ENCYCLOPÉDIE OU DICTIONNAIRE RAISONNÉ
DES SCIENCES, DES ARTS ET DES MÉTIERS

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"196"> de même, comme pour les draps, ce sera une ratine ou serge forte.

A ces premieres combinaisons, il s'en joint d'autres qui naissent ou simplement des degrés du plus au moins, ou des changemens alternatifs soit de couleur, soit de grosseur dans les fils de la chaîne, ou du frapper de l'étoffe sur le métier.

Une étoffe fine d'étaim sur étaim à deux marches, & serrée au métier, fera l'étamine du Mans.

La même frappée moins fort, ou laissée à ciaire voie, fera du voile.

La trame est elle filée de laine fine, mais cardée? c'est un beau maroc.

Est - elle un peu grosse? ce sera une baguette ou une sempiterne, pourvû qu'elle ait de largeur une aune & demie ou deux aunes.

Y a - t - on employé ce qu'il y a de pire en laine? c'est une revesche.

La chaîne est - elle haussée & baissée par quatre marches, & la trame très - fine? c'est un maroc double croisé.

La trame est - elle de laine un peu grasse sans croisure? c'est une dauphine.

La trame est - elle de Ségovie cardée sur étain fin? c'est l'espagnolette de Reims.

Est - elle double croisée? c'est la flanelle.

La chaîne est - elle d'étaim double & retordu? c'est le camelot.

Est - elle sur cinq lisses ou lames avec autant de marches? c'est la calemande de Lisle.

Trame de Berri sur étaim croisé? c'est le moleton, en le tirant au chardon des deux côtés.

Grosse trame de laine du pays, mélée avec du peignon, sur chaîne de chanvre? c'est la tiretaine de Baucamp ou le droguet du Berri & de Poitou.

La serge bien drappée, n'est que le pinchina de Toulon ou de Châlons - sur - Marne.

La serge de grosse laine bien foulée, est le pinchina de Berri.

On rempliroit cent pages des noms qui sont donnés aux étoffes d'une même espece, & qui n'ont de différence que les lieux où elles sont fabriquées.

En un mot, toutes les étoffes unies de laine, sous quelque dénomination qu'elles puissent être, ne se fabriquent que de deux façons, ou à simple croisure ou à double. Tout ce qui est fabriqué à simple croisure est de la nature du drap quand il foule; tels sont les draps londrins, les soies ou draps façon de Venise, destinés pour le commerce du Levant, auxquels on donne des noms extraordinaires, comme aboucouchou, &c. & quand il ne foule pas, il est de la nature de la toile. Tout ce qui est fabriqué à double croisure est serge, soit qu'il foule ou qu'il ne foule pas. De façon que la Draperie en général, n'est que de drap ou de serge, excepté néanmoins les calemandes qui ont cinq lisses & cinq marches, & qui ne levent qu'une lisse à chaque coup de navette; ce qui leur donne un envers & un endroit, quoique sans apprêt.

On appelle croisé simple, une étoffe à deux lisses & à deux marches dont les fils parfaitement croisés haussent & baissent alternativement à chaque coup de navette.

On appelle double croisé, une étoffe à quatre lisses & à quatre marches, dont le premier & le second fil levent au premier coup de navette; le second & le troisieme au second coup de navette; le troisieme & le quatrieme au troisieme coup de navette; le quatrieme & le premier, au quatrieme coup, & ainsi de suite; de maniere qu'un même fil hausse & baisse deux fois pour chaque duite, au lieu qu'il ne hausse & ne baisse qu'une fois au drap.

Après les étoffes de laine viennent les étoffes mélangées de laine & poil.

Des étoffes mélangées de laine & de poil. Tel est le camelot poil qui ne differe du camelot ordinaire, qu'en ce que la chaîne qui est d'un fil d'étaim bien fin est filée & retordue avec un fil de poil de chameau également fin, & la trame d'un fil d'étaim simple.

Les étamines & les camelots en soie, ou étamines jaspées & camelots jaspés, sont fabriqués pour la chaîne d'un fil de soie & d'un fil d'étaim, comme les camelots poil, mais frappés moins fort.

Le camelot & l'étamine jaspée ont la chaîne d'un fil d'étaim & d'un fil de soie de différentes couleurs, & c'est ce qui fait la jaspure.

Le canelé, façon de Bruxelles, a la moitié de la chaîne d'une couleur, & l'autre moitié d'une autre; il se travaille avec deux navettes, dont l'une chargée de grosse laine, & l'autre d'étaim fin, des deux mêmes couleurs que la chaîne qui est également retordue à deux fils, pour donner plus de consistence à l'étoffe, & la liberté de la frapper avec plus de force, & avec les battans les plus pesans.

Le drap, façon de Silésie, a sa chaîne & sa trame filées au grand rouet. Quoique cette étoffe soit réellement drap, néanmoins elle n'est pas travaillée à deux marches comme les draps ordinaires. C'est le dessein qui détermine la distribution des fils qui doivent lever & demeurer baissés; de maniere que le fabriquant est assujetti à composer un dessein qui convienne à l'étoffe, dont la fabrication deviendroit impossible, si le dessein étoit autrement entendu.

Il ne faut pas oublier les camelots fleuris ou droguets façonnés d'Amiens. Ils ont la chaîne composée d'un fil de soie tordu avec un fil d'étaim très - sin, pour leur donner plus de consistence. Cette un on du fil de soie & du fil d'étaim devient nécessaire; car ces étoffes étant travaillées à la marche, la chaine fatigue davantage.

On avoit entrepris à la manufacture de l'Hôpital de faire des droguets de cette espece tout laine; ils ont eu quelque succès. Ces étoffes se fabriquoient à la tire ou au bouton, comme les draps de Silésie; par ce moyen la chaîne étoit moins fatiguée.

Les droguets de Reims soie & laine, ont la trame d'une laine extrémement fine.

Ces étoffes qui sont fabriquées de deux matieres différentes, & qui ne foulent point, sont montées avec deux chaînes, dont l'une exécute la figure, & l'autre fournit au corps de l'étoffe; ce qui ne pourroit se faire avec de la laine; la grosseur du fil d'étaim, de quelque maniere qu'il soit filé, étant beaucoup plus considérable que celle de la soie, & la quantité qu'il en faudroit employer pour la fabrication dans les deux chaînes, érant d'un volume à ne pouvoir plus passer dans les lisses.

Après ces étoffes viennent les calemandes façonnées, ou à grandes fleurs.

Des calemandes façonnées ou à grandes fleurs. La composition de ces étoffes est semblable à celle des satins tout soie. La tire en est aussi la même; il n'y a de différence que dans le nombre des fils, qui n'est pas si considerable à la chaîne, ou ceux - là sont retordus & doubles.

Des pluches unies & façonnées. Les pluches unies ont été fabriquées à l'imitation des velours. La chaîne est également de fil d'étaim double & retordu, & le poil qui fait la seconde chaîne de la pluche, de poil de chameau tordu & doublé, à deux brins le fil pour les simples, à trois pour les moyennes, & à quatre pour les plus belles. Les pluches ciselées sont fabriquées comme les velours de cette espece; les unes avec la marche, lorsque le dessein est peint; les autres à la tire, lorsque le dessein est plus grand.

Il y a des pluches dont le poil est de soie, qu'on appelle pluches mi soie; elles ont la trame & la chaîne à l'ordinaire. [p. 197]

On rompoit plus efficacement le ressort du poil de la laine, & l'on donnoit aux étoffes un lustre plus net & plus durable, autrefois qu'on éroit dans l'usage de les passer à la calandre; mais on s'est apperçu que celles qui étoient foulées n'acquéroient point la sermeté qu'elles devoient avoir, en ne prenant point le cati; ce qui a conduit à l'emploi de la presse. La presse aidée des plaques de fer ou de cuivre extrémement échauffées, donne la consistance qu'on exige.

Les ordonnances qui défendent de presser à chaud, sont des années 1508, 1560, 1601, & du 3 Décembre 1697; il faut s'y soumettre au moins pour les draps d'écarlate & rouge de garence, dont la chaleur éteint l'éclat. Mais pour éviter cet inconvénient, on tombe dans un autre, & ces étoffes non pressées à chaud, n'offrent jamais une qualité égale aux draps qui ont subi cette manoeuvre.

Les fabriquans contraints d'opter, ont négligé les ordonnances sur la presse à chaud; ils la donnent même aux couleurs qui la craignent, & ils n'en font pas mieux.

Les étamines & les serges, soit celles qui étant fort lisses ne vont pas à la foulerie, soit celles qui n'ont été que dégraissées ou battues à I'eau, soit celles qui ont été non - seulement dégraissées & dégorgées, mais foulées à sec pour être drapées, doivent toutes être rintées & aérées. On les retire de la perche pour leur donner lesderniers apprêts, dont le but principal est d'achever de détruire les causes de rétraction & de ressort qui troublent l'égalité du tissu, d'incliner d'un même sens tous les poils d'un côté, d'en former l'endroit, & d'établir ainsi une sorte d'harmonie dans l'étoffe entiere, par la suppression des dérangemens & tiraillemens des fibres exterieures, & l'uniformité de la réflexion de la lumiere au - dehors.

C'est ce que l'on observe en faisant passer au bruisage les étamines délicates, & au retendoir ou bien à la calandre, toutes les étoffes foulées.

Du bruisage. Bruir des pieces d'étoffes, c'est les étendre proprement chacune à part, sur un petit rouleau; & coucher tous ces rouleaux ensemble dans une grande chaudiere de cuivre rouge & de forme quarrée, sur un plancher criblé de trous, & elevé à quelque distance du vrai fond de la chaudiere.

On remplit d'eau l'intervalle du vrai fond, ou faux fond percé de trous; on fait chauffer, on tient la chaudiere bien couverte. La vapeur qui s'éleve & qui passe par les trous du faux fond, est renvoyée par le couvercle de toutes parts sur les étoffes, les pénetre peu - à - peu, & assouplit tout ce qui est de roide & d'élastique; la presse acheve de détruire ce qui reste.

Du retendoir. Il en est de même du retendoir. Après avoir aspergé d'une eau gommée tout l'envers de l'étoffe, & l'avoir mise sur un grand rouleau, on en applanit plus efficacement encore tous les plis & toute l'inégalité des tensions, en dévidant lentement l'étoffe de dessus son rouleau, & la faisant passer sur une barre de fer poli, qui la tient en état au - dessus d'un grand brasier capable d'en agiter jusqu'aux moindres fibres, & en la portant de - là sur un autre rouleau qui l'entraîne uniment à l'aide d'une roue, d'une chevre ou d'un moulinet. L'étoffe va & vient de la sorte à diverses reprises d'un rouleau à l'autre; c'est l'intelligence de l'appréteur qui regle la machine & la manoeuvre.

Voyez figure 46. le retendoir. A A A A, le banc; b b, le rouleau; c c c, les traverses, dessus & dessous lesquelles passe l'étoffe; d d d, l'étoffe; e e, la poele à mettre un brasier, qu'on glisse sous l'étoffe près du rouleau.

Enfin l'étoffe soit bruisée, soit retendue, est plissée, feuilletée, mise à la presse, ou même calandrée, puis empointée, ou empaquetée avec des ficelles qui saisissent tous lesplis par les lisieres.

Il y a encore quelques apprêts qui different des précédens; telle est la gauffre. Voyez l'article Gauffrfr.

Il y a des étoffes gauffrées & qui portent ce nom, parce qu'on y a imprimé des fleurons, ou compartimens avec des fers figurés. Il y a des serges peintes qui se fabriquent & s'impriment à Caudebec en Normandie. Le débit en est d'autant plus considérable, que tout dépend du bon goût du fabriquant, du dessein & de la beauté des couleurs.

Il y a des étoffes tabisées ou ondées comme le gros taffetas qu'on nomme tabis, parce qu'ayant été inégalement, & par des méthodes différentes de l'ordinaire, pressées sous la calandre, le cylindre quoique parfaitement uni, a plié une longue ensilade de poils en un sens, & une autre ensilade de poils sur une ligne ou pression différente; ce qui donne à la soie ou la laine ces différens effets de lumiere ou sillons de lustre, qui semblent se succéder comme des ondes, & qui se conservent assez long - tems; parce que ce sont les impressions d'un poids énorme, qui dans ses différentes allées & venues, a plutôt écrasé que plié les poils & le grain de l'étoffe.

On fit il y a plusieurs années à la manufacture de Saint - Denis des expériences sur une nouvelle méthode de fabriquer les étoffes de laine, sans les coller apres qu'elles sont ourdies, comme c'est l'usage.

Il s'agit de préparer les fils d'une façon, qui leur donne toute la consistance nécessaire.

Nous ne savons ce que cela est devenu.

Nous finirons cet article en rassemblant sous un même point de vûe quelques arts assez différens, qui semblent avoir un but commun, & presque les mêmes manoeuvres; ces arts sont ceux du Chapelier, du Perruquier, du Tabletier - Cornetier, du Faiseur de tabatieres en écaille, & du Drapier. Ils emploient tous, les uns les poils des animaux, les autres l'écaille, les cheveux, & tous leurs procédés consistent à les amollir par la chaleur, à les appliquer fortement, & à les lier.

Laine hachée, Tapisserie en laine hachée (Page 9:197)

Laine hachée, Tapisserie en laine hachée, (Art méchan.) Comme nous ne fabriquons pointici de ces sortes d'ouvrages, voici ce que nous en avons pu recueillir.

1. Préparez un mélange d'huile de noix, de blanc de cérule & de litharge; employez ce mélange chaud.

2. Que votre toile soit bien étendue sur un métier.

3. Prenez un pinceau; répandez par - tout de votre laine hachée, & que cette laine soit de la couleur dont vous voulez que soit votre tapisserie.

4. Si vous voulez varier de dessein coloré votre tapisserie; lorsque votre laine hachée tiendra à la toile, peignez toute sa surface comme on peint les toiles peintes: ayez des planches.

5. Si vous voulez qu'il y ait des parties enfoncées & des parties saillantes, & que le dessein soit exécuté par ces parties sailiantes & enfoncées, ayez un rouleau gravé avec une presse, comme pour le gaufsrer des velours. Un ouvrier enduira le rouleau de couleurs avec des balles; un autre ouvrier tournera le moulinet; l'étoffe passera sur le rouleau, sera pressée & mise en tapisserie.

LAINERIE (Page 9:197)

LAINERIE, terme de, (Commerce, Manufact.) voici d'après Savary, Ricard & autres, l'explication de la plupart des termes de lainerie ou lainage, qui sont usités dans le Commerce & les Manufactures de France.

Laine d'agnelin, laine provenant des agneaux &

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