Dictionnaire de l'Académie Française,
6ème edition (1835)

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s'y passe, n'y prendre aucun intérêt. N'être étranger nulle part, Avoir ce qu'il faut pour ne se trouver embarrassé nulle part, ou pour être bien vu, bien accueilli partout. Cet homme sait presque toutes les langues de l'Europe, il n'est étranger nulle part. Avec une telle célébrité, on n'est étranger nulle part.

ÉTRANGER signifie par extension, Qui ne se mêle point d'une chose, d'une affaire, qui n'y a point de part. Je suis tout à fait étranger à cela, à cette affaire, à cette intrigue. Il resta toujours étranger à ce qui se passait, aux mesures qui furent prises.

Être étranger à une science, à un art, etc., N'en avoir aucune notion, aucune connaissance. Les personnes les plus étrangères à la peinture sentent les beautés de ce tableau. Cet homme est absolument étranger à la musique, à la chimie, etc.

Être étranger à une compagnie, à une famille, etc., N'en pas faire partie. Les personnes étrangères à l'association, à la famille.

ÉTRANGER se dit également De ce qui ne concerne point une personne, ou De l'art, de la science, etc., qu'elle ignore. Ces considérations me sont tout à fait étrangères. La musique, la chimie lui est entièrement étrangère.

Il se dit encore De ce qui n'a aucun rapport ou aucune conformité avec la chose dont il s'agit. Un fait étranger à la cause. Une dissertation étrangère au sujet. Avoir des habitudes étrangères à toute espèce d'intrigue.

Il se dit aussi De ce qui n'est pas naturel ou propre à une personne, à une chose. Une femme qui emprunte des charmes étrangers. Il se targue d'un mérite qui lui est étranger. Une force étrangère met ces corps en mouvement.

Il se dit pareillement Des choses qui ne sont pas de même nature que le corps auquel elles sont unies, alliées. De l'argent combiné avec des substances, des matières étrangères.

En Chirur. et en Médec., Corps étranger, Toute chose qui se trouve contre nature dans le corps de l'homme ou de l'animal, soit qu'elle vienne de dehors, comme des morceaux de bois, de plomb, de linge, de drap, soit qu'elle y ait été engendrée ou formée. Il ne peut guérir tant que ce corps étranger n'aura pas été retiré de sa plaie. Les vers qui s'engendrent dans les abcès, le sable qui se forme dans les reins, les esquilles d'os, sont des corps étrangers. Les plaies se rouvrent quand il y est resté des corps étrangers.

ÉTRANGER, ÈRE s'emploie souvent comme substantif, et se dit d'Une personne qui n'est pas du pays où elle se trouve. C'est un étranger. Il a épousé une étrangère. Accueillir les étrangers. Les étrangers sont bien reçus en France. Il ne faut repousser ni le pauvre ni l'étranger.

Il signifie aussi, Celui, celle qui n'est pas d'une famille, d'une compagnie, etc. Il a donné son bien à un étranger pour l'ôter à ses parents. Il repousse toute sa famille, et ne voit que des étrangers. Il ne faut pas communiquer les secrets de la compagnie à des étrangers. Nous voulons rester entre nous, ne laissez entrer aucun étranger.

Il se prend quelquefois absolument, et désigne alors, Le pays étranger. Faire passer des marchandises à l'étranger. Les ouvrages français qui s'impriment à l'étranger. Passer à l'étranger, S'expatrier. On ne l'emploie guère que dans ces sortes de phrases.

ÉTRANGER. v. a. Chasser d'un lieu, faire éloigner d'un lieu, désaccoutumer d'y venir. Les rats, les moineaux ont étrangé les pigeons du colombier. Étranger le gibier d'un pays. Il a tant fait la chasse aux loups, qu'il les a étrangés de ce pays-là.

Il ne se dit en parlant Des personnes que dans le langage familier. Il a su étranger les importuns qui venaient chez lui. Cet aubergiste est si cher, qu'il a étrangé toutes ses pratiques.

Il s'emploie aussi avec le pronom personnel. Le gibier s'est étrangé de cette plaine. Ce verbe a vieilli.

ÉTRANGÉ, ÉE. participe

ÉTRANGETÉ. s. f. Caractère de ce qui est étrange. L'étrangeté de sa conduite, de son humeur, de ses manières, de son style.

ÉTRANGLEMENT. s. m. Action d'étrangler, et plus ordinairement L'état de celui qui est étranglé. Des indices d'étranglement. Un os arrêté dans la gorge lui a causé un étranglement qui a failli le faire périr.

Il se dit aussi d'Un resserrement, d'un rétrécissement, accidentel ou naturel, dans quelque partie d'une chose plus ou moins allongée. L'étranglement des vaisseaux gêne la circulation du sang. L'étranglement d'une hernie. Le corps de plusieurs insectes, tels que l'araignée, la guêpe, etc., est divisé en deux par un étranglement. La tige de cette plante a plusieurs étranglements.

ÉTRANGLER. v. a. Faire perdre la respiration ou la vie, en pressant le gosier ou en le bouchant. Les voleurs l'ont étranglé. Il le tenait à la gorge, et voulait l'étrangler. Une esquinancie l'a étranglé. Ce morceau l'a étranglé. Le col de sa chemise l'étrangle. On l'emploie avec le pronom personnel. Il s'est étranglé. Cet enfant s'étrangle à force de crier.

Il signifie aussi figurément, Trop resserrer, ne pas donner la largeur, l'étendue nécessaire. Il ne fallait pas étrangler ainsi les manches de cette robe. Vous étranglez trop ce couloir.

Il se dit également en parlant Des endroits d'un discours où l'on ne s'est pas assez étendu. Vous avez bien étranglé cet endroit-là. On dit dans le même sens, Étrangler un ouvrage, étrangler un sujet, etc.

Fig., Étrangler une affaire, La juger à la hâte, sans l'avoir examinée.

ÉTRANGLER est quelquefois neutre. Secourez-moi, j'étrangle.

Pop. et par exagérat., Étrangler de soif, Avoir grand'soif.

ÉTRANGLÉ, ÉE. participe Il se dit adjectivement De ce qui est accidentellement ou naturellement resserré, rétréci dans quelque partie de sa longueur. Intestin étranglé. Hernie étranglée. Le corps de la guêpe est étranglé vers le milieu. La tige de cette plante est étranglée de distance en distance.

Il se dit aussi De certaines choses qui n'ont pas la largeur qu'elles doivent avoir. Ce corridor est bien étranglé. Cette allée de jardin est fort étranglée.

Habit étranglé, Habit trop étroit, qui n'a pas assez de tour.

ÉTRANGUILLON. s. m. Sorte de maladie qui est pour les chevaux ce que l'esquinancie est pour les hommes.

Poire d'étranguillon, Espèce de poire fort âpre.

ÉTRAPE. s. f. T. d'Agricult. Petite faucille qui sert à couper le chaume.

ÉTRAPER. v. a. T. d'Agricult. Couper avec l'étrape. Étraper du chaume.

ÉTRAPÉ, ÉE. participe

ÉTRAVE. s. f. T. de Marine. L'assemblage des pièces de bois courbes qui forment l'avant, la proue d'un bâtiment. Le mât de beaupré s'appuie sur l'étrave. La longueur d'un navire se mesure de l'étrave à l'étambot.

ÊTRE. Verbe que les grammairiens appellent Le verbe substantif. (Je suis, tu es, il est; nous sommes, vous êtes, ils sont. J'étais. Je fus. J'ai été. Je serai. Je serais. Sois, soyez. Que je sois, que tu sois, qu'il soit; que nous soyons, que vous soyez, qu'ils soient. Que je fusse. Que j'aie été. Que j'eusse été. Étant. Ayant été.) Ce verbe signifie absolument, Exister. Dieu dans l'Écriture sainte s'appelle Celui qui est. «Celui qui est m'a envoyé,» disait Moïse. Tous les hommes qui ont été, qui sont, ou qui seront. Vous n'étiez pas encore au monde, ou simplement, Vous n'étiez pas encore, lorsque cet événement arriva. Il n'est plus, Il est mort.

Il s'emploie aussi Lorsqu'on attribue à quelqu'un ou à quelque chose une qualité, un état, une manière d'exister absolue ou relative. Il est le père de cet enfant. Être père. Être avocat, médecin, soldat, etc. Je ne veux pas être plus que je ne suis, que ce que je suis. Je suis l'homme dont on vous a parlé. Il sera mon héritier. Je fus son protecteur, son ami. Dieu est éternel. Les hommes sont mortels. Cette proposition est vraie, est fausse. Entre amis, tout doit être commun. Cet homme est sage, est grand, est vertueux, est fou, n'est pas savant. Être pauvre. Être malade. Être mort. Être bien. Être mal. Cela est bien. Son médecin dit qu'il est mieux. S'il est bien, qu'il s'y tienne. Être couché, debout, assis, etc.

Prov., Il faut être tout un ou tout autre, Il faut avoir une conduite, une manière de penser décidée.

Prov., On ne peut pas être et avoir été, On ne peut pas être toujours jeune.

Cela est, cela n'est pas, Cela est vrai, cela n'est pas vrai. Cela sera, cela ne sera pas, Cela arrivera, cela n'arrivera pas.

Ainsi soit-il. Espèce de voeu par lequel on termine plusieurs prières religieuses. On le dit quelquefois, dans le langage ordinaire, par manière de souhait.

Soit, troisième personne du singulier du subjonctif, s'emploie souvent Pour marquer adhésion, consentement. Eh bien, soit. Voyez SOIT, conjonction, à sa place alphabétique.

Bien-être. Voyez cette expression à sa place alphabétique, dans la lettre B.

ÊTRE dans l'acception qui précède, s'emploie d'une façon particulière, avec l'adjectif démonstratif Ce, pris pour Cela et se rapportant à une personne, à une chose,

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