ENCYCLOPÉDIE OU DICTIONNAIRE RAISONNÉ
DES SCIENCES, DES ARTS ET DES MÉTIERS

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"835"> fois, c'est qu'ils avoient dans les alvéoles trois couches de l'humeur visqueuse, ce qui n'arrive presque jamais.

Vers l'âge de vingt - un an les deux dernieres des dents molaires paroissent, & sont nommées dents de sagesse, parce qu'elles sortent lorsque l'on est à l'âge de discrétion. Voyez Sagesse.

On distingue dans chaque dent en particulier deux portions; l'une est hors l'alvéole & appellée le corps de la dent; elle est aussi appellée couronne, mais ce nom convient plus particulierement aux molaires; l'autre est renfermée dans l'alvéole, & se nomme la racine de la dent. Ces deux portions sont distinguées par une espece de ligne circulaire, qu'on appelle le collet de la dent: leur situation est telle, que dans le rang supérieur les racines sont en - haut & le corps en - bas, & dans le rang inférieur la racine est en - bas & le corps en - haut.

On observe au collet de la dent quelques petites inégalités à l'endroit où s'attache la gencive, & le long des racines différens petits sillons qui rendent l'adhérence de leur périoste plus intime. Voyez Gencive & Périoste.

On observe au bout de la racine de chaque dent un trou par où passent les vaisseaux dentaires, & qui est l'orifice d'un conduit plus ou moins long, qui va en s'élargissant aboutir à une cavité située entre le corps & la racine; cette cavité s'appelle sinus: elle est plus ou moins grande, & il paroît que l'âge n'est pas la seule cause de ces variétés; car on la trouve grande dans de vieux sujets, & petite dans de jeunes; petite dans des gens avancés en âge, & grande dans de jeunes gens.

Lorsque les racines ont plusieurs branches, ces branches varient beaucoup par rapport à leur direction; tantôt elles s'approchent par leur bout en embrassant quelquefois une portion de la mâchoire & les vaisseaux dentaires: on donne alors à ces dents le nom de dents barrées; tantôt elles se portent en - dehors, quelquefois elles se confondent ensemble, rarement avec leurs voisines.

M. de la Hire le jeune a observé que le corps de la dent est couvert d'une substance particuliere appellée émail, entierement différente de celle du reste de la dent.

Cet émail appellé perioste, coeffe, croûte par quelques autres, est composé d'une infinité de petites fibres qui s'ossifient par leurs racines, à - peu - près comme font les ongles ou les cornes. Voyez Ongle & Corne.

Cette composition se discerne facilement dans une dent cassée, où l'on apperçoit l'origine & la situation des fibres. M. de la Hire est persuadé que l'accroissement de ces fibres se fait à - peu - près comme celui des ongles. Si par quelque accident un petit morceau de cet émail vient à être cassé, ensorte que l'os reste à nud, c'est - à - dire si les racines des fibres sont emportées, l'os se cariera en cet endroit, & on perdra sa dent, n'y ayant aucun os dans le corps qui puisse souffrir l'air. Voyez Os.

Il y a à la vérité des gens, qui à force de se frotter les dents avec des dentifriques, &c. ont l'émail si usé & si endommagé, qu'on voit l'os à travers, sans que néanmoins la dent soit cariée. Mais la faison de cela est que l'os n'est pas entierement nud, & qu'il reste encore une couche mince d'émail qui le conserve; & comme cette couche est assez mince pour être transparente, la couleur jaune de l'os se voit àtravers.

Les dents de la mâchoire supérieure reçoivent des nerfs de la seconde branche de la cinquieme paire; celles de la máchoire inférieure de la troisieme branche de la cinquieme paire. Voyez les articles Nerf & Machoire.

Les arteres viennent des carotides externes, & les veines vont se décharger dans les jugulaires externes. Voyez Carotide & Jugulaire.

Quoique les dents ne soient pas revêtues d'un périoste semblable à celui des autres os, elles ont cependant une membrane qui leur en tient lieu; le périoste qui revêt les os maxillaires s'approche du bord des alvéoles, dans lesquelles il se réflechit & s'unit intimement avec la membrane qui les tapisse en - dedans, à moins que quelques fibres charnues de la gencive ne s'opposent à cette union.

Les dents ne sont point sensibles par elles - mêmes, & elles tiennent des nerfs qui s'y distribuent toute la sensibilité qu'elles paroissent avoil. Voyez Nerf.

Quelquefois une dent se casse, & l'os reste nud, sans que la personne en ressente aucune douleur. La raison de cela est que le trou de la racine de la dent par où entre un petit filet de nerf, qui rend la dent sensible, étant entierement bouché par l'âge ou par quelqu'autre cause, a comprimé le nerf & ôté toute communication entre la dent & l'origine des nerfs, & par conséquent toute senstbilité.

Les anciens, & même Riolan parmi les modernes, ont crû que les dents étoient incombustibles, & qu'elles l'étoient seules entre toutes les parties du corps; c'est pourquoi on les plaçoit avec grand soin dans des urnes parmi les cendres des morts. Mais cette opinion est fausse, car on n'a trouvé que deux dents dans les tombeaux de Westphalie, dont il y en avoit même une à demi - calcinée. On peut d'ailleurs s'assûrer par soi - même de la fausseté de ce sentiment.

Une autre erreur populaire est que les dents croissent toûjours, même dans les vieillards, jusqu'à l'heure de la mort. M. de la Hire observe que l'émail, qui est une substance fort différente de celle des dents, est la seule partie des dents qui croit.

La figure, la disposition & l'arrangement des dents, sont admirables. Les plus antérieures sont foibles, & éloignées du centre de mouvement, comme ne servant qu'à donner la premiere préparation aux alimens; les autres, qui sont faites pour les broyer & les hacher, sont plus grosses & placées plus près du centre de mouvement.

Galien suppose que l'ordre des dents fùt renversé, & que les molaires, par exemple, fussent à la place des incisives; & il demande de quel usage seroient alors les dents, & quelle confusion ne causeroit pas ce simple dérangement. Il conclut de - là que comme nous jugerions qu'un homme auroit de l'intelligence, parce qu'il rangeroit dans un ordre convenable une compagnie de trente deux hommes, ce qui est justement le nombre des dents, nous devons à plus forte raison juger la même chose du créateur, &c. Gal. du usu partium.

La différente figure des dents dans les différens animaux, n'est pas une chose moins remarquable; elles sont toutes exactement proportionnées à la nourriture particuliere & aux besoins des diverses sortes d'animaux: ainsi dans les animaux carnaciers elles sont propres à saisir, à tenir, à déchirer la proie. Dans les animaux qui vivent d'herbages, elles sont propres à ramasser & à briser les végétaux: dans les animaux qui n'ont point de dents, comme les oiseaux, le bec y supplée.

Le défaut de dents pendant un certain tems dans quelques animaux, n'est pas moins digne d'attention; comme, par exemple, que les enfans n'en ayent point, tandis qu'ils ne pourroient s'en servir que pour se blesser eux - mêmes, ou leurs meres; & qu'à l'âge où ils peuvent prendre une nourriture plus substancielle & se passer de la mammelle, & où ils commencent à avoir besoin de dents pour parler, qu'alors justement elles commencent à paroître, & [p. 836] qu'elles croissent à mesure qu'ils en ont plus besoin.

Quelques personnes sont venues au monde avec toutes leurs dents, comme un Marcus Curius Dentatus, un Cnéius Papirius Carbo; ou avec une partie, comme Louis XIV. D'autres n'ont eu qu'une seule dent continue qui occupoit toute la longueur de la mâchoire, comme Pyrrhus roi d'Epire, & Prusias fils du roi de Bithynie: les racines s'étoient apparemment confondues ensemble. M. Laudumiey qui fut envoyé en 1714 à la cour d'Espagne, rapporta de ce pays une dent molaire qu'il avoit arrachée, composée de deux couronnes bien distinctes, dont la racine avoit sept branches. On dit que d'autres ont eu deux ou trois rangs de dents à une seule mâchoire, comme Hercule.

Mentzelius, medecin allemand, assûre avoir vû à Cleves en 1666, un vieillard âgé de cent vingt ans, à qui il étoit venu, deux ans auparavant, des dents doubles qui pousserent avec de grandes douleurs. Il vit aussi à la Haye un Anglois à qui il étoit venu un nouveau rang de dents à l'âge de cent dix - huit ans.

Un medecin danois nommé Hagerup, soûtient dans une these qu'on peut entendre avec les dents. L'habitude qu'ont les sourds d'ouvrir quelquefois la bouche pour entendre, & qui par ce moyen entendent effectivement, peut avoir induit ce medecin en erreur; car ce n'est qu'à la communication que l'oreille interne a avec la bouche par la trompe d'Eustache, que nous devons attribuer cet effet. Voyez Ouie & Oreille.

Quant aux animaux, il y a des poissons qui ont leurs dents à la langue, comme la truite; d'autres les ont au fond du gosier, comme le merlus: d'autres, comme le grand chien de mer, appellé canis carcharias, ont trois, quatre ou cinq rangs de dents à la même mâchoire.

Le requin & le crocodile en ont chacun trois rangs, & toutes incisives. La vipere a deux grosses dents canines qui sont crochues, mobiles, ordinairement couchées à plat, & qui ne se dressent que lorsque l'animal veut mordre, voyez Vipere, &c. La grenouille de mer, ou diable de mer, a aussi toutes ses dents mobiles. Le crapaud & la seche n'ont point de dents, & ne laissent pas de mordre.

Le grand nombre de squeletes de différens animaux, que l'on a amassés par ordre du Roi, & que l'on conserve avec soin dans la salle du jardin royal, ayant donné moyen à M. Duverney de comparer ensemble leurs mâchoires & leurs dents, il a remarqué qu'on peut connoître par la seule inspection de ces parties, de quels alimens chaque animal a coûtume de se nourrir.

Les animaux carnaciers, comme les lions, les tigres, les ours, les loups & les chiens, &c. ont audevant de chaque mâchoire six dents incisives, dont les deux dernieres sont plus longues que les quatre autres qui sont au milieu. Les racines de toutes ces dents sont plates, & le côté extérieur de ces racines est plus épais que l'intérieur, de même qu'à l'homme. Ensuite de ces dents incisives sont deux dents canines fort grosses, de figure ovale, excepté vers la pointe, qui est ronde, courbées en - dedans, & environ trois fois plus longues que les premieres incisives. Les deux canines, dans un vieux lion qu'il a disséqué, avoient plus d'un pouce & demi de longueur. Il y a des espaces vuides dans chaque mâchoire, pour loger les bouts de ces dents. Les côtés des mâchoires sont garnis chacun de quatre molaires plates & tranchantes, qui ont ordinairement trois pointes inégales, lesquelles forment une espece de fleur - de - lys, la pointe du milieu étant un peu plus longue que les deux autres. Les dernieres molaires qui sont tout au fond de la mâchoire, sont les plus longues & les plus grosses, & les autres vont toûjours en diminuant. Les racines de chaque dent molaire sont partagées en deux branches qui s'enchâssent dans deux trous creusés dans l'alvéole, & qui sont séparées par une cloison où il y a de chaque côté une espece de languette qui entre dans une petite rainure creusée dans la partie intérieure de chaque branche, afin de tenir la dent plus fermement enchâssée: ces dents sont emboîtées de maniere qu'elles portent entierement sur la cloison, & que le bout de chaque branche ne presse que très - peu le fond de son alvéole. Les chiens & les loups ont douze molaires à chaque mâchoire. L'ours a cela de particulier, que ses dents molaires sont plates, à - peu - près comme celles des chevaux.

Dans les animaux carnaciers la mâchoire inférieure est plus étroite que la supérieure; de sorte que la mâchoire venant à se fermer, les dents molaires ne se rencontrent point l'une contre l'autre, mais celles de la mâchoire d'en - bas passent par - dessous celles d'en - haut, à la maniere des branches des ciseaux: néanmoins ces deux mâchoires sont d'égale longueur, ainsi les dents incisives se rencontrent l'une contre l'autre, à la maniere des tenailles.

L'articulation de la mâchoire inférieure est favorable à ce mouvement; car étant en forme de charniere, elle ne lui permet qu'un simple mouvement de haut en - bas ou de bas en - haut: la maniere dont les canines ou défenses s'engagent les unes dans les autres, y contribue aussi beaucoup.

Les dents incisives d'en - bas rencontrant celles d'en - haut, à la maniere des tenailles, comme il a été dit, il paroît qu'elles sont faites pour arrêter la proie, pour la couper, & même pour la déchirer; car elles ont quelques pointes inégales, n'étant pas simplement taillées en coin ou en biseau, comme le sont les incisives des autres animaux.

Les canines servent aussi à déchirer, mais leur principal usage est de percer & de retenir; & plus leurs crochets sont longs, plus ils retiennent facilement ce que l'animal arrache.

Les racines de ces dents canines sont très - longues; elles sont courbées en - dedans, de même que la partie extérieure de la dent; & le plus grand diametre du corps de la dent, qui est ovale, comme on a remarqué ci - dessus, suit la longueur de la mâchoire: ce qui fait que les dents résistent davantage en - devant que de côté; c'est aussi en ce sens - là que ces animaux font de plus grands efforts.

Les molaires des animaux carnaciers ne se rencontrent point, comme dans les animaux qui broyent leur nourriture; mais elles agissent en ciseaux, ainsi qu'il a été dit. Les trois pointes dont elles sont armées, font connoître qu'elles ne servent qu'à déchirer & à briser: elles sont égales, afin qu'entrant l'une après l'autre, elles trouvent moins de résistance à la fois, & que par ce moyen elles puissent facilement broyer par parties ce qu'elles auroient de la peine à broyer tout ensemble. Les dernieres dents molaires font les plus grosses & les plus solides, de même qu'à l'homme, parce qu'elles servent à briser les choses les plus dures.

Les dents molaires de l'ours ne sont ni tranchantes ni pointues, mais plates & quarrées, & elles se rencontrent, à la maniere des dents des animaux qui broyent leur nourriture; ce qui fait connoître que les dents molaires de l'ours ne peuvent pas broyer en frottant obliquement l'une contre l'autre, comme font les meules: car l'engagement des défenses & l'articulation de la mâchoire en forme de charniere, ne leur permettent pas d'autre mouvement que celui de haut en - bas; ainsi elles brisent seulement, de la maniere que le pilon écrase dans un mortier.

Les dents incisives & les canines de l'ours, sont

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