ENCYCLOPÉDIE OU DICTIONNAIRE RAISONNÉ
DES SCIENCES, DES ARTS ET DES MÉTIERS

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Les consiricteurs des aîles du nez, paire de muscles communs aux aîles du nez & à la levre supérieure. Voyez Nez, Myrtiforme. (L)

CONSTRICTION (Page 4:73)

CONSTRICTION, s. f. (Med.) vice des solides ou organiques. Le mot constriction exprime l'état d'une partic solide ou organique, qui éprouve actuellement une tension violente & contre nature, un resserrement convulsif ou spasmodique. Voy. Spasme. (b)

CONSTRUCTION (Page 4:73)

CONSTRUCTION, s. f. terme de Grammaire; ce mot est pris ici dans un sens métaphorique, & vient du latin construere, construire, bâtir, arranger.

La construction est donc l'arrangement des mots dans le discours. La construction est vicieuse quand les mots d'une phrase ne sont pas arrangés selon l'usage d'une langue. On dit qu'une construction est greque ou latine, lorsque les mots sont rangés dans un ordre conforme à l'usage, au tour, au génie de la langue greque, ou à celui de la langue latine.

Construction louche; c'est lorsque les mots sont placés de façon qu'ils semblent d'abord se rapporter à ce qui précede, pendant qu'ils se rapportent réellement à ce qui suit. On a donné ce nom à cette sorte de construction, par une métaphore tirée de ce que dans le sens propre les louches semblent regarder d'un côté pendant qu'ils regardent d'un autre.

On dit construction pleine, quand on exprime tous les mots dont les rapports successifs forment le sens que l'on vent énoncer. Au contraire la construction est elliptique lorsque quelqu'un de ces mots est sousentendu.

Je crois qu'on ne doit pas confondre construction avec syntaxe. Construction ne présente que l'idée de combinaison & d'arrangement. Cicéron a dit selon trois combinaisons différentes, accepi litteras tuas, tuas accepi litteras, & litteras accepi tuas: il v a là trois constructions, puisqu'il y a trois différens arrangemens de mots; cependant il n'y a qu'une syntaxe; car dans chacune de ces constructions il y a les mêmes signes des rapports que les mots ont entr'eux, ainsi ces rapports sont les mêmes dans chacune de ces phrases. Chaque mot de l'une indique également le même correlatif qui est indiqué dans chacune des deux autres; ensorte qu'après qu'on a achevé de lire ou d'entendre quelqu'une de ces trois propositions, l'esprit voit également que litteras est le déterminant d'accepi, que tuas est l'adjectif de litteras; ainsi chacun de ces trois arrangemens excite dans l'esprit le même sens, j'ai reçu votre lettre. Or ce qui fait en chaque langue, que les mots excitent le sens que l'on veut faire naître dans l'esprit de ceux qui savent la langue, c'est ce qu'on appelle syntaxe. La syntaxe est donc la partie de la Grammaire qui donne la connoissance des signes établis dans une langue pour exciter un sens dans l'esprit. Ces signes, quand on en sait la destination, sont connoître les rapports successifs que les mots ont entr'eux; c'est pourquoi lorsque celui qui parie ou qui écrit s'écarte de cet ordre par des transpositions que l'usage autorise, l'esprit de celui qui ecoute ou qui lit rétablit cependant tout dans l'ordre en vertu des signes dont nous parlons, & dont il connoît la destination par usage.

Il y a en toute langue trois sortes de constructions qu'il faut bien remarquer.

I°. Construction nécessaire, significative ou énonciative, c'est celle par laquelle seule les mots font un sens: on l'appelle aussi construction simple & construction naturelle, parce que c'est celle qui est la plus conforme à l'état des choses, comme nous le ferons voir dans la suite, & que d'ailleurs cette construction est le moyen le plus propre & le plus facile que la nature nous ait donné pour faire connoître nos pensées par la parole; c'est ainsi que lorsque dans un traité de Géométrie les propositions sont rangées dans un ordre successif qui nous en fait appercevoir aisément la liaison & le rapport, sans qu'il y ait aucune proposition intermédiaire à suppléer, nous disons que les propositions de ce traité sont rangées dans l'ordre naturel.

Cette construction est encore appellée nécessaire, parce que c'est d'elle seule que les autres constructions empruntent la propriété qu'elles ont de signifier, au point que si la construction nécessaire ne pouvoit pas se retrouver dans les autres sortes d'énonciations, celles - ci n'exciteroient aucun sens dans l'esprit, ou n'y exciteroient pas celui qu'on vouloit y faire naître; c'est ce que nous ferons voir bien - tôt plus sensiblement.

II°. La seconde sorte de construction, est la construction figurée.

III°. Enfin, la troisieme est celle où les mots ne sont ni tous arrangés suivant l'ordre de la construction simple, ni tous disposés selon la construction figurée. Cette troisieme sorte d'arrangement est le plus en usage; c'est pourquoi je l'appelle construction usuelle.

1°. De la construction simple. Pour bien comprendre ce que j'entens par construction simple & nécessaire, il faut observer qu'il y a bien de la différence entre concevoir un sens total, & énoncer ensuite par la parole ce que l'on a conçu.

L'homme est un être vivant, capable de sentir, de penser, de connoître, d'imaginer, de juger, de vouloir, de se ressouvenir, &c. Les actes particuliers de ces facultés se font en nous d'une maniere qui ne nous est pas plus connue que la cause du mouvement du coeur, ou de celui des piés & des mains - Nous savons par sentiment intérieur, que chaque acte particulier de la faculté de penser, ou chaque pensée singuliere est excitée en nous en un instant, sans division, & par une simple affection intérieure de nous - mêmes. C'est une vérité dont nous pouvons aisément nous convaincre par notre propre expérience. & sur - tout en nous rappellant ce qui se passoit en nous dans les premieres années de notre enfance: avant que nous eussions fait une assez grande provision de mots pour énoncer nos pensées, les mots nous manquoient, & nous ne laissions pas de penser, de sentir, d'imaginer, de concevoir, & de juger. C'est ainsi que nous voulons par un acte simple de notre volonté, acte dont notre sens interne est affecté aussi promptement que nos yeux le sont par les différentes impressions singulieres de la lumiere. Ainsi je crois que si après la création l'homme fût demeuré seul dans le monde, il ne se seroit jamais avisé d'observer dans sa pensée un sujet, un attribut, un substantif, un adjectif, une conjonction, un adverbe, une particule négative, &c.

C'est ainsi que souvent nous ne faisons connoître nos sentimens intérieurs que par des gestes, des mines, des regards, des soupirs, des larmes, & par tous les autres signes, qui sont le langage des passions plûtôt que celui de l'intelligence. La pensée, tant qu'elle n'est que dans notre esprit, sans aucun égard à l'énonciation, n'a besoin ni de bouche, ni de langue, ni du son des syllabes; elle n'est ni hébraïque, ni greque, ni latine, ni barbare, elle n'est qu'à nous: intùs, in domicilio cogitationis, nec hoebrea, nec groeca, nec latina, nec barbara . . . sine oris & linguoe organis, sine strepitu syllabarum. S. August. confes. l. XI. c. iij.

Mais dès qu'il s'agit de faire connoître aux autres les affections ou pensées singulieres, & pour ainsi dire, individuelles de l'intelligence, nous ne pouvons produire cet effet qu'en faisant en détail des impressions, ou sur l'organe de l'ouïe par des sons dont les autres hommes connoissent comme nous la [p. 74] destination, ou sur l'organe de la vûe, en exposant à leurs yeux par l'écriture, les signes convenus de ces mêmes sons; or pour exciter ces impressions, nous sommes contraints de donner à notre pensée de l'étendue, pour ainsi dire, & des parties, afin de la faire passer dans l'esprit des autres, où elle ne peut s'introduire que par leurs sens.

Ces parties que nous donnons ainsi à notre pensée par la nécessité de l'élocution, deviennent ensuite l'original des signes dont nous nous servons dans l'usage de la parole; ainsi nous divisons, nous analysons, comme par instinct, notre pensée; nous en rassemblons toutes les parties selon l'ordre de leurs rapports; nous lions ces parties à des signes, ce sont les mots dont nous nous servons ensuite pour en affecter les sens de ceux à qui nous voulons communiquer notre pensée: ainsi les mots sont en même tems, & l'instrument & le signe de la division de la pensée. C'est de - là que vient la différence des langues & celle des idiotismes; parce que les hommes ne se servent pas des mêmes signes partout, & que le même fond de pensée peut être analysé & exprimé en plus d'une maniere.

Dès les premieres années de la vie, le penchant que la nature & la constitution des organes donnent aux enfans pour l'imitation, les besoins, la curiosité, & la présence des objets qui excitent l'attention, les signes qu'on fait aux enfans en leur montrant les objets, les noms qu'ils entendent en même tems qu'on leur donne, l'ordre successif qu'ils observent que l'on suit, en nommant d'abord les objets, & en énonçant ensuite les modificatifs & les mots déterminans; l'expérience répétée à chaque instant & d'une maniere uniforme, toutes ces circonstances & la liaison qui se trouve entre tant de mouvemens excités en même tems: tout cela, dis - je, apprend aux enfans, non - seulement les sons & la valeur des mots, mais encore l'analyse qu'ils doivent faire de la pensée qu'ils ont à énoncer, & de quelle maniere ils doivent se servir des mots pour faire cette analyse, & pour former un sens dans l'esprit des citoyens parmi lesquels la providence les a fait naître.

Cette méthode dont on s'est servi à notre égard, est la même que l'on a employée dans tous les tems & dans tous les pays du monde, & c'est celle que les nations les plus policées & les peuples les plus barbares mettent en oeuvre pour apprendre à parler à leurs enfans. C'est un art que la nature même enseigne. Ainsi je trouve que dans toutes les langues du monde, il n'y a qu'une même maniere nécessaire pour former un sens avec les mots: c'est l'ordre successif des relations qui se trouvent entre les mots, dont les uns sont énoncés comme devant être modifiés ou déterminés, & les autres comme modifiant ou déterminant: les premiers excitent l'attention & la curiofité, ceux qui suivent la satisfont successivement.

C'est par cette maniere que l'on a commencé dans notre enfance à nous donner l'exemple & l'usage de l'élocution. D'abord on nous a montré l'objet, ensuite on l'a nommé. Si le nom vulgaire étoit composé de lettres dont la prononciation fût alors trop difficile pour nous, on en substituoit d'autres plus aisées à articuler. Aprés le nom de l'objet on ajoûtoit les mots qui le modifioient, qui en marquoient les qualités ou les actions, & que les circonstances & les idées accessoires pouvoient aisément nous faire connoître.

A mesure que nous avancions en âge, & que l'expérience nous apprenoit le sens & l'usage des prépositions, des adverbes, des conjonctions, & surtout des différentes terminaisons des verbes destinées à marquer le nombre, les personnes, & les tems, nous devenions plus habiles à démêler les rapports des mots & à en appercevoir l'ordre successif, qui forme le sens total des phrases, & qu'on avoit grande attention de suivre en nous parlant.

Cette maniere d'énoncer les mots successivement selon l'ordre de la modification ou détermination que le mot qui suit donne à celui qui le précede, a fait regle dans notre esprit. Elle est devenue notre modele invariable, au point que, sans elle, ou du moins sans les secours qui nous aident à la rétablir, les mots ne présentent que leur signification absolue, sans que leur ensemble puisse former aucun sens. Par exemple:

Arma virumque cano, Trojoe qui primus ab oris, Italiam, fato profugus, Lavinaque venit Littora. Virg. AEneid. Liv. I. vers prem. Otez à ces mots latins les terminaisons ou désinances, qui sont les signes de leur valeur relative, & ne leur laissez que la premiere terminaison qui n'indique aucun rapport, vous ne formerez aucun sens; ce seroit comme si l'on disoit:

Armes, homme, je chante, Troie, qui, premier, des côtes, Italie, destin, fugitif, Laviniens, vint, rivages. Si ces mots étoient ainsi énoncés en latin avec leurs terminaisons absolues, quand même on les rangeroit dans l'ordre où on les voit dans Virgile, non seulement ils perdroient leur grace, mais encore ils ne formeroient aucun sens; propriété qu'ils n'ont que par leurs terminaisons relatives, qui, après que toute la proposition est finie, nous les font regarder selon l'ordre de leurs rapports, & par conséquent selon l'ordre de la construction simple, nécessaire, & significative.

Cano arma atque virum, qui vir, profugus à fato, venit primus ab oris Trojoe in Italiam, atque ad littora Lavina; tant la suite des mots & leurs desinances ont de force pour faire entendre le sens.

Tantum series juncturaque pollet. Hor. Art poét. v. 240.

Quand une fois cette opération m'a conduit à l'intelligence du sens, je lis & je relis le texte de l'auteur, je me livre au plaisir que me cause le soin de rétablir sans trop de peine l'ordre que la vivacité & l'empressement de l'imagination, l'élégance & l'harmonie avoient renversé; & ces fréquentes lectures me font acquérir un goût éclairé pour la belle latinité.

La construction simple est aussi appellée construction naturelle, parce que c'est celle que nous avons apprise sans maître, par la seule constitution méchanique de nos organes, par notre attention & notre penchant à l'imitation: elle est le seul moyen nécessaire pour énoncer nos pensées par la parole, puisque les autres sortes de construction ne forment un sens, que lorsque par un simple regard de l'esprit nous y appercevons aisément l'ordre successif de la construction simple.

Cet ordre est le plus propre à faire appercevoir les parties que la nécessité de l'élocution nous fait donner à la pensée; il nous indique les rapports que ces parties ont entr'elles; rapports dont le concert produit l'ensemble, & pour ainsi dire, le corps de chaque pensée particuliere. Telle est la relation établie entre la pensée & les mots, c'est - à - dire, entre la chose & les signes qui la font connoître: connoissance acquise dés les premieres années de la vie, par des actes si souvent répétés, qu'il en résulte une habitude que nous regardons comme un effet naturel. Que celui qui parle employe ce que l'art a de plus séduisant pour nous plaire, & de plus propre à nous toucher, nous applaudirons à ses talens; mais son premier devoir est de respecter les regles

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