ENCYCLOPÉDIE OU DICTIONNAIRE RAISONNÉ
DES SCIENCES, DES ARTS ET DES MÉTIERS

RECHERCHE Accueil Mises en garde Documentation ATILF ARTFL Courriel

Previous page

"837"> ordinairement plus petites que celles du lion; aussi l'ours se sert - il plus de ses pattes que de ses dents, soit pour combattre, soit pour déchirer & rompre les filets & les toiles des chasseurs; parce que ses pattes sont très - larges, & qu'elles sont armées de griffes longues & crochues, & que les muscles qui servent à les mouvoir, sont très - forts; au lieu que ses dents ne sont pas fort longues, comme on l'a déjà fait remarquer, & que la grosseur & l'épaisseur de ses levres l'empêchent de s'en servir aussi commodément que fait le lion.

Dans le lion & dans la plûpart des animaux carnaciers, le sommet de la tête est élevé comme la crête d'un casque; & les os des tempes & les pariétaux sont disposés de maniere qu'il y a vers les tempes un enfoncement très - considérable: cette crête & cet enfoncement servent à aggrandir l'espace où sont logés les muscles des tempes, qui couvrent les deux côtés du sommet de la tête. Il y a un sinus ou enfoncement dans l'os de la mâchoire inférieure, au - dessus de son angle, qui sert encore à aggrandir l'espace où doit être logé le muscle masseter, qui est fort épais.

Les mâchoires de ces animaux sont composées de grands os très - solides, armés de dents grosses & tranchantes, & garnis de muscles très - forts, tant pour leur épaisseur extraordinaire & par leur tissu fort compacte, que parce qu'ils sont très - éloignés du point d'appui; ainsi elles ont tout ce qui est nécessaire pour serrer puissamment la proie, & pour la déchirer.

Les boeufs, les moutons, les chevres, les cerfs, les dains, & tous les autres animaux qui vivent d'herbe, & qui ruminent, n'ont point de dents incisives à la mâchoire supérieure; mais ils ont à la place de ces dents, une espece de bourlet formé de la peau intérieure de la bouche, qui est fort épaisse en cet endroit.

Le devant de leur mâchoire inférieure est garni de huit dents incisives, qui sont de différente longueur, & disposées de maniere que celles du milieu sont les plus longues & les plus larges, & que les autres vont toûjours en diminuant. Ces animaux n'ont point de dents canines ni en - haut ni en - bas; entre les incisives & les molaires, il y a un grand espace vuide qui n'est point garni de dents: ils ont à chaque mâchoire douze dents molaires, savoir six de chaque côté, dont les racines ont pour l'ordinaire trois crocs enchâssés comme ceux des dents molaires du lion. La base de ces dents, qui est a l'endroit par où elles se touchent en mâchant, est rendue inégale par plusieurs éminences pointues, entre lesquelles il y a de petits enfoncemens; de sorte que les dents d'enhaut & celles d'en - bas venant à se rencontrer, les pointes des unes glissent dans les cavités des autres, & permettent le mouvement de la mâchoire de droite à gauche. Ces dents étant coupées obliquement, leur surface en devient plus grande, & par conséquent plus propre à broyer.

La mâchoire inférieure est presque de la moitié moins large que la supérieure; ce qui la rend plus légere, & beaucoup plus propre au mouvement: elle ne laisse pas d'être aussi propre à broyer que si elle étoit plus large, parce que pouvant se mouvoir, elle peut s'appliquer successivement à tous les endroits de la mâchoire supérieure, dont les dents sont plus larges, peut - être afin de suppléer en quelque façon, par leur largeur, au mouvement qu'elle n'a pas. Ces dents paroissent composées de différentes feuilles appliquées les unes aux autres.

A la mâchoire supérieure, la partie extérieure de la dent est moins solide, & plus longue que la partie inférieure de la même dent: à la mâchoire inférieure, au contraire, la partie extérieure de la dent est plus solide & moins longue que sa partie intérieure. Cette disposition étoit nécessaire; car il est évident qu'à la mâchoire inférieure, l'extérieur de la dent s'appuie plus long - tems dans le broyement sur la dent de la mâchoire supérieure, que l'intérieur de la même dent; & qu'au contraire dans la mâchoire supérieure la partie intérieure de la dent soûtient plus long - tems le frottement de la mâchoire inférieure, que l'extérieur de cette même dent. C'est pour cela qu'à la mâchoire supérieure le côté intérieur de la dent est plus court que l'extérieur, quoiqu'il soit plus solide, & qu'à la mâchoire inférieure le côté extérieur de la dent est le plus court & le plus solide.

Le chameau est différent des àutres animaux qui ruminent, en ce qu'il a dix incisives à la mâchoire inférieure, & qu'il a à chaque mâchoire trois canines, qui sont courtes & disposées comme celles des chevaux.

Le bourlet que les animaux qui ruminent ont au lieu de dents à la mâchoire supérieure, est si propre pour aider à couper l'herbe & à l'arracher, que si l'on avoit à choisir de mettre un corps dur à la place, on devroit s'en tenir au bourlet; car il est certain que deux corps durs, quand même ils seroient continus, ne s'appliqueroient jamais si exactement l'un contre l'autre, qu'il n'y eût des intervalles qui laisseroient passer quelques brins d'herbe; & que s'ils étoient divisés comme le sont les dents, il s'en échapperoit davantage. D'ailleurs ces brins d'herbe étant inégaux en grosseur, en dureté, il arriveroit que les plus gros & les plus durs empêcheroient les plus petits d'etre serrés autant qu'il seroit nécessaire pour être arrachés; au lieu que le bourlet s'appliquant à la mâchoe inférieure, remédie à tous les inconvéniens; & qu'enfin il épargne aux dents une partie du coup qu'elles recevroient lorsque les animaux arrachent l'herbe; car la violence du coup est amortie par la mollesse du bourlet.

Ce qui se passe dans l'action des dents, lorsque ces animaux paissent l'herbe, est très - remarquable. Le boeuf jette d'abord sa langue pour embrasser l'herbe, comme le moissonneur fait avec sa main; ensuite il serre cette herbe avec ses dents d'en - bas contre le bourlet. Mais si les dents incisives étoìent également longues, elles ne pourroient pas serrer l'herbe également par - tout; c'est pourquoi elles vont toûjours en diminuant, comme on l'a ci - devant remarqué.

L'herbe étant ainsi serrée contre le bourlet qui sert à ces animaux comme une autre branche de tenailles, ils la coupent & l'arrachent facilement; & le coup de tête qu'ils donnent à droite ou à gauche, y contribue beaucoup. Cette herbe étant ainsi arrachée, les joues se serrent & s'enfoncent dans le vuide qui est entre les incisives & les molaires, pour arrêter ce qui a été arraché, & empêcher qu'il ne retombe. La langue qui s'insinue aussi dans ce vuide, ramasse & pousse l'herbe dans le fond du gosier, où elle ne fait que passer, sans être que fort peu mâchée.

Après que ces animaux ont employé une quantité suffisante de cette nourriture, & qu'ils en ont rempli le premier ventricule appellé la pance, l'animal se met ordinairement sur les genoux pour ruminer avec plus de facilité; & alors l'herbe (qui pendant qu'elle a demeuré dans ce premier ventricule, a été un peu ramollie, tant par la chaleur & par l'humidité de cette partie, que par l'action de la salive dont elle a été moüillée en passant par la bouche), est renvoyée dans la bouche pour être remâchée, & ensuite distribuée aux autres ventricules, dans un état plus propre à y être digérée: ainsi l'animal ayant ramené cette herbe par pelotons dans la bouche, par une méchanique très - ingénieuse qu'<pb-> [p. 838] on expliquera dans la suite, il la mâche une seconde fois, en la faisant passer & repasser sous les dents molaires, dont les bases inégales frottant obliquement les unes contre les autres, la froissent & la broyent jusqu'à ce qu'elle soit assez preparée pour la seconde digestion qu'elle doit recevoir dans trois autres ventricules.

Comme la plûpart des animaux qui ruminent, ne vivent que d'herbe, & que l'herbe qu'ils ont arrachée avec leurs dents incisives, est encore trop longue pour être facilement broyée, la nature leur a donné des dents molaires, qui sont en même - tems propres à couper & à broyer l'herbe.

Les animaux qui vivent d'herbe & qui ne° ruminent point, comme font les chevaux, les ânes & les mulets, ont à chaque mâchoire six dents incisives fort grosses, disposées de maniere qu'elles se rencontrent & se touchent également par leur base; elles ont cela de particulier qu'elles sont très - larges, & qu'elles ont de petites inégalités, ayant dans leur milieu un espace vuide, qui pour l'ordinaire se remplit à mesure que ces animaux vieillissent. Les bords de ce vuide étant un peu élevés, laissent tout - à - l'entour un petit enfoncement, qui est terminé par le bord extérieur de la dent; ils ont deux canines fort courtes qui se jettent en - dehors, & qui laissent entr'elles un peu d'espace, ne s'engageant pas l'une dans l'autre, comme font les canines des animaux carnaciers. Il y a un grand espace vuide entre les incisives & les molaires, de même qu'aux animaux qui ruminent.

Chaque côté des mâchoires est garni de sept molaires, dont les racines sont très - profondes & très grosses. La base de ces dents est plate & quarrée; mais elle est rendue inégale par de légeres éminences & par des cavités peu profondes.

Le cheval ne se sert que de ses levres pour amasser l'herbe, & non pas de sa langue, comme le boeuf; aussi ne la coupe - t - il pas de si près, ni en si grande quantité à chaque fois.

Après qu'il a ramassé l'herbe avec ses levres, il la presse avec les dents incisives, qui sont disposées de maniere qu'elles la serrent également par - tout; & comme leurs bases sont fort larges, & qu'elles ont de petites inégalités, il la retient plus facilement: ensuite il l'arrache en donnant un coup de tête à droite & à gauche, & aussi - tôt il la pousse avec la langue sous les dents molaires, qui se frottant obliquement l'une contre l'autre à droite & à gauche, la froissent & la broyent: il la mâche plus exactement que ne fait le boeuf, & même il la choisit avec plus de soin, parce qu'il ne peut lui donner les préparations que lui donnent les animaux qui ruminent.

Les dents canines du cheval étant fort courtes, & ne se rencontrant point l'une contre l'autre, elles ne sont pas propres pour arracher l'herbe, ni pour leur donner aucune préparation, & elles ne servent au cheval que d'armes pour se défendre.

Dans le cheval & dans les animaux qui ruminent, la figure de la mâchoire inférieure est coudée de sorte qu'elle s'applique également en même tems dans toute sa longueur aux dents molaires de la mâchoire supérieure, afin que les dents puissent broyer à la fois une plus grande quantité de nourriture; car sans cela elles ne pourroient broyer exactement les alimens qu'en un seul point de la mâchoire. Les animaux carnaciers ont au contraire la mâchoire inférieure moins coudée, parce qu'ayant à briser des os, il leur faudroit un bien plus grand effort pour les casser, si leurs dents s'appliquoient en même tems les unes contre les autres, que quand elles s'appliquent successivement.

Les castors, les porcs - épics, les rats, les lievres, les lapins, les écureuils, & tous les autres animaux qui vivent de racines, d'écorces d'arbres, de fruits, & de noyaux, ont deux incisives seulement à chaque mâchoire; elles sont demi - rondes par - dehors, d'un rouge clair, tirant sur le jaune, & fort tranchantes par le bout qui est taillé en biseau par - dedans; leurs racines sont très - longues, principalement dans la mâchoire inférieure. Dans le castor & le porc - épic, leurs racines sont longues de trois pouces, & le corps de la dent n'a que cinq lignes de longueur: elles sont courbées suivant la courbure de la mâchoire, & elles s'étendent dans toute sa longueur.

Ces dents sont situées de maniere que la partie tranchante de celles d'en - bas ne rencontre point la partie tranchante de celles d'en - haut, mais elles passent les unes sur les autres en forme de ciseau, celles d'en - bas coulant sous celles d'en - haut; & afin que les dents de la mâchoire inférieure qui est fort courte, puissent s'enfoncer suffisamment sous celles d'en - haut suivant les différens besoins, les appuis de cette mâchoire ont un mouvement très - libre en devant & en arriere.

Le museau de tous les animaux ressemble à celui des lievres: la levre supérieure étant fendue, celle d'en - bas forme par - dedans un repli qui fait comme un étui qui sert à loger les incisives de la mâchoire inférieure. Ils n'ont point de dents canines; il y a un vuide considérable entre leurs incisives & leurs molaires; ils ont à chaque mâchoire huit molaires, savoir quatre de chaque côté. Dans le porcépic, dans le castor, & dans le cochon d'inde, toutes ces dents sont courtes, leurs bases sont coupées fort également, & elles ne sont pas entierement solides, étant percées fort avant par plusieurs trous de différente figure; dans les écureuils & dans les rats, les dents molaires ont des inégalités qui peuvent leur aider à couper & à broyer.

On remarque que ces animaux coupent avec leurs dents, non pas en les serrant doucement les unes contre les autres, mais en frappant par plusieurs petits coups réitérés & fort fréquens. Comme la force du lievre est fort diminuée vers l'extrémité de la machoire, & que l'effort qui s'y feroit pour serrer seroit très - petit; ces animaux, pour augmenter le mouvement qui est nécessaire pour l'incision, y ajoutent la force de la percussion; ils frappent donc de petits coups de dents ce qu'ils veulent couper: mais comme ces coups agiroient autant contre leurs mâchoires que contre les corps qu'ils ont à couper & à briser, la nature a fait la racine de leurs dents six fois plus longue que leur partie extérieure, & a courbé cette longueur afin que l'effort que la dent soûtient se partageant dans toute cette longue courbure, chaque partie en souffrît moins, & que par conséquent la membrane intérieure s'en trouvât moins ébranlée dans chacune de ses parties. Cette courbure fait aussi qu'une plus grande longueur est enchâssée dans les mâchoires, quoique très - courtes, afin que leurs alvéoles les embrassent & les affermissent dans un plus grand nombre de parties, & non pas comme quelques - uns ont pensé, pour en faire des bras de leviers plus longs, puisque la longueur du levier ne se mesure que par la perpendiculaire qui part du point d'appui.

Ces animaux ont des dents molaires dont ils se servent pour broyer les alimens durs qu'ils ont coupés & rongés; leur maniere de broyer se fait comme dans l'homme, en les frottant à droite & à gauche, en devant & en arriere, parce que l'articulation de la mâchoire permet ces deux especes de mouvemens.

Dans les castors, les porc - épics, & autres animaux semblables, la base de ces dents est comme piquée de plusieurs petits trous qui semblent n'être

Next page


The Project for American and French Research on the Treasury of the French Language (ARTFL) is a cooperative enterprise of Analyse et Traitement Informatique de la Langue Française (ATILF) of the Centre National de la Recherche Scientifique (CNRS), the Division of the Humanities, the Division of the Social Sciences, and Electronic Text Services (ETS) of the University of Chicago.

PhiloLogic Software, Copyright © 2001 The University of Chicago.