ENCYCLOPÉDIE OU DICTIONNAIRE RAISONNÉ
DES SCIENCES, DES ARTS ET DES MÉTIERS

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"111"> du bec, & la bride à portée de passer dessous. On l'y fera donc passer; puis quand elle y sera, on pressera avec le poinçon le bec de l'aiguille & l'on le tiendra dans la chasse; cependant on tirera la tournille, ce qui fera avancer sa bride dans la tête de la tournille & passer la bonne maille par - dessus le bec, alors la maille sera relevée: on continuera de cette maniere s'il y en a plusieurs de tombées, traitant toûjours celle qui se trouvera dans la tête de la tournille comme la bonne, & la bride d'au - dessus comme la mauvaise ou comme la maille à relever; & quand on en sera à la derniere, on la mettra dans la tête de l'aiguille. Voyez cette maneuvre, Planche III. du bas au métier, figure 2, 3. On entend par bride, la petite portion de soie, qui au lieu de passer dans la tête de l'aiguille, a passé par - dessus & n'a point été travaillée.

J'observerai pourtant qu'il faut faire cette opération en - dessous ou à l'endroit, c'est - à - dire, du côté de l'ouvrage qui ne regarde pas l'ouvrier, sans quoi les mailles relevées formeront un relief à l'envers, & par conséquent un creux à l'endroit.

Il arrive encore qu'il se forme des mailles doubles; cet inconvénient arrive de plusieurs façons: s'il y a quelque grosseur dans la matiere, si une aiguille a le bec de travers, s'il y a quelque aiguille fatiguée qui ne presse pas, une aiguille n'aura point de maille & sa voisine en aura deux.

Dans ce cas, de deux mailles on arrête la premiere sous le bec de l'aiguille; on fait tomber la seconde; cette seconde tombée, formera une bride qu'on relevera & qu'on portera sur l'aiguille vuide.

Il y a encore des mailles mordues; on entend par une maille mordue, celle qui est moitié dans la tête de l'aiguille, moitié hors, ou qui est à demi tombée. On fait entierement tomber la maille mordue, & on la releve en plein.

Les ouvriers entendent par la tige du bas, ce pouce d'ouvrage qui est au - dessus des façons & sur lequel on rétrécit.

Sur un métier de quinze pouces, on laisse du milieu d'une façon au milieu de l'autre, cinq pouces & un quart. Si le métier a moins de quinze pouces, la distance du milieu d'une façon au milieu de l'autre diminuera proportionnellement.

Quand on travaille la façon, on continue de rapetisser d'une aiguille de chaque côté de quatre en quatre rangées. Pour reconnoître les milieux des façons, on fait un peu lever les deux aiguilles qui les indiquent.

On fait usage dans les façons de deux especes de mailles, qui ne sont pas de la nature de celles dont le reste du bas est tricoté; ce sont les mailles portées & les mailles retournées. On entend par une maille portée, celle qui, sans sortir de son aiguille, est portée dans la tête de celle qui la suit immédiatement, en allant vers la gauche de l'ouvrier; & par une maille retournée on entend celle qu'on fait tomber & qu'on releve sur la même aiguille, de maniere qu'elle fasse relief à l'envers & creux à l'endroit du bas. Pour cet effet on n'a, comme nous l'avons dit à l'occasion des mailles tombées, qu'à la relever du côté du bas qui regarde l'ouvrier.

Les façons faites, il s'agit de partager les talons. Pour cet effet on prend la maille des aiguilles qui marquoient les milieux des façons, & on la jette sur les aiguilles voisines, en allant à la gauche de l'ouvrier; puis on prend la maille de chacune des aiguilles voisines de ces aiguilles vuides, en allant à droite, & on la jette sur les aiguilles qui leur sont voisines, en allant aussi à droite.

On a donc en deux endroits de la largeur du bas deux aiguilles vuides, qui partagent cette largeur en trois parties.

On travaille ces trois parties avec trois fils de soie séparés, & qu'on jette chacun séparément. Jetter est synony me à cueillir.

De ces trois parties, celle du milieu est pour le dessus du pié, & les deux autres sont les deux parties du talon. On travaille le dessus sans le rapetisser. Pour les parties du talon, on les rétrécit chacune d'une maille de six rangées en six rangées; & cette maille on la prend à leurs extrémités ou aux côtés qui doivent se réunir pour former la couture du talon, ou sur la premiere & la derniere aiguilles pleines, ou sur l'aiguille pleine la plus à droite de l'ouvrier, & sur l'aiguille pleine la plus à gauche; car ce n'est là que plusieurs manieres différentes de désigner les mêmes aiguilles.

On continue de rapetisser ou rétrécir les parties du talon de la maniere que nous avons dit, jusqu'é ce qu'elles n'ayent plus chacune que deux pouces & demi. Alors on forme la pointe du talon, en rétrécissant ces deux parties de la maniere suivante. Pour la partie qui est à droite de l'ouvrier, on compte les aiguilles pleines en allant de droit à gauche, & on jette la maille de la quatrieme aiguille, sur la sixieme aiguille; la maille de la troisieme aiguille aussi sur la sixieme; la maille de la seconde aiguille sur la cinquieme, & la maille de la premiere aiguille sur la quatrieme, qui est la seule qui reste vuide. Pour la partie du talon qui est à gauche, on compte les aiguilles pleines, en allant de gauche à droite, & on jette la maille de la quatrieme aiguille, sur la sixieme aiguille; la maille de la troisieme aiguille pareillement sur la sixieme; la maille de la seconde aiguille sur la cinquieme, & la maille de la premiere aiguille, sur la quatrieme qui est la seule qui reste vuide. On continue ces rapetissemens singuliers, trois, quatre, cinq fois, selon la finesse du bas, & cela de quatre en quatre rangées.

On finit les talons par une rangée lâche. Cette rangée lâche se fait en descendant les platines, comme quand on veut croiser, & en repoussant la barre à moulinet avec le talon des ondes.

On avance ensuite sous les becs, en prenant bien garde d'amener trop; car on jetteroit le dessus du pié en bas.

On a fait cette rangée lâche, afin de pouvoir, à l'aide de la tournille, la diviser en deux & terminer le talon. Pour cet effet, on prend la premiere maille avec la tournille, & la maille suivante avec le poinçon; à mesure que la seconde passe sur le bec de la tournille, l'autre sort de dessous la tête. Celle - ci est loin du bec, quand celle - là est à portée d'entrer dessous. On l'y fait donc entrer, & quand elle y est, on presse le bec de la tournille avec le poinçon; on tire la tournille, & la premiere passe sur le bec & forme avec celle qui est dessous, le commencement d'une espece de chaînette, qu'on exécute exactement, comme quand on releve des mailles tombées; avec cette différence que les mailles tombées se relevent dans une direction verticale, & que cette chaînette se forme horisontalement.

Pour arrêter la chaînette, on fait sortir la derniere maille qui est sous la tête de la tournille, en avançant la tournille; on met le fil de soie à sa place: on presse ensuite le bec de la tournille; on tire la tournille, & la maille passe sur le bec & par conséquent le fil de soie à travers elle. On recommence cette opération plusieurs fois; cela fait on jette bas les talons sans aucun danger, & l'on continue le dessus du pié.

Avant que d'achever le bas, j'observerai que l'on pratique une rangée lâche, & sur cette rangée quelques autres à l'ordinaire, toutes les fois qu'on veut ôter un ouvrage de dessus le métier, sans donner lieu aux mailles de s'échapper.

Le dessus du pié s'acheve comme on l'a commen<pb-> [p. 112] cé; quand il est achevé, on monte le talon sur le métier, non par le côté de la lisiere de derriere, mais par l'autre côté. Pour cet effet, on décroche le métier; on tourne de son côté l'endroit de l'ouvrage; on prend la seconde rangée de mailles après la lisiere, & on la fait passer dans les aiguilles, en tenant l'ouvrage d'une main au - dessus des aiguilles, & faisant passer chaque maille de la rangée dans chaque aiguille.

En s'y prenant ainsi, il est évident que quand après avoir croché & cueilli, comme on le dira, on abattra l'ouvrage, l'envers se trouvera vers l'ouvrier. Lorsque les mailles sont passées sur les aiguilles; on laisse l'ouvrage sur elles, & on le repousse fort avant vers le derriere du métier, afin qu'il se trouve dans la gorge des platines, lorsqu'on crochera en dedans; c'est - à - dire sans avancer le métier en devant, en tirant les abattans perpendiculairement: puis on pratique une enture du côté de la façon: on double la soie à cette enture, sur sept aiguilles seulement. On cueille sur elle avec la main, de peur que l'ouvrage qui est sous les gorges qui sont fort petites & qu'il remplit, ne laissassent pas tomber les platines entre les aiguilles, autant qu'il le faut pour la formation des mailles. On amene sous les becs, & l'on acheve l'ouvrage à l'ordinaire. Voilà comment on commence le coin: voici comment on le continue.

Après avoir cueilli une seconde fois, on rapetisse les coins, où l'on pratique ce que les ouvriers appellent les passemens, de la maniere suivante.

On prend la cinquieme aiguille en comptant de la pointe du coin, & l'on jette sa maille sur la quatrieme aiguille; puis on passe la soie sur ces quatre aiguilles, & l'on forme quatre mailles avec le poinçon.

On prend ensuite la sixieme aiguille, & l'on jette sa maille sur la quatrieme; puis on passe la soie sur ces quatre aiguilles, & l'on forme quatre autres mailles avec le poinçon. On prend ensuite la septieme aiguille, & l'on jette sa maille sur la quatrieme; puis on passe la soie sur les quatre aiguilles, & l'on forme qnatre autres mailles avec le poinçon; ensuite on prend la huitieme aiguille, & l'on jette sa maille sur la quatrieme; puis on passe la soie sur ces quatre aiguilles, & l'on forme quatre dernieres mailles avec le poinçon.

Cela fait, il est évident que l'on a quatre aiguilles vuides, & quatre aiguilles pleines; on prend la quatrieme des pleines, & on la jette sur la neuvieme aiguille; la troisieme des pleines, & on la jette sur la huitieme aiguille ou la premiere des vuides; la seconde des pleines, & ainsi de suite. On fait là - dessus deux rangées, & l'on recommence les mêmes passemens, jusqu'à ce que le coin ait deux pouces & demi de large par le bas. On le finit par une rangée lâche, sur laquelle on fait quatre à cinq rangées à l'ordinaire, pour que la soie ne se défile pas.

Pour former la maille sur les quatre aiguilles, on passe la soie dans leurs têtes, on repousse l'ouvrage au - delà des têtes; puis avec le poinçon on presse le bec de chaque aiguille, on retire l'ouvrage, & la maille formée à l'ouvrage passe sur les têtes, & forme de nouvelles mailles avec la soie qu'on y a mise.

Il ne reste plus que la semelle à faire: pour cet effet, on monte les coins par leur largeur bout - à - bout, ce qui forme un intervalle de cinq pouces; c'est là - dessus qu'on travaille la semelle à laquelle on donne la longueur convenable.

Les grands bas d'hommes ont ordinairement trente - neuf pouces, depuis le bord de l'ourlet jusqu'à la pointe du talon.

Les grands bas de femmes n'ont ordinairement que vingt - neuf pouces, depuis l'ourlet jusqu'à la pointe du talon.

Les grands bas d'hommes, depuis le bord jusqu'à la façon, portent 28 pouces; les grands bas de femmes, dix - neuf pouces.

La façon dans les grands bas d'hommes & les grands bas de femmes, est de deux pouces.

Le talon commence à la hauteur des coins, & il a jusqu'à sa pointe, neuf pouces dans les hommes, & huit pouces dans les femmes.

Les coins ont pour les hommes & pour les femmes, la même hauteur que les talons.

Les talons finis, on les met bout - à - bout & l'on travaille la semelle, de neuf pouces & demi pour les hommes, & de huit pouces & demi pour les femmes.

Apres les talons finis, on continue le dessus du pié, à quatre pouces pour les femmes, & à cinq pouces pour les hommes.

Dans toutes ces dimensions, on observe les rétrécissemens que nous avons prescrits, dans l'article de la main - d'oeuvre, & qu'il est inutile de répéter ici.

On voit, Planche III. du bas au métier, fig. 10. un modele de façon; il est tracé sur un papier divisé en petits quarrés de dix en dix. La ligne A B la partage en deux parties égales; chaque petit quarré représente une aiguille: le petit quarré A représente l'aiguille qui marque le milieu de la façon, & chaque rangée de mailles est représentée par chaque rangée de petits quarrés.

Pour exécuter la façon qu'on voit ici représentée, il faut donc faire aux mailles marquées par chaque petit quarré, quelque changement qui les distingue sur le bas: pour cet effet, on les porte, ou on les retourne; ainsi tous les petits quarrés marqués d'un point désigneront des mailles portées ou retournées.

Nous avons déjà dit qu'une maille portée étoit celle dont la soie passoit sous deux têtes d'aiguilles, sous la tête de son aiguille propre, & sous la tête de l'aiguille voisine, en allant de droite à gauche de l'ouvrier; & que la maille retournée étoit celle qu'on faisoit tomber, & qu'on relevoit sur l'envers de l'ouvrage, ensorte qu'elle étoit en relief sur l'envers, & par conséquent en creux sur l'endroit.

Mais les mailles ne se portent ou ne se retournent pas indistinctement partout. On voit évidemment que des mailles qu'il faut altérer pour distinguer la façon, on ne peut porter celles qui se suivent immédiatement. Quand il faut altérer la maille d'une aiguille, si celle qui lui est voisine, en allant de droite à gauche, ne doit point être altérée, on peut ou la porter ou la retourner: mais si elle doit être aussi altérée, il faut la retourner.

Ainsi dans le dessein de façon qu'on voit, toutes les mailles de masses noires doivent être retournées, & toutes les mailles des autres masses qui sont rares, & qui laissent entr'elles des mailles qu'il ne faut point altérer, peuvent être ou portées ou retournées.

Les ouvriers qui construisent des métiers à bas, se servent d'instrumens comme le rabot des verges, le moule à repasser les cuivres, le moule pour hacher les platines, la fraise, la lime à queue d'aronde, le chevalet pour les platines, le chevalet pour les cuivres, la machine à percer les aiguilles, & son détail, le moule à fondre les plombs à aiguilles & les plombs à platines, le brunissoir, les tourne - à - gauche, les becs d'âne, les clouyeres, la chasse - ronde, le pointot, la tranche, les perçoires plate & ronde, les broches, la griffe, les mandrins, le moule à bouton, le poinçon: entre ces instrumens, il y en a qui sont communs au faiseur de métier, & à celui qui s'en sert. On trouvera leurs usages aux articles de leurs noms, & leurs figures sur les planches du métier à bas.

La premiere manufacture de bas au métier fut établie en 1656, dans le château de Madrid, au bois de Boulogne. Le succès de ce premier établissement don<pb->

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