ENCYCLOPÉDIE OU DICTIONNAIRE RAISONNÉ
DES SCIENCES, DES ARTS ET DES MÉTIERS

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"816"> ferment la raison de leur existence dans leur essence, ce sont des êtres absolument nécessaires, & il impliqueroit contradiction qu'ils n'existassent pas. Le monde n'a point eu de commencement, il n'aura point de sin; il est éternel, & suffisant à lui - même pour sa - conservation. Les miracles sont impossibles, & l'ordre de la nature est inaltérable. Les lois du mouvement, les évenemens naturels, l'enchaînement des choses, sont autant d'effets d'une nécessité absolue; l'ame n'a point de liberté. L'univers est sans bornes; une fatalité absolue tient lieu de Providence. (Voyez Wolf, Théolog. nat. tom. II. sect. II. chap. j.) C'est - là, & non dans le système des théistes, qu'il faut chercher les contradictions; tout en fourmille. Peut - on dire que le monde, considéré en lui - même, ait des caracteres d'éternité qui ne se puissent pas trouver dans un être intelligent? Peut - on soûtenir qu'il est plus facile de comprendre que la matiere se meut d'elle - même, & qu'elle a formé par hasard & sans dessein le monde tel qu'il est, que de concevoir qu'une intelligence a imprimé le mouvement à la matiere, & en a tout fait dans certaines vûes? Pourroit - on dire que l'on comprend comment tout ce qui existe a été formé par un mouvement purement méchanique & nécessaire de la matiere, sans projet & sans dessein d'aucune intelligence qui l'ait conduite; & qu'on ne comprend pas comment une intelligene l'auroit pû faire? Il n'- y a assurément personne qui, s'il veut au moins parler avec sincérité, n'avoue que le second est infiniment plus facile à comprendre que le premier. Il s'ensuit de - là que les athées ont des hypotheses beaucoup plus difficiles à concevoir que celles qu'ils rejettent; & qu'ils s'éloignent des sentimens communs plûtôt pour se distinguer, que parce que les difficultés leur font de la peine; autrement ils n'embrasseroient pas des systèmes tout - à - fait incompréhensibles, sous prétexte qu'ils n'entendent pas les opinions généralement reçues.

3°. L'athée ne sauroit éviter les absurdités du progrès à l'infini. Il y a un progrès qu'on appelle rectiligne, & un progrès qu'on appelle circulaire. Suivant le premier, en remontant de l'effet à la cause, & de cette cause à une autre, comme de l'oeuf à la poule, & de la poule à l'oeuf, on ne trouve jamais le bout; & cette chaîne d'êtres visiblement contingens, forme un tout nécessaire, éternel, infini. L'impossibilité d'une telle supposition est si manifeste, que les philosophes payens l'avoient abandonnée, pour se retrancher dans le progrès circulaire. Celui - ci consiste dans certaines révolutions périodiques extrèmement longues, au bout desquelles les mêmes choses se retrouvent à la même place; & l'état de l'univers est précisément tel qu'il étoit au même moment de la période précédente. J'ai déja écrit une infinité de fois ce que j'écris à présent, & je l'écrirai encore une infinité de fois dans la suite des révolutions éternelles de l'univers. Mais la même absurdité qui détruit le progrès rectiligne, revient ici contre le progrès circulaire. Comme dans le premier cas on cherche inutilement, tantôt dans l'oeuf, tantôt dans la poule, sans jamais s'arrêter, la raison suffisante de cette chaîne d'êtres; de même dans celui - ci une révolution est liée à l'autre: mais on ne voit point comment une révolution produit l'autre, & quel est le principe de cette succession infinie. Que l'on mette des millions d'années pour les révolutions universelles, ou desjours, des heures, des minutes, pour l'existence de petits insectes éphémeres, dont l'un produit l'autre sans fin, c'est la même chose; ce sont toûjours des effets enchaînés les uns aux autres, sans qu'on puisse assigner une cause, un principe, une raison suffisante qui les explique.

4°. On peut aussi attaquer l'athéisme par ses conséquences, qui, en sappant la religion, renversent du même coup les fondemens de la morale & de la politique. En effet l'athéisme avilit & dégrade la nature humaine, en niant qu'il y ait en elle les moindres principes de morale, de politique, d'équité & d'humanité: toute la charité des hommes, suivant cet absurde systeme, toute leur bienveillance, ne viennent que de leur crainte, de leur foiblesse, & du besoin qu'ils ont les uns des autres. L'utilité & le desir de parvenir, l'envie des plaisirs, des honneurs, des richesses, sont les uniques regles de ce qui est bon. La justice & le gouvernement civil ne sont des choses ni bonnes, ni desirables par elles - mêmes; car elles ne servent qu'à tenir dans les fers la liberté de l'homme: mais on les a établies comme un moindre mal, & pour obvier à l'état de guerre, dans lequel nous naissons. Ainsi les hommes ne sont justes que malgré eux; car ils voudroient bien qu'il fût possible de n'obéir à aucunes lois. Enfin (car ce n'est ici qu'un échantillon des principes moraux & politiques de l'athéisme) enfin les souverains ont une autorité proportionnée à leurs forces, & si elles sont illimitées, ils ont un droit illimité de commander; en sorte que la volonté de celui qui commande tienne lieu de justice aux sujets, & les oblige d'obéir, de quelque nature que soient les ordres.

Je conviens que les idées de l'honnête & du deshonnête subsistent avec l'athéisme. Ces idées étant dans le fonds & dans l'essence de la nature humaine, l'athee ne sauroit les rejetter. Il ne peut méconnoître la différence morale des actions; parce que quand même il n'y auroit point de divinité, les actions qui tendent à détériorer notre corps & notre ame seroient toûjours également contraires aux obligations naturelles. La vertu purement philosophique, qu'on ne sauroit lui refuser, en tant qu'il peut se conformer aux obligations naturelles, dont il trouve l'empreinte dans sa nature; cette vertu, dis - je, a très - peu de force, & ne sauroit guere tenir contre les motifs de la crainte, de l'intéret & des passions. Pour résister, sur - tout lorsqu'il en coûte d'être vertueux, il faut être rempli de l'idee d'un Dieu, qui voit tout, & qui conduit tout. L'athéisme ne sournit rien, & se trouve sans ressource; dès que la vertu est malheureuse, il est réduit à l'exclamation de Brutus: Vertu, stérile vertu, de quoi m'as - tu servi? Au contraire, celui qui croit fortement qu'il y a un Dieu, que ce Dieu est bon, & que tout ce qu'il a fait & qu'il permet, aboutira enfin au bien de ses créatures; un tel homme peut conserver sa vertu & son intégrité même dans la condition la plus dure. Il est vrai qu'il faut pour cet effet admettre l'idée des récompenses & des peines à venir.

Il résulte de - là que l'athéisme publiquement professé est punissable suivant le droit naturel. On ne peut que desapprouver hautement quantité de procédures barbares & d'exécutions inhumaines, que le simple soupçon ou le prétexte d'athéisine ont occasionnées. Mais d'un autre côté l'homme le plus tolérant ne disconviendra pas, que le magistrat n'at droit de réprimer ceux qui osent professer l'athéisme, & de les faire périr même, s'il ne peut autrement en délivrer la société. Personne ne révoque en doute, que le magistrat ne soit pleinement autorisé à punir ce qui est mauvais & vicieux, & à récompenser ce qui est bon & vertueux. S'il peut punir ceux qui font du tort à une seule personne, il a sans doute autant de droit de punir ceux qui en font à toute une société, en niant qu'il y ait un Dieu, ou qu'il se mêle de la conduite du genre humain, pour récompenser ceux qui travaillent au bien commun, & pour châtier ceux qui l'attaquent. On peut regarder un homme de cette sorte comme l'ennemi de tous les autres, puisqu'il renverse tous les fondemens sur lesquels leur conservation & leur félicité sont prin<pb-> [p. 817] cipalement établies. Un tel homme pourroit être puni par chacun dans le droit de nature. Par conséquent le magistrat doit avoir droit de punir, non - seulement ceux qui nient l'existence d'une divinité, mais encore ceux qui rendent cette existence inutile, en niant sa providence, ou en prêchant contre son culte, ou qui sont coupables de blasphèmes formels, de profanations, de parjures, ou de juremens prononcés légerement. La religion est si nécessaire pour le soûtien de la société humaine, qu'il est impossible, comme les Payens l'ont reconnu aussi bien que les Chrétiens, que la société subsiste si l'on n'admet une puissance invisible, qui gouverne les affaires du genre humain. Voyez - en la preuve à l'article des athées. La crainte & le respect que l'on a pour cet être, produit plus d'effet dans les hommes, pour leur faire observer les devoirs dans lesquels leur félicité consiste sur la terre, que tous les supplices dont les magistrats les puissent menacer. Les athées mêmes n'osent le nier; & c'est pourquoi ils supposent que la religion est une invention des politiques, pour tenir plus facilement la société en regle. Mais quand cela seroit, les politiques ont le droit de maintenir leurs établissemens, & de traiter en ennemis ceux qui voudroient les détruire. Il n'y a point de politiques moins sensés que ceux qui prêtent l'oreille aux insinuations de l'athéïsme, & qui ont l'imprudence de faire profession ouverte d'irreligion. Les athées, en flattant les souverains, & en les prevenant contre toute religion, leur font autant de tort qu'à la religion même, puisqu'ils leur ôtent tout droit, excepté la force, & qu'ils dégagent leurs sujets de toute obligation & du serment de fidélité qu'ils leur ont fait. Un droit qui n'est établi d'une part que sur la force, & de l'autre que sur la crainte, tôt ou tard se détruit & se renverse. Si les souverains pouvoient détruire toute conscience & toute religion dans les esprits de tous les hommes, dans la pensée d'agir ensuite avec une entiere liberté, ils se verrcient bien - tôt ensevelis eux - mêmes sous les ruines de la religion. La conscience & la religion engagent tous les sujets: 1°. à exécuter les ordres légitimes de leurs souverains, ou de la puissance législative à laquelle ils sont soûmis, lors même qu'ils sont opposés à leurs intérêts particuliers; 2°. à ne pas résister à cette même puissance par la force, comme saint Paul l'ordonne. Rom. ch. xij. v. 12. La religion est plus encore le soûtien des Rois, que le glaive qui leur a été remis, Cet article est tiré des papiers de M. Formey, secrétaire de l'Académie royale de Prusse. (X)

ATHELING (Page 1:817)

ATHELING, s. m. (Hist mod.) étoit chez les anciens Saxons, ancêtres des Anglois, un titre d'honneur qui appartenoit en propre à l'héritier présomptif de la couronne.

Ce mot vient du mot Saxon AEdeling, qui est dérivé de oedel, noble. On l'écrit aussi quelquefois adeling, edling, ethling & etheling.

Le roi Edouard le confesseur, étant sans enfans, & voulant faire son héritier Edgar, dont il étoit le grand - oncle maternel; lui donna le premier le nom d'atheling; les antiquaires remarquent qu'il étoit ordinaire aux Saxons de joindre le mot de ling ou ing, à un nom chrétien, pour marquer le fils ou le plus jeune, comme Edmonding, pour le fils d'Edmond. Edgaring, pour le fils d'Edgar; c'est pour cela que quelques uns ont crû que le mot atheling devoit signifier originairement le fils d'un noble ou d'un prince. Cependant il y a apparence que le mot atheling, quand il est appliqué à l'héritier de la couronne, signifie plutôt un homme doüé de plusieurs belles qualités, que le fils d'un noble; & ce terme paroît répondre au nobiliss. Coesar qui étoit en usage chez les Romains. Voyez Cesar & Nobilissime. (G)

ATHEMADOULET (Page 1:817)

ATHEMADOULET, s. m. (Hist. mod.) c'est le premier ou le principal ministre de l'empire des Perses. Ce mot, selon Kempfer, s'écrit en Persan athemaad daulet; selon Tavernier, athematdoulet; selon Sanson, etmadoulet. On le regarde comme originairement Arabe, & composé de itimade & daulet, c'est - à - dire, la confiance en la majesté; ou selon Tavernier, le support des riches; & selon Kempfer, l'appui & le réfuge de la cour.

L'autorité de l'athemadoulet ressemble beaucoup à celle du grand visir de Turquie, excepté qu'il n'a point le commandement de l'armée, comme le grand visir. Voyez Visir.

L'athemadoulet est grand chancelier du royaume, président du conseil, surintendant des finances; & il est chargé de toutes les affaires étrangeres: c'est un véritable viceroi ou gouverneur du royaume; il intitule ainsi les ordonnances & édits du roi: Bende derga ali il alia etmadaulet; c'est - à - dire, moi qui suis le soûtien de la puissance, la créature de cette cour, la plus puissante de toutes les cours, &c. (G)

ATHENÉE (Page 1:817)

ATHENÉE, s. m. (Hist. anc.) c'étoit un lieu public à Rome, bâti l'an 135 de Jesus - Christ, par l'empereur Adrien, pour servir d'auditoire aux savans, & à ceux qui, selon la coûtume, voudroient lire ou déclamer leurs ouvrages en présenced'une nombreuse assemblée. Il servoit aussi de collége, & l'on y faisoit des leçons publiques. On conjecture qu'Adrien nomma ainsi cet édifice du Grec *A'HNH, Minerve, déesse des sciences, ou de la ville d'Athenes, qui avoit été le séjour & comme la mere des beaux arts. Un semblable athenée construit à Lyon par l'empereur Caligula, fut célebre par les grands hommes qui y enseignerent, & par les prix qu'y fonda ce prince. On a étendu ce titre d'athenée aux colléges, aux académies, aux bibliotheques, aux cabinets des savans. (G)

ATHENÉES (Page 1:817)

ATHENÉES, adj. pris subst. (Hist. anc.) fête que les Athéniens célébroient en l'honneur de Minerve. Erichtonius troisieme roi d'Athenes l'avoit instituée; lorsque Thésée eut rassemblé les douze bourgades de l'Attique pour en former une ville, la fête célébrée par tous les peuples réunis prit le nom de Panathénées. Voyez Panathénées. (G)

ATHENES (Page 1:817)

* ATHENES, (Géog. anc. & mod.) ville de Grece, célebre par son ancienneté, par les savans hommes & les grands capitaines qu'elle a produits. C'est aujourd'hui peu de chose en comparaison de ce qu'elle étoit: il y a quinze à seize mille habitans, dont le langage est un Grec corrompu; elle appartient aux Turcs; elle est sur le golfe d'Engia; c'est la capitale de la Livadie. Long. 41. 55. lat. 38. 5.

On l'appelle vulgairement Setines; il y a une citadelle; c'étoit l'acropole des anciens: cette citadelle est entre deux éminences; l'une étoit le Musoeum, & l'autre le mont Anchesmus; il y a quelques antiquités; celles du château sont les mieux conservées. Ce château est sur une colline; il renferme un temple en marbre blanc & à colonnes de porphyre & marbre noir, qu'on dit magnifique & spacieux. On voit au frontispice des figures de cavaliers armés; dans le pourtour d'autres figures moins grandes; des bas reliefs, &c. Au bas du château, il reste dixsept colonnes de marbre blanc, de trois cents qui formoient anciennement le palais de Thésée: ces colonnes ont dix - huit piés de tour au moins, & sont hautes à proportion; on lit sur une porte qui est entiere, au dehors: Cette ville d'Athenes est assûrément la ville de Thésée; & en dedans: Cette ville d'Athenes est la ville d'Adrien, & non pas de Thésée. On voit encore le fanari, ou la lanterne de Démosthene; on dit que c'estlà que ce grand orateur s'enfermoit pour étudier son art. C'est une petite tour de marbre, environnée de six colonnes cannelées, & couverte d'un dome, au - dessus duquel il y a une lampe à trois becs en orne<pb->

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