ENCYCLOPÉDIE OU DICTIONNAIRE RAISONNÉ
DES SCIENCES, DES ARTS ET DES MÉTIERS

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"722"> vir. Alors mettez - les dans un plat ou sur une assiette arrosés d'eau; & servez en même tems du poivre & du sel mêlés.

Pour les frire, prenez - en les culs; coupez - les par quartiers; ôtez le foin; rognez la pointe des feuilles; saupoudrez - les ensuite de farine détrempée avec du beurre, des jaunes d'oeufs, du sel, &c. & jettez - les dans la friture chaude.

On met encore les artichaux à la sauce blanche & à plusieurs autres. Voyez là - dessus les traités de cuisine.

Pour les confire, pelez les culs; n'y laissez ni feuilles ni foin; jettez - les dans l'eau fraîche; faites - les passer dans une autre eau; faites - leur jetter un bouillon. Prenez un pot; mettez - y de l'eau bien salée qui surnage de trois doigts; ajoûtez une partie d'eau & une autre de vinaigre; l'épaisseur de deux doigts de bonne huile ou de beurre qui ne soit pas trop chaud; & laissez les artichaux dans cet état.

L'artichaut à la poivrade est ami de l'estomac & fait trouver le vin bon. On en conserve les culs pour l'hyver, en les faisant sécher au soleil ou à la fumée, & en les tenant dans un lieu sec: mais de quelque maniere qu'on les prépare, ils nourrissent peu & fournissent un suc grossier & ventux; les côtes des feuilles & les tiges tendres & blanches se digerent facilement. Les racines excitent fortement les urines; on les peut employer dans les décoctions & les bouillons diurétiques. Quelques - uns prescrivent la décoction en lavement pour provoquer les urines.

ARTICLE (Page 1:722)

ARTICLE, s. m. (Gram.) en Latin articulus, diminutif de artus, membre; parce que dans le sens propre, on entend par article les jointures des os du corps des animaux, unies de différentes manieres, & selon les divers mouvemens qui leur sont propres: de - là par métaphore & par extension, on a donné divers sens à ce mot.

Les Grammairiens ont appellé articles certains petits mots qui ne signifient rien de physique, qui sont identifiés avec ceux devant lesquels on les place, & les font prendre dans une acception particuliere; par exemple, le roi aime le peuple; le premier le ne présente qu'une même idée avec roi; mais il m'indique un roi particulier que les circonstances du pays où je suis, ou du pays dont on parle, me font entendre: l'autre le qui précede peuple, fait aussi le même effet à l'égard de peuple; & de plus le peuple étant placé après aime, cette position fait connoitre que le peuple est le terme ou l'objet du sentiment que l'on attribue au roi.

Les articles ne signifient point des choses ni des qualités seulement; ils indiquent à l'esprit le mot qu'ils précedent, & le font considérer comme un objet tel, que sans l'article, cet objet seroit regardé sous un autre point de vûe; ce qui s'entendra mieux dans la suite, surtout par les exemples.

Les mots que les Grammairiens appellent articles, n'ont pas toûjours dans les autres langues des équivalens qui y ayent le même usage; les Grees mettent souvent leurs articles devant les noms propres, tels que Philippe, Alexandre, César, &c. Nous ne mettons point l'article devant ces mots - là; enfin il y a des langues qui ont des articles, & d'autres qui n'en ont point.

En Hébreu, en Chaldéen, & en Syriaque, les noms sont indéclinables, c'est - à - dire, qu'ils ne varient point leur désinence ou dernieres syllabes, si ce n'est comme en François du singulier au pluriel; mais les vûes de l'esprit ou relations que les Grecs & les Latins font connoître par les terminaisons des noms, sont indiquées en Hébreu par des prépositifs qu'on appelle préfixes, & qui sont liés aux noms, à la maniere des prépositions inséparables, ensorte qu'ils forment le même mot.

Comme ces prépositifs ne se mettent point au no<cb-> minatif, & que l'usage qu'on en fait n'est pas trop uniforme, les Hébraïsans les regardent plûtôt comme des prépositions que comme des articles. Nomina Hebraïca proprie loquendo sunt indeclinabilia. Quo ergo in casu accipienda sint & efferenda, non terminatione dignoscitur, sed proecipuè constructions, & proepositionibus quibusdam, seu litteris proepositionum vices gerentibus, quoe ipsis à fronte adjiciuntur. Masclef. gramm. Hebr. c. 11. n. 7.

A l'égard des Grecs, quoique leurs noms se déclinent, c'est - à - dire, qu'ils changent de terminaison selon les divers rapports ou vûes de l'esprit qu'on a à marquer, ils ont encore un article O, H, TO, TOU=, TH=, TOU=, &c. dont ils font un grand usage; ce mot est en Grec une partie spéciale d'oraison. Les Grecs l'appellerent ARTRO, du verbe ARW, apto, adapto, disposer, apprêter; parce qu'en effet l'article dispose l'esprit à considérer le mot qui le suit sous un point de vûe particulier; ce que nous développerons plus en détail dans la suite.

Pour ce qui est des Latins, Quintilien dit expressément qu'ils n'ont point d'articles, & qu'ils n'en ont pas besoin, noster sermo articulos nondesiderat. (Quint. Lib. I. c. iv.) Ces adjectifs, is, hic, ille, iste, qui sont souvent des pronoms de la troisieme personne, sont aussi des adjectifs démonstratifs & métaphysiques, c'est - à - dire, qui ne marquent point dans les objets des qualités réelles indépendantes de notre maniere de penser. Ces adjectifs répondent plûtôt à notre ce qu'à notre le; les Latins s'en servent pour plus d'énergie & d'emphase: Catonem illum sapientem (Cic.) ce sage Caton; ille alter, (Ter.) cet autre; illa seges, (Virg. georg. I. v. 47.) cette moisson; illa rerum domina fortuna, (Cic. pro Marc. n. 2.) la fortune elle - même, cette maitresse des évenemens.

Uxorem ille tuus pulcher amator habet. Propert. Lib. II. Eleg. XXI. v. 4. Ce bel amant que vous avez, a une femme.

Ces adjectifs Latins qui ne servent qu'à déterminer l'objet avec plus de force, sont si différens de l'article Grec & de l'article François, que Vossius prétend (de Anal. Liv. I. c. j. p. 375.) que les maîtres qui en faisant apprendre les déclinaisons Latines font dire hoec musa, induisent leurs disciples en erreur; & que pour rendre littéralement la valeur de ces deux mots Latins, selon le génie de la langue Greque, il faudroit traduire hoec musa, ATH H MOU=SA, c'est - à - dire cette la muse.

Les Latins faisoient un usage si fréquent de leur adjectif démonstratif, ille, illa, illud, qu'il y a lieu de croire que c'est de ces mots que viennent notre le & notre la, ille ego, mulier illa; Voe homini illi per quem tradetur. (Luc, c. xxij. v. 22.) bonum erat ei si natus non fuisset homo ille. (Matt. c. xxvj. v. 24.) Hic illa parva Petilia Philoctetoe. (Virg. AEn. Lib. iij. v. 401.) C'est - là que la petite ville de Petilie fut bâtie par Philoctete. Ausonioe pars illa procul quam pandit Apollo. Ib. v. 479. hoec illa Charybdis. Ib. v. 558. Pétrone faisant parler un guerrier qui se plaignoit de ce que son bras étoit devenu paralytique, lui fait dire: funerata est pars illa corporis mei, quâ quonam Achilles eram; il est mort ce bras, par lequel j'étois autrefois un Achille. Ille Deûm pater, Ovide. Quisquis fuit ille Deorùm. Ovide, Metam. Lib. I. v. 32.

Il y a un grand nombre d'exemples de cet usage, que les Latins faisoient de leur ille, illa, illud, surtout dans les comiques, dans Phedre, & dans les auteurs de la basse latinité. C'est de la derniere syllabe de ce mot ille, quand il n'est pas employé comme pronom, & qu'il n'est qu'un simple adjectif indicatif, que vient notre article le; à l'égard de notre la, il vient du féminin illa. La premiere syllabe du masculin ille, a donné lieu à notre pronom il dont nous [p. 723] faisons usage avec les verbes, ille affirmat, (Phaed. Lib. III. fab. iij. v. 4.) il assûre. ille fecit, (Id. Lib. III. fab. 5. v. 8.) il a fait, ou il fit. Ingenio vires ille dat, ille rapit. (Ovid. Her. Ep. xv. v. 206.) A l'égard de elle, il vient de illa, illa veretur. (Virg. Ecl. 111. v. 4.) elle craint.

Dans presque toutes les langues vulgaires, les peuples soit à l'exemple des Grecs, soit plûtôt par une pareille disposition d'esprit, se sont fait de ces prépositifs qu'on appelle articles; nous nous arrêterons principalement à l'article François.

Tout prépositif n'est pas appellé article. Ce, cet, cette, certain, quelque, tout, chaque, nul, aucun, mon, ma, mes, &c. ne sont que des adjectifs métaphysiques; ils précedent toûjours leurs substantifs; & puisqu'ils ne servent qu'à leur donner une qualification métaphysique, je ne sai pourquoi on les met dans la classe des pronoms. Quoi qu'il en soit, on ne donne pas le nom d'article à ces adjectifs; ce sont spécialement ces trois mots, le, la, les, que nos Grammairiens nomment articles, peut - être parce que ces mots sont d'un usage plus fréquent: avant que d'en parler plus en détail, observons que

1°. Nous nous servons de le devant les noms masculins au singulier, le roi, le jour. 2°. Nous employons la devant les noms féminins au singulier, la reine, la nuit. 3°. La lettre s, qui, selon l'analogie de la langue, marque le pluriel quand elle est ajoûtée au singulier, a formé les du singulier le; les sert également pour les deux genres, les rois, les reines; les jours, les nuits. 4°. Le, la, les sont les trois articles simples: mais ils entrent aussi en composition avec la préposition à, & avec la préposition de, & alors ils forment les quatres articles composés, au, aux, lu, des.

Au est composé de la préposition à, & de l'article le, ensorte que au est autant que à le. Nos peres disoient al, al tems Innocent III. c'est - à - dire, au tems d'Innocent III. L'apostoile manda al prodome, &c. le Pape envoya au prud'homme: Ville - Hardouin, lib. I. pag. 1. mainte lerme i fu plorée de puié al départir, ib. id. pag. 16. Vigenere traduit maintes larmes furent plorées à leur partement, & au prendre congé. C'est le son obscur de l'e muet de l'article simple le, & le changement assez commun en notre langue de l en u, comme mal, maux; cheval, chevaux: altus, haut; alnus, aulne (arbre) alna, aune (mesure) alter, autre, qui ont fait dire au au lieu de à le, ou de al. Ce n'est que quand les noms maculins commencent par une consonne ou une voyelle aspirée, que l'on se sert de au au lieu de à le; car si le nom masculin commence par une voyelle, alors on ne fait point de contraction, la préposition à & l'article le demeurent chacun dans leur entier: ainsi quoiqu'on dise le coeur, au coeur, on dit l'esprit, à l'esprit, le pere, au pere; & on dit l'enfant, à l'enfant; on dit le plomb, au plomb; & on dit l'or, à l'or, l'argent, à l'argent; car quand le substantif commence par une voyelle, l'e muet de le s'élide avec cette voyelle, ainsi la raison qui a donné lieu à la contraction au, ne subsiste plus; & d'ailleurs, il se feroit un bâillement desagréable si l'on disoit au esprit, au argent, au enfant, &c. Si le nom est féminin, n'y ayant point d'e muet dans l'article la, on ne peut plus en faire au, ainsi l'on conserve alors la préposition & l'article, la raison, à la raison; la vertu, à la vertu. 2°. Aux sert au pluriel pour les deux genres; c'est une contraction pour à les, aux hommes, aux femmes, aux rois, aux reines, pour à les hommes, à les femmes, &c. 3°. Du est encore une contraction pour de le; c'est le son obscur des deux e muets de suite de le, qui a amené la contraction du: autrefois on disoit del: la fins del conseil si fu tels, &c. l'arrêté du conseil fût, &c. Ville - Hardouin, lib. VII. p. 107. Gervaise del Chas<cb-> tel, id. ib. Gervais du Castel, Vigenere. On dit donc du bien & du mal, pour de le bien, de le mal, & ainsi de tous les noms masculins qui commencent par une consonne; car si le nom commence par une voyelle, ou qu'il soit du genre féminin, alors on revient à la simplicité de la préposition, & à celle de l'article qui convient au genre du nom; ainsi on dit de l'esprit, de la vertu, de la peine; par - là on évite le bâillement: c'est la même raison que l'on a marquée sur au. 4°. Enfin des sert pour les deux genres au pluriel, & se dit pour de les, des rois, des reines.

Nos enfans, qui commencent à parler, s'énoncent d'abord sans contraction; ils disent de le pain, de le vin; tel est encore l'usage dans presque toutes nos provinces limitrophes, sur - tout par le peuple: c'est peut - être ce qui a donné lieu aux premieres observations que nos Grammairiens ont faites de ces contractions.

Les Italiens ont un plus grand nombre de prépositions qui se contractent avec leurs articles.

Mais les Anglois, qui ont comme nous des prépositions & des articles, ne font pas ces contractions; ainsi ils disent of the, de le, où nous disons du; the king, le roi; of the king, de le roi, & en François du roi; of the queen, de la reine; to the king, à le roi, au roi; to the queen, à la reine. Cette remarque n'est pas de simple curiosité; il est important, pour rendre raison de la construction, de séparer la préposition de l'article, quand ils sont l'un & l'autre en composition, par exemple, si je veux rendre raison de cette façon de parler, du pain sufsit: je commence par dire de le pain, alors la préposition de, qui est ici une préposition extractive, & qui comme toutes les autres prépositions doit être entre deux termes, cette préposition, dis - je, me fait connoître qu'il y a ici une ellipse.

Phédre, dans la fable de la vipere & de la lime, pour dire que cette vipere cherchoit dequoi manger dit: hoec qum tentaret si qua res esset cibi, l. IV. sab. vij. vers 4. où vous voyez que aliqua res cibi fait connoître par analogie que du pain, c'est aliqua res panis, paululum panis; quelque chose, une partie, une portion du pain; c'est ainsi que les Anglois, pour dire donnez - moi du pain, disent give me some bread, donnezmoi quelque pain; & pour dire j'ai vû des hommes, ils disent I have seen some men; mot à mot, j'ai vû quelques hommes; à des Médecins, to some physicians, à quelques Médecins.

L'usage de sous - entendre ainsi quelque nom générique devant de, du, des, qui commencent une phrase, n'étoit pas inconnu aux Latins: Lentulus écrit à Cicéron de s'intéresser à sa gloire; de faire valoir dans le sénat, & ailleurs, tout ce qui pourroit lui faire honneur: de nostra dignitate velim tibi ut semper curoe sit. Cicéron, épit. Livre XII. étît. xjv. Il est évident que de nostra dignitate ne peut être le nominatif de curoe sit; cependant ce verbe sit, étant à un mode fini, doit avoir un nominatif; ainsi Lentulus avoit dans l'esprit ratio ou sermo de nostra dignitate, l'intérêt de ma gloire; & quand même on ne trouveroit pas en ces occasions de mot convenable à suppléer, l'esprit n'en seroit pas moins occupé d'une idée que les mots énoncés dans la phrase réveillent, mais qu'ils n'expriment point: telle est l'analogie, tel est l'ordre de l'analyse de l'énonciation. Ain nos Grammairiens manquent d'exactitude, quand ils disent que la préposition dont nous parlons, sert à marquer le nominatif lorsqu'on ne veut que désigner une partie de la chose, Grammaire de Regnier, pag. 170; Restaut, pag. 75 & 418. ils ne prennent pas garde que les prépositions ne sauroient entrer dans le discours sans marquer un rapport ou relation entre deux termes, entre un mot & un mot: par exemple, la préposition pour marque un motif, une fin, une raison:

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