ENCYCLOPÉDIE OU DICTIONNAIRE RAISONNÉ
DES SCIENCES, DES ARTS ET DES MÉTIERS

RECHERCHE Accueil Mises en garde Documentation ATILF ARTFL Courriel

Previous page

"328"> aller vers L, & que les autres, à mesure qu'elles ont plus de vîtesse, se détournent moins, & passent plus près de G. Voyez Réfrangibilité.

De plus, les rayons de lumiere qui different le plus en réfrangibilité les uns des autres, sont aussi ceux qui different le plus en couleur; c'est une vérité reconnue par une infinité d'expériences. Les particules les plus réfractées, par exemple, sont celles qui forment les rayons violets, & cela, selon toute apparence, à cause que ces particules ayant le moins de vîtesse, sont aussi celles qui ébranlent le moins la rétine, y excitent les moindres vibrations, & nous affectent par conséquent de la sensation de couleur la moins forte & la moins vive, telle qu'est le violet. Au contraire les particules qui se réfractent le moins, constituent les rayons de la couleur rouge; parce que ces particules ayant le plus de vîtesse, frappent la rétine avec le plus de force, excitent les vibrations les plus sensibles, & nous affectent de la sensation de couleur la plus vive, telle qu'est la couleur rouge. Voyez Rouge.

Les autres particules étant séparées de la même maniere, & agissant suivant leurs vîtesses respectives, produiront par les différentes vibrations qu'elles exciter ont, les différentes sensations des couleurs intermédiaires, ainsi que les particules de l'air excitent suivant leurs différentes vibrations respectives les différentes sensations des sons. Voyez Vibrations.

Il faut ajoûter à cela que non - seulement les couleurs les plus distinctes les unes des autres, telles que le rouge, le jaune, le bleu, doivent leur origine à la différente réfrangibilité des rayons; mais qu'il en est de même des différens degrés & nuances de la même couleur, telles que celles qui sont entre le jaune & le verd, entre le rouge & le jaune, &c.

De plus, les couleurs des rayons ainsi séparés ne peuvent pas être regardées comme de simples modifications accidentelles de ces rayons, mais comme des propriétés qui leur sont nécessairement attachées, & qui consistent, suivant toutes les apparences, dans la vîtesse & la grandeur de leurs parties; elles doivent donc être immuables & inséparables de ces rayons, c'est - à - dire que ces couleurs ne sauroient s'altérer par aucune réfraction ou réflexion.

Or c'est ce que l'expérience confirme d'une maniere sensible; car quelqu'effort qu'on ait fait pour séparer par de nouvelles réfractions un rayon coloré quelconque donné par le prisme, on n'a pas pû y réussir. Il est vrai qu'on fait quelquefois des décompositions apparentes de couleurs, mais ce n'est que des couleurs qu'on a formées en réunissant des rayons de différentes couleurs; & il n'est pas étonnant alors que la réfraction fasse retrouver les rayons qu'on avoit employés pour former cette couleur.

De - là il s'ensuit que toutes les transmutations de couleurs qu'on produit par le mélange de couleurs de différentes especes, ne sont pas réelles, mais de simples apparences, ou des erreurs de la vûe, puisque aussi - tôt qu'on sépare les rayons de ces couleurs, on a les mêmes couleurs qu'auparavant: c'est ainsi que des poudres bleues & des poudres jaunes étant mêlées, paroissent à la vûe simple former du verd; & que sans leur donner aucune altération, on distingue facilement, à l'aide d'un microscope, les parties bleues d'avec les jaunes.

On peut donc dire qu'il y a deux sortes de couleurs; les unes primitives, originaires & simples, produites par la lumiere homogene, ou par les rayons qui ont le même degré de réfrangibilité, & qui sont composés de parties de même vîtesse & massè, telles que le rouge, l'orangé, le jaune, le verd, le bleu, l'indigo, le violet, & leurs nuances; les autres secondaires ou hétérogenes, composées des premieres, ou du mélange des rayons de différente réfrangibilité.

On peut produire par la voie de la composition, des couleurs secondaires, semblables aux couleurs primitives, quant au ton ou à la nuance de la couleur, mais non par rapport a la permanence ou à l'immutabilité. On forme de cette maniere du verd avec du bleu & du jaune, de l'orangé avec du rouge & du jaune, du jaune avec de l'orangé & du verd jaunâtre; & en général avec deux couleurs qui ne sont pas éloignées l'une de l'autre dans la suite des couleurs données par le prisme, on parvient assez facilement à faire les couleurs intermédiaires. Il faut savoir aussi que plus une couleur est composée, moins elle est vive & parfaite; & qu'en la composant de plus en plus, on parvient jusqu'à l'éteindre entierement.

Par le moyen de la composition on peut parvenir aussi à former des couleurs qui ne ressemblent à aucune de celles de la lumiere homogene. Mais l'effet le plus singulier que peut donner la composition des couleurs primitives, c'est de produite le blanc; il se forme en employant à un certain degré des rayons de toutes les couleurs primitives: c'est ce qui fait que la couleur ordinaire de la lumiere est le blanc, à cause qu'elle n'est autre chose que l'assemblage des lumieres de toutes les couleurs mêlées & confondues ensemble. Voyez Blancheur.

La réfraction que donne une seule surface réfringente, produit la séparation de la lumiere en rayons de différentes couleurs; mais cette séparation devient beaucoup plus considérable, & frappe d'une maniere tout - à - fait sensible, lorsqu'on employe la double réfraction causée par les deux surfaces d'un prisme ou d'un morceau de verre quelconque, pourvû que ces deux surfaces ne soient pas paralleles. Comme les expériences que l'on fait avec le prisme, sont la base de toute la théorie des couleurs, nous allons en donner un précis.

1°. Les rayons du soleil traversant un prisme triangulaire, donnent sur la muraille opposée une image de différentes couleurs, dont les principales sont le rouge, le jaune, le verd, le bleu, & le violet. La raison en est que les rayons différemment colorés, sont séparés les uns des autres par la réfraction; car les bleus, par exemple, marqués Pl. d'Opt. fig. 6. par une ligne ponctuée, après s'être séparés des autres en d d, par la premiere réfraction occasionnée par le côté c a du prisme a b c (ou par la premiere surface du globe d'eau a b c, fig. 7.), viennent à s'en écarter encore davantage en e e par la réfraction du même sens, que produit l'autre côté du prisme (ou la seconde surface du globe a b c): il arrive au contraire dans le verre plan a b c f, figure 9. (ou sur le prisme g l o, fig. 8. placé dans une autre situation), que les mêmes rayons bleus qui avoient commencé à se séparer par la premiere surface en dd, deviennent, par une seconde réfraction, paralleles à leur premiere direction, & se remêlent par conséquent avec les autres rayons.

2°. L'image colorée n'est pas ronde, mais oblongue, sa longueur étant environ cinq fois sa largeur, lorsque l'angle du prisme est d'environ 60 ou 65 degrés. La raison en est que cette image est composée de toutes les images particulieres que donne chaque espece différente de rayons, & qui se trouvent placées les unes au - dessus des autres, suivant la force de la réfrangibilité de ces rayons.

3°. Les rayons qui donnent le jaune, sont plus détournés de leur chemin rectiligne que ceux qui donnent le rouge; ceux qui donnent le verd, plus que ceux qui donnent le jaune, & ainsi de suite jusqu'à ceux qui donnent le violet. En conséquence de ce principe, si on fait tourner autour de son axe le prisme sur lequel tombent les rayons du soleil, de [p. 329] maniere que le rouge, le jaune, &c. tombent successivement sur un autre prisme fixe placé à une certaine distance du premier, comme douze piés, par exemple; & que les rayons de ces différentes couleurs ayent auparavant passé l'un après l'autre par une ouverture placée entre les deux prismes; les rayons rompus que donneront ces différens rayons, ne se projetteront pas tous à la même place, mais les uns au - dessus des autres.

Cette expérience simple & néanmoins décisive, est celle par laquelle M. Newton leva toutes les difficultés dans lesquelles les premieres l'avoient jetté, & qui l'a entierement convaincu de - la correspondance qui est entre la couleur & la réfrangibilité des rayons de lumiere.

4°. Les couleurs des rayons séparés par le prisme, ne sauroient changer de nature ni se détruire, quoique ces rayons passent par un milieu éclairé, qu'ils se croisent les uns les autres, qu'ils se trouvent voisins d'une ombre épaisse, qu'ils soient réfléchis, ou rompus d'une maniere quelconque; d'où l'on voit que les couleurs ne sont pas des modifications dûes à la réfraction ou à la réflexion, mais des propriétés immuables & attachées à la nature des rayons.

5°. Si par le moyen d'un verre lenticulaire ou d'un miroir concave on vient à réunir tous les différens rayons colorés que donne le prisme, on forme le blanc; cependant ces mêmes rayons qui, tous rassemblés, ont formé le blanc, donnent après leur réunion, c'est - à - dire au - delà du point où ils se croisent, les mêmes couleurs que celles qu'ils donnoient en sortant du prisme, mais dans un ordre renversé, à cause du croisement des rayons. La raison en est claire; car le rayon étant blanc avant d'être séparé par le moyen du prisme, doit l'être encore par la réunion de ses parties que la réfraction avoit écartées les unes des autres, & cette réunion ne peut en aucune maniere tendre à détruire ou à altérer la nature des rayons.

De même si on mêle dans une certaine proportion de la couleur rouge avec du jaune, du verd, du bleu & du violet, on formera une couleur composée qui sera blanchâtre (c'est - à - dire à - peu - près semblable à celle qu'on forme en mêlant du blanc & du noir) & qui seroit entierement blanche, s'il ne se perdoit & ne s'absorboit pas quelques rayons. On forme encore une couleur approchante du blanc, en teignant un rond de papier de différentes couleurs, & en le faisant tourner assez rapidement pour qu'on ne puisse pas distinguer aucune des couleurs en particulier.

6°. Si on fait tomber fort obliquement les rayons du soleil sur la surface intérieure d'un prisme, les rayons violets se réfléchiront, & les rouges seront transmis: ce qui vient de ce que les rayons qui ont le plus de réfrangibilité, sont ceux qui se réfléchissent le plus facilement.

7°. Si on remplit deux prismes creux, l'un d'une liqueur bleue, l'autre d'une liqueur rouge, & qu'on applique ces deux prismes l'un contre l'autre, ils deviendront opaques, quoique chacun d'eux pris seul, soit transparent, parce que l'un d'eux ne laissant passer que les rayons rouges, & l'autre que les rayons bleus, ils n'en doivent laisser passer aucun lorsqu'on les joint ensemble.

8°. Tous les corps naturels, mais principalement ceux qui sont blancs, étant regardés au - travers d'un prisme, paroïssent comme bordés d'un côté de rouge & de jaune, & de l'autre de bordures bleues & violettes; car ces bordures ne sont autre chose que les extrémités d'autant d'images de l'objet entier, qu'il y a de différentes couleurs dans la lumiere, & qui ne tombent pas toutes dans le même lieu, à cause des différentes réfrangibilités des rayons.

9°. Si deux prismes sont placés de maniere que le rouge de l'un & le violet de l'autre tombent sur un même papier, l'image paroîtra pâle; mais si on la regarde au - travers d'un troisieme prisme, en tenant l'oeil à une distance convenable, elle paroîtra double, l'une rouge, l'autre violette. De même si on mêle deux poudres, dont l'une soit parfaitement rouge, & l'autre parfaitement bleue, & qu'on couvre de ce mélange un corps de peu d'étendue, ce corps regardé au - travers d'un prisme, aura deux images, l'une rouge, l'autre bleue.

10°. Lorsque les rayons qui traversent une lentille convexe, sont reçûs sur un papier avant qu'ils soient réunis au foyer, les bords de la lumiere paroîtront rougeâtres; mais si on reçoit ces rayons après la réunion, les bords paroîtront bleus: car les rayons rouges étant les moins réfractés, doivent être réunis le plus loin, & par conséquent être les plus près du bord, lorsqu'on place le papier avant le foyer; au lieu qu'après le foyer, c'est au contraire les rayons bleus réunis les premiers, qui doivent alors renfermer les autres, & être vers les bords.

L'image colorée du soleil, que Newton appelle le spectre solaire, n'offre à la premiere vûe que cinq couleurs, violet, bleu, verd, jaune & rouge; mais en retrécissant l'image, pour rendre les couleurs plus tranchantes & plus distinctes, on voit très - bien les sept, rouge, orangé, jaune, verd, bleu, indigo, violet. M. de Buffon (mém. acad. 2743) dit même en avoir distingué dix - huit ou vingt; cependant il n'y en a que sept primitives, par la raison qu'en divisant le spectre, suivant la proportion de Newton, en sept espaces, les sept couleurs sont inaltérables par le prisme; & qu'en le divisant en plus de sept, les couleurs voisines sont de la même nature.

L'étendue proportionnelle de ces sept intervalles de couleurs, répond assez juste à l'étendue proportionnelle des sept tons de la Musique: c'est un phénomene singulier; mais il faut bien se garder d'en conclure qu'il y ait aucune analogie entre les sensations des couleurs & celles des tons: car nos sensations n'ont rien de semblable aux objets qui les causent. Voyez Sensation, Ton, Clavecin oculaire , &c.

M. de Buffon, dans le mémoire que nous venons de citer, compte trois manieres dont la nature produit les couleurs; la réfraction, l'inflexion, & la réflexion. Voyez ces mots. Voyez aussi Diffraction.

Couleurs des lames minces. Le phénomene de la séparation des rayons de différentes couleurs que donne la réfraction du prisme & des autres corps d'une certaine épaisseur, peut encore être constaté par le moyen des plaques ou lames minces, transparentes comme les bulles qui s'élevent sur la surface de l'eau de savon; car toutes ces petites lames à un certain degré d'épaisseur transmettent les rayons de toutes les couleurs, sans en réfléchir aucune; mais en augmentant d'épaisseur, elles commencent à réfléchir premierement les rayons bleus, & successivement après, les verds, les jaunes & les rouges tous purs: par de nouvelles augmentations d'épaisseur, elles fournissent encore des rayons bleus, verds, jaunes & rouges, mais un peu plus mêlés les uns avec les autres; & enfin elles viennent à réfléchir tous ces rayons si bien mêlés ensemble, qu'il s'en forme le blanc.

Mais il est à remarquer que dans quelqu'endroit d'une lame mince que se fasse la réflexion d'une couleur, telle que le bleu, par exemple, il se fera au même endroit une transmission de la couleur opposée, qui sera en ce cas ou le rouge ou le jaune.

On trouve par expérience, que la différence de couleur qu'une plaque donne, ne dépend pas du milieu qui l'environne, mais seulement la vivacité de

Next page


The Project for American and French Research on the Treasury of the French Language (ARTFL) is a cooperative enterprise of Analyse et Traitement Informatique de la Langue Française (ATILF) of the Centre National de la Recherche Scientifique (CNRS), the Division of the Humanities, the Division of the Social Sciences, and Electronic Text Services (ETS) of the University of Chicago.

PhiloLogic Software, Copyright © 2001 The University of Chicago.