ENCYCLOPÉDIE OU DICTIONNAIRE RAISONNÉ
DES SCIENCES, DES ARTS ET DES MÉTIERS

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Dans les commencemens de la république, les seuls citoyens romains inscrits au rôle des tributs, soit qu'ils habitassent Rome, ou qu'ils demeurassent à la campagne, formerent ces légions invincibles, qui rendirent ce peuple les maîtres du monde.

Les légions étoient composées d'infanterie & de cavalerie, dont le nombre a varié sans cesse; de sorte qu'on ne doit pas être surpris, si les auteurs qui en ont parlé, paroissent se contredire, puisque leurs contradictions ne viennent que de la difference des tems.

D'abord, sous Romulus instituteur de ce corps, la légion n'etoit que de trois mille hommes d'infanterie, & de trois cens chevaux. Sous les consuls, elle fut long - tems de quatre mille, ou de quatre mille deux cens fantassins, & de trois cens chevaux. Vers l'an de Rome 412, elle étoit de cinq mille hommes d'infanterie. Pendant la guerre que Jules - César fit dans les Gaules, ses légions se trouverent encore à - peu - près composées du même nombre d'hommes. Sous Auguste, les légions avoient six mille cent santassins, & sept cens vingt - six chevaux. A la mort de ce prince, elles n'étoient plus que de cinq mille hommes d'infanterie, & de six cens chevaux. Sous Tibere, elles revinrent à six mille hommes de pié, & six cens cavaliers. Comme Septime Severe imagina de former, à l'imitation des Macédoniens, une phalange ou bataillon quarré de trente mille hommes, composé de six légions, nous apprenons de ce trait d'histoire, que la légion étoit alors de cinq mille hommes. Sous les empereurs suivans, elle reprit l'ancien état qu'elle avoit sous Auguste.

Il résulte évidemment de ce détail, que pour connoître la force des armées romaines dans les différens tems, il faut être au fait du nombre des légions que Rome levoit, & du nombre d'hommes qui composoient chaque légion. Les variations ont été fort fréquentes sur ce dernier point; elles l'ont été de même par rapport au premier, du - moins sous les empereurs; car du tems de la république, le nombre des légions fut long - tems limité à quatre légions romaines, dont chaque consul commandoit deux, avec autant des alliés.

Quand Annibal se fut emparé de la citadelle de Cannes, on sit à Rome, dit Polybe, ce qui ne s'étoit pas encore fait; on composa l'armée de huit légions chacune de cinq mille hommes, sans les alliés. C'étoient alors des légions soumises à l'état; mais quand le luxe eut fait des progrès immenses dans Rome, & qu'il eut consumé le bien des particuliers, le magistrat comme le simple citoyen, l'officier, & le soldat, porterent leur servitude où ils crurent trouver leur intérêt.

Les légions de la république non - seulement augmenterent en nombre, mais devinrent les légions des grands & des chefs de parti; & pour attacher le soldat à leur fortune, ils dissimulerent ses brigandages, & négligerent la discipline militaire, à laquelle leurs ancêtres devoient leurs conquêtes & la gloire de Rome.

Ajoutons que les légions ne furent composées de citoyens de la ville de Rome, que jusqu'à la destruction de Carthage; car après la guerre des alliés, le droit de bourgeoisie romaine ayant été accordé à soutes les villes d'Italie, on rejetta sur elles la levée des troupes légionaires, & très - peu sur Rome.

Ces troupes néanmoins s'appellerent romaines, parce que les alliés participant aux mêmes priviléges que les citoyens de Rome, étoient incorporés dan la république.

Mais l'empire s'étant aggrandi de toutes parts, les villes d'Italie ne purent fournir le nombre d'hommes nécessaire à la multiplicité des légions que les empereurs établirent. Ils les formerent alors des troupes de toutes les provinces, & les distribuerent sur les frontieres, où on leur assigna des camps, castra, dont quelques - uns sont devenus des villes par succession de tems; de - là tant de noms géographiques, où le mot castra se trouve inséré.

Il nous faut présentement indiquer les différentes parties & les différentes sortes de soldats, dont la légion romaine étoit composée.

Romulus à qui Rome doit cet établissement, la divisa en dix corps, qu'on nommoit manipules, du nom de l'enseigne qui étoit à la tête de ces coips, & qui consistoit en une botte d'herbes, attachée au bout d'une gaule. Ces corps devinrent plus forts, à mesure que la légion le devint; & toutefois lorsqu'on eut pris d'autres enseignes, ils ne laisserent pas de retenir ce premier nom de manipule.

On fit avec le tems une nouvelle division de la légion qui néanmoins fut toujours de dix parties, mais qu'on appella cohortes, dont chaeune étoit commandée par un tribun: chaque cohorte étoit composée de trois manipules, forts à proportion de la légion.

On attribue cette nouvelle division à Marius. Elle continua depuis d'être toujours la même, tant sous la république, que sous les empereurs. La légion étoit donc composee de trente manipules & de dix cohortes ou régimens, pour patler suivant nos usages, plus ou moins nombreuses, selon que la légion l'étoit.

Mais il faut remarquer que la premiere cohorte étoit plus forte du double, & qu'on y plaçoit les plus grands hommes; les neuf autres cohortes étoient égales en nombre de soldats. Ces dix cohortes formoient dix bataillons, qui se rangeoient sur trois lignes. Si la légion étoit de six mille hommes, la manipule étoit de deux cens hommes ou deux centuries.

Une légion étoit composée indépendamment des cavaliers, de quatre sortes de soldats, qui tous quatre avoient différent âge, différentes armes, & différens noms. On les appelloit vélites, hastaires, princes & triaires; voyez Velites, Hastaires, Princes & Triaires, car ils méritent des articles séparés.

Les légions sous la république, étoient commandées par un des consuls & par leurs lieutenans. Sous les empereurs, elles étoient commandées par un officier général qu'on nommoit préfet, proefectus exercituum. Les tribuns militaires commandoient chacun deux cohortes, & portoient par distinction l'anneau d'or comme les chevaliers. Chaque manipule avoit pour capitaine un officier, qu'on appelloit ducentaire, quand la légion fut parvenue à six mille hommes d'infanterie: de même qu'on nommoit centurion, celui qui commandoit une centurie. Les tribuns militaires élisoient les centurions, & ceux - ci élisoient leur lieutenant, qu'on nommoit succenturion, & qu'on appella dans la suite option. Voyez Option.

Quant aux légions que les alliés fournissoient, ceux qui les commandoient étoient appellés préfets du tems de la république, mais ils étoient à la nomination des consuls ou des généraux d'armées.

Chaque légion avoit pour enseigne générale une aigle les aîles déployées, tenant un foudre dans ses serres. Elle étoit postée sur un petit pié - destal de même métal, au haut d'une pique; cette figure étoit d'or ou d'argent, de la grosseur d'un pigeon. Celui qui la portoit, s'appelloit le porte - aigle, & sa garde ainsi que sa défense, étoit commise au premier centurion de la légion.

Ce fut Marius, selon Pline, liv. X. c. iv. qui choisit l'aigle seule pour l'enseigne générale des légions romaines; car outre l'aigle, chaque cohorte

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