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La lumiere premiere consiste donc selon eux en un certain mouvement des particules du corps lumineux, au moyen duquel ces particules peuvent pousser en tout sens la matiere subtile qui remplit les pores des corps transparens.
Les petites parties de la matiere subtile ou du premier élément étant ainsi agitées, poussent & pressent en tout sens les petits globules durs du second élément, qui les environnent de tous côtés, & qui se touchent. M. Descartes suppose que ces globules sont durs, & qu'ils se touchent, afin de pouvoir transmettre en un instant l'action de la lumiere jusqu'à nos yeux; car ce phllosophe croyoit que le mouvement de la lumiere étoit instantané.
La lumiere est donc un effort au mouvement, ou
une tendance de cette matiere à s'éloigner en droite
ligne du centre du corps lumineux; & selon Descartes l'impression de la lumiere sur nos yeux, par
le moyen de ces globules, est à - peu - près semblable
à celle que les corps étrangers font sur la main d'un
aveugle par le moyen de son bâton. Cette derniere
idée a été employée depuis par un grand nombre
de philosophes, pour expliquer différens phénomenes
de la vision; & c'est presque tout ce qui reste
aujourd'hui du systême de Descartes, sur la lumiere.
Car en premier lieu la lumiere, comme nous le ferons
voir plus bas, emploie un certain tems, quoique
très - court, à se répandre; & ainsi ce philosophe
s'est trompé, en supposant qu'elle étoit produite
par la pression d'une suite de globules durs. D'ailleurs si les particules des rayons de lumiere étoient
des globules durs, elles ne pourroient se réfléchir
de maniere que l'angle de réflexion fût égal à l'angle
d'incidence. Cette propriété n'appartient qu'aux
corps parfaitement élastiques. Un corps d'or qui
vient frapper perpendiculairement un plan, perd
tout son mouvement, & ne se réfléchit point. Il se
réfléchit au contraire dans cette même perpendiculaire,
s'il est élastique; si ce corps vient frapper le
plan obliquement, & qu'il soit dur, il perd par la
rencontre du plan tout ce qu'il avoit de mouvement
perpendiculaire, & ne fait plus après le choc, que
glisser parallélement au plan: si au contraire le
corps est élastique, il reprend en arriere en vertu
de son ressort, tout son mouvement perpendiculaire,
& se réfléchit par un angle égal à l'angle d'incidence.
Voyez
Le P. Malebranche déduit l'explication de la lumiere, d'une analogie qu'il lui suppose avec le son.
On convient que le son est produit par les vibrations
des parties insensibles du corps sonore. Ces
vibrations ont beau être plus grandes ou plus petites,
c'est - à - dire se faire dans de plus grands ou de
plus petits arcs de cercle, si malgré cela elles sont
d'une même durée, elles ne produiront en ce cas
dans nos sensations, d'autre différence que celle
du plus ou moins grand degré de force; au lieu
que si elles ont différentes durées, c'est - à - dire si un
des corps sonores fait dans un même tems plus de
vibrations qu'un autre, les deux sons différeront
alors en espece, & on distinguera deux différens
tons, les vibrations promptes formant les tons aigus,
& les plus lentes les tons graves. Voyez
Le P. Malebranche suppose qu'il en est de même
Ainsi on voit que le P. Malebranche ne fait autre
chose que de substituer aux globules durs de Descartes, de petits tourbillons de matiere subtile. Mais
indépendamment des objections générales qu'on
peut opposer à tous les systêmes qui font consister
la lumiere dans la pression d'un fluide, objections
qu'on trouvera exposées dans la suite de cet article;
on peut voir à l'article
M. Huyghens croyant que la grande vitesse de la lumiere, & la décussation ou le croisement des rayons ne pouvoit s'accorder avec le systeme de l'émission des corpuscules lumineux, a imaginé un autre système qui fait encore consister la propagasion de la lumiere dans la pression d'un fluide. Selon ce grand géometre, comme le son s'étend tout - à - l'entour du lieu où il a été propuit par un mouvement qui passe successivement d'une partie de l'air à l'autre, & que cette propagation se fait par des surfaces ou ondes sphériques, à cause que l'extension de ce mouvement est également prompte de tous côtés; de même il n'y a point de doute selon lui, que la lumiere ne se transmette du corps lumineux jusqu'à nos yeux, par le moyen de quelque fluide intermédiaire, & que ce mouvement ne s'étende par des ondes sphériques semblables à celles qu'une pierre excite dans l'eau quand on l'y jette.
M. Huyghens déduit de ce système, d'une maniere fort - ingémeuse, les differentes propriétés de la lumiere, les lois de la réflection, & de la réfraction, &c. mais ce qu'il paroît avoir le plus de peine à expliquer, & ce qui est en effet le plus difficile dans cette hypothèse, c'est la propagation de la lumiere en ligne droite. En effet M. Huyghens compare la propagation de la lumiere à celle du son: pourquoi donc la lumiere ne se propage - t - elle pas en tout sens comme le son? L'auteur fait voir assez bien que l'action ou la pression de l'onde lumineuse doit être la plus forte dans l'endroit où cette onde est coupée par une ligne menée du corps lumineux; mais il ne suffit pas de prouver que la piession ou l'action de la lumiere en ligne droite, est plus forte qu'en aucun autre sens. Il faut encore démontrer qu'elle n'existe que dans ce sens - là; c'est ce que l'expérience nous prouve, & ce qui ne suit point du système de M. Huyghens.
Selon M. Newton, la lumiere premiere, c'est - à - dire la faculté par laquelle un corps est lumineux, consiste dans un certain mouvement des particules du corps lumineux, non que ces particules poussent une certaine matiere fictice qu'on imagineroit placée entre le corps lumineux & l'oeil, & logée dans les pores des corps transparens; mais parce qu'elles se lancent continuellement du corps lumineux qui les darde de tous côtés avec beaucoup de force; & la lumiere secondaire, c'est - à - dire, l'action par laquelle le corps produit en nous la sensation de clarté, consiste selon le même auteur non dans un effort au mouvement, mais dans le mouvement réel de ces particules qui s'éloignent de tous côtés du corps lumineux en ligne droite, & avec une vitesse presqu'incroyable.
En effet, dit M. Newton, si la lumiere consistoit [p. 719]
Cette déviation qui a été observée d'abord par
M. Roemer, & ensuite par d'autres astronomes, ne
sauroit avoir pour cause l'excentricité de l'orbe de
Jupiter; mais elle provient selon toute apparence,
de ce que la lumiere solaire que les satellites nous
réfléchissent, a dans un cas plus de chemin à faire
que dans l'autre, pour parvenir du satellite à nos
yeux: ce chemin est le diametre de l'orbe annuel
de la terre. Voyez
Descartes qui n'avoit pas une assez grande quantité d'expérience, avoit cru trouver dans les éclipses de lune, que le mouvement de la lumiere étoit instantané. Si la lumiere, dit - il, demande du tems, par exemple une heure pour traverser l'espace qui est entre la terre & la lune, il s'ensuivra que la terre étant parvenue au point de son orbite où elle se trouve entre la lune & le soleil, l'ombre qu'elle cause, ou l'interruption de la lumiere ne sera pas encore parvenue à la lune, mais n'y arrivera qu'une heure après; ainsi la lune ne sera obscurcie qu'une heure après que la terre aura passé par la conjonction avec la lune: mais cet obscurcissement ou interruption de lumiere ne sera vû de la terre qu'une heure après. Voilà donc une éclipse qui ne paroîtroit commencer que deux heures après la conjonction, & lorsque la lune seroit déjà éloignée de l'endroit de l'ecliptique qui est opposé au soleil. Or toutes les observations sont contraires à cela.
Il est visible qu'il ne résulte autre chose de ce raisonnement, sinon que la lumiere n'emploie pas une heure à aller de la terre à la lune, ce qui est vrai; mais si la lumiere n'emploie que 7 rainutes à venir du soleil jusqu'à nous, comme les observations des satellites de Jupiter le font connoitre; elle employera beaucoup moins d'une minute à venir de la terre à la lune, & de la lune à la terre, & alors il sera difficile de s'appercevoir d'une si petite quantité dans les observations astronomiques.
J'ai cru devoir rapporter cette objection pour montrer que si Descartes s'est trompé sur le mouvement de la lumiere, au - moins il avoit imaginé le moyen de s'assurer du tems que la lumiere met à parcourir un certain espace. Il est vrai que la lune étant trop proche de nous, les éclipses de cette planete ne peuvent servir à décider la question; mais il y a apparence que si les satellites de Jupiter eussent été mieux connus alors, ce philosophe auroit changé d'avis; & on doit le regarder comme le premier auteur de l'idée d'employer les observations des satellites, pour prouver le mouvement de la lumiere.
La découverte de l'aberration des étoiles fixes,
faite il y a 20 ans par M. Bradley, a fourni une nouvelle
preuve du mouvement successif de la lumiere,
& cette preuve s'accorde parfaitement avec celle
qu'on tire des éclipses des satellites. Voyez
La lumiere semblable à cet égard aux autres corps, ne se meut donc pas en un instant. M. Roemer & M. Newton ont mis hors de doute par le calcul des éclipses des satellites de Jupiter, que la lumiere du soleil emploie près de sept minutes à parvenir à la terre, c'est - à - dire, à parcourir une espece de plus de 23, 000, 000, de lieues, vitesse 10000000 fois
De plus, si la lumiere consistoit dans une simple
pression, elle ne se répandroit jamais en droite ligne;
mais l'ombre la feroit continuellement fléchir dans
son chemin. Voici ce que dit là - dessus M. Newton:
Quant à la force prodigieuse avec laquelle il faut
que ces corpuscules soient dardés pour pouvoir se
mouvoir si vîte, qu'ils parcourent jusques à plus de
3000000 lieues par minutes, écoutons là - dessus le
même auteur:
Rien ne montre mieux la divisibilité des parties de
la matiere, que la petitesse des parties de la lumiere.
Le docteur Nieuwentit a calculé qu'un pouce de
bougie, après avoir été converti en lumiere, se trouve
avoir été divisé par - là en un nombre de parties
exprimé par le chifre 269617040, suivi de quarante
zéros, ou, ce qui est la même chose, qu'à chaque
seconde que la bougie brûle, il en doit sortir un nombre
de parties exprimé par le chiffre 418660, suivi
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