ENCYCLOPÉDIE OU DICTIONNAIRE RAISONNÉ
DES SCIENCES, DES ARTS ET DES MÉTIERS

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avoit ses propres enseignes faites en forme de petites bannieres, d'une étosse de pourpre, où il y avoit des dragons peints. Chaque manipule & chaque centurie avoit aussi ses enseignes particulieres de même couleur, sur lesquelles étoient des lettres pour désigner la légion, la cohorte & la centurie.

On distinguoit les légions par l'ordre de leur levée, comme premiere, deuxieme, troisieme, ou par les noms des empereurs auteurs de leur fondation; comme legio Augusta, Claudia, Flavia, Trajana, Ulpia, Gordiana, &c. Elles furent encore distinguées dans la suite par des épithetes qu'elles avoient méritées pour quelque belle action, comme celle qui fit surnommer une légion la foudroyante, une autre la victorieuse; ou même pour quelque défaut qui lui étoit propre, comme la paillarde. Enfin elles retinrent quelquefois le nom des provinces où elles servoient, comme l'illyrienne, la macédonienne, la parthique, la gauloise, &c.

Il nous reste à parler de la cavalerie qui composoit chaque légion. On lui donnoit le nom d'aîle, parce qu'on la plaçoit ordinairement de maniere, qu'en couvrant les flancs elle en formoit les aîles. On la divisoit en dix parties ou brigades, autant qu'il y avoit de cohortes; & chaque brigade étoit forte, à proportion du total de la cavalerie de la légion. Si elle passoit six cens chevaux, chaque aîle ou brigade étoit de deux turmes ou compagnies de trente - trois chevaux chacune. La turme se subdivisoit en trois décnries ou dixaines, qui avoient chacune un décurion à leur tête, dont le premier commandoit à toute la turme, & en son absence le second. On prenoit toujours un de ces premiers décurions, pour commander chaque aîle ou brigade, & en cette qualité il étoit appellé préfet de cavalerie; il avoit rang au - dessus du petit tribun, ou comme nous dirions du colonel d'infanterie.

Toute la cavalerie romaine qu'établit Romulus dans les légions qu'il institua, ne consistoit qu'en trois cens jeunes hommes, qu'il choisit parmi les meilleures familles, & qu'on nommoit celeres; c'est là l'origine des chevaliers romains. Servius Tullius porta ce nombre à dix - huit cens cavaliers, & en forma dix - huit centuries. Ils avoient un cheval fourni & entretenu aux dépens de l'état. Cependant cette cavalerie n'etant pas suffisante, on l'augmenta en faisant les levées pour les légions; mais on observa de la tirer d'entre les plébéïens aisés, parce qu'on les obligea de se fournir de monture à leurs dépens. Ils n'avoient encore point d'autres armes défensives qu'un mauvais bouclier de cuir de boeuf, & pour armes offensives, qu'un foible javelot.

Mais comme on éprouva les desavantages de cette armure, on les arma à la grecque, c'est - à - dire de toutes pieces; leurs chevaux même étoient bardés au poitrail & aux flancs. Le cavalier avoit un casque ouvert, sur lequel étoit un grand panache de plumes, ou un ornement relevé qui en tenoit lieu. Une cotte de mailles ou à écailles le couvroit jusqu'au coude & descendoit jusqu'aux genoux, avec des gantelets ou un épais bouclier.

Les armes offensives étoient une grosse javeline ferrée par les deux bouts, & une épée beaucoup plus longue que celle de l'infanterie; c'est ainsi que Polybe, l. VI. c. jv. nous décrit l'armure de la cavalerie des légions romaines.

Elle ne se servoit point d'étriers, & n'avoit que des selles rases. Les cavaliers pour monter à cheval étoient obligés de se lancer dessus tout armés, & ils apprenoient à faire cet exercice à droite comme à gauche; il n'étoit pas non plus d'usage de ferrer leurs chevaux, quoiqu'on le pratiquât pour les mules.

Parmi les légionaires romains il n'y avoit point de cavalerie légere, elle n'étoit connue que dans leurs troupes auxiliaires; mais les empereurs en établirent sous le nom d'archers, lesquels pour être plus agiles, ne portoient aucune armure, & n'avoient que le carquois plein de fleches, l'arc & l'épée. Quant aux étendarts & cornettes de la cavalerie, on les distinguoit de celles de l'infanterie, par la couleur qui étoit bleue, & parce qu'elles étoient taillées en banderolles.

On mettoit sous la garde du premier capitaine les étendarts & cornettes de la cavalerie dans un asyle assuré, ainsi que les aigles ou drapeaux de l'infanterie étoient sous la garde du porte - aigle. Les cavaliers & les soldats des légions portoient leur argent en dépôt dans ces deux endroits. Végece, c. xx. l. II. nous apprend qu'on y déposoit encore la moitié des gratifications qu'on faisoit aux troupes, de peur qu'elles ne dissipassent tout en débauches & en folles dépenses.

Ce furent les empereurs qui imaginerent l'usage de faire aux légions des donatifs, pour me servir des mêmes termes des auteurs. On partageoit ces donatifs en dix portions, une pour chaque cohorte, sur quoi toute la légion mettoit quelque chose à part dans un onzieme sac, pour la sépulture commune; quand un soldat mouroit, on tiroit de ce sac dequoi faire ses funérailles.

Enfin, lorsque les légions avoient remporté quelque victoire, on ornoit de lauriers les aigles romaines, les étendarts de la cavalerie, les enseignes où étoit le portrait de l'empereur, & on faisoit brûler des parfums devant elles.

Voilà les particularités les plus importantes sur cette matiere; je les ai receuillies avec quelque soin de Tite - Live, de Denys d'Halicarnasse, de César, de Polybe, de Végece, de Frontin, & d'autres auteurs; en y mettant de l'ordre, j'ai pris pour guide des gensdu métier. (D. J.)

Légion fulminante

Légion fulminante, (Hist. rom.) étoit une légion de l'armée romaine, & composée de soldats chrétiens qui, dans l'expédition de l'empereur Marc - Aurele contre les Sarmates, Quades & Marcomans, sauverent toute l'armée prête à périr de soif, & qui obtinrent par leurs prieres une pluie abondante pour l'armée romaine, tandis que l'ennemi essuyoit de l'autre côté une grêle furieuse, accompagnée de foudres & d'éclairs épouvantables.

C'est ainsi que les historiens ecclésiastiques rapportent ordinairement ce fait, & toute cette histoire est sculptée en bas - relief sur la colonne Antonine. C'est de - là qu'est venu le nom de fulminant, quoiqu'il y en ait qui prétendent que la légion composée de ces chrétiens, s'appelloit déja auparavant la légion fulminante. Voyez Légion.

Légion Thébéenne

Légion Thébéenne, (Hist. eccl.) nom donné par quelques auteurs à une légion des armées romaines, qui résolue de ne point sacrifier aux idoles, souffrit le martyre sous les empereurs Dioclétien & Maximilien, vers l'an de J. C. 297.

Maximilien, disent ces auteurs, se trouvant à Octodurum, bourg des Alpes cottiennes dans le bas Vallais, aujourd'hui nommé Martinach, voulut obliger son armée de sacrifier aux fausses divinités. Les soldats de la légion thébéenne pour s'en dispenser, s'en allerent à huit milles de là à Agaunum, qu'on appelle à présent Saint - Maurice, du nom du chef de cette légion. L'empereur leur envoya dire de venir sacrifier, ils le refuserent nettement, & l'on les décima sans qu'ils fissent aucune résistance. Entuite Maximien répéta le même ordre aux soldats qui restoient; même refus de leur part. On les massacra; & tout armés qu'ils étoient & en état de résister, ils se présenterent à leurs persécuteurs la gorge nue, sans se prévaloir de leur nombre, & de la facilité qu'ils avoient de défendre leur vie à la pointe de leur

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