ENCYCLOPÉDIE OU DICTIONNAIRE RAISONNÉ
DES SCIENCES, DES ARTS ET DES MÉTIERS

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"19"> dimonium promittere. S'il ne comparoissoit pas; on disoit qu'il avoit fait défaut; ce qui s'exprimoit par vadimonium deserere. Trois jours après, si les parties n'avoient point transigé, le préteur les faisoit appeller, & si l'une des deux ne comparoissoit pas, elle étoit condamnée, à moins qu'elle n'eût des raisons bien légitimes pour excuser son défaut de comparoir.

De l'action. Quand les deux parties se trouvoient à l'audience, le demandeur proposoit son action, conçue selon la formule qui lui convenoit; car les conclusions de chaque action étoient renfermées dans des formules tellement propres à chacune, qu'il n'étoit pas permis de s'en écarter d'une syllabe. On prétend que C. N. Fulvius, qui de greffier devint édile l'an de Rome 449, fut l'auteur de ces formules; mais l'empereur Constantin les abrogea toutes, & il fit bien.

La formule de l'action étant reglée, le demandeur prioit le préteur de lui donner un tribunal ou un juge; s'il lui donnoit un juge, c'étoit ou un juge proprement dit, ou un arbitre; s'il lui donnoit un tribunal, c'étoit celui des commissaires, qu'on appelloit recuperatores, ou celui des centumvirs.

Le juge qui étoit donné de l'ordonnance du préteur, connoissoit de toutes sortes de matieres, pourvû que l'objet fût peu important, mais il ne lui étoit pas permis, comme je l'ai déja dit, de s'écarter tant soit peu de la formule de l'action.

L'arbitre connoissoit des causes de bonne foi & arbitraires. Quelquefois dans les arbitrages on consignoit une somme d'argent, qu'on appelloit compromissum, compromis; c'étoit un accord fait entre les parties de s'en tenir à la décision de l'arbitre, sous peine de perdre l'argent déposé.

Les commissaires recuperatores connoissoient des causes dans lesquelles il s'agissoit du recouvroment & de la restitution des deniers & effets des particuliers: on ne donnoit ces juges que dans les contestations de faits, comme en matiere d'injure, &c.

Des juges nommés centumvirs. Je m'étendrai un peu davantage sur ce qui regarde les centuravirs. Ils étoient tirés de toutes les tribus, trois de chacune, de sorte qu'ils étoient au nombre de cent cinq; ce qui n'empêchoit pas qu'on ne leur donnàt le nom de centumvirs. Ces juges rendoient la justice dans les causes les plus importantes, lorsqu'il s'agissoit de questions de droit & non de fait, sur - tout dans la pétition d'hérédité, dans la plainte de testamens inofficieux, & dans d'autres matieres semblables. Les jugemens des centumvirs avoient une certaine forme qui leur étoit propre.

Outre cela, ces juges étoient assis sur des tribunaux, au lieu que les autres n'étoient assis que sur des bancs. Il n'y avoit point d'appel de leurs jugemens, parce que c'étoit comme le conseil de tout le peuple. On a lieu de croire que ces magistrats furent créés l'an de Rome 519 ou environ, lorsque le peuple fut partagé pour la premiere fois en 135 tribus: cela paroît par la loi 12, 55, 29. ff. de l'origine du droit. Après le regne d'Auguste, le corps des centumvirs devint plus nombreux, & pour l'ordinaire il montoit à cent quatre - vingt: ils étoient distribués en quatre chambres ou tribunaux.

C'étoient les décemvirs qui, par l'ordre du préteur, assembloient ces magistrats pour rendre la justice. Les décemvirs, quoiqu'au nombre des magistrats subalternes, étoient du conseil du préteur, & avoient une sorte de prééminence sur les centumvirs. Il y en avoit cinq qui étoient sénateurs, & cinq chevaliers. Le préteur de la ville présidoit au jugement des centumvirs, & tenoit, pour ainsi dire, la balance entre les quatre tribunaux.

On se contentoit quelquefois de porter les causes légeres à deux de ces tribunaux, ensorte qu'on pou<cb-> voit instruire deux affaires en même - tems. Les centumvirs s'assembloient dans les basiliques, qui étoient de magnifiques édifices, où étoit déposée une pique pour marque de jurisdiction: de - là vient qu'on disoit un jugement de la pique, hastoe judicium, pour désigner un jugement des centumvirs. C'étoit les décemvirs qui recueilloient les voix, & cet acte de jurisdictions'exprimoit par ces mots, hastam cogere, de même que ceux qui présidoient à d'autres tribunaux étoïent dits, judicium cogere.

De la forme du jugement. Le juge, comme l'arbitre, devoit être approuvé par le défendeur, & on disoit alors que le juge convenoit. Il salloit aussi que les deux parties, tant le demandeur que le défendeur, souscrivissent le jugement des centumvirs, afin qu'il parût qu'ils y avoient consenti. On donnoit pour juge un ho mme qu'aucun empêchement, soit du côté des lois, soit du côté de la nature, soit du côté des moeurs, n'excluoit de cette fonction, & on le donnoit dans le même tems qu'il étoit demandé; ensuite on présentoit les cautions de payer les jugemens, & de ratifier celle qui seroit ordonnée.

Celle du défendeur étoit présentée la premiere, ou par son procureur, en cas qu'il fût absent, ou par lui - même quand il étoit présent, ou hors le jugement, en confirmant ce qui avoit été fait par son procureur. Cette caution se donnoit sous trois claufes; sçavoir, de payer le juge, de défendre à la demande, & de n'employer ni dol ni fraude; mais lorsque l'ajourné étoit obligé de se défendre en personne, il n'étoit point astraint à donner cette caution; on exigeoit seulement qu'il s'engageât d'attendre la décision, ou sous sa caution juratoire, ou sur sa simple parole, ou enfin qu'il donnât caution selon sa qualité.

Le procureur du demandeur devoit donner caution que ce qu'il feroit seroit ratifié. Lorsqu'on doutoit de son pouvoir à quelque égard, ou bien lorsqu'il étoit du nombre de ceux qu'on n'obligeoit point de représenter leurs pouvoirs, tels qu'étoient les parens & alliés du demandeur, on prenoit cette précaution pour empêcher que les jugemens ne devinssent illusoires, & que celui au nom duquel on avoit agi ne fût obligé d'essuyer un nouveau procès pour la même chose. Outre cela, si la prétention du demandeur étoit mal fondée, l'argent déposé pour caution étoit un appât qui engageoit le défendeur à se présenter pour y répondre. Cet argent déposé s'appelloit sacramentum.

Suivoit la contestation en cause, qui n'étoit que l'exposition du différend faite par les deux parties devant le juge en présence de témoins, testato. Ce n'étoit que de la contestation en cause que le jugement étoit censé commencer; d'où vient qu'avant le jugement commencé, & avant la cause contestée, étoient deux expressions équivalentes. Après la contestation, chaque plaideur assignoit sa partie adverse à trois jours, ou au surlendemain: c'est pourquoi cette assignation étoit appellée comperendinatio, ou condictio. Ce jour - là il y avoit un jugement rendu, à moins qu'une maladie sérieuse, morbus, sonticus, n'eût empêché le juge ou l'un des plaideurs, de se trouver à l'audience; dans ce cas on prorogeoit le délai, dies diffendebatur.

Si une des parties manquoit de comparoître sans alléguei l'excuse de maladie, le préteur donnoit contre le défaillant un édit péremptoire, qui étoit précédé de deux autres édits. Si les deux parties comparoissoient, le juge juroit d'abord qu'il jugeroit suivant la loi, & ensuite les deux plaideurs prêtoient, par son ordre, le serment de calomnie, c'est - à - dire, que chacun affirmoit que ce n'étoit point dans la vûe de frustrer ou de vexer son adversaire qu'il plaidoits calomniari pris dans ce sens, signifioit chicaner. Dans [p. 20] certaines causes, le demandeur évaluoit par serment la chose qui faisoit la matiere de la contestation, c'est - à - dire qu'il affirmoit avec serment que la chose contestée valoit tant; c'est ce qu'on appelloit in litem jurare; cela avoit lieu dans les causes de bonne foi, lorsqu'on répétoit la même chose, ou qu'il étoit intervenu dol ou contumace de la part du défendeur.

Quand le juge étoit seul, il s'associoit pour conseil un ou deux de ses amis, qui étoient instruits dans la science des loix; alors on plaidoit la cause; ce qui se faisoit en peu de mots, & c'est ce qu'on appelloit causes sommaires, causoe conjectio, ou par des discours plus longs ou composés avec plus d'art; telles sont les oraisons ou plaidoyers de Cicéron pour Quintius & pour Roscius le comédien. On donnoit le nom moratores à ces avocats déclamateurs, qui n'étoient bons qu'à retarder la décision des causes, qui causam morabantur. Enfin, on présidoit à l'audition des témoins, & l'on produisoit les registres & les autres pieces qui pouvoient servir à instruire le procès.

De la fin du jugement. L'après - mioi, après le coucher du soleil, on prononçoit le jugement, à moins que le juge n'eût pas bien compris la cause; car dans ce cas il juroit qu'il n'étoit pas suffisamment instruit, sibi non liquere; & par cet interlocutoire il étoit dispensé de juger: c'est pourquoi dans la suite les juges, pour ne pas hazarder mal - à - propos un jugement, demanderent quelquefois la décision de l'empereur, ou bien ils ordonnoient une plus ample information. Cependant cette plus ample information n'étoit gueres usitée que dans les jugemens publics. Ordinairement les juges prononçoient qu'une cho e leur paroissoit être ou n'être pas ainsi: c'étoit la formule dont ils se servoient, quoiqu'ils eussent une pleine connoissance de la chose dont ils jugeoient; quand ils ne suivoient pas cette maniere de prononcer, ils condamnoient une des parties & déchargeoient l'autre.

Pour les arbitres, ils commençoient par déclarer leur avis; si le défendeur ne s'y soumettoit pas, ils le condamnoient, & lorsqu'il étoit prouvé qu'il y avoit dol de sa part, cette condamnation se faisoit conformément à l'estimation du procès; au lieu que le juge faisoit quelquefois réduire cette estimation, en ordonnant la prisée.

Dans les arbitrages, il pouvoit avoir égard à ce que la foi exigeoit. Cependant les arbitres étoient aussi soumis à l'autorité du préteur, & c'étoit lui qui prononçoit & faisoit exécuter leur jugement aussi bien que celui des autres juges. Aussitôt qu'un juge avoit prononcé, soit bien ou mal, il cessoit d'être juge dans cette affaire.

Après le jugement rendu, on accordoit quelquefois au condamné, pour des causes légitimes, la restitution en entier: c'étoit une action pour faire mettre la chose ou la cause au même état où elle étoit auparavant. On obtenoit cette action, ou en exposant qu'on s'étoit trompé soi - même, ou en alléguant que la partie adverse avoit usé de fraude; par - là on n'attaquoit point proprement le jugement rendu, au lieu que l'appel d'une sentence est une preuve qu'on se plaint de son injustice.

Si le défendeur, dans les premiers trente jours depuis sa condamnation, n'exécutoit pas le jugement, on n'en interjettoit point appel, mais le préteur le livroit à son créancier pour lui appartenir en propriété comme son esclave, nexus creditori addicebatur, & celui ci pouvoit le retenir prisonnier jusqu'à ce qu'il se fût acquitté, ou en argent, ou par son travail. Le deman deur de son côté étoit exposé au jugement de calomnie. On entendoit par calomniateurs, ceux qui pour de l'argent suscitent un procès sans sujet. Dans les actions de partage, le défendeur étoit obligé de faire le serment de calomnie comme le demandeur.

Enfin, si le juge, sciemment & par mauvaise soi avoit rendu un jugement injuste, il devenoit garant du procès, litem faciebat suam, c'est - à - dire qu'il étoit contraint d'en payer la juste estimation. Quelquefois même on informoit de ce crime suivant la loi établie contre la concussion. Si le juge étoit convaincu d'avoir reçu de l'argent des plaideurs, il étoit condamné à mort suivant la loi des douze tables. C'en est assez pour ce qui regarde les jugemens particuliers. Nous parlerons dans un autre article des jugemens publics, dont la connoissance est encore plus intéressante. (D. J.)

Jugemens publics des Romains (Page 9:20)

Jugemens publics des Romains, (Hist. de la Jurisp. rom.) Les jugemens publics de Rome étoient ceux qui avoient lieu pour raison de crimes; ils sont ainsi appellés, parce que dans ces jugemens l'action étoit ouverte à tout le monde. On peut donc les définir des jugemens que les juges, donnés par un commissaire qui les présidoit, rendoient pour la vengeance des crimes, conformément aux lois établies contre chaque espece de crime.

Ces jugemens étoient ordinaires ou extraordinaires; les premiers étoient exercés par des préteurs, & les seconds par des commissaires appellés parricidii & duumviri; c'étoient des juges extraordinairement établis par le peuple. Les uns & les autres rendoient leurs jugemens publies, tantôt au barreau, tantôt au champ de Mars, & quelquefois même au capitole.

Dans les premiers tems, tous les jugemens publics étoient extraordinaires; mais environ l'an de Rome 605, on étab it des commissions perpétuelles, questiones perpetuoe; c'est - à - dire qu'on attribua à certains préteurs la connoissance de certains crimes, de sorte qu'il n'étoit plus besoin de nouvelles lois à ce sujet. Cependant depuis ce tems là il y eut beaucoup de commissions exercées, ou par le peuple lui - même dans les assemblées, ou par des commissaires oreés extraordinairement; & cela à cause de l'atrocité ou de la nouveauté du crime, dont la vengeance étoit poursuivie, comme, par exemple, dans l'affaire de Milon, qui étoit accusé d'avoir tué Clodius, & dans celle de Clodius lui - même, accusé d'avoit violé les saints mysteres. C'est ainsi que l'an de Rome 640, L. Cassius Longinus informa extraordinairement de l'inceste des vestales. Les premieres commissions perpétuelles furent celles qu'on établit pour la concussion, pour le péculat, pour la brigue, & pour le crime de lèze majestê.

Le jugement de concussion est celui par lequel les alliés des provinces répétoient l'argent que les magistrats préposés pour les gouverner, leur ont enlevé contre les lois. C'est pourquoi Cicéron dans ses plaidoyers contre Verrès, donne à la loi qui concernoit les concussions, le nom de loi sociale. En vertu de la loi julia on pouvoit poursuivre par la même action ceux à qui cet argent avoit passé, & les obliger à le restituer, quoiqu'il paroisse que la peine de l'exil avoit aussi été établie contre les concussionnaires.

Le jugement de péculat est celui dans lequel on accusoit quelqu'un d'avoir volé les deniers publics ou sacrés. Le jugement pour le crime d'argent retenu a beaucoup d'affinité avec le péculat: son objet étoit de faire restituer les deniers publics restés entre les mains de quelqu'un. Celui qui, par des voies illégitimes, tâchoit de gagner les suffrages du peuple, pour parvenir aux honneurs, étoit coupable de brigue; c'est pourquoi le jugement qui avoit ce crime pour objet, cessa d'être en usage à Rome, lorsque l'élection des magistrats eut été rèmise au soin du prince, & qu'elle ne dépendit plus du peuple.

Le crime de majesté embrassoit tout crime com<pb->

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