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Des commetteurs. Il s'agit maintenant de mettre le fil en cordages.
Il y a deux especes de cordages: les uns simples,
ou dont par une seule opération on convertit les fils
en corde; on les appelle des aussieres: les autres
qu'on peut regarder comme des cordages composés
de cordages simples ou d'aussieres commises les uns
avec les autres, c'est - à - dire réunies par le tortillement;
on les appelle des grelins. Ces deux especes
de cordages se subdivisent en un nombre d'autres
qui ne different que par leur grosseur, & par l'usage
qu'on en fait pour la garniture des vaisseaux. Voyez
Du bitord. Quand un cordier veut unir ensemble deux fils pour en faire du bitord, il se sert du roüet des fileurs, ou bien d'un roüet de fer dont voici la description.
Du roüet. Ce roüet a,
Le cordier b prend d'abord un sil qu'il attache par un de ses bouts à un des crochets du roüet; ensuite il l'étend, le bande un peu, & va l'attacher à un pieu qui est placé à une distance proportionnée à la longueur qu'il veut donner à sa corde, & ce fil est destiné à faire un des deux cordons. Cela fait, il revient attacher un autre fil à un crochet opposé à celui où il a attaché le premier: il le tend aussi, il va l'arrêter de même au pieu dont nous venons de parler, & ce fil doit faire le second cordon: de sorte que ces deux fils doivent être de même longueur, de même grosseur, & avoir une égale tension. C'estlà ce qu'on appelle étendre les fils ou les vettes, ou bien ourdir une corde. Cette opération étant faite, la corde étant ourdie, le cordier prend les deux fils qu'il a attachés au pieu, & les unit ensemble, soit par un noeud ou autrement; de sorte que ces deux fils ainsi réunis, n'en forment, pour ainsi dire, qu'un: car ils font précisément le même effet qu'un seul fil qui seroit retenu dans le milieu par le pieu, & dont les deux bouts seroient attachés aux deux crochets du roüet. La plûpart des cordiers suivent cette pratique, c'est - à - dire que le second fil n'est que le prolongé du premier; ce qui est préférable, parce que les deux fils sont alors nécessairement tendus également, aussi longs & aussi forts l'un que l'autre, toutes conditions essentielles pour qu'une corde soit bien ourdie. Au reste, que les fils soient assemblés
Ce contrepoids sert à tenir également tendus les deux fils ourdis; & comme le tortillement qu'ils doivent souffrir les raccourcit, il faut que le contrepoids qui les tend, puisse monter à proportion le long de la fourche.
Lorsque tout est ainsi disposé, le cordier prend un instiument qu'on appelle le cabre, le masson, le cochoir, le toupin, le sabot, ou le gabieu.
Du toupin. Cet instrument est un morceau de bois tourné en forme de cone tronqué, dont la grosscur est proportionnée à celle de la corde qu'on veut faire; il doit avoir dans sa longueur, & à une égale distance, autant de rainures ou gougeures que la corde a de cordons: ainsi dans cette opération, où il n'est question que d'une corde à deux cordons, le cordier se sert d'un toupin qui n'a que deux rainures diamétralement opposées l'une à l'autre, tel qu'on le voit en c. Ces rainures doivent être arrondies par le fond, & assez profondes pour que les fils y entrent de plus de la moitié de leur diametre. Le cordier place le toupin entre les deux fils qu'il a étendus, en sorte que chacune de ses rainures reçoive un des fils, & que la pointe du toupin touche au crochet de l'émerilion.
Pendant qu'il tient le toupin dans cette situation, il ordonne qu'on tourne la roüe du roüet pour tordre les fils. Chacun des deux fils se tord en particulier; & comme ils sont parfaitement égaux en grosseur, en longueur, & par la matiere qui est également flexible, ils se tordent également; mais à mesure qu'ils se tordent, ils se raccourcissent, & le poids qui pend le long de la fourche, remonte d'autant. Quand le maître cordier juge qu'ils sont assez tords, il éloigne le toupin de l'émerillon, & le fait glisser entre les fils jusqu'auprès du roüet, sans discontinuer de faire tourner la roüe; moyennant quoi les deux fils se rassemblent en se roulant l'un sur l'autre, & font une corde dont on peut se servir, sans craindre qu'elle se détorde par son élasticité: c'est ce que les cordiers appellent commettre une corde. Mais il faut observer que pendant cette seconde opération, c'est - à - dire pendant que la corde se commet, elle continue de se raccourcir, & le poids remonte encore le long de la fourche. En réfléchissant sur cette manoeuvre des cordiers, on conçoit pourquoi une corde ne se détord pas, pendant qu'un fil abandonné à lui - même, perd pre>que tout le tortillement qu'il avoit acquis. Tandis que le toupin étoit contre l'émerillon, les deux fils étoient tords chacun en particulier, & acquéroient un certain degré de sorce élastique qui tendroit à les détordre, ou à les faire tourner dans un sens opposé - à celui dans lequel ils ont été tortilles, si on leur en donnoit la liberté; ce qui se manifeste par l'effort que le toupin fait pour tourner dans la main du cordier.
Si - tôt donc que le cordier aura écarté le toupin de l'émérillon, la partie du premier fil qui se trouve entre le toupin & l'émérillon étant en liberté, tendra par la force élastique qu'elle a acquise en se tortillant, à tourner dans un sens opposé à son tortille<pb-> [p. 218]
Du merlin. Quand le cordier veut faire du merlin,
qui est composé de trois fils, après avoir tendu un
fil depuis le crochet du roüet jusqu'au crochet de l'émerillon,
il lui reste à étendre de même les deux autres
fils; pour aller plus vite, il prend ordinairement
un fil sur le touret e,
Le bitord sert à fourrer les cordages, c'est - à - dire à les couvrir entierement; on empêche aussi que le frottement ne les endommage, & que l'eau ne les pénetre; il se fait de second brin. On le godronne presque tout, & on le plie en paquet de vingt - cinq brasses. Il y en a de fin & de gros; le gros pour les gros cordages, le fin pour les cordages menus. On le commet tout en blanc. On le trempe tout fait dans la cuve pour le godronner.
Du lusin. Le lusin est un vraí fil retors; il se fait de deux fils de premier brin, simplement tortillés l'un avec l'autre & non commis; c'est le goudron qui l'empêche de se détordre. On s'en sert pour arrêter les bouts des manoeuvres coupées quand elles ne sont pas grosses; quand elles sont grosses on y employe le merlin. On ne conserve que peu de merlin en blanc.
Du fil de voile. Ce n'est qu'un bon fil retors. Pour le faire, on prend du chanvre le mieux peigné & le plus fin: on en étend deux longueurs de vingt brasses chacune; on les attache à une molette du roüet, mais disposée de maniere que la corde la fait tourner en un sens opposé à celui qu'ont les molettes, quand l'ouvrier file à l'ordinaire. Ces deux fils sont peu commis, puisqu'ils ne se raccourcissent que de quatre brasses. Quand ce fil est fait, on le lisse, afin qu'il passe mieux quand on s'en servira à assembler des lés de toile à voile.
Des aussieres. On appelle de ce nom tout cordage commis après qu'on a donné aux fils un degré con<cb->
Des quaranteniers. Les cordages en aussieres sont d'un grand usage dans la Marine; il y en a de plusieurs grosseurs, depuis un pouce de circonférence, jusqu'à douze & par - delà. Les plus petits s'appellent quaranteniers; & il y a des quaranteniers à six fils, à neuf, à douze, & à dix - huit. Les aussieres plus grosses se distinguent par leurs usages; on les appelle garands de caliornes, garands de palans, rides, srancs sunins, itagues, haut - bans, &c. Quand ils n'ont point de destination déterminée, ils retiennent le nom générique d'aussieres. Ils se fabriquent tous de la même maniere. Dans les corderies du Roi, où l'on a de grands roüets, on commet ordinairement les quaranteniers à six & à neuf fils, de la même maniere que le merlin, à cela près seulement qu'en ourdissant les quaranteniers à six fils, on accroche deux fils à chacun des trois crochets du roüet, & que pour les quaranteniers à neuf on en attache trois à chaque crochet. Ils se travaillent de même que les merlins; avec cette difference que quand les fils sont ourdis, on les tord pour les commettre dans un sens opposé à celui du tortillement. Entrons maintenant dans l'attelier des commetteurs des aussieres à plusieurs torons; car il a ses dispositions & ses outils particuliers, & commençons par exposer sa disposition générale.
Cet attelier est, comme celui des fileurs, une galerie longue de deux cents brasses, ou de mille piés, large de six à sept brasses, ou de trente à trente - cinq piés. Aux deux bouts de cette galerie sont posés les supports des tourets, qui sont disposés de différente façon.
Des supports des tourets. On sait que le fil de carret
est conservé dans les magasins sur des tourets; on
en tire la quantité dont on juge avoir besoin, & on
les dispose sur des supports, de façon qu'ils puissent
tourner tout à la fois sans se nuire les uns aux autres,
afin que quand on veut ourdir une grosse corde,
au lieu de faire autant de fois la longueur de la
corderie qu'on veut réunir de fils ensemble, six fois,
par exemple, si l'on a intention de faire un quarantenier
à six fils, on puisse, en prenant six bouts de fils
sur six tourets différens, ourdir sa corde tout d'une
fois. C'est dans cette intention qu'on dispose au bout
de la corderie les tourets sur des supports, qui sont
quelquefois posés verticalement & d'autres fois horisontalement;
pour cela on pose à bas sur le plancher
& par le travers de la corderie, une grosse piece
de bois quarrée, dans laquelle on assemble un nombre
de piés droits, (
Dans beaucoup de corderies on les établit d'une
autre façon plus solide & plus commode; il faut
imaginer deux assemblages de charpente C C, qui
sont posés l'un sur l'autre, de telle sorte que l'un re<pb->
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