ENCYCLOPÉDIE OU DICTIONNAIRE RAISONNÉ
DES SCIENCES, DES ARTS ET DES MÉTIERS

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"229"> le triangle B D E, le côté B E est moindre que la somme des deux autres B D + D E: or le côté B E exprime le degré de force des deux cordons réunis & tortillés pour former une corde, les côtés B D & D E expriment le degré de force avec lequel chacun des deux cordons est capable de résister à l'effort d'un poids.

Autre démonstration. La direction des torons dans une corde composée de deux, peut être considérée comme deux torons séparés l'un de l'autre, & auxquels on donneroit la même direction que les torons ont dans la corde commise; ainsi les deux torons P A, P C, 15, feront un angle d'autant plus ouvert, que la corde sera plus commise; A P C, par exemple, si elle l'est au tiers; I P L, si elle l'est au quart; M P N, si elle l'est au cinquieme. Supposons maintenant, 16, que deux différentes personnes soûtiennent le poids H à l'aide des deux torons P C, P A, lequel soit capable de rompre chaque toron: l'effort composé qui résultera des deux forces particulieres P C, P A, sera représenté par P E, 17, qui est la diagonale du losange P A, E C; cet effort composé marque tout le poids que peut soûtenir la corde, & cependant les deux efforts particuliers représentés par P C, P A, sont ensemble plus grands que l'effort composé représenté par P E; c'est néanmoins cet effort particulier que les cordons ont à supporter. Il y a donc une partie de l'effort des cordons qui est en pure perte pour soulever le poids; c'est ce qui devient sensible par l'inspection de la fig. 18. car on apperçoit aisément que si la corde étoit plus tortillée, ou, ce qui est la même chose, si les torons P C, P A, 18, apprchoient plus de la perpendiculaire à H E, leur direction étant changée, ils produiroient encore moins d'effet pour soûlever le poids H: chaque toron à la vérité aura la même force particuliere, puisque les lignes P C, P A, n'auront point changé de longueur; mais comme les forces particulieres seront encore plus contraires dans leur direction, & comme elles 'accorderont moins à agir suivant la verticale pour soûlever le poids H, ou suivant la direction de la corde H P, leur effort commun sera encore plus petit, parce qu'il y aura plus de force employée suivant une direction latérale, & par conséquent de perdue pour soûlever le poids H. Enfin si la direction des cordons P C, P A, 19, étoit perpendiculaire à H E, l'effort composé seroit anéanti, & les forces P C, P A, ne tendroient nullement à soûlever le poids H. Il est évident que le contraire arriveroit si la corde étoit très - peu commise; car alors les cordons P C, P A, 20, approchant de la direction P H, l'effort composé P E deviendroit plus considérable, & les forces agiroient plus de concert pour soûlever le fardeau H. Ces cordons P C, P H, pourroient même être tellement rapprochés l'un de l'autre, que la diagonale P E qui exprime l'effort composé seroit presqu'aussi longue que les lignes P C, P A, qui expriment les forces particulieres. Donc deux cordes réunies & tortillées pour n'en faire qu'une, sont moins d'effort pour résister à un poids, que ne feroient ces deux cordes si elles agissoient séparément selon leur direction: c'est - à - dire que par le tortillement qui a assemblé ces deux cordes, chacune d'elles a perdu une partie du degré de force qu'elle avoit auparavant pour résister à l'effort d'un poids; & par conséquent qu'elles sont moins en état de résister à cet effort, que si elles étoient tirées par un poids égal selon leur longueur; ce qu'il falloit démontrer.

C'est d'après les même principes que l'auteur que nous analysons conclut, qu'il y auroit pareillement de l'avantage à ne raccourcir qu'au quart ou qu'au cinquieme, au lieu de suivre l'usage, qui est de raccourcir au tiers. C'est la certitude que le tortille<cb-> ment affoiblit les cordes, qui détermina M. de Musschembroeck à chercher le moyen d'en faire sans cette condition. Voyez dans M. Duhamel l'examen de ses tentatives. Lorsqu'il arrive au toupin d'être rendu auprès de l'attelier avant que le quarré soit au tiers accordé par le cordier pour le raccourcissement des fils, ses cordages sont dits par le cordier commis au tiers moû; & ceux en qui cela n'arrive pas, sont dits commis au tiers ferme. L'expérience a fait voir que les premiers étoient les plus forts. Le tortillement diminue donc toûjours la force des cordes; mais on ne peut s'en passer: il faut nécessairement tordre les torons, & avant que de les commettre, & pendant qu'on les commet. Supposons qu'on veuille faire une piece de cordage commise, suivant l'usage ordinaire, au tiers, on ourdira les fils à 180 brasses, pour avoir un cordage de 120 de longueur; ainsi les fils auront à se raccourcir de 60 brasses par le raccourcissement des torons qu'on tord, soit avant de les commettre, soit pendant qu'on les commet. Nous avons dit que quelques cordiers divisoient en deux le raccourcissement total, & en employoient la moitié pour le raccourcissement des torons avant que d'être commis, & l'autre lorsqu'on les commet: ainsi, suivant cette pratique, on raccourciroit les torons de 30 brasses avant que de mettre le toupin, & des 30 autres brasses pendant que le toupin parcourroit la longueur de la corderie. Nous avons aussi remarqué que tous les Cordiers ne suivoient pas exactement cette pratique, & qu'il y en avoit qui raccourcissoient leurs torons, avant que de les commettre, de 40 brasses, & seulement de 20 brasses pendant l'opération du commettage: c'est assez l'usage de la corderie de Rochefort. On pourroit penser que cette derniere pratique auroit des avantages; car en tordant beaucoup les torons avant que de les commettre, on augmente l'élasticité des fils, ce qui fait que quand la corde sera commise elle doit moins perdre sa ferme, & rester mieux tortillée: quand on la commettra, le toupin en courra mieux, les hélices que forment les torons seront plus allongées, & le tortiliement se distribuera plus également sur toute la piece. Ceux qui donnent moins de tortillement aux torons, pourroient aussi appuyer leur pratique sur des raisons assez fortes: ils pourroient dire qu'ils fatiguent moins les fils, & qu'ils évitent de donner trop d'élasticité aux torons: mais l'expérience est contre eux; elle démontre qu'on augmente la force des cordes en diminuant le tortillement des torons avant l'application du toupin. Ainsi un cordier qui obstinément voudroit commettre ses manoeuvres au tiers, feroit donc de meilleures cordes s'il ne donnoit que trois neuviemes de tortillement à ses torons avant de mettre le toupin, & que six neuviemes après qu'il l'a mis, ou quand il commet sa corde, que s'il donnoit pour le raccourcissement de la premiere opération six neuviemes, & en commettant seulement trois neuviemes; parce que, sans s'en appercevoir, il commettroit sa corde beaucoup plus lâche que le tiers. Cela seroit à merveille pour les cordages commis au tiers, mais nous croyons qu'il en seroit autrement pour un cordage commis au quart ou au cinquieme, c'est ce qu'il faut expliquer. Si l'on ourdit une piece de cordage qui doit avoir 120 brasses de longueur, & que l'intention soit de la commettre au tiers, on donne aux fils 180 brasses de longueur; & pour faire ce cordage comme l'aussiere E de la premiere expérience, on raccourcit les torons, avant de mettre le toupin, des deux tiers du raccourcissement total, c'est - à - dire de 20 brasses, & ils acquierent assez de force élastique par ce tortillement pour se bien commettre; il reste 40 brasses pour commettre la corde, & c'est beaucoup plus qu'il ne faut pour consommer la force élastique des [p. 230] torons. Mais si au lieu de se proposer de commettre une piece autiers, on la vouloit commettre au quart, on n'ourdiroit pas les fils à 180 brasses, mais seulement à 150; & au lieu d'avoir 60 brasses pour le raccourcissement, on n'en auroit que 30: maintenant si on vouloit n'employer pour ce cordage, comme pour le précédent, qu'un tiers du raccourcissement total pour tordre les torons avant que de mettre le toupin, on ne devroit dans cette premiere opération raccourcir les torons que de dix brasses au lieu de vingt; & alors les torons auroient acquis si peu de force élastique, que quand on viendroit à ôter la piece de dessus le chantier, les vingt brasses de tortillement qu'on auroit données en commettant se perdroient presqu'entierement; & la corde étant rendue à elle - même, au lieu d'être commise au quart, ne le seroit peut - être pas au cinquieme: au contraire sion avoit raccourci les torons, dans la 1re opération, de la moitié du raccourcissement total, c'est - à - dire de 15 brasses, les torons ayant acquis plus de force élastique, la corde se détortilleroit moins quand elle seroit rendue à elle - même, & elle resteroit commise au quart. Il faut donc mettre d'autant plus de tortillement sur les torons avant de mettre le toupin, qu'on commet la corde plus lâche: ainsi pour commettre au cinquieme une corde pareille, le raccourcissement total étant de 24 brasses, il en faudroit employer plus de 12 pour le raccourcissement de la premiere opération, si l'on vouloit avoir une corde qui ne perdît pas tout son tortillement.

Noms & usages de différens cordages. 1°. Des lignes. On distingue de quatre sortes de lignes; savoir, 1°. les lignes à tambour; 2°. les lignes de sonde ou à sonder; 3°. les lignes de loc; 4°. les lignes d'amarrage. Les lignes à tambour sont ordinairement faites avec six fils fins & de bon chanvre, qu'on commet au roüet & qu'on ne goudronne point. Il n'est pas besoin de dire que leur usage est de rendre la peau sonore des caisses ou des tambours. Les lignes à sonder ont ordinairement un pouce & demi de grosseur, & 120 brasses de longueur. Les lignes de loc sont faites avec six fils, un peu plus gros que le fil de voile: on ne les goudronne point, afin qu'elles soient plus souples, & qu'elles filent plus aisément quand on jette le loc. Les deux dernieres especes de lignes sont à l'usage des pilotes. Les lignes d'amarrage sont, de même que les trois précédentes, de premier brin; mais comme elles servent à beaucoup d'usages différens, savoir, aux étropes des poulies, aux ligatures, aux haubans, aux étais, &c. il en faut de différente grosseur; c'est pourquoi on en fait à six fils & à neuf. On les commet toutes en blanc, mais on en trempe une partie dans le goudron, & l'autre se conserve en blanc, suivant l'usage qu'on en veut faire.

2°. Des quaranteniers. Il y a des quaranteniers de six & de neuf fils, qui ne different des lignes d'amarrage que parce qu'ils sont du second brin: car tous les quaranteniers sont de ce brin; mais il y en a qui ont 18 fils, & même davantage. On les commet tout goudronnés: ils n'ont point d'usage déterminé; on les employe par - tout où l'on a besoin de cordage de leur grosseur & qualité. On distingue les pieces par leur longueur en quaranteniers simples qui ont 40 brasses, & quaranteniers doubles qui en ont 80; & on distingue leur grosseur, en disant un quarantenier de six, de neuf, de quinze fils, &c.

3°. Des ralingues. Les ralingues sont destinées à border les voiles, où elles tiennent lieu d'un fort ourlet, pour empêcher qu'elles ne se déchirent par les bords. Il y a des corderies où l'on commet toutes les pieces de ralingues de 80 brasses de longueur, & dans d'autres on en commet depuis 35 jusqu'à 100, & on leur donne depuis un pouce jusqu'à six de grosseur, diminuant toûjours par quart de pouce. On les fait avec du fil goudronné, premier brin, & on les commet un peu moins serré que les autres cordages, afin qu'étant plus souples, elles obéissent aisément aux plis de la voile. Suivant l'usage ordinaire, on ourdit les fils à un quart plus que la longueur de la piece, plus encore un cinquieme de ce quart: ainsi pour 80 brasses, il faut ourdir les fils à 104 brasses: en virant sur les torons, on raccourcit d'un cinquieme ou de 20 brasses; & en commettant, on réduit la piece à 80 brasses. Nous croyons qu'il les faut commettre au quart. Si donc l'on veut avoir une ralingue de 80 brasses, nous l'ourdirons à 100 brasses; & comme il est important que les hélices soient très - allongées, afin que le toupin aille fort vîte, nous raccourcirons les torons de 15 brasses, & le reste du raccourcissement sera pour commettre. Si par hasard on employe une piece de ralingue à quelque manoeuvre, il n'y a point de matelot qui ne sache qu'elle résiste beaucoup plus qu'une autre manoeuvre de même grosseur avant que de rompre. N'est - il pas surprenant après cela qu'on se soit obstiné si long - tems à affoiblir les cordages à force de les tortiller?

4°. Cordages qui servent aux carenes du port. Les cordages qui servent aux carenes du port, pourroient être simplement nommés du nom générique d'aussiere, qu'on distingueroit par leur grosseur en aussiere de deux ou trois pouces, &c. néanmoins on leur a donné des noms particuliers; les uns se nomment des francs funins, les autres des prodes, des aiguillettes, des pieces de palans, &c. On commet toûjours ces différens cordages en pieces de cent vingt brasses, & on s'assujettit aux grosseurs que fournit le maître d'équipage. Néanmoins les francs funins ont ordinairement six pouces de grosseur, les prodes & les aiguillettes cinq, & les pieces de palans deux pouces & demi jusqu'à trois & demi; ce qui souffrira beaucoup d'exceptions: car ordinairement les francs funins qu'on destine pour les grandes machines à mâter, ont cent trente brasses de longueur. Pour que ces manoeuvres roulent mieux dans les poulies, on ne les goudronne point, ce qui n'est sujet à aucun inconvénient, puisqu'on peut ne les pas laisser exposées à la pluie; & comme elles doivent souffrir de grands efforts, on les fait toutes de premier brin. Il y a des ports où on fait les francs funins moitié fil blanc & moitié fil goudronné: cette méthode est très - mauvaise.

Pieces servant aux manoeuvres des vaisseaux. Outre les différens cordages que nous venons de nommer, on commet dans les corderies des pieces qui n'ont point une destination fixe, qui servent tantôt à une manoeuvre & tantôt à une autre, selon le rang des vaisseaux. Elles ont toutes 120 brasses de longueur, elles sont toutes faites avec du sil goudronné, & on ne les distingue que par leur grosseur: on en fait depuis dix pouces jusqu'à deux. Il y a des maîtres d'équipage qui font un grand usage des aussieres à trois torons. Ceux - là demandent des pieces de haubans, des tournevires, des itagues, des drisses, des guinderesses, des écoutes de hune, &c. pour lors on s'assujettit aux proportions qu'ils donnent, & suivant les méthodes que nous avons indiquées.

Des aussieres à quatre, cinq & six torons. On our dit ces sortes de cordages comme ceux qui n'ont que trois torons. Quand les fils sont étendus, on les divise en quatre, en cinq ou en six faisceaux; ainsi pour faire une aussiere à trois torons, comme il a fallu que le nombre des fils pût être divisé par trois, une corde, par exemple, de vingt - quatre fils pouvant être divisée par trois, on a mis huit fils à chaque toron; de même pour faire une corde de vingt - quatre fils à quatre torons, il faut diviser les fils par

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