ENCYCLOPÉDIE OU DICTIONNAIRE RAISONNÉ
DES SCIENCES, DES ARTS ET DES MÉTIERS

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"364"> dans la vérité elle eût été introduite par l'empereur Constantin; mais Justimen y fit plusieurs changeinens, c'est pourquoi il regardoit cette forme comme étant de son invention.

Cette forme de légitimation est celle qu'il appelle per dotalia instrumenta, parce que dans ce cas le seul consentement n'étoit pas suffisant pour la validité du mariage; il falloit qu'il y eût un contrat rédigé par écrit & des pactes dotaux.

Il ordonna donc que quand un homme épouseroit une femme libre ou affranchie qu'il pouvoit avoir pour concubine, soit qu'il eût deja des enfans légitimes, ou qu'il eût seulement des enfans naturels de cette femme, que ces enfans naturels deviendroient légitimes par le mariage subséquent.

La même chose a lieu parmi nous, & comme pour opérer cette légitimation, il faut que le pere naturel puisse contracter mariage avec la personne dont il a eu des enfans; les bâtards adultérins & incestueux ne peuvent être légitimés par ce moyen, mais seulement par lettres du prince.

Néanmoins si un homme marié épousoit encore une femme, & que celle ci fût dans la bonne foi, les enfans seroient légitimes, cap. ex tenore extra qui filii sint legitimi.

Il y avoit chez les Romains une cinquieme forme de légitimation; c'étoit celle qui se fait per oblationem curioe; c'est - à - dire lorsque le bâtard étoit aggrégé à l'ordre des décurions ou conseillers des villes, dont l'état devint si pénible, que pour les encourager on leur accorda divers privileges, du nombre desquels étoit celui - ci: ce privilege s'étendoit aussi aux silles naturelles qui épousoient des décurions. Cette maniere de légitimer fut introduite par Théodose le Grand, ainsi que le remarque Justinien dans sa novelle 89; elle n'est point en usage parmi nous.

La légitimation par mariage subséquent, a été admise par le Droit canon; elle n'est pas de droit divin, n'ayant été admise que par le droit positif des décrétales, suivant un rescrit d'Alexandre III. de l'an 1181, au titre des décrétales, qui filii sint legitimi.

Cet usage n'a même pas été reçu dans toute l'Eglise; Dumolin, Fleta, Selden & autres auteurs, assurent que la légitimation par mariage subsequent, n'a point d'effet en Angleterre par rapport aux successions, mais seulement pour la capacité d'être promu aux ordres sacrés.

Quelque dispense que la cour de Rome accorde pour les mariages entre ceux qui ont commis incestes ou adulteres, & quelque clause qui se trouve dans ces dispenses pour la légitimation des enfans nés de telles conjonctions, ces clauses de légitimation sont toujours regardées comme abusives; elles sont contraires à la disposition du concile de Trente, & ne peuvent opérer qu'une simple dispense quoad spiritualia, à l'effet seulement de rendre ces enfans capables des ministeres de l'Eglise. Voyez les Mem. du clergé, tome V. pag. 858. & suiv.

Les empereurs voulant gratifier certaines familles, leur ont accordé la faculté de légitimer tous bâtards, & de les rendre capables de successions, en dérogeant aux lois de l'empire & à toutes les constitutions de l'empire comprises dans le corps des authentiques. Il y en a un exemple sous Louis de Baviere quatrieme du nom, lequel par des lettres données à Trente le 20 Janvier 1330, donna pouvoir à nobles hommes Tentalde, fils de Gauthier, Suard & à Maffée, fils d'Odaxes de Forêts de Bergame, & à leurs héritiers & successeurs en ligne maseuline, de légitimer dans toute l'Italie toutes sortes de bâtards, même ceux descendus d'incestes; en sorte qu'ils pussent être appellés aux successions, être institués héritiers & rendus capables de donation, nonobstant les lois contraires contenues aux authentiques.

Il y a dans l'empire un titre de comte palatin, qui n'a rien de commun avec celui des princes palatins du Rhin; c'est une dignité dont l'empereur décore quelquefois des gers de Lettres. L'empereur leur donne ordinairement le pouvoir de faire des docteurs, de créer des notaires, de légitimer des bâtards; & un auteur qui a écrit sur les affaires d'Allemagne dit, que comme on ne respecte pas beaucoup ces comtes, on fait encore moins de cas de leurs productions, qui sont souvent vénales ausiibien que la dignité même.

On voit dans les arrêts de Papon, qu'un de ces comtes nommé Jean Navar, chevalier & comte palatin, fut condamné par arrêt du parlement de Toulouse, prononcé le 25 Mai 1462, à faire amende honorable, à demander pardon au roi pour les abus par lui commis en octroyant en France légitimation, notariats & autres choses, dont il avoit puissance du pape contre l'autorité du roi; & que le tout fut déclaré nul & abusif.

En France on ne connoit que deux manieres de légitimer les bâtards; l'une de droit, qui est par mariage subséquent; l'autre de grace, qui est par lettres du prince.

Le mariage subséquent efface le vice de la naissance, & met les bâtards au rang des enfans légitimes. Ceux qui sont ainsi légitimés jouissent des mêmes droits que s'ils étoient nés légitimes; conséquemment ils succedent à tous leurs parens indistinctement, & considérés en toute occasion comme les autres enfans légitimes.

Le bâtard légitimé par mariage, jouit même du droit d'aînesse à l'exclusion des autres enfans qui sontnés constante matrimonio, depuis sa légitimation mais non pas à l'exclusion de ceux qui sont nés auparavant, parce qu'on ne peut enlever à ces derniers le droit qui leur est acquis.

La légitimation par mariage subséquent requiert deux conditions.

La premiere, que le pere & la mere fussent libres de se marier au tems de la conception de l'enfant, au tems de sa naissance, & dans le tems intermédiaire.

La seconde, que le mariage ait été célébré en face d'Eglite avec les formalités ordinaires.

La légitimation qui se fait par lettres du prince est un droit de souveraineté, ainsi qu'il est dit dans une instruction faite par Charles V. le 8 Mai 1372.

Nos rois ont cependant quelquefois permis à certaines personnes de légitimer les bâtards. Le roi Jean, par exemple, par des lettres du 26 Février 1061, permet à trois réformateurs généraux, qu'il envoyoit dans le bailliage de Mâcon, & dans les sénéchaussées de Toulouse, de Beaucaire & de Carcassonne, de donner des lettres de légitimation, soit avec finance, ou sans finance, comme ils jugeroient à propos.

De même Charles VI. en établissant le duc de Berrison frere pour son lieutenant dans le Languedoc par des lettres du 19 Novembre 1380, lui donna le pouvoir entre autres choses, d'accorder des lettres de légitimation, & de faire payer sinance aux légitimés.

Les lettres de légitimation portent qu'en tousactes en jugement & dehors, l'impétrant sera tenu censé & réputé légitime; qu'il jouira des mêmes franchises, honneurs, privileges & libertés, que les autres sujets du roi; qu'il pourra tenir & posséder tous biens, meubles & immeubles qui lui appartien lront par dons ou acquêts, & qu'il pourra acquerir dans la suite; recueillir toutes successions & acceptions, dons entre - vifs, à cause de mort ou autrement, pourvu toutefois quant aux successions, que ce soit du [p. 365] consentement de ses parens; de maniere que ces lettres n'habilitent à succéder qu'aux parens qui ont consenti à leur enregistrement & que la légitimation par lettres du prince, a bien moins d'esset que celle qui a lieu par mariage subséquent.

Les bâtards légitimés par lettres du prince acquierent le droit de porter le nom & les armes de leur pere; ils sont seulement obligés de mettre dans leurs armes une barre, peur les dislinguer des enfans légitimes.

On a quelquefois accordé des lettres à des bâtards, adultérins, mais ces exemples sont rares.

Pour ce qui est de la - légitimation, ou plutôt de la dispense, à l'effet de pouvoir être promu aux ordres sacrés & de pouvoir posséder des bénéfices, il faut se pourvoir en la jurisdiction ecclésiastique.

Sur la légitimation, Voyez ce qui est dit dans Henrys, tom. III. liv. VI. chap. V. quest. 27.

LEGITIME (Page 9:365)

LEGITIME, legitima, seu portio lege debita, (Jurisprud.) est une portion assurée par la loisur la part héréditaire que l'on auroit eu, sans les dispositions entrevifs ou testamentaires qui out donné atteinte à cette part.

La loi n'accorde cette portion qu'à l'héritier présomptif, auquel le défunt étoit naturellement obligé de laisser la subsistance, & qui pourroit intenter la querelle d'inosficiosité.

Quelques auteurs, tels que le Brun en son traité des suceessions, attribuent l'origine de la légitime à la loi glicia; nous ne savons pas précisément en quel tems cette loi fut faite, comme il sera dit ci - après au mot Loi, à l'article loi glicia. On voit seulement que le jurisconsulte Caïus, qui vivoit sous l'empire de Mare - Aurele, sit un commentaire sur cette loi; mais il paroît que l'on a confondu la querelle d'inoff cicsité avec la légitime; que la loi glicia n'introduisit que la querelle d'inosficiosité, & que le droit de légitime étoit déja établi.

Papinien dit que la légitime est quarta legitimoe partis, ce qui nous indique l'origine de la légitime. Cujas avoue cependant en plusieurs endroits de ses observations, qu'il n'a pu la decouvrir; mais Janus Acosta, ad prine. institut. de inoff. testan. & d'après lui Antoine Schultingius, in Jurispruc. antjustinianoea, p. 381. prétendent avec assez de fondement que la légitime tire son origine de la loi filidia, faite sous le triumvirat d'Auguste, laquelle permet à l'eritier de retenir le quart de l'hérédité. quelque disposition que le testateur ait pu faire au conraire.

Et en effet le jurisconsulte Paulus. liv. IV. recept. senten, ti. 5. & Vulpien dans la loi 8. 9 & 14. ff. de inoff. testam. disent positivement que la quarte falcidie est dûe aux héritiers qui pouoient intenter la plainte d'inofficiosité; d'où il paroît qu'anciennement la légitime & la falcidie étoient la même chose. Voyez Quarte falcidie.

Mais on cessa de les confondre ensenible depuis que Justinien eut ordonné pases novelles 18 & 92, que dorénavant la légitime se oit du tiers s'il y avoit quatre enfans ou moins, & de la moitie s'il y avoit cinq enfans ou davantage.

C'est de ces novelles qu'a été tirée l'authentique de triente & de semisse, qui dit que cette portion est un bienfait de la loi & non pas du pere.

La légitime a lieu quand il y a des donations entrevifs ou testamentaires si excessives, que l'héritier est obligé d'en demander la reduction, pour avoir la portion que la loi lui assure.

En pays coutumier, où l'institution n'a pas lieu, & où les estamens ne sont proprement que des codiciles, la querelle d'inosficiosité n'est ordinairement qu'une simple demande en légitime.

Celui qui est donataire ou légataire, & qui ne se trouve pas rempli de sa légitime, a l'action en supplémen.

Le donataire contre lequel le légitimaire demande la réduction de la donation pour avoir sa légitime, a une exception pour retenir sur sa donation, autant qu'il lui seroit dû à lui - même pour sa légitime.

La légitime est un droit qui n'est ouvert qu'à la mort de celui sur les biens duquel elle est dûe; un enfant ne peut, sous quelque prétexte que ce soit, en demander une à son pere de son vivant, même sous prétexte que le pere auroit marié & doté, ou établi autrement quelques autres enfans.

Pour être légitimaire il faut être héritier, & n'avoir pas renoncé à la succession; & en effet les lois romaines veulent que la légitime soit laissée non pas quocumque titulo, mais à titre d'institution. En pays coutumier, le légitimaire est saisi de plein droit & peut demander partage, & l'on traite avec lui de même qu'avec un héritier, comme il paroît par l'imputation qui se fait sur la légitime; imputation qui est un véritable rapport par l'obligation de fournir des corps héréditaires pour la légitime, le jet des lots qui se pratique avec le légitimaire, & la garantie active & passive qui a lieu entre lui & les autres héritiers.

Cependant lorsque tous les biens de la succession ne suffisent pas pour payer les dettes, l'enfant qui veut avoir sa légitime, peut, sans se porter héritier, la demander au dernier donataire.

Le fils aîné prend non - seulement sa légitime naturelle, mais il la prend avec le préciput que la loi accorde aux aînés.

La légitime est quelquefois qualifiée de créance, ce qui s'entend selon le Droit naturel; car selon le Droit civil, elle ne passe qu'après toutes les dettes, soit chirographaires ou hypothécaires; elle a néanmoins cet avantage qu'elle se prend sur les immeubles qui ont été donnés, avant que les dettes fussent constatées, & sur les meubles que le défunt a donné de sen vivant, au lieu que les créanciers n'ont aucun droit sur ces biens.

Toute rénonciation à une succession soit échue ou future, lorsqu'elle est faite aliquo dato, exclud les enfans du renonçant de demander aucune part en la succession, même à titre de légitime.

Une rénonciation gratuite exclud pareillement les enfans du renonçant, de pouvoir demander une légitime, à moins que le renonçant ne fût fils unique, parce qu'en ce cas ses enfans viennent de leur chef, & non par représentation.

Une fille qui auroit renoncé par contrat de mariage, pourroit néanmoins revenir pour sa légitime, supposé qu'elle fût mineure lors de sa rénonciation, qu'elle souffrît une lésion énorme, & qu'elle prît des lettres de rescision dans les dix ans de sa majorité.

Un fils majeur qui auroit accepté purement & simplement le legs à lui fait pour lui tenir lieu de légitime, ne seroit pas recevable à revenir pour sa légitime: on le juge pourtant autrement dans les parlemens de Droit écrit.

Nous ne voyons point de coutumes qui privent absolument les enfans de toute légitime; les plus dures sont celles qui excluent de la succession les filles mariées, quand même elles n'auroient eu qu'un chapeau de roses en mariage, ou mariage avenant, lequel tient lieu de légitime.

Suivant le Droit romain, les enfans naturels n'ont point droit de légitime dans la succession de leur pere, quoiqu'ils soient appellés pour deux onces à sa succession, lorsqu'il ne laisse point de femme ni d'enfans légitimes.

A l'égard de la succession de la mere, le Droit romain y donne une légitime aux bâtards, quand

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