ENCYCLOPÉDIE OU DICTIONNAIRE RAISONNÉ
DES SCIENCES, DES ARTS ET DES MÉTIERS

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"482"> ne s'ouvre que pour recevoir du secours du dehors, & pour cet effet on la nomme porte du secours.

Les citadelles sont jointes aux villes de plusieurs manieres, suivant la disposition de la ville & de la citadelle; mais celle - ci doit être toûjours placée de maniere que la ville n'ait aucun ouvrage ou aucun flanc qui puisse battre la citadelle, ni aucun ouvrage qui la commande. On joint l'enceinte de la place à la citadelle par des especes de murs qui aboutissent sur les capitales des bastions de la citadelle, sur celles des demi - lunes, ou enfin sur le milieu des courtines. Cette derniere disposition est la meilleure. Ces murs ont un rempart jusqu'à la distance de 40 ou 50 toises de la citadelle; on les nomme lignes de communication: elles ne sont autre chose dans cet espace, qu'un mur de maçonnerie de quatre ou cinq piés d'épaisseur, & de même hauteur que le rempart de la place. Sur la partie supérieure de ce mur, on éleve un garde - fou de deux piés d'épaisseur & de six piés de hauteur; on le perce de creneaux pour découvrir dans la campagne.

Quand on construit des citadelles aux villes maritimes, on les dispose de maniere qu'elles commandent la ville, le port, & la campagne. Celle du Havre - de - Grace est placée de cette maniere: elle peut servir de modele pour la position de ces sortes de citadelles.

Les villes maritimes, outre les citadelles, sont encore quelquefois défendues par des châteaux qui commandent au port. Dans ces sortes de villes, on construit ordinairement des jettées, qui sont des especes de digues, de fortes murailles, ou chaussées, qu'on bâtit aussi avant qu'on le peut dans la mer, en y jettant une très - grande quantité de gros quartiers de pierres. A leur extrémité, on établit des forts dont le canon empêche que les vaisseaux ennemis ne s'approchent du port, & par conséquent de la ville. La figure de ces forts n'a rien de déterminé: on leur donne la plus propre à leur faire commander tous les côtés par où l'ennemi peut se présenter.

On construit aussi quelquefois des réduits dans les villes, qui ont le même objet que la citadelle. Voyez Réduit. (Q)

CITATION (Page 3:482)

CITATION, s. f. (Gramm.) c'est l'usage & l'application que l'on fait en parlant ou en écrivant, d'une pensée ou d'une expression employée ailleurs: le tout pour confirmer son raisonnement par une autorité respectable, ou pour répandre plus d'agrément dans son discours ou dans sa composition.

Dans les ouvrages écrits à la main, on soûligne les citations pour les distinguer du corps de l'ouvrage. Dans les livres on les distingue, soit par un autre caractere, soit par des guillemets. Voyez Guillemets.

Les citations doivent être employées avec jugement: elles indisposent, quand elles ne sont qu'ostentation: elles sont blâmables, quand elles sont fausses. Il faut mettre le lecteur à portée de les vérifier. En matiere grave, il est à propos de citer l'édition du livre dont on s'est servi.

Quelques modernes se sont fait beaucoup d'honneur en citant à propos les plus beaux morceaux des anciens, & par - là ils ont trouvé l'art d'embellir leurs écrits à peu de frais. Nos prédicateurs citent perpétuellement l'Ecriture & les Peres, moins cependant qu'on ne faisoit dans les siecles passés. Les Protestans ne citent guere que l'Ecriture. Quoi qu'il en soit, s'il est d'heureuses citations, s'il est des citations exactes, il en est aussi beaucoup d'ennuyeuses, de fausses, & d'altérées ou par l'ignorance, ou par la mauvaise foi des écrivains; souvent aussi par la négligence de ceux qui citent de mémoire. La mauvaise foi dans les citations est universellement reprouvée; mais le défaut d'exactitude & d'intelligen<cb-> ce n'y sont guere moins repréhensibles, & peuvent être même de conséquence suivant l'importance des sujets.

Le projicit ampullas & sesquipedalia verba d'Horace, de même que le scire tuum nihil est de Perse, sont cités communément dans un sens tout contraire à celui qu'ils ont dans l'auteur. Cette application détournée qui n'est pas dangereuse en des sujets profanes, peut devenir abusive, quand il s'agit des passages de l'Ecriture, & il en peut résulter des erreurs considérables. En voici entr'autres un exemple frappant, & qui mérite bien d'être observé.

C'est le multi vocati, pauci vero electi (Mat. ch. xx.), passage qu'on nous cite à tous propos comme une preuve décisive du grand nombre des damnés & du petit nombre des élûs; mais rien, à mon avis, de plus mal entendu ni de plus mal appliqué. En effet, à quelle occasion Jesus - Christ dit - il, beaucoup d'appellés, mais peu d'élús? C'est particulierement dans la parabole du pere de famille qui occupe plusieurs ouvriers à sa vigne, où l'on voit que ceux qui n'avoient travaillé que peu d'heures dans la journée, gagnerent tout autant que ceux qui avoient porté le poids de la chaleur & du jour; ce qui occasionna les murmures de ces derniers, lesquels se plaignirent de ce qu'après avoir beaucoup fatigué, on ne leur donnoit pas plus qu'à ceux qui n'avoient presque rien fait. Sur quoi le pere de famille s'adressant à l'un d'eux, lui répond: Mon ami, je ne vous fais point de tort; n'êtes - vous pas convenu avec moi d'un denier pour votre journée? Prenez ce qui vous appartient, & vousen allez. Pour moi je veux donner à ce dernier autant qu'à vous. Ne m'est - il pas permis de faire des libéralités de mon bien, & faut - il que votre il soit mauvais, parce que je suis bon? C'est ainsi, continue le Sauveur, que les derniers seront les premiers, & les premiers les derniers, parce qu'il y en a beaucoup d'appellés, mais peu d'élûs.

J'observe d'abord sur ces propositions du texte, Sic erunt novissimi primi & primi novissimi, multi enim sunt vocati, pauci vero clecti; j'observe, dis - je, qu'elles sont absolument relatives à la parabole; & c'est ce que l'on voit avec une pleine évidence par ces conjonctions connues sic, enim, qui montrent si bien le rapport nécessaire de ces propositions avec ce qui précede: elles sont comme le résultat & le sommaire de la parabole; & si elles ont quelque obscurité, c'est dans la parabole même qu'il en faut chercher l'éclaircissement.

Je dis donc que les élûs dont il s'agit ici, ce sont les ouvriers que le pere de famille trouva sur le soir sans occupation, & qu'il envoya, quoique fort tard, à sa vigne: ouvriers fortunés, qui n'ayant travaillé qu'une heure, furent payés néanmoins pour la journée entiere. Voilà, dis - je, les élûs, les favoris, les prédestinés.

Les simples appellés que la parabole nous présente, ce sont tous ces mercenaires que le pere de famille envoya dès le matin à sa vigne, & qui après avoir porté toute la fatigue du jour furent payés néanmoins les derniers, & ne reçûrent que le salaire convenu, le même en un mot que ceux qui avoient peu travaillé. Ce sont tous ceux - là qui, suivant la commune opinion, nous figurent les non - élus, les prétendus réprouvés.

Mais que voit - on dans tout cela qui suppose une réprobation? Le traitement du pere de famille à l'égard des ouvriers mécontens, a - t - il quelque chose de cruel ou d'odieux, & trouve - t - on rien de trop dur dans le discours sage & modéré qu'il leur adresse? Mon ami, je ne vous fais point de tort; je vous donne tout ce que je vous ai promis: je veux faire quelque gratification à un autre, pourquoi le trouvez - vous mauvais? [p. 483]

On ne voit rien là qui doive nous faire sécher de crainte, rien qui sente les horreurs d'une réprobation anticipée. J'y vois bien de la prédilection pour quelques - uns; mais je n'y apperçois ni injustice ni dureté pour les autres: nul n'éprouve un sort funeste; ceux même qui ne sont qu'appellés sans être élus, doivent être satisfaits du maître qui les employe, puisqu'il les récompense tous, & qu'il les traite avec humanité. Mon ami, dit - il, je ne vous fais point de tort; appellé au travail de ma vigne, vous avez reçû le salaire de vos peines; & quoique vous ne soyez pas du nombre des élus ou des favoris, vous n'avez pourtant pas sujet de vous plaindre. Paroles raisonnables, paroles même affectueuses, qui me donnent de l'espoir, & nullement de l'épouvante.

Je conclus de ces réflexions si simples, que le multi vocati, pauci vero electi, dont il s'agit, est cité malà propos dans un sens sinistre, & qu'on a tort d'en tirer des inductions desespérantes; puisqu'enfin ce passage bien entendu, & déterminé comme il convient par les circonstances de notre parabole, inspirera toûjours moins d'effroi que de confiance en la divine bonté, & qu'il indique tout au plus les divers degrés de béatitude que Dieu prépare dans le ciel à ses serviteurs: erunt novissimi primi, & primi novissimi. Ibid.

Le multi vocati, pauci vero electi, se trouve encore une autre fois dans l'Ecriture; c'est au xxij. chap. de S. Matthieu; mais il n'a rien là de plus sinistre & de plus concluant que ce qu'on a vû ci - dessus.

J'ai aussi un mot à dire sur le fameux ô altitudo de S. Paul, & je montrerai sans peine que l'on abuse encore de ce passage dans les applications qu'on en fait: on le cite presque toûjours en parlant du jugement de Dieu, & il semble que ce soit pour couvrir ce qui paroît trop dur dans le mystere de la prédestination, ou pour calmer les fideles effrayés des célestes vengeances. Mais ce passage au sens qu'il est cité, loin d'éclairer ou de calmer les esprits, inspire au contraire une frayeur ténébreuse, & nous montre un Dieu plus terrible qu'aimable.

Néanmoins admirezici le mal - entendu de cette citation: ce passage si peu satisfaisant de la maniere qu'on le présente, est véritablement dans le texte sacré un sujet d'espérance & de consolation, puisqu'il exprime le ravissement où est l'apôtre à la vûe des thrésors de sagesse & de miséricorde que Dieu reserve pour tous les hommes.

Dieu, dit S. Paul aux Romains, a permis que tous fussent enveloppés dans l'incrédulité, pour avoir occaston d'exercer sa miséricorde envers tous. Conclusit enim Deus omnia in incredulitate, ut omnium misereatur. Sur quoi l'apôtre s'écrie transporté d'admiration: « O profondeur des thrésors de la sagesse & de la science de Dieu; que ses jugemens sont impénétrables, & ses voies incompréhensibles »! S. Paul par conséquent, loin de nous annoncer ici la rigueur des jugemens de Dieu, nous rappelle au contraire les effets ineffables de sa bonté: O altitudo divitiarum sapientia & scientia Dei ! Le dogme de la prédestination n'a donc rien d'effrayant dans ce passage de S. Paul.

Quoi qu'il en soit, certains prédicateurs abusant de ces expressions, & outrant les vérités évangéliques, n'ont que trop souvent allarmé les consciences, & jetté la terreur, le desespoir, où ils devoient inspirer au contraire les plus tendres sentimens de la reconnoissance pour le Dieu des miséricordes. Mais hélas que ce prétendu zele, que ce zele outré a causé de maux!

Les auditeurs épouvantés, méconnoissant leur créateur & leur pere dans le Dieu foudroyant qu'on leur prêchoit, ont secoué pour la plûpart le joug de la foi, & se sont livrés à l'incrédulité; disposition fu<cb-> neste qui sape le fondement des vertus, & qui assûre le triomphe des vices. Art. de M. Faiguet, maître de pension à Paris.

Citation, (Page 3:483)

Citation, (Théolog.) Les citations sont la base de la Théologie. Les citations de l'ancien Testament qu'on trouve dans le nouveau, ont donné lieu à des doutes, des disputes, & des objections spécieuses de la part des ennemis de la religion Chrétienne. Julien, Porphyre, les Juifs, & les esprits forts modernes, reprochent aux Chrétiens que les apôtres citent souvent des passages de l'ancien Testament, & des prophéties, comme accomplies dans la personne de Jesus - Christ; que cependant il arrive fréquemment, ou que ces passages ainsi cités ne se trouvent point dans l'ancien testament, ou ne sont point employés dans le sens littéral & naturel qu'ils semblent présenter dans l'ancien Testament: ce qui paroît évidemment, ajoûte - t - on, par ce passage de S. Matthieu, chap. xj. vers. 15. Ex Ægypto vocavi filium meum, qui pris à la lettre se rapporte à la sortie des Israélites d'Egypte.

Cette difficulté a paru insurmontable à quelques auteurs; d'autres pour la résoudre ont pris différentes routes. Quelques - uns ont recours à un double accomplissement, & prétendent que quoique les prophéties ayent été accomplies une premiere fois dans certains événemens, elles peuvent l'être encore une fois dans la personne du Messie. Mais d'autres rejettent ce double accomplissement, à moins que le prophete lui - même ne le déclare, rendant par ce moyen toute la prophétie inutile.

Entre ces deux extrémités presque également vicieuses, quelques - uns ont embrassé une opinion fort raisonnable, & qui paroît fondée; c'est de dire qu'il y a des prophéties typiques sur le Messie, lesquelles ont deux objets; l'un prochain & immédiat, qui est comme l'ombre ou la figure du Messie contenue dans l'ancienne loi, & qui a eu un accomplissement imparfait & commencé; l'autre eloigné, mais principal, savoir le Messie, en qui ces prophéties ent eu leur plein & entier accomplissement: le premier n'étoit que le type du second, & par conséquent celui - ci étoit le principal; & de ce genre est le passage cité dans l'objection, qui pour avoir été accompli en figure par la sortie des Israélites d'Egypte, n'en a pas moins été une prophétie bien appliquée & pleinement accomplie dans le retour de J. C. d'Egypte après la mort d'Hérode.

Pour lever le reste de la difficulté, on observe que les Juifs rabbins prennent beaucoup de libertés en citant ou en interprétant les Ecritures, & l'on suppose que les apôtres ont suivi la même méthode dans leurs citations; mais cette supposition n'est pas fondée: en effet, les apôtres instruits immédiatement par J. C. & inspirés par le S. Esprit, n'avoient aucun besoin de recourir aux regles des docteurs Juifs dans leurs citations.

Néanmoins enconséquence de cette supposition, M. Surenhusius prosesseur en Hébreu à Amsterdam, a tâché de retrouver ces regles perdues depuis si long - tems, & a donné à cet effet un savant traité intitulé sepberhamechawe, ou *B*I*B*L*O*S *K*A*T*A*L*L*A<-> *T*H*S, in quo secundùm veterem theologorum Hebraorum formulam allegandi & modos interpretandi, conciliantur loca ex veteri in novo testamento allegata. Il y remarque d'abord quantité de différences qui se trouvent dans les différentes manieres de citer usitées dans les Ecritures; comme il a été dit; il est écrit, afin que ce qu'ont dit les prophetes fût accompli, l'Ecriture dit, voyez ce qui est dit, l Ecriture a prédit, il n'est point dit, &c. Il ajoûte que les livres de l'ancien Testament ayant été arrangés différemment en divers tems & sous différens noms, c'est pour cela qu'un li<pb->

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