ENCYCLOPÉDIE OU DICTIONNAIRE RAISONNÉ
DES SCIENCES, DES ARTS ET DES MÉTIERS
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La corde d'un arc A B, fig. 6. & le rayon C E étant
donnés, trouver la corde de la moitié A E de cet arc. Du
quarré du rayon C E, ôtez le quarré de la moitié
A D de la corde donnée A B, le reste sera le quarré
de o C; & tirant la racine quarrée, elle sera égale
à C D: on la soustraira du rayon E C, & il restera
D E: on ajoûtera les quarrés de A D & de E D, &
la somme sera le quarré de A E; dont tirant la racine,
on aura la corde de la moitié A E.
Ligne des cordes, c'est une des lignes du compas
de proportion. Voyez Compas de proportion.
Wolf & Chambers. (E)
Corde
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* Corde, s. f. ouvrage du Cordier. C'est un corps
long, flexible, résistant, rond, composé de filamens
appliqués fortement les uns contre les autres
par le tortillement. Il y a des - cordes de plusieurs especes,
qu'on distingue par leur grosseur, leur fabrication,
leurs usages & leurs matieres.
On peut faire des cordes avec le lin, le coton, le
roseau, l'écorce de tilleul, la laine, la soie, le chanvre,
&c. mais celles de chanvre sont les plus communes
de toutes; elles ont plus de force que celles de
roseau & d'écorce d'arbre, & les autres matieres ne
sont pas assez abondantes pour qu'on en pût faire
toutes les cordes dont on a besoin dans la société,
quand il seroit démontré par l'expérience que ces
cordes seroient meilleures que les autres.
Des cordes de chanvre. On fait avec le chanvre
quatre sortes de cordes; les unes qui sont composées
de brins, & qu'on ne commet qu'une fois, comme
le merlin & le bitord, voyez Bitord & Merlin;
d'autres qui sont composées de torons, & qu'on ne
commet qu'une fois, comme les aussieres à deux,
trois, quatre, cinq & six torons, voyez Aussieres
& Torons, Il y en a de composées d'aussieres, &
commises deux fois; on les appelle grelins, voyez
Grelins. On peut commettre des grelins ensemble,
& la corde qui en proviendra sera commise trois fois,
& s'appellera archigrelins, voyez Archigrelins.
Il y a encore une espece de corde plus menue par un
bout que par l'autre, qu'on appelle par cette raison
corde en queue de rat, voyez pour cette corde & pour
la fabrication des précédentes, l'article Corderie.
Si l'on fabriquoit des cordes de coton, de crin,
de brins, &c. on ne s'y prendroit pas autrement que
pour celles de chanvre; ainsi on peut rapporter à
cette main - d'oeuvre tout ce qui concerneroit celle
de ces cordes. Mais il n'en est pas de même des cordes
qu'on tire de substances animales, comme les cordes
à boyau, les cordes de nerfs, les cordes d'instrumens
de musique, &c. celles - ci demandent des préparations
& un travail particuliers: nous en allons traiter
séparément.
Des cordes à boyau, ou faites de boyaux mis en filets,
tortillés & unis avec la presle. Il y en a de deux
especes; les unes grossieres, qu'on employe soit à
fortifier, soit à mouvoir des machines: nous en
avons donné la fabrication à l'article Boyaudier,
voyez Boyaudier. Elle se réduit au lavage, premiere
opération. Ce lavage consiste à démêler à
terre les boyaux; ce qui se fait avec quelque précaution,
pour ne pas les rompre. A la seconde opération
on les jette dans un baquet d'eau claire; on
les lave réellement, & le plus qu'il est possible. A
la troisieme on les vuide dans un autre baquet; à
la quatrieme on les tire de ce baquet, & on les
gratte en les faisant passer sous un couteau qui n'est
tranchant que vers la pointe. Cette opération se fait
sur un banc plus haut que le baquet d'un bout, &
appuyé sur le baquet par le bout qui est plus bas:
à la cinquieme on coupe les boyaux grattés, par les
deux bouts & de biais, & on les jette dans une autre
eau: à la sixieme on les en tire un à un, & on les
coud avec une aiguille enfilée de filamens enlevés
de la surface du boyau. On observe, pour empêcher
la grosseur de la couture, que les biais des coupures
se trouvent en sens contraires, c'est - à - dire l'une en
dessus & l'autre en dessous. A la septieme on noue
chaque longueur à un lacet qui tient à une cheville
fixe, & l'on attache l'autre bout aux nelles du roüet,
voyez
Nelle, Rouet, Lacet
, &c. A la huitieme
on tord le boyau au roüet jusqu'à un certain point,
on en tord toûjours deux à la fois: on a des brins
de presle; on entrelace ces brins de presle entre les
deux boyaux; on les serre entre cette presle, & on
tire sur toute leur longueur la presle serrée, en les
frottant fortement. A la neuvieme on leur donne plus
de tors; on les frotte avec un frottoir; on les épluche ou l'on enleve leurs inégalités avec un couteau
ordinaire, & on leur donne le troisieme & dernier
tors. A la dixieme, on les détache des nelles; on les
attache par un autre lacet à une autre cheville; on
les laisse sécher; on les détache quand ils sont secs;
on coupe la partie de chaque bout qui a formé les
noeuds avec les lacets; on les endouzine, on les
engrossit, & la corde est faite. Il faut travailler le
boyau le plus frais qu'il est possible; le délai en été
le fait corrompre; en tout tems il lui ôte de sa qualité.
Il ne faut jamais dans cette manoeuvre employer
d'eau chaude, elle feroit crisper le boyau. Il y
a quelqu'adresse dans le travail de ces cordes, à estimer
juste leur longueur, ou ce que le boyau perdra
dans ses trois tors. On n'a jusqu'à présent fait des
cordes à boyau que de plusieurs boyaux cousus. Le
sieur Petit Boyaudier, qui a sa manufacture au Croissant rue Mou>fetard, prétend en fabriquer de bonnes
de toute longueur, & sans aucune couture. Nous
avons répeté ici la maniere de travailler le boyau,
parce qu'en consultant plusieurs ouvriers, on trouve
souvent une grande différence, tant dans la maniere
de s'exprimer que dans celle d'opérer, & qu'il
importe de tout savoir en ce genre, afin de connoître
par la comparaisonde plusieurs mains - d'oeuvres,
quelle est la plus courte & la plus parfaite. Voyez
Endouziner, Engrossir, &c.
Des cordes à boyau propres à la Lutherie. On dit
qu'il ne se fabrique de bonnes cordes d'instrumens
qu'en Italie, celles qui viennent de Rome passent
pour les meilleures; on les tire par paquets assortis,
composés de 60 bottes ou cordes, qui sont toutes
pliées en sept ou buit plis. On les distingue par numéro,
& il y en a depuis le n°. 1. jusqu'au n°. 50.
Ce petit art qui contribue tant à notre plaisir, est un
des plus inconnus: les Italiens ont leur secret, qu'ils
ne communiquent point aux étrangers. Les ouvriers
de ce pays qui prétendent y entendre quelque
chose, & qui font en effet des cordes d'instrumens,
que les frondeurs jugeront assez bonnes pour la
musique qu'on y compose, ont aussi leurs secrets
qu'ils gardent bien, sur - tout quand ils sont consultés.
Voici tout ce que nous en avons pû connoître avec
le secours de quelques personnes qui n'ont pû nous
instruire selon toute l'étendue de leur bonne volonté.
On se pourvoit de boyaux grêles de moutons,
qu'on nettoye, dégraisse, tord & seche de la maniere
qui suit. On a un baquet plein d'eau de fontaine,
on y jette les boyaux comme ils sortent du
corps de l'animal; on ne peut les garder plus d'un
jour ou deux, sans les exposer à se corrompre: au
reste cela dépend de la chaleur de la saison, le mieux
est de les nettoyer tout de suite. Pour cet effet on
les prend l'un après l'autre par un bout, de la main
droite, & on les fait glisser entre le pouce & l'index,
les serrant fortement. On les vuide de cette maniere;
& à mesure qu'ils sont vuidés, on les laisse tomber
dans l'eau nette. On leur réitere cette opération
deux fois en un jour, en observant de les agiter
dans l'eau de tems en tems pendant cet intervalle,
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a>n de les mieux laver; on les passe ensuite dans de
nouvelle eau de fontaine, pour y macérer pendant
deux ou trois jours, selon la chaleur du tems: chacun
de ces jours on les racle deux fois, & on les
change d'eau trois fois. Pour les racler on les étend
l'un après l'autre sur une planche ou banc incliné au
bord du baquet, on a un morceau de roseau divisé
longitudinalement; il faut que les côtés de la division
ne soient pas tranchans, mais ronds. C'est avec
ce roseau qu'on les ratisse, & qu'on parvient à les
dépouiller de l'épiderme grasse qui les rend opaques;
on les fait passer dans des eaux nouvelles à
mesure qu'on les ratisse: alors le boyau est nettoyé,
& le voilà en état d'être dégraissé. Les ouvriers font
un premier secret de la maniere dont ils dégraissent
les boyaux; mais il est constant qu'indépendamment
de leur secret, si l'on n'apporte les plus grandes
précautions au dégraissage des boyaux, les cordes
n'en vaudront rien. Il faut préparer une lessive que
les ouvriers appellent eau - forte, & qui s'employe au
quart forte, au tiers forte, demi - forte, trois quarts
forte, & toute forte. Pour la faire on a un vaisseau
de grais ou cuve de pierre contenant demi - barrique,
ou le poids de 250 liv. d'eau; on la remplit d'eau,
on y jette environ deux livres & demie de cendres
gravelées, qu'on y remue bien avec un bâton. N'y
met - on que cela? Il y en a qui prétendent qu'il y
entre de l'eau d'alun en petite quantité; mais on ne
sait, par la maniere dont ils s'expriment, si l'eau
d'alun sert avant le dégraissage, si elle entre dans la
lessive du dégraissage, si elle y entre seule, ou en
mêlange avec la cendre gravelée, ou si cette façon
d'eau d'alun ne se donne pas après le dégraissage
même avec la cendre gravelée. Quoi qu'il en soit,
on a des tinettes ou terrines de grais, qui peuvent
tenir environ dix livres d'eau; on met les boyaux
par douzaines dans ces vaisseaux; on prend dans la
cuve environ deux livres & demie de lessive: quelle
que soit cette lessive, on la verse dans la tinette sur
les boyaux, & on acheve de la remplir avec de
l'eau de fontaine: on dit qu'alors les boyaux sont
dans la lessive au quart, ce qui - signifie que le liquide
dans lequel ils trempent, est composé d'une partie
de lessive & de trois parties d'eau de fontaine. On
les laisse blanchir dans cette eau une demi - journée
dans un lieu frais; on les en retire l'un après l'autre,
pour leur donner la façon suivante. On a à l'index
une espece d'ongle de fer blanc qu'on met au doigt
comme un dé à coudre; on nomme cet instrument
dégraissoir. On applique le pouce contre le bord de
son calibre, à son extrémité, & l'on presse le boyau
contre ce bord, tandis qu'on le tire de la main droite:
on le jette, au sortir de cette opération, dans une
autre tinette ou terrine, dont la lessive est au tiers
forte, c'est - à - dire de deux parties d'eau de fontaine,
sur une partie de lessive. On revient à cette manoeuvre
du dégraissoir quatre à cinq fois, & elle dure
deux ou trois jours, suivant la chaleur de la saison.
Chaque demi - journée on augmente la force de la
lessive. Les boyaux se dégraissent plus promptement
en été qu'en hyver. Les augmentations de la lessive
en hyver sont du quart au tiers, du tiers au demi,
du demi aux trois quarts, des trois quarts à l'eau
toute forte; & en été du quart au demi, du demi
aux trois quarts, & des trois quarts à l'eau toute
forte. Dans le premier cas, les degrés d'eau se
donnent en trois jours, & en deux jours dans le second;
mais tantôt on abrege, tantôt on prolonge
cette opération: c'est à l'expérience de l'ouvrier à
le déterminer. Il faut avoir grande attention à ne
point écorcher les boyaux avec le dégraissoir. Le
dégraissage se fait sur un lavoir haut de deux piés &
demi, large de deux, & long d'environ dix ou douze,
suivant l'emploi de la fabrique; il est profond
d'environ six pouces, & les eaux peuvent s'en écouler aux deux bouts par les ouvertures, & au moyen
de la pente qu'on y a pratiquée. Après ce dégraissage,
au sortir des lessives que nous avons dites, on
en a une autre qu'on appelle double - forte; elle est
composée de la même quantité d'eau de fontaine,
c'est - à - dire de 250 livres ou environ; mais on y
met cinq livres de cendres gravelées. Je demanderai
encore: n'y met - on que cela? & l'on sera bien fondé
à avoir sur cette lessive double forte, les mêmes
doutes que sur la lessive simple forte. Au reste, on
est bien avancé vers la découverte d'une manoeuvre,
quand on connoît les expériences qu'on a à
faire. On laisse les boyaux dans cette seconde lessive
une demi - journée, une journée entiere, & même
davantage, selon la saison, & toûjours par douzaines,
& dans les mêmes tinettes ou terrines de grais.
On les en tire, pour passer encore une fois sur le dégraissoir
de fer, d'où on les jette dans de l'eau fraiche;
les boyaux sont alors en état d'être tordus au
roüet. On les tire de l'eau; il est encore incertain si
cette eau est pure, ou si elle n'est pas un peu chargée
d'alun, & tout de suite on les double. Les gros
boyaux servent à faire les grosses cordes, les boyaux
plus petits & plus clairs servent à faire les cordes
plus petites; mais il est bon de savoir qu'on ne les
tord presque jamais simples; la plus fine chanterelle
est un double. On les fait environ de cinq piés &
demi, ou huit pouces. Chaque boyau en fournit
deux. Il peut arriver que le boyau double n'ait pas
la longueur requise pour la corde. Alors on en prend
deux qu'on assemble de cette maniere >; on
porte un des bouts à un émerillon du roüet; on passe
le boyau doublé sur une cheville de la grosseur du
doigt, qui est fichée dans un des côtés d'un chassis,
à quelque distance de l'émerillon, & qui fait partie
d'un instrument appellé le talart ou l'attelier. Il faut
observer que le bout de la corde qui est à l'émerillon,
a aussi sa cheville, & que cette cheville est passée
dans le crochet de l'émerillon. Si la corde est trop courte
pour cet intervalle, on l'allonge, comme on l'a indiqué
plus haut, en assemblant l'un des deux boyaux
avec un autre boyau plus long; s'il y a du superflu,
on le coupe, & l'on tord le boyau en douze ou quinze
tours de roüet. La roüe du roüet a trois piés de
diametre, & les bobines qu'elle fait mouvoir ont
deux pouces. On détache les deux petites chevilles,
l'une de l'émerillon, l'autre du côté du chassis, &
on les transporte dans des trous faits exprès à l'autre
extrémité du talart placé à côté du roüet. Le talart
est un chassis de bois de sapin long de deux aunes,
large de deux; à l'une de ses extrémités il y a vingt
trous garnis d'autant de chevilles de la grosseur du
doigt, & à l'autre quarante plus petites: ainsi un
boyau tord pour un instrument de musique, & tendu
sur le talart, a ses deux extrémités attachées, l'une
à une des petites chevilles des quarante, & l'autre
à une des vingt grosses. Voyez Planche V. de Corderie.
b est le baquet où s'égoutte l'eau; d est une table
avec rebords qui reçoit l'eau, & qui par sa pente &
ses gouttieres conduit l'eau dans le baquet; c, c sont
des treteaux qui la soûtiennent; u, rangées de chevilles
où l'on attache les cordes quand on les tord;
a, a, a, a, est un chassis oblong, de deux aulnes
sur une de ses dimensions, & de deux piés & demi
sur l'autre; x, sont des trous à recevoir les chevilles
des cordes, lorsqu'elles sont tordues; z, corde
que l'on tord à l'aide d'une roüe & de deux poulies,
avec un petit crochet k, auquel on adapte la cheville
qui doit remplir un des trous du chassis quand
la corde sera torse. Mais la manoeuvre que nous venons
de décrire ne suffit pas pour donner à la corde
l'élasticité convenable, & lui faire rendre du son;
il y a, dit on, encore un autre secret. C'est ce<pb->
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