ENCYCLOPÉDIE OU DICTIONNAIRE RAISONNÉ
DES SCIENCES, DES ARTS ET DES MÉTIERS

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"674"> tre tous les astres qu'on avoit observés, on pourroit soupçonner qu'il y a encore un grand nombre d'autres planetes différentes de celles que nous connoissons; ce qui doit s'entendre, comme l'on voit, des cometes, que l'on regardoit alors comme des étoiles errantes, c'est - à - dire qu'on mettoit au nombre des planetes. On ignore cependant si le nombre en a été fixé, ni si plusieurs de ces cometes ont été distinguées par des noms particuliers; il est d'ailleurs incertain si l'on avoit quelque théorie du mouvement des cinq planetes qui nous environnent. Cependant Séneque ajoûte encore qu'Apollonius le Myndien, l'un de ceux qui avoient le plus de connoissance dans la Physique, étoit persuadé que les Chaldéens plaçoient depuis long - tems les cometes au nombre des étoiles errantes, qu'elles avoient un cours reglé, & dans des orbites particulieres qui leur étoient connues. Le même Apollonius soûtenoit aussi que les cometes étoient de véritables astres semblables au soleil & à la lune: leur cours, ajoûte - t - il, ne se fait pas dans l'univers sans être assujetti à quelque loi constante; elles descendent & remontent alternativement au plus haut des cieux; mais lorsqu'elles achevent de descendre, il nous est permis de les appercevoir, parce qu'elles décrivent la partie la plus basse de leur orbite.

Séneque paroît avoir adopté ce sentiment: « Je ne suis pas, dit - il, de l'opinion commune sur les cometes; je ne les regarde pas comme des feux passagers, mais comme des ouvrages éternels de la nature. Chaque comete a un certain espace assigné à parcourir. Les cometes ne sont point détruites, mais elles se trouvent bientôt hors de la portée de notre vûe. Si on les met au nombre des planetes, il semble qu'elles ne devroient jamais sortir du zodiaque. Mais pourquoi le zodiaque renfermeroit - il le cours de tous les astres? pourquoi les restraindre à un si petit espace? Le petit nombre des corps célestes, qui sont les seuls qui paroissent se mouvoir, décrivent des orbites différentes les unes des autres; pourquoi donc n'y auroit - il pas d'autres corps celestes qui auroient chacun leurs routes particulieres à parcourir, quoique fort éloignées de celles des planetes »? Ce philosophe ajoûte encore qu'il faudroit, pour les reconnoître, avoir recueilli une suite non interrompue d'observations des anciennes cometes qu'on auroit vûes; mais que faute d'un tel secours, ces observations ne lui étant pas parvenues, & l'apparition des cometes étant d'ailleurs assez rare, il ne croyoit pas qu'il fût possible, dans le siecle où il vivoit, de parvenir à regler leurs mouvemens, ni le tems de leurs révolutions périodiques; qu'ainsi il ignore entierement le tems de leurs apparitions, & la loi suivant laquelle elles doivent revenir à la même distance de la terre ou du soleil. Enfin il ajoûte: « Le tems viendra que les secrets les plus cachés de la nature seront dévoilés & mis au plus grand jour, par la vigilance & par l'attention que les hommes y apporteront pendant une longue suite d'années. Un siecle ou deux ne suffisent pas pour une aussi grande recherche: un jour la postérité sera étonnée de ce que nous avons cherché l'explication d'un phénomene si simple, sur - tout lorsqu'après avoir trouvé la vraie méthode d'étudier la nature, quelque grand philosophe sera parvenu à démontrer dans quels endroits des cieux les cometes se répandent, & parmi quelles especes de corps célestes on doit les ranger ». Quoique ce passage soit un peu long, j'ai crû devoir le rapporter dans un ouvrage destiné principalement à l'histoire des sciences & de l'esprit. Je l'ai tiré des Inst. astr. de M. le Monnier.

La prédiction de Séneque a été accomplie de nos jours par M. Newton, dont la doctrine est celle - ci.

Les cometes sont des corps solides, fixes, & durables; en un mot c'est une espece particuliere de planetes qui se meuvent librement & vers toutes les parties du ciel dans des orbites très - excentriques, & faisant de fort grands angles avec l'écliptique. Les cometes perséverent dans leur mouvement, aussi bien quand elles vont contre le cours des planetes ordinaires, que lorsqu'elles se meuvent du même côté; & leurs queues sont des vapeurs fort subtiles qui s'exhalent de la tête ou noyau de la comete échauffée par la chaleur du soleil. Ce fait une fois établi, explique tous les phénomenes. Car 1°. nous avons déjà fait voir que les irrégularités dans la vîtesse apparente des cometes, viennent de ce qu'elles ne sont point dans les régions des fixes, mais au contraire dans celles des planetes, où suivant qu'elles ont des mouvemens conspirans avec celui de la terre, ou de direction opposée, elles doivent avoir les apparences d'accélération & de rétrogradation que l'on remarque dans les planetes. Voyez Retrogradation, &c.

2°. Si les cometes paroissent se mouvoir le plus vîte lorsque leur course est rectiligne, &c. la raison en est qu'à la fin de leur course, lorsqu'elles s'éloignent directement du solcil, la partie du mouvement apparent qui vient de la parallaxe a dans ce cas une plus grande proportion à la totalité du mouvement apparent; c'est - à - dire cette partie de leur mouvement apparent qui vient de la parallaxe de l'orbe annuel, devient trop considérable par rapport au mouvement propre de la comete, ou au mouvement qu'elle paroîtroit avoir si la terre demeuroit au même point de son orbe: alors ces astres paroissent se détourner de leur route ordinaire, ou s'écarter de la circonférence d'un grand cercle; ensorte que si la terre se meut d'un côté, elles semblent au contraire être emportées suivant une direction opposée. Les différence des parallaxes qui sont causées chaque jour par le mouvement de la terre sur son orbe étant donc très - sensibles, l'observation qui en a été faite plusieurs fois a enfin fait conclure que vers le commencement ou la fin de l'apparition des cometes, leur distance n'étoit pas si excessive que quelques philosophes l'avoient supposé, mais qu'elles se trouvoient alors bien au - dessous de l'orbite de Jupiter. De - là on est bientôt parvenu à conclure qu'au tems de leur périgée ou de leur périhelie, les cometes paroissant alors sous un bien plus grand angle, parce qu'elles sont beaucoup plus proches de la terre, elles devoient descendre au - dessous des orbites de Mars & de la terre; quelques - unes aussi ont descendu au - dessous des planetes insérieures. Inst. astr.

3°. Les cometes, suivant les observations, se meuvent dans des ellipses qui ont le soleil à un de leuis foyers, &c. cela fait bien voir que ce ne sont pas des astres errans de tourbillons en tourbillons, mais qu'elles font partie du système solaire, & qu'elles reviennent sans cesse dans leurs mêmes orbes. Voy. Orbe.

Comme leurs orbites sont très - allongées & très centriques, elles deviennent invisibles lorsqu'elles sont dans la partie la plus éloignée du soleil.

4°. La lumiere de leur tête augmente en s'approchant du soleil, &c. cela s'accorde avec les phénomenes des autres planetes.

Par les observations de la comete de 1680, M. Newton a trouvé que la vapeur qui étoit à l'extrémité de la queue le 25 Janvier, avoit commencé à s'élever du corps avant le 11 Décembre précédent, & qu'ainsi elle avoit employé plus de quarante - cinq jours à s'élever; mais que toute la queuc qui avoit paru le 10 Décembre s'étoit élevée dans l'espace de deux jours écoulés depuis le périhelie.

Ainsi dans le commencement, lorsque la comete [p. 675] étoit proche du soleil, la vapeur s'élevoit prodigieusement vîte; & continuant ensuite de monter en souffrant du retardement dans son mouvement par la gravité de ses particules, elle augmentoit la longueur de la queue: & cette queue, malgré l'immensité de son étendue, n'étoit autre chose qu'une simple vapeur exhalée pendant le tems du périhelic; la vapeur qui s'étoit élevée la premiere, & qui composoit l'extrémité de la queue, ne s'évanoüit que lorsqu'elle fut trop loin du soleil pour réfléchir une lumiere sensible.

On voit aussi que les queues des cometes qui sont plus courtes, ne s'élevent pas d'un mouvement prompt & continuel pour disparoître tout de suite; mais que ce sont des colonnes permanentes de vapeurs qui sortent de la tête avec un mouvement très - modéré pendant un grand espace de tems, & qui en participant du mouvement qu'elles ont d'abord reçû de la tête, continuent à se mouvoir avec facilité dans les espaces célestes; d'où l'on peut aisément inférer le vuide de ces espaces. Voy. Vuide.

5°. Les queues paroissent les plus grandes & les plus brillantes immédiatement après qu'elles ont passé près du soleil. Cela suit de ce que le corps central étant alors le plus échauffé doit exhaler le plus de vapeurs.

La lumiere du noyau ou étoile apparente de la comete, fait conclure que ces astres sont dans notre système, & qu'ils ne sont en aucune maniere dans la région des fixes, puisque dans ce cas leurs têtes ne seroient pas plus éclairées par le soleil, que les planetes ne le sont par les étoiles fixes.

6°. Les queues déclinent un peu de la ligne tirée par le soleil & par la comete, en se rapprochant vers le côté que la comete vient de quitter; parce que toute fumée ou vapeur poussée par un corps en mouvement s'éleve obliquement, en s'éloignant un peu du côté vers lequel va le corps fumant.

7°. Cette déviation est plus petite auprès du corps de la comete que vers l'extrémité de la queue, & est la moindre lorsque la comete est dans sa plus petite distance au soleil; parce que la vapeur monte avec plus de vîtesse auprès du corps de la comete qu'à l'extrémité de la queue, & qu'elle s'éleve aussi avec plus de vîtesse lorsque la comete est plus proche du soleil.

8°. La queue est plus brillante & mieux terminée dans sa partie convexe que dans sa partie concave; parce que la vapeur qui est dans la partie convexe s'étant élevée la premiere, est un peu plus dense & plus propre à réfléchir la lumiere.

9°. La queue paroît plus large vers l'extrémité qu'auprès de la tête; parce que la vapeur qui est dans un espace libre se raréfie & se dilate continuellement.

10°. Les queues sont transparentes, parce qu'elles ne sont que des vapeurs très déliées, &c.

On voit donc que cette hypothese sur les queues des cometes s'accorde avec tous les phénomenes.

Phases des cometes. Le noyau, qu'on appelle aussi corps ou tête de la comete, étant regardé au - travers d'un télescope, paroît d'une forme différente de celle des étoiles fixes ou des planetes.

Sturmius rapporte qu'en observant la comete de 1680 avec un télescope, il la trouva moins lumineuse vers les bords que dans le centre, & qu'elle lui parut plûtôt ressembler à un charbon enflammé d'un feu obscur, ou à une masse informe de matiere éclairée par une lumiere accompagnée de fumée, qu'à une étoile ronde & d'une lumiere vive.

Hevelius observant la comete de 1661, trouva que le corps étoit d'une lumiere jaunâtre, brillante, & terminée, mais sans étinceler, ayant dans le milieu un noyau rougeâtre de la grosseur de Jupiter, & environné d'une matiere beaucoup plus rare. Le 5 Février sa tête étoit un peu plus foncée & plus brillan<cb-> te que la couleur d'or, mais d'une lumiere plus sombre que le reste des étoiles: de plus le noyau lui parut divisé en plusieurs parties. Le 6 le disque étoit diminué, le noyau toûjours existant, mais moindre qu'auparavant: une de ces parties dont on vient de parler, celle qui étoit au bas de la comete & sur la gauche, sembloit plus dense & plus lumineuse que le reste: le corps entier étoit rond, & représentoit une étoile très - peu lumineuse, & le noyau paroissoit toûjours environné d'une matiere différente de la sienne. Le 10 la tête de la comete étoit un peu obscure, & le noyau moins terminé, mais plus brillant vers le haut que vers le bas. Le 13 la tête étoit fort diminuée, tant en grandeur qu'en lumiere. Le 2 Mars sa rondeur étoit altérée, & ses bords dentelés, &c. Le 28 Mars elle étoit très - pâle, & extrèmement rare, sa matiere fort dispersée, & sans noyau distingué du reste.

Weigelius qui en observant la comete de 1664, vit dans le même moment la lune & un petit nuage éclairé par le soleil, trouva que la comete, au lieu d'être d'une lumiere continue comme la lune, ressembloit au contraire à une espece de nuage: c'est ce qui lui avoit fait conclure que les cometes étoient, ainsi que les taches du soleil, des exhalaisons de cet astre. La longueur de la queue des cometes est variable; celle de 1680, suivant Sturmius, n'avoit guere le 20 Décembre que vingt degrés de longueur: en peu de tems elle s'accrut jusqu'à soixante degrés; ensuite elle diminua très - sensiblement. Wolff.

Formation des queues des cometes. M. Newton a fait voir que l'atmosphere des cometes peut fournir une vapeur suffisante pour former leurs queues; il se fonde sur l'extrème dilatation de l'air à une certaine distance de la terre; un pouce cube d'air commun élevé à la distance d'un demi - diametre de la terre, seroit suffisant pour remplir un espace aussi grand que toute la région des étoiles, c'est ce qu'a démontré M. Gregory dans son Astronomie physique. Puis donc que la chevelure ou l'atmosphere de la comete est dix fois plus haute que la surface du noyau, elle doit être prodigieusement rare, & il est tout simple qu'on voie les étoiles au - travers.

Quant à l'ascension des vapeurs qui forment la queue des cometes, Newton la suppose occasionnée par la raréfaction de l'atmosphere au tems du périhelie. La fumée commetout le monde sait, s'éleve par l'impulsion de l'air dans lequel elle nage; l'air le plus raréfié monte par la diminution de sa pesanteur spécifique, & enleve avec lui la fumée. Pourquoi ne supposeroit - on pas que la queue d'une comete seroit élevée de la même maniere par la chaleur du soleil?

Les queues étant ainsi produites, la force qu'elles ont pour conserver leur mouvement & celle qui les pousse vers le soleil, les oblige à décrire des ellipses ainsi que la comete même, & à l'accompagner dans toute son orbite. En effet, la gravitation des vapeurs vers le soleil, n'est pas plus propre à détacher la queue d'une comete de sa tête & à la faire tombet sur le soleil, qu'à détacher la terre de son athmosphere; mais leur gravitation commune est cause qu'elles se meuvent également, & qu'elles sont poussées de la même maniere.

Par ce moyen les queues des cometes produites pendant le tems de leurs périhelies, peuvent être entraînées avec ces astres dans les régions du ciel les plus reculées, & revenir ensuite avec les cometes au bout d'un grand nombre d'années: mais il est plus naturel qu'elles se détruisent peu - à - peu entierement, & qu'en se rapprochant du soleil les cometes en reprennent de nouvelles, d'abord très - peu sensibles, ensuite plus grandes par degrés jusqu'au périhelie, tems auquel elles reprennen: toute leur grandeur, la comete étant alors le plus échaussée qu'il est possible.

Les vapeurs dont ces queues sont composées, se

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