ENCYCLOPÉDIE OU DICTIONNAIRE RAISONNÉ
DES SCIENCES, DES ARTS ET DES MÉTIERS

RECHERCHE Accueil Mises en garde Documentation ATILF ARTFL Courriel

Previous page

Page 6:417

teux, qui excitent des douleurs vagues & des mouvemens convulsifs. Willis, de morb. convuls. c. vij. p. m. 44. met hors de doute que toutes les convulfions qu'un homme en santé ne pourroit imiter, & qui demandent une force surnaturelle, sont diaboliques. Il se réunit avec Frommann, lib. cit. p. 916. & plusieurs autres, pour expliquer par l'opération du démon, les excrétions de choses qui ne peuvent se former dans le corps de l'homme. Ainsi suivant la maxime d'Hippocrate, WERI\ I(ERHS2 N/SOU, les hommes ont recours à un pouvoir surnaturel dans les choses dont ils n'ont aucune connoissance: mais le font - ils toûjours avec fondement?

Dans les anciennes éphémérides des curieux de la Nature, on voit plusieurs exemples de maladies causées par la fascination. On trouve aussi des observations de maladies pareilles dans les nouveaux actes de cette académie, mais elles y sont rapportées plus philosophiquement. Westphalus, dans sa pathologie démoniaque, p. 50. n'admet point de fascination qui ne soit magique. Cette pathologie a été imprimée en 1707. Il semble que depuis ce tems la Magie a beaucoup perdu de son crédit en Allemagne.

Frommann, lib. cit. p. 595. croit que le tact peut être fasciné, de sorte qu'il résiste à l'action du feu & des corps tranchans, & même aux balles de mousquet. Cet auteur se donne beaucoup de peine, ibid. pag. 815 - 6. pour expliquer comment le démon peut produire cet endurcissement de la peau. Il auroit été bien éloigné d'employer dans une maladie semblable les bains & le mercure, comme a fait avec succès un medecin italien, qui a publié récemment l'histoire de cette guérison, que M. Vandermonde a traduite. La santé des hommes est donc intéressée à la destruction des préjugés, & aux progrès de la bonne Physique.

On ne voit point dans le texte hébreu de l'Ecriture de vestige de la fascination proprement dite, si ce n'est peut - être dans le ch. xxiij. des Proverb. n. 7. au lieu de l'envieux dont parle la vulgate en cet endroit, l'hébreu dit, l'oeil malin, râ aiin, (Don Ramirez de Prado a cité ces mots en caracteres hébreux, qu'il faudroit lire ouâ tin, ce qui ne fait aucun sens). Grotius explique cependant avec beaucoup de vraissemblance ce mau vais oeil, de celui de l'avare, dans ses notes sur le ch. xx. v. 15. évang. de S. Matthieu. Les Romains crurent qu'il failoit opposer des dieux à ces puissances mal - faisantes qui fascinent les hommes: ils créerent le dieu Fascinus & la déesse Cunina. Nous apprenons de Varron, que les symboles du dieu Fascinus étoient infames, & qu'on les suspendoit au cou des enfans, ce qui est confirmé par Pline, hist. nat. l. XXVIII. c. iiij. Le P. Hardoüin, tom. II. p. 451. col. 1. apprend que les amuletes des enfans dont parle Pline, n'avoient rien d'obscene. Il a reproché aux commentateurs de s'être trompés; mais il étoit bien à plaindre, s'il se croyoit obligé de soûtenir ce paradoxe. Voyez ci - après Fascinus.

Le culte que les Grecs rendoient à Priape, étoit sans doute honteux; mais ce culte naquit peut - être de refléxions profondes. Ils l'avoient reçu des Egyptiens, dont on sait que les hiéroglyphes présentent souvent les attributs de ce dieu. Ils étoient une image sensible de la fécondité, & apprenoient aux peuples grossiers que la nature n'est qu'une suite de générations: unis sur les monumens égyptiens, avec l'oeil symbole de la prudence (voyez Pignorius, mens. isiac. pag. 32.), ils insinuoient aux hommes, qu'une intelligence suprème reproduit sans cesse l'univers.

Les allégories furent perdues pour les Grecs, les Etrusques, & les Romains; ils continuerent néanmoins à regarder l'image de Priape comme un puissant préservatif, Ils n'y virent plus qu'un objet ridi<cb-> cule qui desarmeroit les envieux, & en partageant leur attention, affoibliroit leurs regards funestes. M. Gori, dans son Museum Etrusc. p. 143. nous assûre que les cabinets des curieux, en Toscane, sont remplis de ces amuletes que les femmes Etrusques portoient, & attachoient au cou de leurs enfans. Thomas Bartholin, de puerperio vet. p. 161. a donné un de ces infames amuletes, avec ceux que Pignorius avoit déjà donnés. Ceux - ci représentent seulement une main fermée, dont le pouce est inséré entre le doigt index & le doigt du milieu. Delrio, Vallefius, & Gutierrius, cités par Frommann, l. c. p. 60. assûrent que l'usage de cette main fermée s'est conservé en Espagne: on en fait de jayet, d'argent, d'ivoire, qu'on suspend au cou des enfans, & les femmes Espagnoles obligent à toucher cette main, ceux dont elles craignent les yeux malins. Voyez les mém. du chev. d'Arvieux, tom. III. p. 249.

Don Ramirez de Prado, dans son Pentecontarche, c. xxxj. p. 247 - 8. ajoûte que l'on appelle cette main higa, & il en tire l'origine du grec I)/U+GC, qui fait à l'accusatif I)/U+G*GA; il doit cette etymologie au docteur François Penna Castellon; mais ce medecin, dans ses vers, dit que l'iynx est un oiseau qui garantit de la fascination; c'est le motacella ou hoche - queue. Son opinion sur le mot higa, n'a point de fondement, mais elle a quelque rapport avec ce qu'on lit dans Suidas, que l'I)/U+GC est une petite machine, O)RGA/NIO/N *TI, dont les Magiciennes se servent pour rappeller leurs amans. Biser a transcrit ce passage de Suidas, dans ses notes greques sur le v. 1112. de la Lysistrata d'Aristophane. Psellus, dans ses scholies sur les oracles chaldaïques, p. 74. donne la description de ces machines: elle est assez vague, & l'on pourroit fort bien soupçonnèr qu'il y avoit parmi ces machines des nevrospastes ou pantins dont parlent Hérodote, Lucien, &c.

Don Ramirez de Prado a été copié par Balthasar de Vias noble Marseillois, dans ses Sylvoe regioe, pag. 333 - 4. (Notez que Mencken dans sa dissertation sur la fascination attribuée aux loüanges, a mal cité la Via regia de cet auteur au lieu de Sylvoe regioe). Ramirez nous apprend, au même endroit, qu'une vieille qui regarde un enfant, est obligée de lui présenter ses doigts dans cette disposition qu'on appelle higa. Nous appellons cela faire la figue, & les Allemans l'appellent feige; ces derniers ont un proverbe fort singulier: lorsqu'ils veulent préserver quelqu'un de la fascination, ils souhaitent: er hat ihm eine feige bewiesen, que le Seigneur d'en - haut lui montre la figue. Frommann, l. c. p. 335.

Perkins, lib. cit. c. vij. qu. 3. & plusieurs autres, se déchaînent contre les préservatifs des catholiques romains, les Agnus Dei, &c. Ces auteurs n'ont pas fait attention que de semblables amuletes étoient ufités parmi les premiers Chrétiens. Voyez Casalé, de R. vet. christian. p. 267. Le chancelier Bacon regarde comme illicites les amuletes, qu'il confond avec les autres cérémonies magiques, quand on les employeroit seulement comme des remedes physiques; parce que, dit - il, cette espece de magie tend à faire joüir l'homme avec fort peu de peine, de ce qui doit être la récompense d'un travail pénible: in sudore vultûs comedes panem tuum. De augm. scient. p. m. 130.

Goropius Becanus rapporte dans ses Origines d'Anvers, p. m. 26. que les femmes les plus respectables de cette ville, appelloient Priape à leur secours au moindre accident. Cette superstition subsistoit encore de son tems, quoique Godefroi de Bouillon marquis d'Anvers, dès qu'il se fut rendu maître de Jérusalem, leur eût envoyé le prépuce de Jesus - Christ; mais les femmes ne purent renoncer à leur premiere habitude.

Quoique les conciles ayent fait plusieurs canons

Next page


The Project for American and French Research on the Treasury of the French Language (ARTFL) is a cooperative enterprise of Analyse et Traitement Informatique de la Langue Française (ATILF) of the Centre National de la Recherche Scientifique (CNRS), the Division of the Humanities, the Division of the Social Sciences, and Electronic Text Services (ETS) of the University of Chicago.

PhiloLogic Software, Copyright © 2001 The University of Chicago.