ENCYCLOPÉDIE OU DICTIONNAIRE RAISONNÉ
DES SCIENCES, DES ARTS ET DES MÉTIERS

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"330"> cette couleur. Toutes choses égales la couleur sera plus vive, si le milieu le plus dense est environné par le plus rare.

Une plaque, toutes choses égales, réfléchira d'autant plus de lumiere, qu'elle sera plus mince jusqu'à un certain degré, par - delà lequel elle ne réfléchira plus aucune lumiere.

Dans les plaques dont l'épaisseur augmente suivant la progression des nombres naturels 1, 2, 3, 4, 5, 6, 7, &c. si les premieres, c'est - à - dire les plus minces, réfléchissent un rayon de lumiere homogene, la seconde le transmettra; la troisieme le réfléchira de nouveau, & ainsi de suite; ensorte que les plaques de rangs impairs, 1, 3, 5, 7, &c. réfléchiront les mêmes rayons, que ceux que leurs correspondantes en rangs pairs, 2, 4, 6, 8, &c. laisseront passer. De - là une couleur homogene donnée par une plaque, est dite du premier ordre, si la plaque réfléchit tous les rayons de cette couleur. Dans une plaque trois sois plus mince, la couleur est dite du second ordre. Dans une autre d'épaisseur cinq fois moindre, la couleur sera du troisieme ordre, &c.

Une couleur du premier ordre est la plus vive de toutes, & successivement la vivacité de la couleur augmente avec l'ordre de la couleur. Plus l'épaisseur de la plaque est augmentée, plus il y a de couleurs réfléchies & de différens ordres. Dans quelques cas la couleur variera, suivant la position de l'oeil; dans d'autres elle sera permanente.

Cette théorie sur la couleur des lames minces, est ce que M. Newton appelle dans son Optique, la théorie des acces de facile réflexion & de facile transmission; & il faut avoüer que toute ingénieuse qu'elle est, élle n'a pas à beaucoup près tout ce qu'il faut pour convaincre & satisfaire entierement l'esprit. Il faut ici s'en tenir aux simples faits, & attendre pour en connoître ou en chercher les causes, que nous soyons plus instruits sur la nature de la lumiere & des corps, c'est - à - dire attendre fort long - tems, & peut - être toûjours. Quoi qu'il en soit, voici quelques expériences résultantes des faits qui servent de base à cette théorie.

Anncaux colorés des verres. Si on met l'un sur l'autre deux verres objectifs de fort grandes spheres, l'air qui se trouve entre ces deux verres, forme comme un disque mince, dont l'épaisseur n'est pas la même par - tout: or au point de contact l'épaisseur est zéro, & on voit le noir en cet endroit; ensuite on voit autour plusieurs anneaux différemment colorés, & séparés les uns des autres par un anneau blanc. Voici l'ordre des couleurs de ces anneaux, à commencer par la tache noire du centre:

Noir, bleu, blanc, jaune, rouge, Violet, bleu, verd, jaune, rouge, Pourpre, bleu, verd, jaune, rouge, Verd, rouge.

Il y a encore d'autres anneaux, mais ils vont toûjours en s'affoiblissant.

En regardant les verres par - dessous, on verra des couleurs aux endroits où les anneaux paroissoient séparés, & ces couleurs seront dans un autre ordre. Voyez Musschenbroek, E ss. de Phys. §. 1134 & suiv.

On explique par - là les couleurs changeantes qu'on observe aux bulles de savon, selon que l'épaisseur de ces bulles est plus ou moins grande.

Couleurs des corps naturels. Les corps ne paroissent de telle ou telle couleur, qu'autant qu'ils ne réfléchissent que les rayons de cette couleur, ou qu'ils réfléchissent plus de rayons de cette couleur que des autres; ou plûtôt ils paroissent de la couleur qui résulte du mélange des rayons qu'ils réfléchissent. Voyez Corps.

Tous les corps naturels sont composés de petites lames minces, transparentes; & lorsque ces petites lames seront disposées les unes à l'égard des autres, de maniere qu'il n'y aura ni réfraction ni réflexion entre leurs interstices, les corps seront transparens; mais si les interstices qui sont entre ces lames, sont remplis de matiere si hétérogene par rapport à celle des lames elles - mêmes, qu'il se fasse beaucoup de réfractions & de réflexions dans l'intérieur du corps, ce corps sera alors opaque. Voyez Transparence & Opacité.

Les rayons qui ne sont pas réfléchis par un corps opaque, pénetrent an - dedans de ce corps, & y souffrent une quantité innombrable de réfractions & de réflexions, jusqu'à ce qu'enfin ils s'unissent avec les particules de ce corps.

De - là il suit que les corps opaques s'échauffent d'autant moins, qu'ils réfléchissent plus de lumiere: aussi voyons - nous que les corps blancs, qui sont ceux qui réfléchissent le plus de rayons, s'échauffent beaucoup moins que les corps noirs, qui n'en réfléchissent presque point. Voyez Chaleur, Noir.

Pour déterminer la constitution de la surface des corps, d'où dépend leur couleur, il faut considérer que les corpuscules ou premieres parties dont ces surfaces sont composées, sont très - minces & transparentes; de plus, qu'elles sont séparées par un milieu qui differe d'elles en densité. On peut donc regarder la surface de chaque corps coloré, comme un nombre infini de petites lames, dans le cas de celles dont nous venons de parler, & auxquelles on peut appliquer tout ce qu'on a dit à cette occasion.

De - là il suit que la couleur d'un corps dépend de la densité & de l'épaisseur des particules de ce corps, renfermées entre ses pores: que la couleur est d'autant plus vive & plus homogene, que ces parties sont plus minces; & que, toutes choses égales, ces parties doivent être les plus épaisses dans les corps rouges, & les plus minces dans les violets: qu'ordinairement les particules des corps sont plus denses que celles du milieu qui remplit leurs interstices; mais que dans les queues de paons, dans quelques étoffes de soie, & dans tous les corps dont la couleur dépend de la situation de l'oeil, la densité des parties est moindre que celle du milieu; & qu'en général la couleur d'un corps est d'autant moins vive, qu'il est plus rare par rapport au milieu que renferment ses pores.

De plus, ceux des différens corps opaques dont les lamelles sont les plus minces, sont ceux qui paroissent noirs, & les corps blancs sont ceux qui sont composés des lamelles les plus épaisses, ou de lamelles qui different considérablement en épaisseur, & sont par conséquent propres à réfléchir toutes sortes de couleurs. Les corps dont les lamelles seront d'une épaisseur moyenne entre ces premieres, seront ou bleus, ou verds, ou jaunes, ou rouges, suivant celle de ces couleurs qu'ils réfléchiront en plus grande quantité, absorbant les autres, ou les laissant passer.

C'est cette derniere circonstance de renvoyer ou de laisser passer les rayons de telle ou telle couleur, qui fait que certaines liqueurs, telles par exemple que celle de l'infusion de bois néphrétique, paroissent rouges ou jaunes par la réflexion de la lumiere, & qu'elles paroissent bleues lorsqu'on les place entre l'oeil & la lumiere. Il en est de même des feuilles d'or, qui sont jaunes dans le premier cas, & bleues dans le second.

On peut encore ajoûter à cela que le changement de couleur qui arrive à quelques poudres employées par les Peintres, lorsqu'elles sont broyées extrèmement fin, vient sans doute de la diminution sensible des parties de ces corps produite par le broyement, [p. 331] de même que le changement de couleur des lamelles est produit par celui de leur épaisseur.

Enfin ce phénomene si singulier du mêlange des liqueurs d'où résultent différentes couleurs, ne sauroit venir d'une autre cause que des différentes actions des corpuscules salins d'une liqueur, sur les corpuscules qui constituent la couleur d'une autre liqueur: si cos corpuscules s'unissent, leurs masses en seront ou retrécies ou allongées, & leur densité par conséquent en sera altérée; s'ils fermentent, la grandeur des particules sera diminuée, & par conséquent les liqueurs colorées deviendront transparentes; si elles se coagulent, une liqueur opaque sera le résultat de deux couleurs transparentes.

On voit encore aisément par les mêmes principes, pourquoi une liqueur colorée étant versée dans un verre conique placé entre l'oeil & la lumiere, paroît de différentes couleurs dans les différens endroits du verre où l'on la regarde: car suivant que la section du verre sera plus éloignée du bas ou de la pointe, il y aura plus de rayons interceptés; & dans le haut du verre, c'est - à - dire à la base du cone, tous les rayons seront interceptés, & on n'en appercevra aucun que par la réflexion.

M.Newton prétend qu'on peut déduire l'épaisseur des parties composantes des corps naturels de la couleur de ces corps; car les particules des corps doivent donner les mêmes couleurs que les lamelles de même épaisseur, pourvû que la densité soit aussi la même. Toute cette théorie est conjecturale.

Quant aux propriétés particulieres de chaque couleur, voyez Noir, Blanc, Bleu , &c. voyez aussi Arc - en - ciel.

Couleurs qui résultent du mêlange de différentes liqueurs, ou de l'arrangement de différens corps. Lorsqu'on fait infuser pendant un court espace de tems des roses rouges avec de l'eau - de - vie, & qu'on verse sur cette infusion encore blanche quelqu'esprit acide de sel, comme l'esprit de vitriol, de soufre, de sel marin, de nitre, ou de l'eau - forte, mais en si petite quantité qu'on ne puisse même y remarquer l'acide, l'insusion blanche deviendra d'abord d'un beau rouge - couleur - de - rose. Si on verse sur cette teinture rouge quelque sel alkali dissous, comme de la lessive de potasse, ou de l'esprit de sel ammoniac, elle se changera en un beau verd: mais si on verse sur l'infusion de roses du vitriol dissous dans de l'eau, il en naîtra d'abord une teinture noire comme de l'encre. Mussch. ess. de Phys.

Si on fait infuser pendant peu de tems des noix de gale dans l'eau, ensorte que cette infusion demeure blanche, & qu'on y verse du vitriol commun, ou qui ait été calciné au feu jusqu'à ce qu'il soit devenu blanc, ou qu'on l'ait réduit en colcothar rouge; on aura d'abord une teinture noire. Si on verse sur cette teinture quelques gouttes d'huile de vitriol ou d'eau - forte, toute la couleur noire disparoîtra, & la teinture reprendra son premier éclat. Mais si on verse sur cette liqueur quelques gouttes de lessive de potasse, tout ce mêlange deviendra d'abord fort noir; & pour lui faire perdre cette noirceur, il suffira de verser dessus un peu d'esprit acide.

Si on met sur du papier d'un bleu obscur un morceau de papier blanc, qui ait été auparavant légerement frotté d'eau - forte, le bleu deviendra roux, & ensuite pâle. La même chose arrive aussi lorsqu'on a écrit sur du papier bleu avec le phosphore urineux. Si on éclaircit du syrop violat commun avec de l'eau, & qu'on le verse dans deux différens verres, le syrop avec lequel on mêlera une liqueur acide deviendra rouge, & celui auquel on ajoûtera une liqueur alkaline ou du sel, deviendra verd: si on mêle ensuite ensemble ces deux syrops ainsi changés, on aura un syrop bleu, supposé qu'on ait employé autant d'acide que d'alkali: mais si l'alkali domine, tout ce mélange sera verd; & si l'acide s'y trouve en plus grande quantité, le mêlange deviendra rouge. Lorsqu'on verse un peu de lessive de sel de tartre sur du mercure sublimé dissous dans de l'eau, ce mêlange devient rouge, épais, & opaque; mais si on verse sur ce mêlange un peu d'esprit urineux ou de sel ammoniac, il redevient blanc.

Si on dissout aussi un peu de vitriol bleu dans une grande quantité d'eau, ensorte que le tout reste blanc & transparent, & qu'on verse ensuite dans cette liqueur un peu d'esprit de sel ammoniac, on verra paroître, après que ce mêlange aura été fait, une belle couleur bleue; mais si on y verse un peu d'eau - forte, la couleur bleue disparoitra sur le champ, & l'eau deviendra claire & blanche: enfin si l'on y joint encore de nouvel esprit de sel ammoniac, la couleur bleue reparoîtra de nouveau. Lorsqu'on verse une infusion de thé - bou sur de l'or dissous dans de l'esprit - de - vin éthéré, il s'y forme une chaux de couleur pourprée qui se précipite au fond. Lorsqu'on dissout de l'étain dans de l'eau régale, & qu'après avoir éclairci cette solution avec de l'eau on y verse quelques gouttes d'or fondu dans de l'eau régale, on voit paroître une belle couleur de pourpre fort agréable à la vûe. Ceux qui veulent voir un plus grand nombre d'expériences sur le changement des couleurs, doivent consulter la chimie de Boerhaave: on peut aussi en trouver d'autres dans l'ouvrage des philosophes de Florence: enfin on ne fera pas mal de consulter encore sur cette matiere les trans. philosoph. n°. 238. §. vj. Mussch. ibid.

L'infusion de noix de gale versée sur la solution de vitriol, produit un mêlange dont les parties absorbent toute la lumiere qu'elles reçoivent, sans en réfléchir que sort peu ou point du tout; d'où il arrive que cette teinture paroît noire; mais nous ignorons quel est l'arrangement de ces parties: lorsqu'on verse sur cette teinture quelques gouttes d'eau - sorte, elle redevient aussi claire que l'eau, & la couleur noire disparoît; parce que l'eau - forte attire d'abord à elle avec beaucoup de violence le vitriol qui se sépare des noix de gale, lesquelles nagent alors dans leur eau comme elles faisoient auparavant, en lui laissant toute sa clarté & sa transparence. Dès qu'on verse ensuite sur ce mêlange quelques gouttes de lessive de potasse, qui étant un sel alkali agit fortement sur l'acide, elles attirent sur le champ les parties acides de l'eau - sorte, qui de son côté se sépare du vitriol qu'elle avoit attiré; de sorte que le vitriol trouve encore par - là le moyen de se réunir avec les parties des noix de gale, & de produire la même couleur noire qu'auparavant.

Les parties de la surface d'un papier d'un bleuviolet, ont une épaisseur & une grandeur déterminées; mais aussi - tôt que l'eau - forte les rend plus minces, ou qu'elles se séparent un peu des autres parties, il faut qu'elles écartent des rayons de lumiere qui ont une couleur différente de celle des premiers, ce qui fait que la couleur bleue se change en une couleur roussâtre; & comme les particules du papier deviennent chaque jour plus minces, & qu'elles sont comme rongées par l'humidité de l'air qui se joint aux parties de l'eau - forte, il faut qu'elles rompent continuellement d'autres rayons colorés, & par consequent qu'elles fassent paroître le papier d'une autre couleur. Voycz Mussch. ess. de Phys. pag. 556. & suivantes, d'où ceci est extrait.

Couleurs accidentelles, sont des couleurs qui ne paroissent jamais que lorsque l'organe est force, ou qu'il a été trop fortement ébranlé. C'est ainsi que M. de Buffon, dans un mémoire fort curieux imprimé parmi ceux de l'académie des Sciences de 1743, a nommé ces sortes de couleurs, pour les distinguer des

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