ENCYCLOPÉDIE OU DICTIONNAIRE RAISONNÉ
DES SCIENCES, DES ARTS ET DES MÉTIERS

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"226"> donné la description dans son ouvrage intitulé la Statique des végétaux & l'analyse de l'air.

2°. Une autre propriété de l'air, c'est que par son moyen les corps terrestres qui sont en feu, continuent de bruler jusqu'à ce que toutes les parties qui peuvent contenir du feu, soient consumées; au contraire les vapeurs & les exhalaisons éteignent dans l'instant le feu le plus vif, de même que l'éclat des charbons & du fer ardent. Ces mêmes vapeurs, bien loin d'être nécessaires à la respiration, comme l'air, y nuisent souvent, & quelquefois suffoquent. Témoin l'effet du soufre allumé, & celui de la grotte d'Italie, où un chien est suffoqué en un clin d'oeil.

3°. Si l'air n'est pas un fluide différent des vapeurs & des exhalaisons, pourquoi reste - t - il tel qu'il étoit auparavant, après une grosse pluie mêlée d'éclairs & de tonnerre? En effet, lorsqu'il fait des éclairs, les exhalaisons se mettent en feu, & tombent sur la terre en forme de pluie avec les vapeurs: mais après la pluie, on ne remarque pas qu'il soit arrivé aucun changement à l'air, si ce n'est qu'il se trouve purifié; il doit donc être différent des exhalaisons terrestres. Mussch. Essai de Phys.

Quant à la nature & la substance de l'air, nous n'en savons que bien peu de chose; ce que les Auteurs en ont dit jusqu'à présent n'étant que de pures conjectures. Il n'y a pas moyen d'examiner l'air seul & épuré de toutes les matieres qui y sont mêlées; & par conséquent on ne peut pas dire quelle est sa nature particuliere, abstraction faite de toutes les matieres hétérogenes parmi lesquelles il est confondu.

Le Docteur Hook veut que ce ne soit rien autre chose que l'éther même, ou cette matiere fluide & active, répandue dans tout l'espace des régions célestes; ce qui répond au medium subtile, ou milieu subtil de Newton. Voyez Éther, Milieu.

Considéré comme tel, on en fait une substance sui generis, qui ne dérive d'aucune autre, qui ne peut être engendrée, qui est incorruptible, immuable, présente en tous lieux, dans tous les corps, &c. D'autres s'attachent à son élasticité, qu'ils regardent comme son caractere essentiel & distinctif; ils supposent qu'il peut être produit & engendré, & que ce n'est autre chose que la matiere des autres corps, devenue par les changemens qui s'y sont faits, susceptible d'une élasticité permanente. M. Boyle nous rapporte plusieurs expériences qu'il a lui - même faites sur la production de l'air: ce Philosophe appelle produire de l'air, tirer une quantité d'air sensible de corps où il ne paroissoit pas y en avoir du tout, du moins où il paroissoit y en avoir moins que ce qui en a été tiré. Il observe que parmi les différentes méthodes propres à cet effet, les meilleures sont la fermentation, la corrosion, la dissolution, la décomposition, l'ébullition de l'eau & des autres fluides, & l'action réciproque des corps, surtout des corps salins, les uns sur les autres. Hist. de l'air. Il ajoûte que les différens corps solides & minéraux, dans les parties desquels on ne soupçonneroit pas la moindre élasticité, étant plongés dans des menstrues corrosifs, qui ne soient point élastiques non plus, on aura cependant au moyen de l'atténuation des parties, causée par leur froissement, une quantité considérable d'air élastique. Voyez Ibid.

Newton est du même sentiment. Selon ce Philosophe, les particules d'une substance dense, compacte & fixe, adhérentes les unes aux autres par une puissante force attractive, ne peuvent être séparées que par une chaleur violente, & peut - être jamais sans fermentation; & ces corps raréfiés à la fin par la chaleur ou la fermentation, se transforment en un air vraiment élastique. Voyez l'Optique de Newton. Sur ce principe, il ajoûte que la poudre à canon produit de l'air par son explosion. Ibid.

Voilà donc non - seulement des matériaux pour produire de l'air, mais aussi la méthode d'y procéder: en conséquence de quoi on divise l'air en réel ou permanent, & en apparent ou passager. Car pour se convaincre que tout ce qui paroît air ne l'est pas pour cela, il ne faut que l'exemple de l'éolipile, où l'eau étant suffisamment raréfiée par le feu, sort avec un siflement aigu, sous la forme d'une matiere parfaitement semblable à l'air; mais bientôt après perd cette ressemblance, surtout au froid, & redevient eau par la condensation, telle qu'elle étoit originairement. On peut observer la même chose dans l'esprit de vin, & autres esprits subtils & fugitifs qu'on obtient par la distillation; au lieu que l'air réel ne se peut réduire ni par la compression, ni par la condensation ou autre voie, en aucune autre substance que de l'air. Voyez Eolipile.

On peut donc faire prendre à l'eau pour quelque tems l'apparence de l'air: mais elle reprend bientôt la sienne. Il en est de même des autres fluides; la plus grande subtilisation qu'on y puisse produire, est de les réduire en vapeurs, lesquelles consistent en un fluide extrèmement raréfié, & agité d'un mouvement fort vif. Car pour qu'une substance soit propre à devenir un air permanent, il faut, dit - on, qu'elle soit d'une nature fixe; autrement elle ne sauroit subir la transmutation qu'il faudroit qui s'y fît; mais elle s'envole & se dissipe trop vîte. Ainsi la différence entre l'air passager & l'air permanent, répond à celle qui est entre les vapeurs & les exhalaisons, qui consiste en ce que celles - ci sont seches, & celles - là humides, &c. Voyez Vapeur, & Exhalaison

La plûpart des Philosophes font consister l'élasticité de l'air dans la figure de ses particules. Quelques - uns veulent que ce soit de petits floccons semblables à des touffes de laine; d'autres les imaginent tournées en rond comme des cerceaux, ou roulées en spirale comme des fils d'archal, des copeaux de bois, ou le ressort d'une montre, & faisant effort pour se rétablir en vertu de leur contexture; de sorte que pour produire de l'air, il faut, selon eux, produire des particules disposées de cette maniere, & qu'il n'y a de corps propres à en produire, que ceux qui sont susceptibles de cette disposition. Or c'est dequoi, ajoûtent - ils, les fluides ne sont pas susceptibles, à cause du poli, de la rondeur, & de la lubricité de leurs parties.

Mais Newton, (Opt. p. 371.) propose un système différent: il ne trouve pas cette contexture des parties suffisante pour rendre raison de l'élasticité surprenante qu'on observe dans l'air, qui peut être raréfié au point d'occuper un espace un million de fois plus grand que celui qu'il occupoit avant sa raréfaction. Or comme il prétend que tous les corps ont un pouvoir attractif & répulsif, & que ces deux qualités sont d'autant plus fortes dans les corps, qu'ils sont plus denses, plus solides, & plus compacts; il en conclut que quand par la chaleur, ou par l'effet de quelqu'autre agent, la force attractive est surmontée, & les particules du corps écartées au point de n'être plus dans la sphere d'attraction, la force répulsive commencant à agir, les fait éloigner les unes des autres avec d'autant plus de force qu'elles étoient plus étroitement adhérentes entre elles, & ainsi il s'en forme un air permanent. C'est pourquoi, dit le même Auteur, comme les particules d'air permanent sont plus grossieres, & formées de corps plus denses que celles de l'air passager ou des vapeurs, le véritable air est plus pesant que les vapeurs, & l'atmosphere humide plus légere que l'atmosphere seche. Voyez Attraction, Répulsion, &c.

Mais, après tout, il y a encore lieu de douter si [p. 227] la matiere ainsi extraite des corps solides a toutes les propriétés de l'air; si cet air n'est pas passager, ou si l'air permanent qu'on tire des corps n'y existoit pas déjà. M. Boyle prouve par une expérience faite dans la Machine pneumatique avec une meche allumée, que cette fumée subtile que le feu éleve même des corps secs, n'a pas autant de ressort que l'air, puisqu'elle ne sauroit empêcher l'expansion d'un peu d'air enfermé dans une vessie qu'elle environne. Physic. mech. Exper. Néanmoins dans quelques expériences postérieures, en dissolvant du fer dans l'huile de vitriol & de l'eau, ou dans de l'eau - forte, il a formé une grosse bulle d'air qui avoit un véritable ressort, & qui en conséquence de son ressort, empêchoit que la liqueur voisine ne prit sa place; lorsqu'on y appliqua la main toute chaude, elle se dilata aisément comme tout autre air, & se sépara dans la liqueur même en plusieurs bulles, dont quelques - unes s'éleverent hors de la liqueur en plein air. Ibid.

Le même Physicien nous assûre avoir tiré une substance vraiment élastique de plusieurs autres corps; comme du pain, du raisin, de la bierre, des pommes, des pois, du boeuf, &c. & de quelques corps, en les brûlant dans le vuide, & singulierement du papier, de la corne de cerf: mais cependant cette substance, à l'examiner de prés, étoit si éloignée de la nature d'un air pur, que les animaux qu'on y enfermoit, non - seulement ne pouvoient respirer qu'avec peine, mais même y mouroient plus vîte que dans un vuide, où il n'y auroit point eu d'air du tout. Physic. mechan. exper.

Nous pouvons ajoûter ici une observation de l'Académie Royale des Sciences, qui est que l'ésticité est si éloignée d'être la qualité constitutive de l'air, qu'au contraire s'il se joint à l'air quelques matieres hétérogenes, il devient plus élastique qu'il ne l'étoit dans toute sa pureté. Ainsi M. de Fontenelle assûre en conséquence de quelques expériences faites à Paris par M. de la Hire, & à Boulogne par M. Stancari, que l'air rendu humide par le mélange des vapeurs est beaucoup plus élastique, & plus capable d'expansion, que quand il est pur; & M. de la Hire le juge huit fois plus élastique que l'air sec. Hist. de l'Acad. an. 1708.)

Mais il est bon d'observer aussi que M. Jurin explique ces expériences d'une autre maniere, & prétend que la conséquence qu'on en tire, n'en est pas une suite nécessaire. Append. ad V aren. Geogr.

Tout ce que nous venons de dire, s'entend de l'air considéré en lui - même: mais, comme nous l'avons remarqué, cet air n'existe nulle part pur de tout mêlange. Or ces substances hétérogenes des propriétés & des effets desquels nous avons à traiter ici, sont selon M. Boyle, d'une nature toute différente de celle de l'air pur. Boerhaave même fait voir que c'est un cahos & un assemblage de toutes les especes de corps créés. Tout ce que le feu peut volatiliser s'éleve dans l'air: or il n'y a point de corps qui puisse résister à l'action du feu. Voyez Feu, Volatil, &c.

Par exemple, il doit s'y trouver 1°. des particules de toutes les substances qui appartiennent au regne minéral: car toutes ces substances, telles que les sels, les soufres, les pierres, les métaux, &c. peuvent être converties en fumée, & par conséquent prendre place parmi les substances aériennes. L'or même, le plus fixe de tous les corps naturels, se trouve dans les mines fortement adhérent au soufre, & peut conséquemment être élevé avec ce minéral. Voyez Or, &c.

2°. Il faut aussi qu'il y ait dans l'air des particules de toutes les substances qui appartiennent au regne animal. Car les émanations abondantes qui sortent perpétuellement des corps des animaux par la transpiration qu'opere sans cesse la chaleur vitale, portent dans l'air pendant le cours entier de la vie d'un animal plus de particules de sa substance qu'il n'en faudroit pour récomposer plusieurs corps semblables. Voyez Transpiration, Emanation, &c.

De plus, quand un animal mort reste exposé à l'air, toutes ses parties s'évaporent & se dissipent bien - tôt; de sorte que la substance dont étoit composé un animal, un homme par exemple, un boeuf ou tout autre, se trouve presque toute convertie en air.

Voici une preuve entre mille autres, qui fait bien voir que l'air se charge d'une infinité de particules excrémenteuses; on dit qu'à Madrid, on n'est point dans l'usage d'avoir des privés dans les maisons; que les rues en servent la nuit: que cependant l'air enleve si promptement les particules fétides, qu'il n'en reste aucune odeur le jour.

3°. Il est également certain que l'air est aussi chargé de végétaux; car on sait que toutes les substances végétales deviennent volatiles par la putréfaction, sans même en excepter ce qu'il y a de terreux & de vasculaire qui s'échappe à son tour. Voyez Végétal, Plante, &c.

De toutes ces émanations qui slotent dans le vaste océan de l'atmosphere, les principales sont celles qui consistent en parties salines. La plûpart des Auteurs imaginent qu'elles sont d'une espece nitreuse: mais il n'y a pas à douter qu'il n'y en ait de toutes sortes; du vitriol, de l'alun, du sel marin, & une infinité d'autres. Voyez Sel, Nitre, &c.

M. Boyle observe même qu'il peut y avoir dans l'air quantité de sels composés qui ne sont point sur terre: formés par la rencontre fortuite & le mêlange de différens esprits salins. Ainsi l'on voit des vitrages d'anciens bâtimens, corrodés comme s'ils avoient été rongés par des vers, quoique aucun des sels que nous connoissons en particulier, ne fût capable de produire cet effet.

Les soufres sont sans doute une partie considérable de la substance aérienne, à cause du grand nombre de volcans, de grottes, de cavernes, & de soûpiraux; d'où il sort une quantité considérable de soufres qui se répand dans l'atmosphere. Voyez Soufre, Volcan, &c.

Et l'on peut regarder les aggrégations, les séparations, les frottemens, les dissolutions & les autres opérations d'une matiere sur une autre, comme les sources d'une infinité de substances neutres & anonymes qui ne nous sont pas connues.

L'air, pris dans cette acception générale, est un des agens les plus considérables & les plus universels qu'il y ait dans la nature, tant pour la conservation de la vie des animaux, que pour la production des plus importans phénomenes qui arrivent sur la terre. Ses propriétés & ses effets - ayant été les principaux objets des recherches & des découvertes des Philosophes modernes; ils les ont réduits à des lois & des démonstrations précises qui font partie des branches des Mathématiques qu'on appelle Pneumatique & Airométrie. Voyez Respiration, Pneumatique & Airometrie , &c.

Parmi les propriétés & les effets méchaniques de l'air, les principaux sont sa fluidité, sa pesanteur & son élasticité. 1°. Commençons par la fluidité. Cette propriété de l'air est constante par la facilité qu'ont les corps à le traverser, par la propagation des sons, des odeurs & émanations de toutes sortes qui s'échappent des corps; car ces effets désignent un corps dont les parties cedent au plus léger effort, & en y cédant, se meuvent elles - mêmes avec beaucoup de facilité: or voilà précisément ce qui constitue le fluide. L'air ne perd jamais cette propriété, soit qu'on le garde plusieurs années dans une bouteille fermée,

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