ENCYCLOPÉDIE OU DICTIONNAIRE RAISONNÉ
DES SCIENCES, DES ARTS ET DES MÉTIERS

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"204"> funestes. Cette maladie met la femme dans un danger beaucoup plus imminent si elle est nouvellement accouchée ou enceinte; dans ce dernier cas, dit Hippocrate, l'érésipele (ou inflammation) est mortelle. Aphor. 43. lib V. « Le hoquet, le vomissement, la convulsion, le délire & l'extrème tension du ventre en une femme accouchée, qui a une inflammation de matrice, sont tous signes avant - coureurs de sa mort ». Mauriceau, Aphor. 264.

Les remedes qui conviennent dans cette maladie sont ceux, à peu près, que nous avons ordonné dans l'inflammation & les maladies inflammatoires; on ne doit pas trop compter sur les saignées; une, deux & peut - être trois, ne peuvent qu'être avantageuses; mais trop réitérées, elles pourroient devenir nuisibles. Fréderic Hoffman raconte qu'un médecin ayant sait saigner sept fois, dans l'espace de six jours, une dame qui avoit une inflammation à la matrice, d'abord après la septieme saignée, ses yeux s'obscurcirent & elle tomba dans une défaillance mortelle. Oper. tom. ij. sect. 2. cap. x. Les purgarifs sont encore moins convenables. Mauriceau qui, quoique chirurgien, mérite d'en être cru sur cette matiere à cause de sa longue expérience, assure que les purgatifs sont pernicieux à la femme qui a une inflammation de matrice. Aphor. 263. Ainsi on doit se restraindre à l'usage intérieur des tempérans, calmans, antiphlogistiques & légers emménagogues, tels que la liqueur minérale anodine d'Hossman, le nître, le borax, le sel sédatif, le castor, le camphre &c. Les lavemens adoucissans, rafraîchissans, peuvent avoir quelqu'effet; on peut aussi appliquer avec succés, ou du moins sans inconvénient, des fomentations avec l'eau vulnéraire: les incessus, ou bains des piés, les demi - bains sont de tous les emménagogues ceux qui conviennent le mieux. Si quelque corps étranger est resté dans la matrice, il saut l'en retirer au plutôt. L'inflaimmation loin d'être un motif de différer l'extraction de quelque morceau d'ariere saux retenu, ou d'un foetus moit, comme plusieursont prétendu, doit au contraire faire accélérer cette opération, quoique la matrice dont l'orifice est dur & serré, y apporte un plus grand obstacle; mais l'inflammation & l'obstacle augmenteroient continuellement si on laissoit persister la cause qui l'a produite & qui l'entretient.

Ulcere de la matrice. L'inflammation de la matrice ordinairement superficielle, ne se termine que rarement en abcès; lorsqu'elle supure, elle dégénere en ulcere, qui semble n'être qu'un abcès imparfait, dont l'entiere formation est prévenue par la rupture trop prompte des vaisseaux. L'ulcere est quelquefois aussi une suite des fleurs blanches invétérées, d'une excoriation faite pendant un accouchement laborieux; il peut aussi être le produit du virus vénérien, & je crois que dans ce tems - ci cette cause est la plus fréquente. Frédéric Hoffman assure que les femmes qui font beaucoup usage du lait, & celles qui ne peuvent satisfaire leur appetit vénérien, pour l'ordinaire fort grand, sont les plus sujettes à cette maladie. C'est à l'écoulement du pus par le vagin qu'on connoît sûrement l'ulcere de la matrice. On peut même aussi s'assurer de sa présence, & s'instruire de la partie qu'il occupe, par le tact & même la vûe, au moyen du speculum de la matrice. Les personnes qui en sont attaquées ressentent des douleurs dans cette partie, sont tristes, languissantes, abattues, sans force, sans appetit: la fievre, les frissons, les défaillances, &c. surviennent quelquefois. Si l'ulcere occupe les parties antérieures, il est accompagné de strangurie, de discurie, &c. il excite au contraire le tenesme s'il a son siege aux parties postérieures. L'ulcere de la matrice se guérit rare<cb-> ment, il consume insensiblement la malade; il entraîne ordinairement à sa suite la fievre lente, le marasme, & enfin la mort. Une des causes fréquentes de l'ineurabilité de ces ulceres, est la mauvaise méthode qu'on suit dans leur traitement; ce n'est ordinairement qu'avec des rafraîchissans, des assadissans, & sur - tout des laitages qu'on attaque cette maladie; cependant suivant la remarque d'Hossman, le lait dispose plûtôt à ces ulceres qu'il ne les guérit. Il est d'ailleurs certain que ce remede si celébre affadit, épaissit & énerve entierement le sang, & s'oppose par - là à la guérison des ulceres; aussi peuton s'appercevoir que les ulceres extérieurs, soumis à la vue, sont mollasses, baveux, sordides, & ont beaucoup de peine à se cicatriser tant qu'on use du lait: on doit appliquer cette observation à ceux qui sont dans l'intérieur, & compter un peu moins dans leur curation, sur les propriétés si vantées, mais si peu constatées, du lait & autres médicamens semblables. Les remédes qu'on doit regarder comme plus appropriés, sont les décoctions vulnéraires, balsamiques, les baumes, les eaux minérales, sulphureuses, celles de Berrege, de Banniere, de saint Laurent, &c. prises intérieurement & injectées dans la matrice. Les succes répétés qu'ont eu ces caux dans la guérison d'autres ulceres, même intérieurs, nous sont des garants assurés de leur efficacité dans le cas présent. Quant aux injections, il faut avoir attention qu'elles ne soient pas adstringentes, car alors elles seroient extremèment pernicieuses, & risqueroient de rendre l'ulcere carcinomateux. Si l'ulcere est vénérien, on doit avoir plus d'espérance pour sa guérison, parce que nous connoissons un spécifique sûr pour détruire ce virus: le même remede réussiroit peut - être dans les autres cas. Du moins lorsqu'il n'est pas permis au médecin de prendre tous les éclaircissemens nécessaires, il doit, si la malade veut s'y résoudre, en venir sans crainte à ce remede; d'autant mieux qu'il y a peu d'occasions où les soupçons qu'on pourroit avoir ne soient bien fondés. La meilleure façon d'employer le mercure, c'est sous forme d'onguent en friction; l'usage intérieur est quelquefois nuisible, & toujours tresincertain, de quelque façon qu'on le déguise.

Skirrhe de la matrice. Le skirre de la matrice est ordinairement la suite de l'inflammation traitée par des remedes trop froids, astringens, &c. ou il est précédé & comme préparé par des engorgemens, des embarras qui se forment peu - à - peu dans le tissu de ce viscere, qui augmentent insensiblement par un régime peu exact, & qui acquierent enfin la dureté skirrheuse; quelquefois la matrice grossit prodigieusement, excite une tumeur considérable à l'hypogastre. On a vu des matrices dans ce cas - là qui étoient monstrueuses, qui pesoient jusqu'à trente & quarante livres: la maiadie pour lors se connoît facilement. Quelquefois au contraire le skirrhe n'occupe qu'une petite partie, le col, par exemple, ou l'orifice; dans ces circonstances la matrice n'est pas trop tuméfiée, on s'apperçoit cependant de cette tumeur par le fait, en appuyant la main sur le ventre, ou en introduisant le doigt sur le col de la matrice: on sent alors son corps grossi, dur, inégal; l'orifice interne est aussi plus résistant & plus court que dans l'état ordinaire. Cette maladie est souvent occasionnée par un dérangement dans l'excrétion menstruelle, & elle en est ordinairement accompagnée: le cours des regles est ou supprimé ou plus abondant, & toujours irrégulier. Les femmes qui approchent de cinquante ans & qui sont sur le point de perdre tout - à - fait leurs regles, sont assez sujettes à cette maladie. Lorsque le skirrhe se forme, il excite des symptomes plus graves, jette la machine dans un plus grand désordre que lorsqu'il est formé; pendant qu'il se pré<pb-> [p. 205] pare, la femme est dans un malaise presque continuel, sans cesse attaquée de vapeurs, de sussocation, de palpitation, &c. & lorsqu'il est décidé, tous ces symptomes cessent: il semble être le fruit d'un mouvement critique, & former un dépôt salutaire.

On peut rapporter au skirrhe de la matrice son ossification, dont il y a quelques exemples. Un de mes anciens condisciples & amis, M. Desgaux, docteur en Medecine de l'université de Montpellier, a donné une observation très curieuse touchant une matrice ossifiée, Journal de medecine année 1759, mois d'Octobre, pag. 336. Elle étoit, assure - t - il, enveloppée d'une membrane mince, à peu pres comme le périoste, qui recouvroit une substance osseuse, lisse & polie dans la partie extérieure, presque semblable à celle des os du crâne: cette substance n'étoit point continue, elle paroissoit séparée par une partie tendineuse dans son milieu; la partie extérieure étoit solide, résistoit aux différens coups, & rendoit le même son que les os: elle auroit pu supporter la scie & le trépan..... Après la croûte osseuse, qui avoit environ deux lignes d'épaisseur, étoit une espece de diploë aussi solide que celui qu'on trouve dans les condylomes des os de la cuisse; quelques glandes du vagin parurent aussi ossifiées. La personne de qui on avoit tiré cette matrice avoit eu dans sa jeunesse les pâles - couleurs, après cela une fievre intermittente; elle ressentit ensuite des douleurs à la matrice, qui furent enfin terminées par le skirrhe de la matrice qui s'ossifia à la longue, & augmenta au point qu'elle pesoit huit livres & demie. André Cnoëffell rapporte qu'on trouva dans une jeune veuve la matrice entierement cartilagineuse; l'ossification ne seroit - elle qu'un progrès du skirihe, ou plûtôt un endurcissement propre aux parties nerveuses, museuleuses? on voit les gros vaisseaux près de leur embouchure devenir d'abord durs, skirrheux, & enfin par succession de tems osseux.

Lorsque le skirrhe de la matrice est encore dans son commencement, dans l'état simple d'engorgement, d'embarras, les symptomes sont plus graves, le danger paroît pressant, mais il est moins certain, la guérison est plus facile; lorsqu'au contraire il est formé, quelquefois il rétablit la santé, mais le plus souvent il dégénere en cancer, ou donne lieu à des hydropisies funestes; il est d'ailleurs pour l'ordinaire incurable: alors il ne demande aussi aucun remede; ceux qui paroîtroient les plus indiqués, tels que les apéritifs énergiques, stimulans, les eaux minérales, &c. sont les moins convenables; ils le font dégénérer plûtôt en cancer, ou hâtent l'hydropisie. C'est pourquoi la malade doit s'en tenir à un régime exact, s'abstenir de viandes salées, épicées, des exercices violens, des veilles trop longues, & sur - tout du coït: par ce moyen elle pourra sans autre incommodité porter son skirrhe pendant de longues années. Quelques observations font voir que les martiaux ne doivent point être compris dans la regle que nous avons établie. Zacutus Lusitanus assure avoir vu des obstructions dures comme des pierres, lapidoras durities, ramollies & fondues par leur usage. Il raconte avoir guéri par leur moyen une femme qui avoit à la matrice une tumeur skirrheuse, dure, indolente, de la grosseur d'une courge, qu'il avoit inutilement combattue par les sudorifiques, fomentations, cataplasmes, onguens & autres remedes aussi peu efficaces. Prax. medic. admirab. lib. II. observ. 88. Si l'engorgement ne fait que commencer, les avéritiss réfineux, les emménagogues, les fondans, les eaux minérales, peuvent être employés avec succès.

Cancer de la matrice. Le skirrhe de la matrice dégénere en cancer lorsqu'il est traité par des remedes trop actifs, échauffans, incendians le sang; lorsque la femme qui en est attaquée ne garde aucun régime, fait un usage immodéré des liqueurs ardentes, spiritueuses, aromatiques, des alimens salés, épicés; qu'elle pousse les veilles fort avant dans la nuit, & sur - tout quand toutes ces causes sont aidées & déterminées par une disposition héréditaire, naturelle ou acquise. Cette funeste dégénération s'annonce par des douleurs extrèmement aiguës rapportées à l'endroit de la matrice qui paroissoit auparavant skirrheux, & qu'on observe toujours dur & inégal: les malades y ressentent dans certains tems comme des piquures d'aiguille ou des traits de flamme qui les dévorent, ainsi qu'elles s'expriment, & que me le disoit une jeune dame atteinte de cette cruelle maladie, à la violence de laquelle elle a suceombé. Je ne me rappelle qu'avec horreur le souvenir de l'état affreux dans lequel la jettoient les douleurs violentes dont elle étoit tourmentée; la fievre lente, avec frissons & redoublemens, est une suite assez ordinaire de cette maladie, de même que les défaillances, les enflûres, &c. Tant que le cancer est fermé, il ne se manifeste que par ces symptomes; mais lorsque sur la fin il vient à s'ouvrir, il donne issue à une sanie noirâtre extrèmement âcre, qui s'échappe par la vulve & excorie en passant tout l'intérieur du vagin. Il semble dans cette maladie que la lymphe éprouve la même altération que le sang dans la gangrene ou dans l'état scorbutique qui en est le commencement: la corruption est quelquefois si grande, qu'il s'y engendre des vers, comme Moriceau & autres l'ont observé.

Cette maladie, si terrible en elle - même, l'est encore plus par ses suites, qui sont toujours des plus fâcheuses. Elle ne se termine que par la mort, qui arrive souvent trop lentement selon les desirs de la malade, qui semble l'attendre avec indifférence & même avec plaisir, comme le terme de ses peines. Elle est quelquefois précédée par des enflures, des syncopes frequentes, des cours de ventre colliquatifs, marasme, &c. Le cancer de la matrice est l'écueil de la Medecine: elle ne peut fournir aucune espece de secours propres, je ne dis pas à guérir, mais même à pallier cette maladie, à en arrêter les progrès: elle élude l'action molle des remedes adoucissans, inéficaces, & les médicamens actifs héroïques l'aigrissent. Il est plus à - propos de ne pas médicamenter les cancers cachés, dit Hippocrate; car destitués de remedes, les malades vivent plus long - tems. Aphor. 38. lib. VI. L'extirpation, secours pour l'ordinaire utile dans celui qui attaque les mammelles, n'est pas permise dans celui qui a son siége à la matrice; on n'a pas même la ressource de pouvoir y appliquer des remedes extérieurs. Il est bien douloureux pour un medecin de voir un malade dans l'état le plus affreux, sans avoir le moindre secours à porter; & il est bien désespérant pour un malade de se trouver dans ce cas. Cependant pour qu'un medecin ne reste pas oisif spectateur des progrès de la maladie, il peut amuser & consoler la malade en lui prescrivant des petits remedes indifférens, incapables de pouvoir opérer le moindre effet sensible sur le sang: c'est ici le cas où les laitages pourroient être employés, si on peut les soutenir; ils sont très - propres à bien remplir cette vûe, mais il est rare que leur usage sympathise avec celui des narcotiques, dont on doit sans cesse enivrer la malade, pour lui dérober une partie de son mal, pour calmer la vivacité de ses douleurs. Le plus grand service qu'on puisse lui rendre dans ces cruelles circonstances, est de la rendre insensible. (m)

Matrice (Page 10:205)

Matrice, en Minéralogie, est un synonyme de miniere. On nomme ainsi la pierre ou la substance dans laquelle un minerai a été reçu, formé & élaboré. C'est ainsi qu'on dit que le quartz est ordinai<pb->

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