ENCYCLOPÉDIE OU DICTIONNAIRE RAISONNÉ
DES SCIENCES, DES ARTS ET DES MÉTIERS

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"310"> L'eau des fontaines est légere, la pierre des rochers est d'un gris bleu céleste, elle a le grain dur & fin; on en fait de la chaux. C'est derriere ces rochers qu'on trouve les bures pour le soufre, l'alun, le vitriol, le plomb & le cuivre. Plus on s'enfonce dans les profondeurs de la terre, plus les matieres sont belles. On y descend quelquefois de 80 toises; on suit les veines de rochers en rochers; on rencontre de tres beaux minéraux, quelquefois du crystal; il sort de ces mines une vapeur qui produit des effets surprenans. Une fille qui se trouva à l'entrée de la mine fut frappée d'une de ces vapeurs, & elle changea de couleur d'un côté seulement. On trouve dans les bois sous les hauteurs à dix piés de profondeur, plusieurs sortes de sable dont on fait du verre, du crystal & de la fayance. Trois hommes commencent une bure; ils tirent les terres, les autres les étançonnent avec des perches coupées en deux. Quand le percement est poussé à une certaine profondeur, on place à son entrée un tour avec lequel on tire les terres dans un panier qui a trois piés de diametre sur un pié & demi de profondeur. Six femmes sont occupées à tirer le panier, trois d'un côté du tour, trois de l'autre. Un broüetteur reçoit les terres au sortir du panier & les emmene. On conçoit que plus la bure avance, plus il faut de monde. Il y a quelquefois sept personnes dedans & sept au - dehors. De ceux du dedans les uns minent, les autres chargent le panier, quelques - uns étançonnent. Les hommes ont 20 sols du pays par jour, ou 28 sols de France; les femmes dix sols de France. Quand on est parvenu à 50 piés de profondeur, les femmes du tour tirent jusqu'à 200 paniers par huit heures. A dix piés on commence à rencontrer de la mine qu'on néglige. On ne commence à recueillir qu'à 20 à 25 piés. Quand on la trouve bonne, on la suit par des chemins soûterrains qu'on se fraye en la tirant; on étançonne tous ces chemins avec des morceaux de bois qui ont six pouces d'équarrissage sur six piés de haut; on place ces étais à deux piés les uns des autres sur les côtés; on garnit le haut de petits morceaux de bois & de fascines; quand les ouvriers craignent de rencontrer d'eau, ils remontent leur chemin.

Mais s'il arrive qu'on ne puisse éviter l'eau, on pratique un petit canal soûterrain qui conduise les eaux dans une bure qui a 90 piés de profondeur, & qui est au niveau des eaux: là il y a dix pompes sur quatre bassins, quatre au niveau de l'eau, trois au second étage, & trois au troisieme. Des canaux de ces pompes, les uns ont deux piés de hauteur, les autres quatre ou même cinq. Ces pompes vont par le moyen de deux grandes roues qui ont 46 piés de diametre, & qui sont mises en mouvement par des eaux qui se trouvent plus hautes qu'elles & qui sont dans les environs. Cette machine qui meut les pompes s'appelle engin. La premiere pompe a 10 toises, la seconde 10, & celle du fond 10. Les trois verges de fer qui tiennent le piston ont 50 piés, & le reste est d'aspiration. La largeur de la bure a huit piés en quarré. L'engin & les pompes font le même effet que la machine de Marly, mais ils sont plus simples.

On jette le minéral qui contient l'alun dans de gros tas qui ont vingt piés de haut, sur soixante en quarré. V. Minéral. Plan. 2. A, A, A, sont ces tas. On le laisse dans cet état pendant deux ans, pour qu'il jette son feu, disent les ouvriers. Au bout de deux ans, on en fait, pour le brûler, de nouveaux amas, qu'on voit même Planche en B, B, B, B. Ces amas sont par lits de fagots & lits de minéral, les uns élevés au - dessus des autres, au nombre de vingt, en forme de banquettes, comme on les voit. On a soin de donner de l'air à ces amas dans les endroits où l'on s'apperçoit qu'ils ne brûlent pas également; c'est ce que fait avec son pic la fig. 1. Pour donner de l'air, l'ouvrier travaille ou pioche, comme s'il vouloit faire un trou d'un pié quarré: mais ce trou fait, il le rebouche tout de suite. On laisse brûler le minéral pendant huit à neuf jours, veillant à ce qu'il ne soit ni trop cuit ni pas assez cuit; dans l'un & l'autre cas on n'en tireroit rien. Quand on s'apperçoit que la matiere est rougeâtre, & qu'elle sonne; on s'en sert d'un côté (celui où l'on a commencé de mettre le feu) tandis que de l'autre côté on continue d'ajoûter à peu près la même quantité; en sorte que l'amas se réforme à mesure qu'il se détruit: c'est ce que font les deux fig. 2. & 3. l'une, 2. emporte la matiere brûlée avec sa brouette; l'autre, 3. continue un lit avec sa hotte. Les Fêtes & les Dimanches n'interrompent point ce travail, qu'on pousse pendant 8 heures par jour. Deux hommes prennent la matiere brûlée pour la jetter dans les baquets d'eau; & une douzaine de petits garçons & de petites filles refont le tas à l'autre extrémité. C, C, C, C, &c. D, D, D, D, &c. sont ces baquets. Les hommes ont trente sols de France par jour, & les enfans cinq sols.

On remarque que les arbres qui sont aux environs des tas du minéral en feu meurent, & que la fumée qui les tue ne fait point de mal aux hommes. Les baquets sont au nombre de douze, comme on les voit sur deux rangées C, C, C, C, C, C; D, D, D, D, D, D; six d'un côté, six d'un autre: ils ont chacun seize piés en quarré, sur un pié de profondeur. Ces douze baquets sont séparés par un espace, dans lequel on en a distribué trois petits E, E, E, qui ont chacun, sur trois piés de long, un pié & demi de large, & deux piés de profondeur. Il y a un petit baquet pour quatre grands; quatre des grands, deux d'un côté C, C, & deux de l'autre D, D, communiquent avec un petit E. L'ouverture par laquelle les grands baquets communiquent avec les petits, est fermée d'un tampon, qu'on peut ôter quand on veut. Les broüetteurs portent sans cesse de la matiere du tas dans les grands baquets: ces grands baquets sont pleins d'eau; ils reçoivent l'eau par le canal F; le canal F prolongé en G, G, G, &c. fait le tour des douze grands baquets: ces grands baquets ont des ouvertures en H, H, H, &c. par lesquelles ils peuvent recevoir l'eau qui coule dans le canal G, G, G, qui les environne. Quand la matiere a trempé pendant 24. heures dans un grand baquet C 1. on laisse couler l'eau chargée de particules alumineuses dissoutes dans le petit baquet E, & on la jette de ce petit baquet E, dans le grand D1. où elle reste encore à s'éclaircir: on continue ainsi à remplir les baquets C1. C2. C3. &c. & les baquets D1. D2. D3. &c. d'eau chargée de parties alumineuses, par le moyen des petits baquets E, E, E. Ces baquets sont tous faits de bois, de madriers & de planches, & le fond en est plancheyé. Quand on présume que l'eau est assez éclaircie dans les grands baquets C1. C2. C3. &c. D1. D2. D3. &c. on en ôte les bouchons, & on la laisse couler par le long canal E, E, E, &c. dans un réservoir F, qui est à 50 toises de - là: elle demeure deux à trois heures dans ce réservoir, puis on la laisse aller dans un autre réservoir I, qui est à deux cens toises du réservoir F; mais de sa même grandeur: ce dernier réservoir I (Voyez Minéral. Plan. 3.) est derriere les chaudieres. Quand l'eau du réservoir I est claire, on s'en sert; si elle ne l'est pas, on la laisse reposer. Quand elle est suffisamment reposée, on la laisse couler dans les deux chaudieres G, G; ces chaudieres sont de plomb, & sont assises sur les fourneaux H, H, H. K, K, escaliers qui conduisent sur les fourneaux vers les chaudieres. L, L, cendriers. M, M, portes des fourneaux par lesquelles on jette la houille. L'eau qu'on a introduite dans les chaudieres G, G, y reste 24. heures; on les remplit à me<pb-> [p. 311] sure que l'eau y diminue, non de l'eau du réservoir I, qui est derriere elles, mais d'une autre dont nous parlerons tout à l'heure. Quand on s'apperçoit que la matiere contenue dans les chaudieres G, G, est cuite, ce que l'on reconnoît à sa transparence & à son écume blanche, on la renvoye, soit par un canal, soit autrement, des chaudieres G, G, dans huit cuves M, M, M, M, &c. où elle reste pendant trois jours: au bout de trois jours on prend avec des écopes l'eau qui lui surnage dans les cuves M, M, M, M, &c. on la jette sur les canaux r, r, r, r, qui la conduisent dans les cuves p, p, où il ne reste plus qu'un sédiment qu'on prend avec des seaux, & qu'on remet dans les deux chaudieres du milieu ou d'affinage n, n. A mesure que la matiere diminue dans les chaudieres n, n, on les remplit avec d'autre eau claire. Quand la matiere tirée des chaudieres M, M, M, en une espece de pâte, & portée dans les chaudieres d'affinage n, n, est entierement fondue ou dissoute, on la décharge par un petit canal dans les tonneaux o, o, o, o, où elle crystallise. Les chaudieres G, G, ont cinq piés de largeur, deux & demi de hauteur du côté du bouchon; de l'autre côté deux piés, & neuf piés de longueur. Les tonneaux, o, o, o, ont trois piés de diametre sur six de hauteur. On laisse la matiere dans les tonneaux pendant neuf jours en automne, & pendant douze jours en hyver, sans y toucher, crainte de tout gâter. Le tonneau tient 2500. Quant aux chaudieres G, G, qu'on appelle chaudieres à éclaircir, on les remplit à mesure que l'eau y diminue avec de l'eau mere: on entend par eau mere, celle qui s'éleve à la surface des cuves, M, M, M, &c. pendant que l'eau y séjourne; on prend cette eau dans les cuves p, p, avec des seaux, & on la renvoye, selon le besoin, des cuves p, p, dans les chaudieres à éclaircir G, G. C'est ce que font les deux fig. 1. 2. dont l'une prend dans la cuve p, & l'autre jette sur les canaux de renvoi q, q, qui se rendent aux deux chaudieres à éclaircir G, G, qu'on entretient toûjours avec moitié de l'eau des cuves p, p, & moitié de l'eau du réservoir I. Les fours sont de la longueur de la chaudiere; leur hauteur est coupée en deux par un grillage dont les barres ont trois pouces d'équarrissage, & cinq piés de longueur; il y en a cinq en longueur, & trois en travers. Ce grillage ne s'étend qu'à la moitié de la capacité du four; c'est sur lui qu'on met la houille; il faut toutes les 24 heures deux tombereaux de houille pour les quatre fourneaux. Ces tombereaux ont six piés de long, sur trois de large & trois de haut.

Il est bon d'observer que les chaudieres étant de plomb, il faut qu'elles soient garanties de l'action du feu par quelque rempart; ce rempart, c'est une grande plaque de fonte d'un pouce d'épaisseur H, H, H, qui couvre le dessus des fourneaux. Voyez la Planche 3. de Minéralogie. On voit, Planche de la couperose, une coupe du fourneau; A, porte du fourneau; B, B, porte du cendrier; C, C, la grille; D, D, D, D, coupe de la chaudiere; H, H, la cheminée; I, K, L, hotte & tuyau de la cheminée.

On fait aussi de l'alun en France, proche les montagnes des Pyrénées.

L'alun est composé d'un acide qui est de la nature de l'acide vitriolique, puisque quand il est joint avec l'alkali du tartre, il donne un tartre vitriolé, comme feroit l'acide tiré du vitriol même. Cet acide, pour former l'alun, est uni à une terre qui est une espece de craie; cette terre est particuliere, & semble tenir de la nature des matieres animales calcinées. L'alun donne par la décomposition quelque chose d'urineux, qui vient le plus souvent de l'urine dont on se sert pour le clarifier quand on le fabrique. D'ailleurs, l'alun pourroit donner un alkali volatil urineux, indépendamment de cette urine, parce qu'il contient un peu de bitume, qui combiné avec la terre de l'alun, peut donner un alkali volatil; ce qu'on doit inférer des expériences que M. Malouin a rapportées à l'Académie en 1746. en donnant l'analyse des eaux minérales de Plombieres. C'est de lui que nous tenons le reste de cet article.

L'alun est un remede qui, étant mis en oeuvre avec les précautions & la prudence nécessaires, appaise & guérit toutes les hémorrhagies en général, tant internes qu'externes. On peut donc s'en servir dans l'écoulement du sang, causé par l'ouverture de quelques vaisseaux dans les premieres voies; dans le saignement de nez; dans les crachemens & vomissemens de sang; dans le flux des urines ensanglantées, & des hémorrhodes; dans toutes les pertes de sang qui arrivent aux femmes, en quelque tems qu'elles leur surviennent, pendant leur grossesse, & après l'accouchement.

Enfin l'alun n'est pas moins efficace dans les hémorrhagies qui auroient été causées par un coup de feu, ou par quelque instrument tranchant, par quelque chûte, ou quelque coup de tête violent; & dans celles même qui seroient la suite de quelques ulceres rongeans & invétérés.

La maniere dont agit l'alun est très - douce: on n'éprouve lorsqu'on en prend, d'autre changement dans le corps, que quelques maux de coeur légers: mais ils durent très - peu, & ne vont jamais jusqu'à faire vomir avec effort.

Quelques - uns prétendent qu'il est dangereux d'arrêter le sang par l'usage des astringens; préjugé d'autant plus mal fondé à l'égard de l'alun, qu'il est détruit par l'expérience. Ce remede n'entraîne jamais de suite fâcheuse, pourvû néanmoins que les vaisseaux aient été suffisamment desemplis, ou par les pertes, ou par les saignées; c'est au Medecin à en décider. Le Medecin ne l'employera jamais dans les hémorrhagies critiques, ni dans les fievres violentes: c'est pourquoi il est toûjours nécessaire de consulter le Medecin sur son usage.

Au reste, la maniere d'en user doit être variée, ainsi que le régime, selon les différens tempéramens, & les différentes hémorrhagies.

La dose est depuis trois grains, jusqu'à un demi-gros, incorporé avec un peu de miel rosat. M. Malouin a trouvé que le cinabre joint à l'alun, faisoit réussir mieux ce remede, surtout lorsqu'il s'agit de calmer les nausées, &c. Ce Medecin fait entrer un grain de cinabre naturel dans chaque prise d'alun. Voyez sa Chimie Médicinale. On donne l'alun dans les grandes hémorrhagies pressantes, de deux heures en deux heures, & nuit & jour. Lorsque les hémorrhagies seront moins vives, on le donnera de trois ou de quatre heures en quatre heures, & le jour seulement, si la chose n'est pas pressante.

Lorsque la perte de sang sera arrêtée, ce qui arrive ordinairement après la huitieme ou dixieme prise, on diminuera insensiblement pendant un mois l'usage de l'alun.

Les femmes ont quelquefois des pertes de sang extraordinaires, ou sont sujettes à en évacuer tous les mois en telle abondance, qu'elles s'en trouvent considérablement affoiblies.

Dans la vûe de modérer ces pertes sans les arrêter, on leur fera prendre le matin à jeun un demi-gros d'alun sept ou huit jours de suite avant le tems de l'évacuation; elles continueront cette pratique pendant cinq ou six mois, sans quoi elles courent risque de devenir sujettes aux pertes blanches, qui peuvent devenir d'autant plus dangereuses, qu'elles sont quelquefois suivies de skirrhes ou d'ulceres.

Deux observations générales doivent être rapportées à toutes les especes de pertes de sang dont nou

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