépendent, dans l'ordre qui lui a paru le plus convenable, & a renvoyé à d'autres titres celles qui lui ont paru y avoir plus de rapport; ensorte néanmoins qu'il n'a omis aucune portion du texte, & n'a fait à cet égard que le mettre dans un meilleur ordre.

Il y a joint quelques fragmens de la loi des douze tables de Gaïus, d'Ulpien, & des sentences de Paulus, afin d'éclaircir le droit qui étoit en vigueur du tems des jurisconsultes dont les écrits ont servi à former le digeste; droit sans la connoissance duquel il est impossible d'entendre certaines lois.

Il y a aussi inseré la plûpart des lois du code, & les novelles qui confirment, expliquent ou abrogent quelqu'endroit du digeste. Les lois publiées jusqu'au tems de Constantin, y sont rapportées en leur entier. A l'égard de celles des empereurs qui ont regné depuis, comme elles sont trop longues, & souvent d'un style barbare, il s'est contenté d'en rapporter l'esprit.

L'auteur a suppléé de suo la plûpart des définitions, des divisions, regles & exceptions, & même les propositions nécessaires pour la liaison des textes; mais tout ce qu'il a mis du sien est en caracteres italiques, & par - là distingué du texte qui est en caractere romain.

Il a aussi ajoûté quelques notes, tant pour éclaircir les textes qui lui ont paru obscurs, que pour rétablir ceux qui paroissent avoir été corrompus en les corrigeant suivant les observations de Cujas & des meilleurs interpretes, & enfin pour concilier les lois qui paroissent opposées les unes aux autres.

A la fin du troisieme tome il y a une table de tous les livres, titres, lois & paragraphes du digeste, suivant l'ordre de Justinien, qui indique le tome, la page & le nombre où chaque objet est rapporté dans le digeste de M. Potier. (A)

DIGESTEUR (Page 4:998)

DIGESTEUR, s. m. (Physiol.) c'est un instrument ou un moyen artificiel qui sert à digérer ou à dissoudre les mets hors de l'estomac, & suivant une voie analogue à celle de la digestion des animaux.

Dans les transactions philosophiques M. Leigh nous donne un digesteur artificiel, fort propre à répandre du jour sur la maniere dont se fait la digestion naturelle. Sa préparation consiste dans de l'esprit de soufre, de l'esprit de corne de cerf, du chyle d'un chien, & de sa salive. Si l'on met dans une dragme de cette préparation un morceau de veau, de mouton, de boeuf, ou quelque chose de semblable, de l'épaisseur d'une noix, & qu'on le mette pendant deux heures sur un fourneau de digestion, il en sortira un jus qui aura la couleur & le goût du chyle, & la chair deviendra légere, seche, insipide.

Le digesteur de Clopton Havers est composée d'huile de térébenthine mêlée avec de l'huile de vitriol: que l'on mette dans cette préparation de la viande crue & des miettes de pain, & que l'on fasse digérer le tout pendant quatre heures au bain - marie, on trouve la chair dissoute, & tout le mélange forme une pulpe très - épaisse; d'où ces auteurs concluent chacun de son côté, que les alimens se digerent dans l'estomac par quelque dissolvant. Voyez Digestion. Voyez aussi Automate.

Mais le plus célebre de tous les digesteurs est celui de Papin, & celui dont les effets ont plus de rapport à l'opération de l'estomac. C'est une sorte de vaisseau dans lequel on met de la viande, avec autant d'eau qu'il en faut pour le remplir exactement; après quoi on le ferme à vis avec un couvercle, de maniere que l'air extérieur ne puisse s'y communiquer: mettant ensuite cette machine sur deux ou trois charbons rouges, ou même l'exposant simplement à l'action d'un petit feu de lampe, la viande en six ou huit minutes se trouve réduite en une pulpe, ou plûtôt en une liqueur parfaite: en poussant un peu le feu, ou seulement en le laissant agir tel qu'il est quelques minutes de plus, les os les plus durs se transforment en pulpe ou en gelée. On attribue cet effet à l'exactitude avec laquelle cette machine est fermée; comme elle ne permet ni l'entrée ni la sortie de l'air, les secousses occasionnées par la dilatation & les oscillations de l'air renfermé dans la chair, sont uniformes & très - vigoureuses: celles de l'air qui en est sorti, jointes à celui qui étoit dans le vase autour de la viande dans le tems qu'on l'a fermé, sont aussi très - fortes; & plus il est échauffé, plus sa raréfaction empêchée par les parois qui ne cedent point, le fait réagir en maniere de pilon sur la matiere résistante contenue; moyennant quoi la dissolution s'en fait & s'acheve: tout se trouve converti en un fluide qui paroît homogene, & en un mélange de particules aqueuses, salines, huileuses & autres, si intimement adhérentes qu'elles ne sont presque plus séparables. Quand ce mélange est chaud, il ressemble à une liqueur & à une gelée; lorsqu'il est froid, sa consistance est proportionnée à la quantité de viande ou d'os que l'eau a dissous. Voyez l'article Digestoire.

Cette expérience paroît avoir une parfaite analogie avec l'opération de l'estomac; car quoique la dissolution de ce viscere ne soit pas ordinairement si vive & si pénétrante, néanmoins à proportion de sa chaleur & de sa construction, M. Drake pense que l'effet est tout - à - fait semblable; car par son action il broie & il réduit en très - petites particules les corps qu'il renferme, en les pénétrant des humeurs qui lui sont propres. Ces corps ainsi réduits en une substance fluide, & intimement mêlés avec la boitson & les sucs stomachiques, composent cette liqueur laiteuse que l'on appelle chyle. Voyez Chyle. Chambers. (d)

DIGESTIF (Page 4:998)

DIGESTIF, adj. terme de Chirurgie concernant la matiere medicale externe. C'est une espece d'onguent ou de liniment qu'on applique sur les plaies, pour en mûrir la matiere & la disposer à une suppuration loüable.

Lorsque le pus qui étoit renfermé dans l'abcès est évacué (voyez Abcés), on doit penser à procurer l'écoulement de celui qui reste infiltré dans les chaits qui avoisinent la cavité de l'abcès, & qui ont été comprises dans l'étendue de l'inflammation qui a précédé. Voyez Phlegmon. Le pus qui étoit amassé dans cette cavité étoit avant l'évacuation un suppuratif qui facilitoit beaucoup le dégorgement de ces chairs dans cette même cavité: en agissant contre leur surface, il entretenoit, par le relâchement qu'il y procuroit, toutes les issues dilatées, & en formoit continuellement de nouvelles par la destruction qu'il causoit dans le tissu de ces mêmes chairs; l'humeur purulente qui trouvoit moins de résistance à couler vers le foyer de l'abcès où ce tissu étoit relâché, & où toutes les voies lui étoient ouvertes, venoit de toutes parts s'y rassembler.

Il est donc nécessaire de suppléer à cet amas de pus après l'évacuation de l'abcès, par des remedes qui continuent à attendrir & à relâcher les chairs qui doivent achever de se dégorger dans la cavité

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