ENCYCLOPÉDIE OU DICTIONNAIRE RAISONNÉ
DES SCIENCES, DES ARTS ET DES MÉTIERS

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Mais ç'eût été bien du tems de perdu pour l'ouvrier, & bien de la peine réitérée, s'il eût fallu relever la presse & la soûtenir: aussi se releve - t - elle d'elle - même, à l'aide de la courroie passée de la grande anse sur la roulette du porte - saix d'en - bas, & attachée à la branche du contre - poids.

On s'est encore ménagé aux porte - grilles, Pl. III. fig. 5. le même avantage qu'aux gueules de loup, & qu'aux arrêtans. Leur ouverture longitudinale x x, permet aussi de les avancer ou reculer à discrétion.

Le porte - roulette fixé, méme fig. au milieu de la petite barre de dessous, facilite avec les roulettes de l'extrémité de la barre fondue, le mouvement en - arriere ou en - devant, de tout ce qu'on appelle l'ame du métier, que l'ouvrier fait en travaillant avancer ou reculer toutes les fois qu'il tire à soi ou repousse les abattans; ce qui lui arrive très - souvent. Aussi louai - je beaucoup ceux qui ont diminué le poids de ces parties, en ajoûtant une roulette à la petite barre, & une gueule de loup à la barre de derriere, pour recevoir la roulette ajoûtée.

Il y a plusieurs choses à considérer dans les ressorts de grille. Pl. III. fig. 6. Premierement, ils sont disposés sur deux rangées paralleles de maniere que les ressorts de la rangée de derriere répondent aux intervalles que laissent entre - eux les ressorts de la rangée de devant: c'est le seul moyen qu'il y cût peut - être de leur donner la force qui leur est nécessaire pour l'usage auquel ils sont employés. Si on les eût tous placés sur une même rangée, ils auroient été plus petit; & trop foibles. Voilà pour leur arrangement.

Secondement, ils sont composés de quatre plans inclinés, disposés à - peu - près en zig - zag. Lorsque la queue de l'onde est chassée de la cavité c, figure 7. même Pl. par le corps du chevalet, elle écarte le ressort, qui revient ensuite sur elle quand elle est sortie, & qui la repousse d'autant plus vivement, qu'alors elle se trouve sur un plan incliné a b; c'est le même effet quand elle est chassée de sa cavité en - dessous par la bascule: elle écarte pareillement le rossort qui revient ensuite sur elle, avec d'autant plus de vivacité qu'elle se trouve encore sur un plan incliné c d. La méchanique n'est pas différente, quand chassée de sa cavité, soit en - dessus, soit en - dessons, elle y est ramenée; elle ne peut y descendre que par une espece d'échappement fort prompt, puitqu'elle y est toûjours conduite par un petit plan incliné c d, c b.

Ce n'est pas une petite assaire que de bien disposer les cuivres de la barre sondue. Leur usage est d'empêcher les ondes de vaciller dans leur mouvement de chûte. Si l'on a bien compris ce que j'ai dit jusqu'à présent, on doit s'appercevoir qu'il y a un rapport bien déterminé entre le nombre des ressorts, les intervalles qu'ils laissent entr'eux; le nombre des cuivres, leur épaisseur; les ondes, leur longueur, leur nombre, leur épaisseur; les platines à ondes, leur nombre, leur épaisseur; les platines à plomb, leur nombre, leur longueur, leur épaisseur; les plombs à platines, leur nombre, leur épaisseur; les aiguilles, leur nombre, leurs intervalles; les plombs à aiguille, leur nombre, leur épaisseur: & que l'une de ces choses étant donnée, tout le reste s'ensuit. Il y a très peu d'ouvriers en état de combiner avec précision toutes ces choses, sur - tout quand il s'agit de faire un métier un peu fin; comme un quarante, un quaranteun, un quarante - deux, &c.

La méchanique des contre - pouces 43, 44, 45, Pl. IV. fig. 4. mérite bien un coup - d'oeil. Ces pieces sont chargées à leur extrémité d'un contre - poids 44, qui ne permet à la bascule d'agir sur les queues des ondes, qu'à la volonté de l'ouvrier. Il y a sur les ondes deux actions opposées pendant tout le travail, & elles ont leurs effets successivement, selon les mouve<cb-> mens des abattans. Ces deux actions sont l'action de la bascule 48, 48, par le moyen des pouces & contrepouces sur la queue des ondes, & l'action de la barre à platines sur leur tête. Lorsque l'ouvrier tire les abattans perpendiculairement en bas, alors la barre à platine, ou son chaperon, c'est - à - dire cette petite plaque qui lui est appliquée par derriere & qui fait éminence, presse fortement sur leurs têtes, les entraîne dans la même direction, & les réduit dans le parallélisme avec les platines à plomb, malgré l'action des pouces sur les contre - pouces, & celle des contre - pouces sur la bascule, & celle de la bascule sur les queues des ondes: mais lorsque l'ouvrier laisse agir le grand ressort, & que les abattans abandonnés à eux - mêmes sont relevés, alors rien ne s'oppose à l'action des pouces, des contre - pouces & de la bascule, qui subsiste pendant tout le travail; & les ondes se relevent, & leurs queues rentrent dans leur cavité, ou descendent au - dessous, selon que l'ouvrier le veut.

Comme il falloit que dans tous les mouvemens les platines à ondes & les platines à plomb fussent toûjours exactement paralleles en tout sens les unes aux autres, quoique les platines à ondes appartinssent à la barre fondue, & que les platines à plomb appartinssent à la barre à platines, c'étoit donc nécessité que la barre sondue se prétât & suivît tous les mouvemens de la barre à platines: c'est ce qui s'exécute par le moyen des tirans qui répondent d'un bout à la barre fondue, & de l'autre à la barre à platines, & par le moyen des trois roulettes de l'ancien métier, & des quatre du métier nouveau, dont deux se meuvent dans les gueules de loup, & deux sur les grandes pieces.

Passons maintenant aux moulinets. Comme nous n'en avons rien dit jusqu'à présent, & que nous avons cependant traité de presque tout ce qui concerne la main - d'oeuvre, on seroit tenté de croire au moins que ces parties & toutes celles qui leur appartiennent, comme la boite, la barre, & le ressort à moulinet, sont superflues, & qu'il n'y a pas non plus grand besoin de umelles. On va voir combien ce soupçon est éloigné de la vérité.

Pour bien entendre ce qui suit, il faut examiner un peu la configuration d'une onde en - dessous. On voit, Pl. IV. fig. 3. que depuis a jusqu'à b elle est comme arrondie, & qu'elle est évidée depuis b jusqu'à c. La partie arrondie a b forme sa tête. Lorsque le chevalet passant sous la queue de l'onde, fait desecendre cette partie a b, elle s'applique sur la barre à moulinet 82, 82, Pl. V. fig. 1. ensorte que toutes les têtes des ondes sont rangées sur la barre à moulinet, quand le corps à chevalet a fait sa course. D'où il s'ensuit évidemment que plus cette barre sera haute, moins les têtes des ondes descendront, moins les platines à ondes attachées à ces têtes descendront entre les aiguilles; moins les becs des platines descendront au - dessous des aiguilles dans la premiere opération de la main - d'oeuvre ou le cueillement; moins les boucles de soie formées entre les aiguilles seront grandes; moins les mailles seront lâches: mais cette barre à moulinet étant enfermée dans des boîtes 81, 81, qui peuvent se hausser ou se baisser à l'aide des arbres à moulinet 68, 81; 68, 81, qui les traversent, on pourra donc hausser ou baisser cette barre à diserétion, & faire un bas plus ou moins serré. Voilà l'usage de la barre en elle - même & de sa mobilité le long des corps de moulinet; mais ce n'est pas sans raison qu'on lui a attaché postérieurement un ressort 83, 83, 83, à l'aide duquel elle peut aller & venir dans les boîtes.

Pour sentir l'usage de ce ressort & de la mobilité de la barre dans ses boîtes, il faut relire ou se rappeller la derniere opération de la main - d'oeuvre ou du crochement: il consiste à faire descendre les platines jusqu'à ce que leurs gorges soient un peu plus bas que les têtes des aiguilles, & que ces gorges puissent [p. 110] embrasser l'ouvrage qui remplit ces têtes, & le remporter en - arriere.

Mais pour exécuter ces mouvemens, comme il y a loin de la barre à moulinet, sur laquelle les têtes des ondes étoient placées, jusqu'aux têtes des aiguilles, il a fallu amener les têtes des ondes & les platines qui y sont attachées, en - devant; c'est ce que l'ouvrier a fait, en tirant à lui la barre à poignée ou les abattans. Il a fallu faire descendre les platines, & par conséquent les têtes des ondes auxquelles elles sont assemblées, pour que les gorges des platines se trouvassent un peu au - dessous des têtes des aiguilles; c'est ce qu'il a fait en tirant les abattans aussi bas qu'ils pouvoient descendre, & se laissant diriger par les arrétans. C'est pour rendre possible ce dernier mouvement, que l'on a évidé les ondes en - dessous; car si elles avoient été par - tout de la même largeur, elles n'auroient pû descendre; la barre à moulinet sur laquelle elles auroient continué de porter, les en auroit empêché: mais en les évidant, elles ont cessé de porter sur la barre à moulinet, & en les évidant assez, elles n'ont rien rencontré d'ailleurs qui les gênât dans leur descente, & qui empêchât la gorge des platines de parvenir jusqu'au - dessous des becs des aiguilles.

Mais ce n'étoit pas tout; il falloit que ces gorges remportassent l'ouvrage de dessous les becs des aiguilles en - arriere: pour cet effet, l'ouvrier tenant ces gorges entre les tétes des aiguilles, les repousse en - arriere: mais en les repoussant en - arriere, qu'arrive - t - il? c'est que le talon de l'échancrure des ondes rencontre la barre à moulinet. Si cette barre à moulinet étoit immobile dans les boîtes, elle arrêteroit ce mouvement horisontal, & l'ouvrage ne seroit point remporté en - arriere par les gorges; aussi l'a - t - on fait mobile: le talon de l'échancrure des ondes la fait reculer; l'ouvrage est remporté par les gorges; les ondes se relevent; leurs talons cessent d'appuyer contre la barre à moulinet; le ressort circulaire qui agit contre cette barre la restitue dans son premier état, & elle est disposée à recevoir de rechef la tête des ondes dans leur chûte, qui se fera au nouveau cueillement.

Voilà les usages de ces parties, qui paroissoient si superflues. On a dentelé la roue 69 du moulinet, figure premiere, Planche V. afin qu'on pût savoir de combien on haussoit ou baissoit la barre à moulinet, & évaluer à peu près par ce moyen, de combien on relâchoit ou resserroit les mailles, & relâcher & resserrer également de chaque côté. La partie 68, 68, qu'on appelle croisée du moulinet, sert de poignée à l'arbre, & puis c'est tout.

Il ne nous reste plus qu'un mot à dire des jumelles, 61, 61, fig. 1. Planc. V. des platines tant à ondes qu'à plomb, & des gardes - platines. On a pratiqué aux jumelles 61, 61, deux arrétans 5, 5, l'un en - dessus 61, & l'autre en - dessous 5. L'usage de celui de dessus est de contenir à une juste hauteur les épaulieres & les abattans qui y sont assemblés, malgré l'action du grand ressort. Voyez même Planche, fig. 7. L'usage de celui de dessous est d'empêcher, dans le crochement, les mêmes épaulieres, ainsi que les abattans & par conséquent les gorges des platines, à descendre trop au - dessous des têtes des aiguilles, & de les briser & fausser toutes.

Toutes les sinuosités que l'on remarque aux platines, Pl. IV. fig. 2. ont leur raison. On peut distinguer quatre lieux principaux dans ces parties: leur bec b, qui prend la soie étendue sur les aiguilles & la fait descendre entr'elles: le dessous du bec c, qui amene la soie bouclée sous les becs & la corroie: le ventre e, qui abat l'ouvrage: la gorge d, qui le reprend & le ramene en - arriere: la queue f, qui s'emboîte dans la barre à poignée, & l'empêche de vaciller. S'il n'y avoit point de garde - platine 94, 94, Pl. VI. fig. 2. quand, dans la troisieme opération, on amene l'ouvrage sur les becs avec le ventre des platines, ce ventre viendroit frapper contre la presse qui est alors appliquée, & se défigureroit: mais le garde - platine empêche ce choe; il permet aux ventres des platines d'approcher assez de la presse, pour que l'ouvrage soit bien amené sur les becs, mais non de la frapper, en rencontrant lui - même assez - tôt pour prevenir cet inconvénient, le bras de presse.

Il survient en travaillant plusieurs accidens, & il y a plusieurs autres choses à observer, dont je vais faire mention.

Lorsqu'il se rencontre des noeuds dans la soie ou qu'elle se casse, on ne peut continuer l'ouvrage sans faire ce que les ouvriers appellent une enture.

Pour enter, on étend bien sur les aiguilles la partie du fil de soie qui tient à l'ouvrage, & l'on couche l'autre partie, non pas bout à bout avec la premiere: mais on la passe entre la cinq, la sept, &c. avant le bout du fil qui tient à l'ouvrage; ensorte que le fil se trouve double sur ces cinq, sept aiguilles, & l'on continue de travailler comme si le fil étoit entier.

Tout bas se commence par un ourlet, & voici comment on s'y prend pour le faire. On passe la soie dans la tête de la premiere aiguille, & on l'y arrête en la tordant; on embrasse ensuite en - dessous les deux suivantes; on la ramene en - dessus sur la premiere; puis on la passe en - dessous, & on embrasse la quatrieme & la cinquieme sur lesquelles on la ramene, & sur la troisieme sous laquelle on la passe, & on embrasse la sixieme & la septieme sur lesquelles on la ramene, & sur la cinquieme sous laquelle on la passe ensuite, & on embrasse la huitieme & la neuvieme, & ainsi de suite.

Un bas n'est pas par - tout de la même venue; on est obligé de le rérrécir de tems en tems. Supposons donc qu'on ait à rétrécir d'une maille, on prend un petit outil qu'on appelle poinçon, on s'en sert pour porter la maille de la troisieme aiguille sur la quatrieme aiguille, la maille de la seconde sur la troisieme, la maille de la premiere sur la seconde, & la premiere se trouve vuide.

On demandera peut - être pourquoi on porte la troisieme maille sur la quatrieme aiguille, & non la premiere sur la seconde tout d'un coup; puisqu'il faut qu'il se trouve deux mailles sur une aiguille, pourquoi donner la préférence à la quatrieme? Je répons que c'est afin que la lisiere soit plus nette; car si la maille double se trouvoit au bord de la lisiere, elle tireroit trop. Il faut même, si l'on veut que la lisiere ne soit pas trop serrée, bien repousser l'ouvrage enarriere, & ne pas accoller la platine avec la soie quand on la jette.

Au reste, on rétrécit d'une maille de chaque côté du métier de quatre rangées en quatre rangées. & l'on ne commence à rétrécir qu'à un pouce au - dessus de la façon, ou de cet ornement qu'on pratique au - dessus des coins.

Il arrive quelquefois, après le coup de presse, qu'un bec d'aiguille ne se releve pas, mais demeure dans sa chasse; lors donc qu'on a cueilli & qu'on vient à abattre l'ouvrage, il y a une maille qui n'ayant pas été mise dans la tête de l'aiguille, mais ayant passé par - dessus, ne sera pas travaillée, & qu'il faudra relever; il pourra même se trouver plusieurs mailles non - travaillées de suite; pour les relever, voici comment on s'y prendra: on saisira la derniere qui est bien formée à l'ouvrage, avec le poinçon, & on la passera dans la tête de la tournille ou d'une aiguille emmanchée, puis on prendra avec le poinçon la bride de dessus cette maille; on passera cette bride sur la tournille; à mesure qu'elle avancera le long du bec, la bonne maille sortira de dessous, & bientôt la bonne maille se trouvera entierement sortie & fort loin

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