ENCYCLOPÉDIE OU DICTIONNAIRE RAISONNÉ
DES SCIENCES, DES ARTS ET DES MÉTIERS

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"184"> compactes. Cette méthode a l'avantage de dévoiler les imperfections de la portion qu'on pluche, & de préparer la laine à être plus facilement droussée.

5°. Le Droussage. Drousser, ou trousser la laine, c'est l'huiler, l'imbiber d'huile d'olive ou de navette, pour la carder. Je ne puis m'etendre autant que je le voudrois, sur les moyens qui sont les plus expédiens pour bien huiler la laine; je dirai seulement en passant, qu'il est plus à propos d'asperger la laine, que de l'arroser; de l'huiler par petites portions, que par tas & en monceau.

6°. Cardage & peignage. La longue laine se peigne, la courte se carde. Les cardeurs on deux excès à éviter; l'un de trop carder, l'autre de carder moins qu'il ne faut.

Ceux qui cardent trop légérement laissent dans la portion de laine qu'ils façonnent, de petits floccons plus durs que le reste de la cardée. La laine ainsi préparée, donne un fil inégal & vicieux. Les cardeurs qui ont la main pesante, brisent la laine; les filets ou coupés ou brisés, ne donnent plus une trême de même consistance, l'étoffe a moins de force. Cette façon, qui est des plus essentielles, est fort négligée dans nos manufactures; la paye modique qu'on donne aux ouvriers, leur fait préferer la méthode la plus expéditive à la meilleure.

7°. Mélange. Mêler, assortir, ou rompre la laine, c'est faire le mélange des laines de différentes qualités, que l'on veut employer à la fabrique des draps. Nos fabriquans françois étant obligés depuis longtems d'employer toutes sortes de laines pour fournir à la consommation, ont acquis une grande habileté dans l'art de mêler & d'allier les laines du royaume avec celles de leurs voisins.

8°. Filage. Filer la laine c'est téduire en fil les portions que le cardeur ou le peigneur ont disposées à s'étendre & à s'unir ensemble, pour ne former qu'un seul tissu long, étroit, & délié. Le fileur doit se précautionner contre deux défauts bien communs; l'un de trop tordre son fil, ce qui lui ôte de sa force, & fait fouler le drap; l'autre de donner un fil inégal, en le filant plus gros dans un endroit que dans l'autre. Il semble qu'on ne peut éviter ces deux défauts que par l'invention de machines qui tordent le fil au point qu'on désire en le filant également. Voyez l'article suivant sur la main - d'oeuvre de toutes ces opérations. (D. J.)

Laine (Page 9:184)

Laine, (Mat. méd.) laine de bélier ou de brebis. La laine sale, grasse, imprégnée della sueur de l'animal, ou d'oesipe (voyez OEsipe), étoit d'un grand usage chez les anciens. Hippocrate la faisoit appliquer sur les tumeurs après l'avoir fait carder, tremper dans de l'huile & dans du vin. Celse & Dioscoride célebrent aussi beaucoup de pareilles applications, & même pour des maladies internes, telles que l'inflammation de l'estomac, les douleurs de tête, &c.

Dioscoride préfere celle du cou & des cuisses, comme étant plus chargée d'oesipe.

Dioscoride décrit aussi fort au long une espece de calcination fort mal entendue de la laine, & sur - tout de la laine teinte en couleur de pourpre, qu'il prétend être un excellent ophtalmique après avoir essuyé cette calcination.

Heureusement la laine & ses préparations ne grossissent plus la liste des inutilités pharmaceutiques assez énormes sans cela; car on ne compte pour rien l'action de la laine dans l'application des flanelles imbibées de différentes liqueurs qui est en usage aujourd'hui. Il est évident qu'elle ne fait proprement dans ce cas que la fonction de vaisseau, c'est - à - dire d'instrument retenant le remede sur la partie asfectée.

Les vêtemens de laine, & même ceux qu'on ap<cb-> plique immédiatement sur la peau (ce qui est une pratique fort salutaire dans bien des cas, voyez Transpiration), ne doivent aussi leurs effets qu'à la propriété très - commune de couvrir le corps mollement & exactement, & par conséquent ces effets ne dépendent peint de la laine comme telle, c'est - à - dire de ses qualités spécifiques. Voyez Vêtement. (b)

Laine, Manufacture en Laine (Page 9:184)

Laine, Manufacture en Laine, ou Draperie, (Art méchan.) la laine habille tous les hommes policés. Les hommes sauvages sont nuds, ou couverts de la peau des animaux. Ils regardent en pitié les peines que nous prenons pour obtenir de notre industrie un secours moins sûr & moins prompt que celui que la bonté de la nature leur offre contre l'inclémence des saisons. Ils nous diroient volontiers: Tu as apporté en naissant le vêtement qu'il te faut en été, & tu as sous ta main celui qui t'est nécessaire en hiver. Laisse à la brebis sa toison. Vois - tu cet animal fourré. Prends ta fleche, tue - le, sa chair te nourrira, & sa peau te vêtira sans apprêt. On raconte qu'un sauvage transporté de son pays dans le nôtre, & promené dans nos atteliers, regarda avec assez d'indifférence tous nos travaux. Nos manufactures de couvertures en laine parurent seules arrêter un moment son attention. Il sourit à la vue de cette sorte d'ouvrage. Il prit une couverture, il la jetta sur ses épaules, fit quelques tours; & rendant avec dédain cette enveloppe artificielle au manufacturier: en vérité, lui ditil, cela est presqu'aussi bon qu'une peau de bête.

Les manufactures en laine, si superflues à l'homme de la nature, sont les plus importantes à l'homme policé. Aucunes substances, pas même l'or, l'argent & les pierreries, n'occupent autant de bras que la laine. Quelle quantité d'étoffes différentes n'en fabriquons - nous pas! nous lui associons le duvet du castor, le ploc de l'autruche, le poil du chameau, celui de la chevre, &c.

Quoique la plûpart de ces poils soient très - lians, on n'en forme point une étoffe sans mélange; ils fouleroient mal.

Si l'on unit la vigogne & le duvet du castor dans une étoffe, elle en aura l'oeil plus brillant. On appelle vigogne la laine de la brebis du Pérou.

Le ploc de l'autruche, le poil du chameau, celui de la chevre, sont des matieres fines, mais dures; elles n'entrent que dans des étoffes qu'on n'envoie point à la foule, telles que les camelots & autres dont nous faisons nos vêtemens d'été. Ces matieres ne fournissent donc qu'une très - petite partie de ce qu'on appelle étoffe de laine.

La laine de la brebis commune est seule l'objet du travail le plus étendu, & du commerce le plus considérable.

Entre les laines, on place au premier rang celles d'Espagne; après celles - ci, on nomme les laines d'Angleterre; les laines de France sont les dernieres. La Hollande en produit aussi d'assez belles; mais on ne les emploie qu'en étoffes légeres, parce qu'elles ne foulent pas.

On distingue trois qualités dans les laines d'Espagne; les léonoises, ou sorices ou ségovies; les belchites ou campos di Riziedos, & les navarroises.

On divise les deux premieres sortes seulement en trois qualités, qu'on appelle prime, seconde & tierce.

Dans les laines d'Angleterre & de Hollande, il y a le bouchon & la laine commune. Ces bouchons ne vont qu'au peigne, le reste passe à la carde.

Les meilleures laines de France sont celles du Berry. On nomme ensuite les laines du Languedoc. Quelques autres provinces fournissent encore des laines fines. Le reste est commun, & ne se travaille qu'en étoffes grossieres.

Travail préliminaire de la laîne. Toutes les laines en [p. 185] général doivent être lavees & dégraissées de leur quin. On appelle suin, cette crasse onctueuse qu'elles rapportent de dessus la brebis. Il est si nécessaire d'en purger la laine, qu'on ne fabriquera jamais un beau drap sans cette précaution, à laquelle on n'est pas assez attentif parmi nous, parce qu'elle cause un déchet de trente à quarante pour cent au moins. Cependant il est impossible de dégraisser un drap comme il convient, si la laine dont on l'a manufacturé, n'a pas été bien débarrassée de son suin.

Du lavage des laines. La laine ne se lave pas bien dans l'eau froide. C'est cependant l'usage du Berry & des autres provinces de France, malgré les ordonnances qui enjoignent de se servir de l'eau chaude. C'est toujours la raison d'intérêt qui prévaut. Il est défendu par arrêt du 4 Septembre 1714, de vendre ni exposer en vente aucunes laines, qu'elles n'aient été lavées de maniere à pouvoir être employées en étoffe sans être relavées, & ce à peine de trente livres d'amende pour chaque balle, tant contre le vendeur que contre l'acheteur. On n'excepte que les laines d'Espagne qui auront été lavées sur les lieux, & qui pourront être vendues d'après le lavage d'Espagne.

Cependant les laines d'Espagne qu'on emploie dans les bonnes manufactures sont toutes lavées ou relavées avec de l'eau tiede & de l'urine. Ce dernier ingrédient est absolument nécessaire pour en écarter les parties qui ont été rapprochées & serrées dans l'emballage, de maniere qu'elles feutreroient, si on n'employoit au lavage que l'eau.

La premiere opération du lavage à l'eau chaude se fait dans des baquets ou cuves disposées à cet effet. Il faut observer que l'eau ne soit pas trop chaude, le trop de chaleur amollissant les parties les plus déliées, les rapprocheroit & feroit feutrer. Que l'eau soit seulement tiede. Lorsque l'ouvrier l'aura bien serrée, pressée entre ses mains, il la mettra dans une grande corbeille d'osier, ensuite on la portera dans une eau courante pour la faire dégorger. Pour cet effet, la corbeille étant plongée dans l'eau, qui la pénétrera par - tout, on la relevera, pressera, remuera. Cette manoeuvre lui ôtera la mauvaise odeur qu'elle aura contractée au premier lavage. & achevera de la nettoyer. Voyez ce travail dans nos Planches de Draperie, fig. 1. A est la cuve pour laver les laines dans leur suin. B, le laveur. C, la laine dans la cuve. D, la riviere où l'on rinse & dégorge la laine. E, la manne on corbeille qui contient la laine qu'on fait dégorger. F, le laveur. G, un petit banc portatif qui soutient le laveur sur les bords du courant.

Une observation qui n'est pas à négliger, c'est que plus l'eau des baquets destinés au lavage des laines est chargée de suin, plus le lavage s'exécute parfaitement. Ainsi le lavage se fait d'autant mieux, qu'il a déja passé plus de laine dans un baquet avant celle qu'on y met.

Du pilotage des laines. Outre cette premiere opération, il est encore une façon de relaver les laines, & de leur donner une blancheur qui convient au genre d'étoffe que le fabriquant se propose de faire. C'est le pilotage.

Le pilotage n'a lieu que sur la laine à employer en étoffes légeres, telles que les flanelles, les molletons fins, &c. dont le dégrais avec la terre glaise altéreroit la qualité, lorsqu'on les feroit passer au moulin comme les draps & autres étoffes qui ont plus de résistance & de corps.

Pour piloter les laines on se sert du savon fondu dans de l'eau un peu chaude. On en remplit les cuves ou baquets semblables au premier lavage. On y ajoute de l'eau de suin, ou du premier lavage; & deux hommes qui ont des especes de pilons, l'agi<cb-> tent & la remuent avec la laine qui en prend la blancheur qu'on desire. On voit cette opération fig. 2. A, la cuve. B, les lissoires, ou bâtons à remuer la laine dans de l'eau de savon. C, les ouvriers qui pilotent.

Apres que la laine a été pilotée, on la porte à la riviere pour la rinser & la faire dégorger.

De l'étendage des laines. Lorsque les laines ont été lavées, on les fait sécher; l'usage dans les campagnes est de les étendre sur les prés, & quelquefois sur la terre; mais cet usage est mauvais. Les laines se chargent ainsi de poussiere, ou même ramassent de la terre qui s'y attache; ensorte qu'un manufacturier entendu, lorsqu'il achete des laines qui ont été séchées de cette maniere, & que la proximité des lieux le lui permet, a soin de la faire secouer par les emballeurs, à mesure qu'ils la mettent dans les sacs. On en séparera ainsi la poussiere & les autres ordures qui causeroient un déchet considérable.

Dans les manufactures réglées, on fait sécher les laines sur des perches posées dans des greniers. Il en est de même des laines teintes destinées à des draps & autres étoffes, lorsqu'elles ont besoin de sécher avant que d'être transmises à d'autres opérations relatives à la fabrication. Voyez fig. 3. la disposition des perches sur lesquelles on étend & l'on fait sécher les laines teintes ou en blanc, A, A, A, &c. B, B, B, les perches.

Du triage des laines. Lorsque les laines sont seches, on en fait un triage; c'est - à - dire qu'on divise les laines d'Espagne de la premiere qualité, en prime, seconde & tierce. Pour celle de Navarre & de France & autres plus communes, on sépare seulement les inférieures des autres.

La finesse du drap est proportionnée à la qualité de la laine; il faut pour les draps d'Abbeville & de Sedan des laines plus belles que pour ceux de Louviers & de d'Arnetat. Les laines qu'on emploie aux draps d'Elbeuf, sont inférieures à celles du drap de Louvier. On exige dans la fabrication des ouvrages dont nous venons de parler, l'emploi des laines d'Espagne seules.

Après le premier triage des laines communes de Navarre & de France, on en fait un second qui consiste à séparer les laines les plus longues des plus courtes. Les premieres sont destinées aux chaînes des étoffes, les secondes aux trames. Il faut encore que le trieur soit attentif à en rejetter les ordures qu'il rencontre sous ses mains. Voyez fig. iv. cette opération. A est la claie sur laquelle la laine est posée; B, la laine; C, le trieur.

Le manufacturier donne le nom de haute laine à la laine longue, & celui de basse laine à la laine courte. On emploie la haute laine aux chaînes, parce que le fil en aura plus de consistence, & que le travail de l'ourdisseur en sera facilité. On ne distingue point de haute & basse laine dans celles d'Espagne, & l'on n'en fait point de triage.

Le triage & le choix ont lieu pour toutes les autres, quelle que soit leur destination; qu'elles doivent aller à la carde ou au peigne. Nous allons suivre la main - d'oeuvre sur celles qui passeront à la carde, & dont on fabrique les draps. Nous reviendrons ensuite à celles qui vont au peigne, & nous exposerons leur usage.

Du battage des laines. Lorsque les laines ont été triées, & que la séparation en a été faite, on les porte par petites portions sur une espece de claie, formée de cordes tendues où on les frappe à coups de baguette, comme on voit, fig. v. A est la claie de corde à battre les laines; les ouvriers B, B sont deux batteurs.

Cette manoeuvre a deux objets. Le premiet d'ouvrir la laine ou d'en écarter les brins les uns des au<pb->

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