Dictionnaire de l'Académie Française,
6ème edition (1835)

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a étouffé son enfant. Hercule étouffa le redoutable Antée. On dit par exagération, dans le langage familier, Que la peste l'étouffe!

Il est quelquefois neutre, et signifie, Avoir la respiration empêchée; ou Mourir faute d'air. Il n'y a point d'air dans cette chambre, on y étouffe. Délacez cette femme, elle étouffe. Il étouffa au milieu des plus horribles convulsions. Nous pensâmes étouffer de chaud.

Fig. et fam., Étouffer de rire, Rire avec excès, jusqu'à perdre la respiration.

ÉTOUFFER se dit également De ce qui dérobe aux plantes l'air nécessaire à leur végétation. Les mauvaises herbes étouffent le blé. Cet arbre étouffe les arbustes qui l'entourent.

Il signifie aussi, Éteindre, en interceptant l'air. Étouffer du charbon, de la braise.

ÉTOUFFER signifie figurément, Supprimer, cacher, surmonter. Étouffer les cris de quelqu'un. Tâchez d'étouffer vos soupirs, vos plaintes, vos ressentiments. Je ne saurais étouffer ma douleur. Étouffer les remords de sa conscience. Étouffez ces soupçons, de pareils soupçons.

Étouffer des sons, Les rendre moins éclatants, les amortir. Il y a, dans les pianos, une pédale qui sert à étouffer les sons.

ÉTOUFFER signifie aussi, Détruire, dissiper, faire cesser. Étouffer les germes du vice. Étouffer les talents. Étouffer une révolte, une hérésie, une sédition, une guerre civile. Étouffer une erreur.

Étouffer une affaire, étouffer une querelle, Empêcher qu'elle n'éclate, qu'elle n'ait des suites.

ÉTOUFFÉ, ÉE. participe Cris étouffés, Les cris sourds d'une personne dont la respiration est gênée. Rire étouffé, Celui qui échappe à une personne, malgré les efforts qu'elle fait pour ne point rire.

Dans l'Ancien Testament, Viandes étouffées, se dit de La chair des animaux qu'on avait tués sans verser leur sang.

ÉTOUFFOIR. s. m. Espèce de boîte faite de métal, dont on se sert pour étouffer et éteindre des charbons.

ÉTOUFFOIR se dit aussi de Petites pièces de drap qui servent, dans un piano, à étouffer les sons, et qui s'abaissent au moyen d'une pédale.

ÉTOUPE. s. f. La partie la plus grossière, le rebut de la filasse, soit de chanvre, soit de lin. Étoupe de chanvre. Étoupe de lin. Paquet d'étoupe. Fil d'étoupe. Toile d'étoupe. Boucher avec de l'étoupe.

Fig. et fam., Mettre le feu aux étoupes, Déterminer tout à coup quelque mouvement impétueux, comme la colère, un amour violent, etc. Quand les esprits sont aigris, il faut peu de chose pour mettre le feu aux étoupes. On dit dans un sens analogue que Le feu prend aux étoupes.

ÉTOUPER. v. a. Boucher avec de l'étoupe ou avec quelque autre chose semblable. Les conduits sont étoupés. Le vin s'enfuit, il faut étouper les fentes du tonneau. Étouper un bateau. Étouper des trous. S'étouper les oreilles.

ÉTOUPÉ, ÉE. participe

ÉTOUPILLE. s. f. T. d'Artillerie. Petite mèche inflammable qu'on introduit dans la lumière d'une pièce, et qui sert d'amorce.

ÉTOUPILLON. s. m. T. d'Artillerie. Petite mèche d'étoupe suiffée qu'on introduit dans la lumière d'une pièce, pour préserver la charge de l'humidité.

ÉTOURDERIE. s. f. Action d'étourdi, ou Habitude de faire des actions d'étourdi. C'est une étourderie. Il fait toujours des étourderies. Ce sont là de vos étourderies. On ne saurait le corriger de son étourderie. Il est d'une étourderie inconcevable.

ÉTOURDI, IE. adj. Qui agit sans réflexion, sans considérer ce qu'il fait. C'est un jeune homme bien étourdi. Cette femme est fort étourdie.

Il se prend aussi substantivement. C est un étourdi, un petit étourdi, un jeune étourdi, un grand étourdi, un franc étourdi. Il fait tout en étourdi. Vous êtes une étourdie. Tous ces gens-là sont des étourdis, ils ne savent ce qu'ils font.

Prov., Notre homme ne fut ni fou ni étourdi, Il sut prendre son parti sur-le-champ.

Prov., Être étourdi comme le premier coup de matines, comme un hanneton, Être fort étourdi.

À L'ÉTOURDIE. loc. adv. A la manière d'un étourdi, inconsidérément. Cette affaire est importante, il ne faut pas y aller à l'étourdie. Agir à l'étourdie.

ÉTOURDIMENT. adv. À l'étourdie. Il fait toutes choses si étourdiment, que... Vous avez agi bien étourdiment. Il a entrepris cette affaire fort étourdiment, Sans l'examiner, sans prendre conseil.

ÉTOURDIR. v. a. Causer dans le cerveau un ébranlement qui trouble, qui suspend en quelque sorte la fonction des sens. Il lui donna sur la tête un coup de bâton qui l'étourdit. Le grand bruit du canon, des cloches, des tambours étourdit. Vous m'étourdissez avec votre caquet. Il crie à pleine tête, il nous étourdit. Le branle du bateau, du carrosse étourdit.

Fam., Étourdir les oreilles, Importuner, fatiguer par trop de paroles. Vous m'étourdissez les oreilles. Il m'a étourdi les oreilles de sa réclamation, de ses plaintes.

ÉTOURDIR s'emploie aussi figurément, et signifie, Causer de l'étonnement, de l'embarras. Cette nouvelle, cette défaite, ce coup imprévu les a fort étourdis. Ils en sont tout étourdis.

Fig. et fam., Étourdir la grosse faim, La calmer en mangeant quelque peu.

Fig., Étourdir une douleur, en parlant D'une douleur physique, L'endormir, empêcher qu'elle ne soit aussi sensible. Ce remède ne guérit pas, il ne fait qu'étourdir la douleur. En parlant D'une douleur morale, Faire que l'esprit en soit moins occupé, en soit distrait. Il va à la promenade, il voit le monde pour étourdir sa douleur.

S'étourdir sur quelque chose, Se distraire de quelque chose, s'empêcher d'y penser. Il s'est étourdi sur cette perte. Il s'étourdit sur le temps à venir. On dit dans le même sens, Chercher à s'étourdir, Chercher à étourdir sa douleur, à dissiper son chagrin, son inquiétude, etc.

ÉTOURDI, IE. participe Il tomba tout étourdi du coup.

Il se dit quelquefois Des parties du corps où il ne reste plus qu'un léger ressentiment de la douleur qu'on y a éprouvée. Sa goutte est passée, mais il a le pied encore tout étourdi, la main étourdie. Ce sens est peu usité.

Prov. et fig., Il est encore tout étourdi du bateau, se dit D'un homme qui n'est pas encore bien remis de quelque fâcheuse affaire, d'une maladie dont il vient de sortir, etc.

ÉTOURDISSANT, ANTE. adj. Qui étourdit. Un bruit étourdissant. Ces cloches sont étourdissantes.

ÉTOURDISSEMENT. s. m. Impression, ébranlement causé par quelque chose qui étourdit. Grand étourdissement. Causer de l'étourdissement. Il a des étourdissements. Il lui a pris un étourdissement.

Il se dit, figurément, Du trouble que cause un malheur, une mauvaise nouvelle. Ils ne sont pas tout à fait revenus de leur étourdissement. Le premier étourdissement passé, on parvint à calmer sa douleur.

ÉTOURNEAU. s. m. Sorte d'oiseau de passage, dont le plumage noirâtre est marqué de petites taches grises. On l'appelle aussi Sansonnet. Les étourneaux ne vont que par bandes. Une bande d'étourneaux.

Fig. et fam., C'est un étourneau, se dit D'un jeune homme léger et inconsidéré. Vous êtes un étourneau, un plaisant étourneau.

ÉTOURNEAU se dit encore d'Un cheval qui a le poil gris-jaunâtre. En ce sens, il se prend aussi adjectivement. Un cheval étourneau.

ÉTRANGE. adj. des deux genres Qui n'est pas dans l'ordre, dans l'usage commun; qui est singulier, extraordinaire, inconcevable. Il y a des coutumes bien étranges dans ce pays-là. Cela est étrange, il est vraiment étrange que vous ne croyiez jamais vos amis. Étrange aveuglement. Étrange affaire. Événement étrange. Chose étrange! Étrange situation. Étranges manières. Étrange façon de faire, d'agir. Je trouve bien étrange que vous ayez fait cela. Étrange humeur. Étrange esprit. Voilà un homme étrange. C'est une personne bien étrange.

ÉTRANGEMENT. adv. D'une manière étrange, contre l'ordre et l'usage communs, extrêmement, excessivement. Il est étrangement bizarre. Il l'a étrangement maltraité.

ÉTRANGER, ÈRE. adj. Qui est d'une autre nation, qui appartient, qui a rapport à une autre nation. Coutumes, lois étrangères. Les gouvernements étrangers. La guerre civile et la guerre étrangère. Langue étrangère. Accent étranger. Plante étrangère. Climats, pays étrangers. Il a l'air étranger. Princes étrangers. Les puissances étrangères. Les ministres étrangers résidant à Paris. On dit de même: Les nations étrangères. Un peuple étranger.

Ministre des affaires étrangères, Ministre qui entretient les relations de l'État avec les gouvernements étrangers, et qu'on appelle aussi Ministre des relations extérieures. On dit dans un sens analogue, Le ministère, le département des affaires étrangères.

Fig., Être étranger dans son pays, Ne point en connaître les usages, ou Ignorer ce qui

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