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La difficulté de l'accouplement consiste en ce que les Grecs n'ont donné de l'axe d'un trigliphe à l'autre, que deux modules & demi, qui valent trente minutes, le métope étant d'un module & demi, & le trigliphe d'un module, & que lorsque les colonnes & les pilastres sont accouplés, il faut nécessairement que d'un axe de colon - ne à l'autre il y ait trente - quatre minutes, chaque demi - diametre étant d'un module, & chaque base de cinq mi - nutes; en sorte que trente minutes données par les Grecs, ne pouvant satisfaire à trente - quatre minutes qu'exige l'accouplement des modernes, il faut nécessairement hausser la frise de l'entablement de trois minutes, qui, au lieu de dix - huit, en aura vingt - un, pour donner en - suite vingt minutes à la largeur du métope, & quatorze à celle du trigliphe, qui ensemble égaleront trente qua - tre minutes nécessaires pour le bas des colonnes accou - plées deux à deux. De ce procédé il s'ensuit à la vérité que l'entablement acquiert trois minutes de plus que le quart de la hauteur de la colonne; mais il faut observer que non - seulement cette proportion a été sujette à va - riation dans tous les tems; que d'ailleurs cette partie su - périeure est toujours fort élevée de l'oeil du spectateur; & qu'enfin cette augmentation est préférable à faire un entablement de quatre modules un quart porté sur une colonne dorique de dix - sept modules, ainsi que Le Vau l'a pratiqué à son portique de Vincennes déjà cité; sys - tême qui renverse les lois fondamentales de l'art, & qui ôte absolument à l'ordre le caractere de virilité qu'il nous paroît essentiel de lui conserver.
Ce moyen qui n'est pas sans inconvénient, nous pa -
roît moins licencieux que tous les autres, & peut
faire appliquer cet ordre à tous les édifices où son ex -
pression paroîtroit convenable, en observant cepen -
dant que les mesures que nous venons de donner, ne
regardent que les angles saillans, & que lorsqu'il paroî -
tra nécessaire, pour donner plus de mouvement à son
ordonnance, de pratiquer des angles rentrans qu'il fau -
dra donner à ces derniers d'un axe de trigliphe à l'autre,
trente - sept minutes, au lieu de trente quatre, afin que
les mutules placés sous le sophite du larmier supérieur
de la corniche soient aussi sans aucune espece de péné -
tration. Autrement, on ne doit faire aucun cas de la dé -
coration de ce genre, parce que celle - ci n'étant mise en
oeuvre que pour embellir nos édifices, elle doit plaire à
tous les yeux, loin d'offrir la confusion & le desordre
qu'on remarque dans presque tous nos bâtimens fran -
çois où cet ordre préside. (Voyez ce que nous avons déjà
dit des fontaines, Tome VII. page 102.)
TROISIEME PARTIE.
Les édifices sacrés sont de tous les bâtimens ceux qui
devroient annoncer le plus de grandeur, de dignité &
de majesté, & rien n'est si négligé que la plûpart de nos
églises. En général nos églises paroissiales, & particulie -
rement les modernes, n'ont point ce caractere; elles ne
sont point assez vastes pour contenir les différens genres
d'ornemens dont on décore l'intérieur, & le plus sou -
vent ces décorations sont plus théatrales que convena -
bles à la maison du Seigneur.
Cette courte réflexion n'empêche pas que nous n'ap -
plaudissions aux chefs - d'oeuvre que renferment la plû -
part de nos monumens sacrés; mais nous n'en sommes
pas moins forcés de convenir qu'à l'exception de quel -
ques édifices gothiques, nous n'avons guéres d'ouvrages
modernes qui méritent quelque considération, & que le
Val de - Grace, la Sorbonne, l'Oratoire, sont peut - etre
les seules églises en cette ville qui offrent le plus d'objets
conformes à l'idée qu'on doit se former de l'ordonnan -
ce, de la décoration & de la disposition de nos temples.
Nous pourrions pousser plus loin nos observations
gritiques, & nous étendre sur les reproches que l'on
L'église du plan que nous donnons ici, ne paroît pas
d'abord un projet considérable, en comparaison des mo -
numens que nous venons de citer; mais néanmoins la
régularité de son ordonnance extérieure & intérieure,
& la simplicité louable de sa décoration, la rendent di -
gne d'être mise en parallele avec les deux églises des da -
mes de sainte Marie, l'une à la porte S. Antoine, l'autre
à Chaillot, aussi - bien qu'avec celle des dames de l'An -
nonciade à S. Denis; ouvrages du premier mérite en ce
genre; toutes trois exécutées sur les desseins des Man -
sards. D'ailleurs nous avons choisi ce projet d'abbaye
plûtôt que celui d'une église paroissiale, à cause des bâ -
timens qui le composent, & dont la distribution nous
rapproche davantage de la partie de l'Architecture qui
intéresse le plus grand nombre.
ARCHITECTURE ET PARTIES QUI EN DÉPENDENT. |TROISIEME PARTIE. |PLANCHES XVII. & XVIII.
(Page 18:5:8)
La Planche dix - septieme offre la distribution du pre -
mier étage, & la dix - huitieme tous les supplémens que
n'ont pu contenir les deux plans précédens; en sorte que
par ces trois Planches on est en état de concevoir toutes
les parties d'utilité, de commodité & d'agrément qu'il
convient de donner à une abbaye royale destinée à con -
tenir une abbesse, un certain nombre de religieuses, des
dames pensionnaires de dehors, des demoiselles pen -
sionnaires logées dans l'intérieur, & généralement toutes
les pieces principales, pourvûes des dégagemens qui leur
sont relatifs. La grandeur de l'échelle de ces plans, & la
précaution que nous avons prise de décrire l'usage de
chacun, nous dispense d'entrer dans un plus grand détail.
ARCHITECTURE ET PARTIES QUI EN DÉPENDENT. |TROISIEME PARTIE. |PLANCHE XIX.
(Page 18:5:8)
Cette Planche offre le frontispice de l'église & la fa -
çade extérieure des bâtimens du côté de la rue. Ces der -
niers sont d'un bon style, & se lient heureusement par
le moyen de la tour creuse, avec le portail de l'église
d'ordonnance grave & réguliere, & où cependant un
ordre ïonique eût peut - être été plus convenable que le
dorique, comme on le voit du côté des jardins.
ARCHITECTURE ET PARTIES QUI EN DÉPENDENT. |TROISIEME PARTIE. |PLANCHE XX.
(Page 18:5:8)
Cette Planche fait voir la façade du côté des jardins,
qui ayant trente - huit toises quatre pieds de longueur, a
pu être divisée par trois avant - corps & deux arriere -
corps; les trois premiers sont revêtus de pilastres ïoni -
ques, les deux derniers n'en ont seulement que l'enta -
blement. Ce bel étage est élevé sur un soubassement,
genre d'ordonnance préférable à beaucoup d'égards à
deux ordres pratiqués l'un sur l'autre, qui non - seulement
deviennent monotomes, mais ne distinguent jamais l'é -
tage supérieur d'avec l'inférieur.
Cette Planche offre la coupe prise dans le plan du rez -
de - chaussée sur la ligne D, E. On remarque dans cette
coupe l'intérieur de l'église, celle du choeur des dames
religieuses, le profil du grand escalier, & les dévelop -
pemens de la maçonnerie & de la charpente de la plus
grande partie de ce monument. On y remarque aussi,
quoiqu'en petit, ce genre de la décoration & des orne -
mens, dont le style ne peut faire que beaucoup d'hon -
neur à M. Franque, dont nous possédons à Paris & dans
la plus grande partie de nos provinces des ouvrages très -
estimés.
QUATRIEME PARTIE.
Après les temples, les édifices publics tiennent le pre -
mier rang dans l'Architecture; ce sont eux qui annoncent
l'opulence des cités, la splendeur des nations, & la bien -
faisance des princes. On comprend sous le nom d'édifices
publics, les hôtels - de - ville, les bourses, les hôtels des
monnoies, les bibliotheques, les manufactures, les pla -
ces, les marchés, les prisons, les hôpitaux, les arcs de
triomphe, les ponts, les fontaines, & généralement
tous ceux qui contribuent à l'embellissement, à l'utilité
& à la sureté des villes.
Ces divers bâtimens doivent s'annoncer en géné -
ral par une grandeur relative à leurs especes & à l'im -
portance des capitales où ils se trouvent élevés, par une
architecture qui n'ait rien de petit, par une ordonnance
simple mais noble, par une construction solide, & par -
ticulierement par de belles issues qui les présentent avec
dignité.
La plûpart de nos édifices publics manquent assez es -
sentiellement d'une partie de ces avantages, le plus grand
nombre n'ayant pas été élevés pour leurs destinations
actnelles, tels que la bibliotheque du Roi, la bourse, la
manufacture des Gobelins, l'hôtel des Monnoies, &c. d'un
autre côté, notre hôtel - de - ville, nos marchés & nos
hôpitaux sont d'une structure si ancienne, qu'ils ne peu -
vent servir d'exemple ni d'autorité; en sorte que nous
n'avons d'assez véritablement beaux édifices du genre
dont nous parlons, que la porte triomphale de S. Denis,
la fontaine de Grenelle, plusieurs ponts & quelques pla -
ces qui distinguent cette capitale des autres capitales du
Royaume.
Choisissons en particulier un seul de ces monumens
élevé de nos jours avec éclat dans l'une de nos provin -
ces; & d'après cet exemple, rapportons une partie des
précautions qu'on doit prendre & qui doivent être com -
munes à toutes, ces explications ne pouvant nous per -
mettre de détails particuliers sur chacun de nos édifices
publics.
Ce monument, commencé à bâtir en 1758 par la ville
de Rouen, sur les desseins de M. le Carpentier, archi -
tecte du Roi, a été projetté avec toutes les précautions
que nous venons d'observer plus haut, c'est - à - dire que
non - seulement l'architecte & les officiers municipaux se
sont proposés d'élever le monument dont nous parlons,
mais de prévoir le bon effet qu'il pourroit acquérir en -
core en le situant de maniere à être apperçu d'un éloigne -
ment convenable, tel, par exemple, que de la métro -
politaine d'une part, & de l'hôtel - Dieu de l'autre, tous
deux éloignés de 530 toises, distance à - peu - près au mi -
lieu de laquelle est placé l'hôtel - de - ville dont nous par -
lons. A cette situation avantageuse on a observé une prin -
cipale rue bien dressée & bien alignée, & d'un côté une
place royale de 58 toises de longueur sur 45 de largeur,
de l'autre un jardin de 64 toises de longueur sur 36 de
largeur; & enfin d'une double place publique quadran -
gulaire & à pans d'environ 50 toises de diametre; projet
immense conçu en grand, bien percé, & toujours le pre -
La façade de cet hôtel - de - ville du côté de la place
royale, est d'ordre ïonique, de deux piés & demi de
diametre, élevé sur un soubassement, & chargé de re -
fend: au - dessus des deux étages, sur l'avant - corps du
milieu seulement, s'éleve un attique surmonté d'un dô -
me qui est terminé par un béfroi: dans le soubassement
des deux pavillons de cette façade, sont placées des fon -
taines avec des inscriptions: enfin aux pieds de cet édi -
fice regne une terrasse continue qui empatte tous ce bâ -
timent, & lui procure un caractere de fermeté, le pro -
pre des édifices publics. Nous ne parlerons point ici des
détails (a).
On construit aussi maintenant à Reims, sous la conduite & sur les des -
seins de M. le Gendre, ingénieur de la province de Champagne, une placè
publique qui réunit la noblesse, la simplicité, & la convenance. Elle sera
décorée d'une statue pédestre de Louis XV. protecteur du Commerce &
des Loix, de l'exécution de notre célebre Pigal.
CINQUIEME PARTIE.
Les maisons royales & les palais des rois doivent être
considérés comme des bâtimens d'habitation de la plus
grande importance, & comme tels ils n'ont pu entrer
dans cette collection; ce qui fait que nous nous sommes
réduits à donner les desseins d'un grand hôtel, demeure
qui, après les palais & les maisons royales, doit tenir le
premier rang. Nous dirons seulement ici que les maisons
royales ne different des palais qu'en ce que ceux - ci sont or -
dinairement élevés dans les capitales, les maisons royales
à la campagne. La disposition de ces dernieres & l'ordon -
nance de leurs façades, doivent par cette raison avoir un
caractere moins grave dans leur décoration, & une fer -
meté moins absolue dans les parties qui les composent.
On doit regarder les palais comme le lieu de la représen -
tation du monarque, les maisons royales seulement
comme la demeure du prince, où dans la belle saison il
vient avec sa famille & ses courtisans se délasser des soins
du gouvernement.
Dans les palais il faut un caractere noble & une ma -
gnificence imposante, dans les maisons royales il suffit
d'y observer de la grandeur & de l'agrément. Au reste
l'agrément dont nous voulons parler doit moins s'en -
tendre ici de l'ordonnance de leur décoration que de la
situation avantageuse du lieu, de leurs issues agréables,
de leurs dépendances assorties, & de l'étendue de leurs
jardins de propreté; l'ordre ïonique peut être préféré
pour les dehors, le corinthien pour les dedans. Ces or -
dres semblent autoriser une certaine réitération dans les
avant - corps & les pavillons extérieurs, & une certaine
élégance dans les appartemens, qui assignent à ces édifi -
ces le style qui leur est propre.
Trianon pourroit être considéré comme une assez belle
maison royale, s'il n'étoit pas situé si près de Versailles.
Ce n'est pas qu'on ne puisse admettre plusieurs étages
dans un bâtiment de l'espece dont nous parlons; mais la
suppression des combles de Trianon, l'ordre ïonique qui
y préside, la beauté de ses jardins, tout y concourt à
nous donner une idée de l'agrément que nous recom -
mandons.
Marli peut être aussi considéré comme une maison
royale plûtôt que comme un château, rien n'annonçant
à Marli ce caractere.
Il nous seroit plus difficile encore de citer plusieurs
exemples de palais à Paris. Le Luxembourg & le Palais -
royal ont un caractere de pesanteur dans les masses &
de si petites parties dans les détails, qu'ils ne peuvent
servir d'autorité. Le palais des Tuileries, quoique con -
tenant plus d'un chef - d'oeuvre, est composé d'une archi -
chitecture si desassortie, qu'il est presque dans le cas du
précédent. A l'égard du palais Bourbon, il est d'une or -
donnance si mesquine, & chargé de détails si peu cor -
rects, qu'il est moins capable qu'aucun d'être imité pour
ce genre de productions. Au défaut de tels exemples,
citons quelques - uns de nos beaux hôtels, & disons un
mot de l'ordonnance qui les doit caractériser.
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Text Services (ETS) of the University of Chicago.
(a) Nous avions promis dans le quatrieme Volume, p. 420. de donner
les desseins de l'abbaye de Corbie, par M. Franque, & celle de Clairvaux,
par M. le Carpentier; mais nous nous sommes décidés far celle de Pan -
themont, aussi du dessein de M. Franque, & préféré l'hôtel - de - ville de
Rouen, par M. le Carpentier, afin de jetter plus de varieré dans cette col -
lection.
[p. 5:9]
(a) On peut voit cette disposition générale dans la collection de ce pro -
jet que M. le Carpentier a fait graver.