ENCYCLOPÉDIE OU DICTIONNAIRE RAISONNÉ
DES SCIENCES, DES ARTS ET DES MÉTIERS

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"231"> quatre, & on aura six fils pour chaque toron; ou pour faire une corde de vingt - quatre fils à six torons, il faudra diviser vingt - quatre par six, & on aura quatre fils par toron. Mais on ne pourroit pas faire une corde de vingt - quatre fils à cinq torons, parce qu'on ne peut pas diviser exactement vingt - quatre par cinq; ainsi il faudroit mettre vingt - cinq fils, & on auroit cinq fils par toron.

On met autant de manivelles au quarré & au chantier, qu'on a de torons, & on vire sur ces torons comme sur les trois dont nous avons parlé dans les articles précédens; on les raccourcit d'une même quantité, on les réunit de même du côté du quarré à une seule manivelle: pour les commettre on se sert d'un toupin qui a autant de rainures qu'il y a de torons. Enfin en commettant les torons on les raccourcit autant que quand il n'y en a que trois; ainsi il y a peu de différence entre la façon de fabriquer les aussieres à quatre, cinq ou six torons, & celles à trois.

De la meche. Quand on examine attentivement une aussiere à trois torons, on voit que les torons se sont un peu comprimés aux endroits où ils s'appuient l'un sur l'autre, & qu'il ne reste presque point de vuide dans l'axe de la corde. Si on examine de même une aussiere à quatre torons, on remarque qu'ils se sont moins comprimés, & qu'il reste un vuide dans l'axe de la corde. A l'égard des cordes à six torons, leurs torons sont encore moins comprimés, & le vuide qui reste dans la corde est trésgrand.

Pour rendre sensible la raison de cette différence, onsidérons la coupe de trois torons placés parallelement l'un à côté de l'autre, comme dans la Pl. IV. fig. 1. C'est dans ce cas où il paroît qu'il doit moins rester de vuide entr'eux, parce que quand les torons sont gros, la difficulté qu'il y aura à les plier, augmentera le vuide, & d'autant plus que les révolutions des hélices seront plus approchantes de la perpendiculaire à l'axe de la corde. Nous ferons remarquer en passant, que cette raison devroit faire qu'il y auroit moins de vuide dans les aussieres à quatre & à six torons, que dans celles à trois, puisque les révolutions d'un toron dans celles à trois torons, sont bien plus fréquentes que dans celles à quatre, & dans celles à quatre que dans celles à six, néanmoins il reste plus de vuide dans les aussieres à quatre torons que dans celles à trois, & dans celles à six que dans celles à quatre, & cela pour les raisons suivantes.

Nous considérons l'aire de la coupe de trois torons posés parallelement comme les trois cercles, fig. 1. A B C, qui se touchent par leur circonférence. On appercevra que les cercles qu'on suppose élastiques, s'applattiront aux attouchemens, pour peu qu'ils soient pressés l'un contre l'autre, & que les torons rempliront aisément le vuide qui est entr'eux; car ce vuide étant égal au triangle G H I, moins les trois secteurs g h i, qui valent ensemble un demi-cercle, ne sera que la vingt - huitieme partie de l'aire d'un des torons; ainsi chaque toron n'a à prêter, pour remplir le vuide, que d'une quantité égale à la quatre - vingt - quatrieme partie de son aire; encore cette quatre - vingt - quatrieme partie est - elle partagée en deux, puisque la compression s'exerce sur deux portions différentes de chaque toron. Or les torons peuvent bien se comprimer de cette petite quantité, d'autant qu'à mesure qu'ils se commettent, ils se détordent un peu, ce qui les amollit; & les torons d'un cordage à trois torons faisant plus de révolutions dans des longueurs pareilles, que les torons des aussieres à quatre & à six torons, ils doivent se détordre & mollir davantage, à moins qu'en les commettant on ne fasse tourner les manivelles du chantier beaucoup plus vite que quand on commet des aussieres à quatre, à cinq ou à six torons. Pour appercevoir à la simple inspection que la compression des torons d'une aussiere à trois torons est peu considérable, on peut jetter les yeux sur la figure 2. où l'on verra que les surfaces comprimées des torons font des angles de cent vingt degrés.

Il suit de ce que nous venons de dire, que pour connoître la quantité du vuide qui reste entre les torons de toutes sortes de cordages, il n'y a qu'à chercher le rapport d'une suite de polygones construits sur le diametre d'un des torons; car le rapport des vuides sera celui de ces polygones, diminué successivement d'un demi - toron pour l'aussiere à trois torons, d'un toron pour l'aussiere à quatre, d'un toron & demi pour l'aussiere à cinq, & de deux torons pour l'aussiere à six torons, pourvû que les torons soient d'égale grosseur dans toutes les aussieres. Cela posé, examinons le vuide qui restera entre les torons d'une aussiere à quatre torons. Il est égal à un quarré L M N O, fig. 3. dont le côté est égal au diametre d'un toron, moins quatre secteurs l m n o, égaux ensemble à un toron: or l'aire d'un quarré circonscrit à un toron étant à l'aire de la coupe de ce toron, à - peu - près comme 14 est à 11, l'aire de la coupe d'un toron sera au vuide compris entre les quatre torons, comme 14 moins 11 est à 11, ou comme 3 est à 11, c'est - à - dire que le vuide compris entre les quatre torons, ne sera que les trois onziemes de l'aire du toron. Il suffit donc, pour remplir le vuide, que chacun des quatre torons prête du quart de ces trois onziemes, ou de trois quarantequatriemes, ou d'une quantité à - peu - près égale à la quinzieme partie de son aire. Il faudroit que les torons prissent à - peu - près la forme représentée par la fig. 4. & que les côtés applatis fissent des angles de quatre - vingt - dix degrés; c'est trop: ainsi il restera un vuide dans l'axe de la corde, mais qui ne sera pas assez considérable pour qu'on soit dans la nécessité de le remplir par une meche. Si l'on examine de même la coupe d'une aussiere à six torons, fig. 5. on appercevra que le vuide qui restera entre les torons, sera beaucoup plus grand, puisqu'il égalera à peu de chose près l'aire de la coupe de deux torons, & que chacun des six torons sera obligé de prêter d'un tiers de son aire; ainsi pour que les torons pussent remplir le vuide qu'ils laissent entr'eux, il faudroit qu'ils prissent à - peu - près la forme qui est représentée par la figure 6. & que les côtés applatis formassent des angles de 60 degrés.

On remarque sans doute que nous avons comparé des cordes de grosseur bien différente, puisque nous les avons supposé faites avec des torons de même grosseur, & que les unes sont formées de trois torons, les autres de quatre, les autres de six; & on juge peut - être que nous aurions dû comparer des cordes de même grosseur, mais dont les torons seroient d'autant plus menus, que les cordes seroient composées d'un plus grand nombre de torons, pour dire, par exemple, que le vuide qui est dans une aussiere de quatre pouces de grosseur, est tel, si elle est formée de trois torons, tel, si elle est formée de quatre torons, & tel, si elle est formée de six torons; mais ce problème est résolu par ce qui a précédé: car puisqu'il est établi que l'espace qui reste entre trois torons, est égal à la vingt - huitieme partie de l'aire d'un toron; que celui qui reste entre quatre torons, est égal à trois onziemes de l'aire d'un des torons; & que l'espace qui reste entre six torons, est égal à l'aire de la coupe de deux torons, on pourra, sachant la grosseur des torons, en conclure le vuide qui doit rester entr'eux pour des aussieres de toute grosseur, & composées de trois, quatre ou six torons. Néanmoins il faut convenir que [p. 232] plusieurs causes physiques rendent cet espace vuide plus ou moins considérable. Entre les cordages de même grosseur, ceux à trois torons sont commis plus ferré que ceux à quatre, & ceux - ci plus que ceux à six; ce qui peut faire que les torons seront plus comprimés dans un cas que dans un autre; & le vuide de l'axe peut encore être changé par la direction des torons, qui dans les cordages à trois est plus approchante de la perpendiculaire à l'axe de la corde, que dans ceux à quatre, & dans ceux - ci que dans ceux à six. Mais une plus grande exactitude seroit superflue. Il suffit de savoir qu'il reste un vuide au centre des cordages, & de connoître à - peu - près de combien il est plus grand dans les cordages à six torons que dans ceux à quatre, & dans ceux - ci que dans ceux à trois, pour comprendre que ce vuide les rend difficiles à commettre, & souvent défectueux, surtout quand les aussieres sont grosses, à cause de la roideur des torons, qui obéissent plus difficilement aux manoeuvres du cordier. Il est aisé d'en appercevoir la raison, car puisqu'il y a un vuide à l'axe du cordage, les torons ne se roulent autour de rien qui les soûtienne; ils ne peuvent donc prendre un arrangement uniforme autour de cet axe vuide, qu'à la faveur d'une pression latérale qu'ils exercent les uns à l'égard des autres: or pour que cet arrangement régulier se conserve, il faut qu'il y ait un parfait équilibre entre les torons, qu'ils soient bien de la même grosseur, dans une tension pareille, également tortillés, sans quoi il y auroit immanquablement quelque toron qui s'approcheroit plus de l'axe de la corde que les autres; quelquefois même, surtout dans les cordes à cinq & six torons, un d'eux se logeroit au centre de la corde, & alors les autres se rouleroient sur lui: en ce cas ce toron ne feroit que se tordre sur lui - même, pendant que les autres formeroient autour de lui des hélices qui l'envelopperoient. Une corde de cette espece à cinq ou six torons seroit très - mauvaise, puisque quand elle viendroit à être chargée, le toron de l'axe porteroit d'abord tout le poids, qui le feroit rompre; & alors l'aussiere n'étant plus composée que des quatre ou cinq torons restans, auroit perdu le cinquieme ou le sixieme de sa force, encore les torons restans seroient - ils mal disposés les uns à l'égard des autres, & le plus souvent hors d'état de faire force tous à la fois. C'est pour éviter ces défauts que la plûpart des cordiers remplissent le vuide qui reste entre les torons avec un nombre de fils qui leur servent de point d'appui, & sur lesquels les torons se roulent: ces fils s'appellent l'ame ou la meche de la corde. Voici les precautions que l'on prend pour la bien placer.

Grosseur des meches. On ne met point, & on ne doit point mettre de meche dans les cordages à trois torons, la compression des torons remplissant presque tout le vuide qui seroit dans l'axe. On n'est pas dans l'usage de faire de grosses cordes avec plus de quatre torons, & quelques cordiers ne mettent point non plus de meche dans ces sortes de cordages. Le vuide qui reste dans l'axe n'étant pas à beaucoup près assez considérable pour recevoir un des quatre torons, un habile cordier peut, en y donnant le soin nécessaire, commettre très - bien & sans défaut quatre torons sans remplir le vuide; néanmoins la plûpart des cordiers, soit qu'ils se méfient de leur adresse, soit pour s'épargner des soins & de l'attention, pretendent qu'on ne peut pas se passer de meche pour ces sortes de cordages; & ceux qui sont de ce sentiment, sont partagés sur la grosseur qu'il faut donner aux meches: les uns les font fort grosses, d'autres les tiennent plus menues, chacun se fondant sur des tables qu'ils ont héritées de leurs maîtres, & auxquelles ils ont donné leur confiance. Nous avons entre les mains quelques - unes de ces tables de la plus haute réputation, qui néanmoins ne sont construites sur aucun principe, & qui sont visiblemens défectueuses. Cependant il nous a paru qu'il étoit bien - aisé de fixer quelle grosseur il faut donner aux meches; car le seul objet qu'on se propose étant de remplir le vuide qui reste dans l'intérieur, pour donner aux torons un point d'appui qui empêche qu'ils n'approchent plus les uns que les autres de l'axe de la corde, il suffit de connoître la proportion du vuide avec les torons, eu égard à leur grosseur & à leur nombre: car il faut augmenter la grosseur des meches proportionnellement à l'augmentation de grosseur des torons, & proportionnellement à celle de leur nombre, évitant toûjours de faire des meches trop grosses, 1°. pour ne point faire une consommation inutile de matiere, 2°. pour ne point augmenter le poids & la grosseur des cordages par une matiere qui est inutile à leur force, 3°. parce que des meches trop grosses seroient extrèmement serrées par les torons, & nous ferons voir dans la suite que c'est un défaut qu'il faut éviter le plus qu'il est possible.

Pour remplir ces différentes vûes, connoissant par ce qui a été dit dans l'article précedent, que pour remplir exactement tout le vuide qui est au centre des quatre torons, il faut les trois onziemes d'un toron, on croiroit qu'il n'y a qu'à se conformer à cette regle pour a voir une meche bien proportionnée; mais ayant remarqué que les torons se compriment non - seulement aux parties par lesquelles ils se touchent, mais encore à celles qui s'appuient sur la meche, nous avons jugé qu'il suffiroit de faire les meches de la grosseur d'un cercle inscrit entre les quatre torons, tel que le cercle A, fig. 7. la compression des torons & celle de la meche étant plus que suffisantes pour remplir les petits espaces représentés par les triangles curvilignes a a a a, c'est - à - dire que la meche ne doit être que la sixieme partie d'un des torons, parce que le rapport du cercle A au cercle B est comme 1 à 6. Suivant cette regle, dont l'exactitude est fondée sur beaucoup d'expériences, on a tout d'un coup la grosseur des meches pour des cordages à torons de toutes sortes de grosseurs: il faut donner un exemple de son application.

Si on veut commettre une aussiere à quatre torons de onze pouces de grosseur, sachant qu'en employant des fils ordinaires, il en faut cinq cent quatre - vingt, non compris les fils de la meche, on divise cinq cens quatre - vingt par quatre, & on a cent quarante - cinq fils pour chaque toron. On divise ensuite ce nombre de fils par six, & le quotient indique que vingt - quatre à vingt - cinq fils suffisent pour faire la meche de ce cordage, supposé toutefois qu'on veuille mettre une meche dans ces cordages; car il est à propos de s'en passer. A l'égard des cordages à six torons, pour peu qu'ils soient gros, il n'est pas possible de les commettre sans le secours d'une meche; mais quoique le vuide de l'axe soit à - peu - près égal à l'aire de deux torons, on sait par bien des épreuves qu'il suffit de faire la meche égale à un cercle inscrit entre les six torons, ou, ce qui est la même chose, égal à un des torons, fig. 8.

Maniere de placer les meches. Il ne suffit pas de savoir de quelle grosseur doivent être les meches, il faut les placer le plus avantageusement qu'il est possible dans l'axe des cordages; pour cela on fait ordinairement passer cette meche dans un trou de tarriere qui traverse l'axe du toupin, & on l'arrête seulement par un de ses bouts à l'extrémité de la grande manivelle du quarré, de façon qu'elle soit placée entre les quatre torons qui doivent l'envelopper. Moyennant cette précaution, la meche se présente toûjours au milieu des quatre torons, elle se place

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