ENCYCLOPÉDIE OU DICTIONNAIRE RAISONNÉ
DES SCIENCES, DES ARTS ET DES MÉTIERS

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"33"> Femme, même après la mort de celle - ci.

7°. Il faut observer exactement dans les mariages les degrés de parenté & d'affinité.

8°. C'est une idolátrie que d'adorer les anges, le ciel, & les astres; & il n'en faut point tolérer les représentations.

Enfin, leur morale est fort pure; ils font sur - tout prosession d'une grande tempérance; ils craignent de manger trop, ou de se rendre trop délicats sur les mets qu'on leur présente; ils ont un respect excessif pour leurs maîtres; les Docteurs de leur côté sont charitables, & enseignent gratuitement; ils prétendent se distinguer par - là de ceux qui se font dieux d'argent, en tirant de grandes sommes de leurs leçons.

De la secte des Pharisiens. Origine des Pharisiens. On ne connoît point l'origine des Pharisiens, ni le tems auquel ils ont commencé de paroître. Josephe qui devoit bien connoître une secte dont il étoit membre & partisan zelé, semble en fixer l'origine sous Jonathan, l'un des Machabées, environ cent trente ans avant Jesus Christ.

On a crû jusqu'à présent qu'ils avoient pris le nom de séparés, ou de Pharisiens, parce qu'ils se séparoient du reste des hommes, au - dessus desquels ils s'elevoient par leurs austérités. Cependant il y a une nouvelle conjecture sur ce nom: les Pharisiens éto ent opposés aux Sadducéens qui nioient les récompenses de l'autre vie; car ils soutenoient qu'il y avou un paras, ou une remunération après la mort. Oerte récompense faisant le point de la controverse avec les Sadducéens, & s'appellant Paras, les Pharisiens purent tirer de - là leur nom, plutôt que de la séparation qui leur étoit commune avec les Pharisiens.

Doctrine des Pharisiens. 1°. Le zele pour les traditions fait le premier crime des Pharisiens. Ils soutenoient qu'outre la loi donnée sur le Sinaï, & gravée dans les écrits de Moïse, Dieu avoit confié verbalement à ce législateur un grand nombre de rits & de dogmes, qu'il avoit fait passer à la postérité sans les ecrire. Ils nomment les personnes par la bouche desquels ces traditions s'étoient conservées: ils leur donnoient la même autorité qu'à la Loi, & ils avoient raison, puisqu'ils supposoient que leur origine étoit également divine. J. C. censura ces traditions qui affoiblissoient lé texte, au lieu de l'éclaircir, & qui ne tendoient qu'à flatter les passions au lieu de les corriger. Mais sa censure, bien loin de ramener les Pharisiens, les effaroucha, & ils en furent choqués comme d'un attentat commis par une personne qui n'avoit aucune mission.

2°. Non - seulement on peut accomplir la Loi écrite, & la Loi orale, mais encore les hommes ont assez de forces pour accomplir les oeuvres de surérogation, comme les jeûnes, les abstinences, & autres dévotions très - mortifiantes, auxquelles ils donnoient un grand prix.

3°. Josephe dit que les Pharisiens admettoient non - seulement un Dieu créateur du ciel & de la terre, mais encore une providence ou un destin. La difficulté consiste à savoir ce qu'il entend par destin: il ne faut pas entendre par - là les étoiles, puisque les Juifs n'avoient aucune dévotion pour elles. Le destin chez les Payens, étoit l'enchaînement des causes secondes, liées par la vérité éternelle. C'est ainsi qu'en parle Ciceron: mais chez les Pharisiens, le destin signifioit la providence & les decrets qu'elle a formés sur les évenemens humains. Josephe explique si nettement leur opinion, qu'il est difficile de concevoir comment on a pû l'obscurcir. « Ils croyent, dit - il, (antiq. jud. lib. XVIII. cap. ij.) que tout se fait par le destin; cependant ils n'ôtent pas à la volonté la liberté de se déterminer, parce que, selon eux, Dieu use de ce tempérament; que quoique toutes choses arrivent par son decret, ou par son conseil, l'homme conserve pourtant le pouvoir de choisit entre le vice & la vertu ». Il n'y a rien de plus clair que le témoignage de cet historien, qui étoit engagé dans la secte des Pharisiens, & qui devoit en connoitre les sentimens. Comment s'imaginer après cela, que les Pharisiens se crussent soumis aveuglément aux influences des astres, & à l'enchaînement des causes secondes?

4°. En suivant cette signification naturelle, il est aisé de développer le véritable sentiment des Pharisiens, lesquels soutenoient trois choses différentes. 1°. Ils croioient que les évenemens ordinaires & naturels arrivoient nécessairement, parce que la providence les avoit prévus & déterminés; c'est - là ce qu'ils appelloient le deslin. 2°. Ils laissoient à l'homme sa liberté pour le bien & pour le mal. Josephe l'assure positivement, en disant qu'il dépendoit de l'homme de faire le bien & le mal. La Providence regloit donc tous les évenemens humains; mais elle n'imposoit aucune nécessité pour les vices ni pour les vertus. Afin de mieux soutenir l'empire qu'ils se donnoient sur les mouvemens du coeur, & sur les actions qu'il produisoit, ils alléguoient ces paroles du Deutéronome, où Dieu déclare, qu'il a mis la mort & la vie devant son peuple, & les exhorte à choisir la vie. Cela s'accorde parfaitement avec l'orgueil des Pharisiens, qui se vantoient d'accomplir la Loi, & demandoient la récompense dûe à leurs bonnes oeuvres, comme s'ils l'avoient méritée. 3°. Enfin, quoiqu'ils laissassent la liberté de choisir entre le bien & le mal, ils admettoient quelques secours de la part de Dieu; car ils étoient aidés par le destin. Ce dernier principe leve toute la difficulté: car si le destin avoit été chez eux une cause aveugle, un enchaînement des causes secondes, ou l'influence des astres, il seroit ridicule de dire que le destin les aidoit.

5°. Les bonnes & les mauvaises actions sont récompensées ou punies non - seulement dans cette vie, mais encore dans l'autre; d'où il s'ensuit que les Pharisiens croyoient la résurrection.

6°. On accuse les Pharisiens d'enseigner la transmigration des ames, qu'ils avoient empruntée des Orientaux, chez lesquels ce sentiment étoit commun: mais cette accusation est contestée, parce que J. C. ne leur reproche jamais cette erreur, & qu'elle paroît détruire la résurrection des morts: puisque si une ame a animé plusieurs corps sur la terre, on aura de la peine à choisit celui qu'elle doit préférer aux autres.

Je ne sais si cela suffit pour justifier cette secte: J. C. n'a pas eû dessein de combattre toutes les erreurs du Pharisaïsnie; & si S. Paul n'en avoit parlé, nous ne connoîtrions pas aujourd'hui leurs sentimens sur la justification. Il ne faut donc pas conclure du si ence de l'Evangile, qu'ils n'ont point cru la transmigration des ames.

Il ne faut point non plus justifier les Pharisiens, parce qu'ils auroient renversé la résurrection par la métempsicose; car les Juifs modernes admettent également la révoiution des ames, & la résurrection des corps, & les Pharisiens ont pu faire la même chose.

L'autorité de Josephe, qui parle nettement sur cette matiere, doit prévaloir. Il assure (Antiq. jud. lib. XVIII. cap. ij.) que les Pharisiens croyoient que les ames des méchans étoient renfermées dans des prisons, & souffroient - là des supplices éternels, pendant que celles des bons trouvoient un retour facile à la vie, & rentroient dans un autre corps. On ne peut expliquer ce retour des ames à la vie par la résurrection: car, selon les Pharisiens, l'ame [p. 34] étant immortelle, elle ne mourra point, & ne ressuscitera jamais. On ne peut pas dire aussi qu'elle rentrera dans un autre corps au dernier jour: car outre que l'ame reprendra par la résurrection le même corps qu'elle a animé pendant la vie, & qu'il y aura seulement quelque changement dans ses qualités; les Pharisiens représentoient par - là la différente condition des bons & des méchans, immédiatement après la mort; & c'est attribuer une pensée trop subtile à Josephe, que d'étendre sa vûe jusqu'à la résurrection. Un historien qui rapporte les opinions d'une secte, parle plus naturellement, & s'explique avec plus de netteté.

Moeurs des Pharisiens. Il est tems de parler des austérités des Pharisiens; car ce fut par là qu'ils séduisirent le peuple, & qu'ils s'attirerent une autorité qui les rendoit redoutables aux rois. Ils faisoient de longues veilles, & se refusoient jusqu'au sommoil nécessaire. Les uns se couchoient sur une planche très - étroite, afin qu'ils ne pussent se garantir d'une chûte dangereuse, lorsqu'ils s'endormiroient profondement; & les autres encore plus austeres semoient sur cette planche des cailloux & des épines, qui troublassent leur repos en les déchirant. Ils saisoient à Dieu de longues oraisons, qu'ils répétoient sans remuer les yeux, les bras, ni les mains. Ils achevoient de mortifier leur chair par des jeûnes qu'ils observoient deux fois la semaine; ils y ajoûtoient les flagellations; & c'étoit peut - être une des raisons qui les faisoit appeller des Tire - sang, parce qu'ils se déchiroient impitoyablement la peau, & se fouettoient jusqu'à ce que le sang coulât abondamment. Mais il y en avoit d'autres à qui ce titre avoit été donné, parce que marchant dans les rues les yeux baissés ou fermés, ils se frappoient la tête contre les murailles. Ils chargeoient leurs habits de phylacteres, qui contenoient certaines sentences de la loi. Les épines étoient attachées aux pans de leur robe, afin de faire couler le sang de leurs piés lorsqu'ils marchoient; ils se séparoient des hommes, parce qu'ils étoient beaucoup plus saints qu'eux, & qu'ils craignoient d'être souillés par leur attouchement. Ils se lavoient plus souvent que les autres, afin de montrer par là qu'ils avoient un soin extrème de se purifier. Cependant à la faveur de ce zele apparent, ils se rendoient vénérables au peuple. On leur donnoit le titre de sages par excellence; & leurs disciples s'entrecrioient, le sage explique aujourd'hui. On enfle les titres à proportion qu'on les mérite moins; on tâche d'imposer aux peuples par de grands noms, lorsque les grandes vertus manquent. La jeunesse avoit pour eux une si profonde vénération, qu'elle n'osoit ni parler ni répondre, lors même qu'on lui faisoit des censures; en effet ils tenoient leurs disciples dans une espece d'esclavage, & ils régloient avec un pouvoir absolu tout ce qui regardoit la religion.

On distingue dans le Thalmud sept ordres de Pharisiens. L'un mesuroit l'obéissance à l'aune du profit & de la gloire; l'autre ne levoit point les piés en marchant, & on l'appelloit à cause de cela le pharisien tronqué; le troisieme frappoit sa tête contre les murailles, afin d'en tirer le sang; un quatrieme cachoit sa tête dans un capuchon, & regardoit de cet enfoncement comme du fond d'un mortier; le cinquieme demandoit fiérement, que faut - il que je fasse? je le serai. Qu'y a - t - il à faire que je n'aye fait? le sixieme obéistoit par amour pour la vertu & pour la récompense; & le dernier n'exécutoit les ordres de Dieu que par la crainte de la peine.

Origine des Esseniens. Les Essênieps qui devroient être si célebres par leurs austérités & par la sainteté exemplaire dont ils faisoient profession, ne le sont presque point. Serrarius soutenoit qu'ils étoient connus chez les Juifs depuis la sortie de l'Egypte, parce qu'il a supposé que c'étoient les Cinéens descendus de Jethro, lesquels suivirent Moïse, & de ces genslà sortirent les Réchabites. Mais il est évident qu'il se trompoit, car les Esséniens & les Réchabites étoient deux ordres differens de dévots, & les premiers ne paroissent point dans toute l'histoire de l'ancien - Testament comme les Réchabites. Gale sçavant anglois, leur donne la même antiquité; mais de plus il en fait les peres & les prédécesseurs de Pythagore & de ses disciples. On n'en trouve aucune trace dans l'histoire des Machabées sous lesquels ils doivent être nés; l'Evangile n'en parle jamais, parce qu'ils ne sortirent point de leur retraite pour aller disputer avec J. C. D'ailleurs ils ne vouloient point se confondre avec les Pharisiens, ni avec le reste des Juifs, parce qu'ils se croyoient plus saints qu'eux; enfin ils étoient peu nombreux dans la Judée, & c'étoit principalement en Egypte qu'ils avoient leur retraite, & où Philon les avoit vûs.

Drusius fait descendre les Esséniens de ceux qu'Hircan persécuta, qui se retirerent dans les deserts, & qui s'accoutumerent par nécessité à un genre de vie très - dur, dans lequel ils persévererent volontairement; mais il faut avouer qu'on ne connoît pas l'origine de ces sectaires. Ils paroissent dans l'histoire de Josephe, sous Antigonus; car ce fut alors qu'on vit ce prophête essénien, nommé Judas, lequel avoit prédit qu'Antigonus seroit tué un tel jour dans une tour.

Histoire des Esséniens. Voici comme Josephe (bello Jud. lib. II. cap xij.) nous dépeint ces sectaires. « Ils sont Juifs de nation, dit - il, ils vivent dans une union très étroite, & regardent les voluptés comme des vices que l'on doit fuir, & la continence & la victoire de ses passions, comme des vertus que l'on ne sauroit trop estimer. Ils rejettent le mariage, non qu'ils croyent qu'il faille détruire la race des hommes, mais pour éviter l'intempérance des femmes, qu'ils sont persuadés ne garder pas la foi à leurs maris. Mais ils ne laissent pas néanmoins de recevoir les jeunes enfans qu'on leur donne pour les instruire, & de les élever dans la vertu avec autant de soin & de charité que s'ils en étoient les peres, & ils les habillent & les nourrissent tous d'une même sorte.

Ils méprisent les richesses; toutes choses sont communes entre eux avec une égalité si admirable, que lorsque quelqu'un embrasse leur secte, il se dépouille de la propriété de ce qu'il possede, pour éviter par ce moyen la vanité des richesses, épargner aux autres la honte de la pauvreté, & par un si heureux mélange, vivre tous ensemble comme freres.

Ils ne peuvent souffrir de s'oindre le corps avec de l'huile; mais si cela arrive à quelqu'un contre son gré, ils essuyent cette huile comme si c'étoient des taches & des souillures; & se croyent assez propres & assez parés, pourvû que leurs habits soient toujours bien blancs.

Ils choisissent pour économes des gens de bien qui reçoivent tout leur revenu, & le distribuent selon le besoin que chacun en a. Ils n'ont point de ville certaine dans laquelle ils demeurent, mais ils sont répandus en diverses villes, où ils reçoivent ceux qui desirent entrer dans leur société; & quoiqu'ils ne les ayent jamais vus auparavant, ils partagent avec eux ce qu'ils ont, comme s'ils les connoissoient depuis long - tems. Lorsqu'ils font quelque voyage, ils ne portent autre chose que des armes pour se défendre des voleurs. Ils ont dans chaque ville quelqu'un d'eux pour recevoir & loger ceux de leur secte qui y viennent, & leur donner des habits, & les autres choses dont ils peuvent avoir besoin. Ils ne changent point d'habits que

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