ENCYCLOPÉDIE OU DICTIONNAIRE RAISONNÉ
DES SCIENCES, DES ARTS ET DES MÉTIERS

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"374"> para le duché de la couronne, & l'attacha à sa propre personne & à ses héritiers, comme s'il n'avoit pas été roi, mais un simple particulier. Les choses continuerent dans le même état sous les regnes d'Henri V. & d'Henri VI. & même jusqu'à Edouard IV. lequel après avoir recouvré la couronne suivant les droits de la maison d'Yorck, réunit encore le duché de Lancastre à la couronne: il permit néanmoins que la cour & les officiers demeurassent dans l'état où il les trouva. C'est de cette maniere que ce duché vint avec la couronne à Henri VII. lequel, suivant la politique de Henri IV. (par les droits duquel il étoit effectivement parvenu à la royauté) sépara encore ce duché de la couronne, & le laissa ainsi à sa postérité, qui en joüit encore aujourd'hui. (G)

Cour fonciere, (Page 4:374)

Cour fonciere, (Hist. mod.) que les Anglois appellent cour - leet, est une cour qui se tient par le seigneur du manoir, quoiqu'elle soit réellement cour du roi dans tel manoir que ce soit qu'elle se tienne; parce que l'autorité qu'a cette cour appartient originairement à la couronne, & en est émanée aux particuliers qui l'exercent.

Dans cette cour on a droit d'informer & de prendre connoissance de toutes sortes d'offenses, qui ne peuvent pas être qualifiées de crime d'état ou de haute trahison: elle n'a à la vérité le pouvoir d'en punir qu'un petit nombre; il faut qu'elle renvoye les autres au juge de l'assise. Chambers. (G)

COURADOUX (Page 4:374)

COURADOUX, s. m. (Marine.) c'est l'espace qui est entre deux ponts. (Z)

COURAGE (Page 4:374)

COURAGE, s. m. (Morale.) c'est cette qualité, cette vertu mâle qui naît du sentiment de ses propres forces, & qui par caractere ou par réflexion fait braver les dangers & ses suites.

Delà vient qu'on donne au courage les noms de coeur, de valeur, de vaillance, de bravoure, d'intrépidité: car il ne s'agit pas ici d'entrer dans ces distinctions délicates de notre langue, qui semble porter dans l'idée des trois premiers mots plus de rapport à l'action que dans celle des deux derniers, tandis que ceux - ci à leur tour renferment dans leur idée particuliere un certain rapport au danger que les trois premiers n'expriment pas. En général, ces cinq mots sont synonymes & désignent la même chose, seulement avec un peu plus ou un peu moins d'énergie. Voyez Bravoure.

On ne sauroit s'empêcher d'estimer & d'honorer extrèmement le courage, parce qu'il produit au péril de la vie les plus grandes & les plus belles actions des hommes; mais il faut convenir que le courage, pour mériter véritablement l'estime, doit être excité par la raison, par le devoir, & par l'équité. Dans les batailles, la rage, la haine, la vengeance, ou l'intérêt, agitent le coeur du soldat mercenaire; mais la gloire, l'honneur, & la clémence, animent l'officier de mérite. Virgile a bien senti cette différence. Si l'éclat & le brillant font paroître dans son poëme la valeur de Turnus plus ébloüissante que celle d'Enée, les actions prouvent qu'en effet & au fond la valeur d'Enée l'emporte infiniment sur celle de Turnus. Epaminondas n'a pas moins de résolution, de vaillance, & de courage, qu'aucun héros de la Grece & de Rome, « non pas de ce courage (comme dit Montagne) qui est éguisé par ambition; mais de celui que l'esprit, la sapience, & la raison, peuvent planter en une ame bien réglée, il en avoit tout ce qui s'en peut imaginer.»

Cette loüange dont Epaminondas est bien digne, me conduit à la distinction philosophique du courage de caur, si je puis parler ainsi, qu'on nomme communément bravoure, qui est le plus commun; & de cette autre espece de courage qui est plus rare, que l'on appelle courage de l'esprit.

La premiere espece de courage est beaucoup plus dépendante de la complexion du corps, de l'imagination échauffée, des conjonctures, & des alentours. Versez dans l'estomac d'un milicien timide des sucs vigoureux, des liqueurs fortes, alors son ame s'arme de vaillance; & cet homme devenu presque féroce, court gaiement à la mort au bruit des tambours. On est brave à la guerre, parce que le faste, le brillant appareil des armes, le point d'honneur, l'exemple, les spectateurs, la fortune, excitent les esprits que l'on nomme courage. Jettez - moi dans les troupes, dit la Bruyere, en qualité de simple soldat, je suis Thersite; mettez - moi à la tête d'une armée dont j'aye à répondre à toute l'Europe, je suis Achille. Dans la maladie, au contraire, où l'on n'a point de spectateurs, point de fortune, point de distinctions à espérer, point de reproches à appréhender, l'on est craintif & lâche. Où l'on n'envisage rien pour récompense du courage du coeur, quel motif soûtiendroit l'amour propre? Il ne faut donc pas être surpris de voir les héros mourir lâchement au lit, & courageusement dans une action.

Le courage d'esprit, c'est - à - dire cette résolution calme, ferme, inébranlable dans les divers accidens de la vie, est une des qualités des plus rares. Il est très - aisé d'en sentir les raisons. En général tous les hommes ont bien plus de crainte, de pusillanimité dans l'esprit que dans le coeur; & comme le dit Tacite, les esclaves volontaires font plus de tyrans, que les tyrans ne font d'esclaves forcés.

Il me semble, avec un auteur moderne qui a bien développé la différence des deux courages (Considér. sur les moeurs), « que le courage d'esprit consiste à voir les dangers, les périls, les maux, & les malheurs, précisément tels qu'ils sont, & par conséquent les ressources, les voir moindres qu'ils ne sont, c'est manquer de lumieres; les voir plus grands, c'est manquer de coeur: la timidité les exagere, & parlà les fait croître: le courage aveugle les déguise, & ne les assoiblit pas toûjours; l'un & l'autre mettent hors d'état d'en triompher. Le courage d'esprit suppose & exige souvent celui du coeur; le courage du coeur n'a guere d'usage que dans les maux matériels, les dangers physiques, ou ceux qui y sont relatifs. Le courage d'esprit a son application dans les circonstances les plus délicates de la vie. On trouve aisément des hommes qui affrontent les périls les plus évidens; on en trouve rarement qui sans se laisser abattre par un malheur, sachent en tirer le parti qui conviendroit ».

Cependant l'Histoire, & l'on ne doit pas le dissimuler, ne manque pas d'exemples de gens qui ont réuni admirablement en eux le courage de coeur & le courage d'esprit: il ne faut que lire Plutarque parmi les anciens, & de Thou parmi les modernes, pour sentir son ame élevée par des traits & des actions de cette espece, glorieuses à l'humanité. Mais l'exemple le plus fort & le plus frappant qu'il y ait peut - être en ce genre, exemple que tout le monde sait, qu'on cite toûjours, & que j'ose encore transcrire ici, c'est celui d'Arria femme de Cecina Poetus, fait prisonnier par les troupes de l'empereur Claude, après la déroute de Scribonianus dont il avoit embrassé le parti.

Cette femme courageuse ayant inutilement tenté, par les instances les plus vives, les plus séduisantes, & les plus ingénieuses, d'être reçûe dans le navire qui conduisoit son mari prisonnier, loüa, sans s'abandonner au desespoir, un bateau de pêcheur, & suivit Poetus toute seule dans ce petit esquif depuis l'Esclavonie jusqu'à Rome. Quand elle y fut arrivée, & qu'elle ne vit plus d'espérance de sauver les jours de son mari, elle s'apperçut qu'il n'avoit pas le coeur assez ferme pour se donner la mort, à laquelle la cruauté de l'empereur le contraignoit. Dans [p. 375] cette extrémité elle commença, pour tâeher d'y disposer Poetus, d'employer ses conseils & ses exhortations les plus pressantes: alors le voyant ébranlé, elle prit dans sa main le poignard qu'il portoit: Sic Poete, fais ainsi mon cher Poetus; & à l'instant s'étant donné un coup mortel de ce même poignard, elle l'arracha de la plaie, le lui présenta tranquillement, & lui dit en expirant ces trois mots: Poete non dolet; tiens, Poetus, il ne m'a point fait de mal. Proeclarum illud, s'écrie Pline, ferrum stringere, perfodere pectus, extrahere pugionem, porrigere marito, addere vocem immortalem ac poene divinam, Poete non dolet. Pline, ép. xvj. liv. III. Article de M. le Chevalier de Jaucourt.

COURALIN (Page 4:375)

COURALIN, s. m. terme de Pêche usité dans l'amirauté de Bordeaux: c'est une sorte de petite chaloupe dont se servent les Pêcheurs.

COURANT (Page 4:375)

COURANT, s. m. en terme d'Hydrographie, est le nom qu'on donne en général à une certaine quantité d'eau qui se meut suivant une direction quelconque. Voyez Fleuve.

Les courans, par rapport à la navigation, peuvent être définis un mouvement progressif que l'eau de la mer a en différens endroits, soit dans toute sa profondeur, soit à une certaine profondeur seulement, & qui peut accélérer ou retarder la vîtesse du vaisseau, selon que sa direction est la même que celle du vaisseau, ou lui est contraire. Voyez Navigation.

Les courans en mer sont ou naturels & généraux, en tant qu'ils viennent de quelque cause constante & uniforme; ou accidentels & particuliers, en tant qu'ils sont causés par les eaux qui sont chassées vis - à - vis les promontoires, ou poussées dans les golfes & les détroits, dans lesquelles n'ayant pas assez de place pour se répandre, elles sont obligées de reculer, & troublent par ce moyen le flux & reflux de la mer. Voyez Mer, Flux, & Reflux.

Il y a grande apparence qu'il en est des courans comme des vents, qui parmi une infinité de causes accidentelles, ne laissent pas d'en avoir de réglées. L'auteur des réflexions sur la cause généale des vents, imprimées à Paris en 1746, paroîpoité à croire que les courans considérables qu'on observe en pleine mer, peuvent être attribués à l'action du soleil & de la lune: il pretend que si la terre étoit entierement inondée par l'ocean, l'action du soleil & de la lune qui produit les vents d'est réglés de la zone torride, donneroit aux eaux de la mer sous l'équateur une direction constante d'orient en occident, ou d'occident en orient, selon que les eaux seroient plus ou moins profondes; & il ajoùte qu'on pourroit expliquer par le plus ou moins de hauteur des eaux, & par la disposition des côtes, les différens courans réglés & constans que les navigateurs observent, & que les oscillations horisontales de la pleine mer dans le flux & reflux, pourroient être l'effet de plusieurs courans contraires. Voyez sur cela l'histoire naturelle de MM. de Busson & Daubenton, tome I. art. des courans. C'est sur - tout aux inégalités du fond de la mer que M. de Busson attribue les courans. Quelques - uns, selon lui, sont produits par les vents; les autres ont pour cause le flux & le reflux modifié par les inégalités dont il s'agit. Les courans varient à l'infini dans leurs vîtesses & dans leurs directions, dans leur force, leur largeur, leur étendue. Les courans produits par les vents, changent de direction avec les vents, sans changer d'ailleurs d'étendue ni de vîtesse. C'est sur - tout à l'action des courans que M. de Buffon attribue la cause des angles correspondans des montagnes. Voy. Angles correspondans des Montagnes.

Les principaux courans, les plus larges & les plus rapides, sont 1°. un près de la Guinée, depuis le cap - Verd jusqu'à la baie de Fernandopo, d'occident en orient, faisant faire aux vaisseaux cent cinquante lieues en deux jours. 2°. Auprès de Sumatra, du midi vers le nord. 3°. Entre l'ile de Java & la terre de Magellan. 4°. Entre le cap de Bonne - Espérance & l'ile de Madagascar. 5°. Entre la terre de Natal & le même cap. 6°. Sur la côte du Pérou dans la mer du Sud, du midi au nord, &c. 7°. Dans la mer voisine des Maldives, pendant six mois d'orient en occident, & pendant six autres mois en sens contraire. Hist. nat. tome I. p. 454.

Les courans sont si violens sous l'équateur, qu'ils portent les vaisseaux tres - promptement d'Afique en Amérique: mais aussi ils les empêchent absolument de revenir par le même chemin; de sorte que les vaisseaux, pour retourner en Europe, sont forcés d'aller chercher le cinquantieme degré de latitude.

Dans le détroit de Gibraltar, les courans poussent presque toûjours les vaisseaux à l'est, & les jettent dans la Méditerranée: on trouve aussi qu'ils se meuvent suivant la même direction dans d'autres endroits. La grande violence de la mer dans le détroit de Magellan, qui rend ce détroit fort périlleux, est attribuée à deux courans directement contraires, qui viennent l'un de la mer du Nord, & l'autre de celle du Sud. (O)

L'observation & la connoissance des courans est un des points principaux de l'art de naviger: leur direction & leur force doit être soigncusement remarquée. Pour la déterminer, les uns examinent, quand ils sont à la vûe du rivage, les mouvemens de l'eau, & la violence avec laquelle l'écume est chassée: mais suivant Chambers, la méthode la plus simple & la plus ordinaire est celle - ci. D'abord on arrête le navire de son mieux par différens moyens; on laisse aller & venir le vaisseau comme s'il étoit à l'ancre: cela fait, on jette le lock; & à mesure que la ligne du lock file, on examine sa vîtesse & sa direction. Voyez Lock. Par ce moyen on connoit s'il y a des courans ou s'il n'y en a point; & quand il y en a, on détermine leur direction & leur degré de force. Il faut cependant observer qu'on ajoûte quelque chose à la vîtesse du lock pour avoir celle du vaisseau; car quoique le vaisseau paroisse en repos, cependant il est réellement en mouvement. Voici comment se détermine ce qu'on 'doit ajoûter. Si la ligne du lock file jusqu'à soixante brasses, on ajoûte le tiers de sa vîtesse; si elle file à quatre - vingts, le quart; & le cinquieme, si elle file à cent brasses. Si le vaisseau fait voile suivant la direction même du courant, il est évident que la vîtesse du courant doit être ajoûtée à celle du vaisseau; s'il fait voile dans une direction contraire, la vîtesse du courant doit être soustraite de la vîtesse du vaisseau; si la direction du vaisseau traverse celle du courant, le mouvement du vaisseau sera composé de son mouvement primitif & de celui du courant, & sa vîtesse sera augmentée ou retardée, selon l'angle que fera sa direction primitive avec celle du courant; c'est - à - dire que le vaisseau décrira la diagonale formée sur ces deux directions, dans le même tems qu'il auroit décrit l'un des deux côtés, les forces agissant séparément. Voyez Composition de Mouvement. Chambers.

Ce qui rend la détermination des courans si difficile, c'est la difficulté de trouver un point fixe en pleine mer. En effet le vaisseau ne le sauroit être, car il est mû par le courant même, de sorte que la vîtesse du vaisseau se combine avec celle du courant, & est cause qu'on ne sauroit exactement démêler celle - ci. L'académie royale des Sciences a proposé ce sujet pour le prix de l'année 1751; mais en rendant justice au mérite des pieces qui lui ont été envoyées, elle reconnoît que les méthodes proposées par les auteurs laissent encore beaucoup à desirer. Ces pieces

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