ENCYCLOPÉDIE OU DICTIONNAIRE RAISONNÉ
DES SCIENCES, DES ARTS ET DES MÉTIERS

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"963"> continuent dans tous les tems leurs travaux ordinaires; la vie dure qu'elles menent, donne à leurs fibres plus de sorce, plus de ressort, & les garantit des accidens qu'éprouvent les femmes des villes: les danseuses publiques sont à - peu - pres dans le même cas que celles qui sont habituées au travail. Ainsi les femmes enceintes doivent proportionner l'exercice qu'elles font, à la force de leur tempérament; il est toûjours plus sûr de s'y livrer moins qu'on ne pourroit le soûtenir, cependant sans passer d'une extrémité à l'autre, parce que le défaut nuit comme l'excès. Voyez Exercice, (Econom. anim.)

Mais lorsqu'il s'agit de s'exercer avec modération pendant la grossesse, ce ne doit jamais être par des moyens qui puissent causer des secousses dans le corps; on ne doit par conséquent se servir qu'avec beaucoup de prudonce, de voitures roulantes, & ne pas s'exposer aux accidens de l'équitation, sur - tout aux approches de l'accouchement; le repos est alors plus nécessaire que dans aucun autre tenis. C'est un préjugé pernicieux de croire que les mouvemens du corps aident alors à détacher l'enfant & à favoriser son exclusion; il en est comme d'un fruit que l'on abat à coups de gaul avant sa maturité: cet abus est une des causés les plus communes des mauvais accouchemens, des pertes qui les précedent, des situations desavantageuses dans lesquelles se présente l'enfant pour sortir de la matrice. Voyez Accouchemint, Fausse - Couche.

Des différens états de santé dans lesquels peut se trouver la femme. Il en est peu où le sommeil paroisse lui convenir autant que pendant la grossesse; l'embryon ou le foetus qu'elle porte est dans un repos presque continuel. Voyez Foetus. Puisque le repos du foetus est un des moyens que la nature se choisit pour travailler à sa formation, attendu la délicatesse de ses organes, qui ne pourroient pas être mis en mouvement dans les premiers tems sans danger de solution de continuité, les meres doivent donc être attentives à tout ce qui peut troubler ce repos, sur - tout dans les premiers tems de la grossesse: ainsi elles doivent dormir dans cet état plus qu'elles ne font ordinairement; mais en général le sommeil doit être proportionné à leurs forces & à l'exercice qu'elles font. Les femmes délicates dissipent moins que les autres, elles ont les fibres plus foibles, le sommeil les relâche, les affoiblit encore plus; elles doivent donc aussi s'y livrer avec modération: celles qui sont robustes & qui font beaucoup d'exercice, ou qui sont accoûtumées à des travaux pénibles, ont besoin de plus de repos, & le sommeil leur convient mieux. La vie oisive équivaut presque au sommeil; la vie exercée est l'état le plus marqué de la veille, & celui qui paroît être le plus éloigné du sommeil. Plus on s'exerce, plus ona besoin de repos, c'est ce qui doit servir aux femmes grosses pour se régler sur le plus ou moins d'avantage qu'elles peuvent retirer du sommeil, entant qu'il peut contribuer au parfait développement & à l'accroissement du foetus.

Quant aux évacuations naturelles, il est ordinaire dans l'état de santé, que les femmes grosses ne soient point sujettes aux flux menstruel, le plus souvent il est nuisible qu'elles le soient; ainsi elles doivent éviter tout ce qui peut les échausser, foüetter le sang, & faire reparoitre cette évacuation qui est alors contre - nature; les exercices violens, les passions vives produisent souvent cet effet, & sont parlà également préjudiciables à la mere & à l'enfant: quand au contraire la suppression naturelle des menstrues cause quelque atteinte à la santé des femmes grosses, elles peuvent y remédier par de plus grands exercices, par la diminution des alimens & le choix de ceux qui sont plus liquides, & par la saignée; le volume & le poids de la matrice, en resserrant le boyau rectum sur lequel elle porte principalement, y letient les matieres secales, en retarde l'excretion; ce qui donne lieu à ce qu'elles s'y dessechent par leur séjour dans un lieu chaud, & occasionne le plus souvent la constipation. On peut remédier à cet inconvénient (qui peut meme être cause de quelque fausse - couche par les efforts qu'il fait faire dans la déjection), en usant de quelques legers laxatifs huileux ou de quelques minoratifs, & sur - tout en employant les remedes ou lavemens, avec la précaution de ne rien faire qui puisse rendre le ventre trop libre, parce que ce vice oppose à celui qu'il s'agit de combattre, dispose souvent à l'avortement, selon que l'a remarqué Hippoerate, qui dit, anhor. xxxjv. lib. V. que si une femme enceinte a un cours de ventre considérable, elle est en grand danger de se blesser.

Tout annonce que la femme est plus délicate que l'homme, par conléquent plus sensible; c'est pourquoi elle est plus susceptible des plus fortes passions, mais elle les retient moins long - tems que l'homme. De tous les différens états de la vie dans lesquels peut se trouver la femme, il n'en est point dans lequel sa grande sensibilité soit plus marquee, & les passions qui en peuvent résulter lui sorent plus nuisiples que dans celui de la grossesse: cette difference ne peut être attribuée qu'au changement qui se fait dans l'équilibre de l'économie animale par rapport à la femme grosse, par l'effet de la suppression des menstrues, qui rend le systeme des vaisseaux en général plus tendu, qui augmente l'érétisme du genre nerveux; ce qu'on observe également dans cette meme suppression, lorsqu'elle est morbinque. Voyez Equilibre (Econom. amm.), Orgasme, Menstrues, Passion (l'hysique). En general toutes les passions agissent en tendant ou detendant les organes du sentiment, en contractant ou relâchant les fibres motrices; de quelque maniere qu'elles produisent leurs effets, elles ne peuvent que troubler l'action des solides & le cours des humeurs: ainsi les passions de l'ame ne peuvent manquer de produire de plus grands, deserdres dans les femmes grosses, à proportion qu'elles y ont plus de disposition. Ainsi soit que les passions accélerent l'exercice de toutes leurs fonctions, ou qu'elles le retardent, il ne peut que s'en suivre des lesions qui doivent se communiquer au foetus ou par les compressions, par les resserremens spasmodiques, convulfifs, auxquels il est exposé de la part de la matrice & des parties ambiantes, ou par les étranglemens des vaisseaux utérins, qui lui transmettent la matiere de sa nourriture, ou par le défaut d'impulsion dans le cours des humeurs de la mere, qui dispose celles qui sont portées au foetus à perdre leur fluidité, & à contracter d'autres mauvaises qualités, &c. ensorte que les passions excessives ne peuvent qu'être très - pernicieuses au foetus, lorsqu'elles le sont à celle qui le porte dans son sein; d'autant plus qu'il est lui - même plus susceptible d'impression à - proportion que son organisation est plus foible, plus delicate; mais il faut observer que les intluences de l'ame de la mere sur le foetus se reduisent toûjours à des impressions purement méchaniques, & qu'elles n'ont sur lui aucun pouvoir physique, tel que celui qu'on attribue communement à l'imagination. Voy. Imagination.

On peut juger de tout ce qui vient d'être dit des mauvais esrets des passions dans les femmes grosses, par ceux qu'elles produisent dans les femmes pendant l'évacuation menstruelle: la terreur causée par le bruit subit du tonnerre, d'un coup de canon, arrête souvent tout - à - coup le flux uterin dans les unes, & l'excitc dans les autres au point de causer une suppression ou une perte, & quelquefois même une fausse - couche. Les pauions sont donc extremement à craindre pour les femmes grosses, sur - tout quand [p. 964] elles font des révolutions subites; c'est pourquoi on doit éviter soigneusement qu'il ne leur soit annoncé aucun évenement qui soit propre à exciter tout - à - coup une grande joie, un grand chagrin, ou une grande crainte; qu'elles ne soient affectées de rien qui puisse les effrayer, les épouvanter, en un mot qui puisse causer des agitations subites, violentes dans l'ame, ou en suspendre considérablement les influences sur le corps. Elles doivent donc sur - tout être fort attentives à ne pas se laisser aller à la disposition qu'elles peuvent avoir à la colere, à la tristesse, ou à toute autre affection vive, forte, dont les rend susceptibles leur sensibilité naturelle, qui est fort augmentée ordinairement, comme il a été dit, par les changemens que la grossesse occasionne dans l'économie animale. Il faut qu'elles s'abstiennent généralement, autant qu'il est possible, de tout ce qui peut animer le sang & lui donner de l'acreté, pour ne pas augmenter cette disposition, c'est - à - dire le trop d'érétisme du genre nerveux dont elle dépend: on doit leur procurer de la dissipation & mettre en usage tous les moyens, tant physiques que moraux, propres à conserver ou à ramener le calme dans leur esprit.

Une autre sorte de passion qu'ont la plûpart des femmes enceintes, qui n'est pas la moins nuisible aux foetus qu'elles portent dans leur sein, c'est le soin qu'elles prennent de la partie de leurs ajustemens, qui tend à leur conserver ou à leur faire paroître la taille aussi - bien faite qu'elles peuvent en être susceptibles. Elles employent communément pour cet effet, ce qu'on appelle corps, qui est une espece de vêtement peu flexible, armé de busques roides, dont elles se serrent le tronc pour le tenir droit; qui comprime fortement la partie moyenne & inférieure de la poitrine & toute la circonférence du bas - ventre au - dessus des hanches & des os pubis, autant qu'elle en est susceptible, par le moyen des lacets qui rapprochent avec violence les pieces de ce vêtement, que l'on tient toûjours fort étroit, pour que le resserrement, la constricution en soit d'autant plus considérable: ensorte que le bas - ventre prend la figure en en - bas d'un cone tronqué, dont la poitrine est la base: ce qui ne peut manquer de gêner tous les visceres de l'abdomen dans leurs différentes fonctions, d'empêcher notablement le jeu des organes de la respiration, & de presser les mammelles, d'en comprimer les vaisseaux en les tenant soulevées vers la partie supérieure du thorax, qui est la moins resserrée par l'espece de cuirasse dans laquelle le bas de la poitrine se trouve emboîté tout comme le bas - ventre.

Mais tous ces mauvais effets sont encore plus marqués dans les femmes grosses, en tant qu'elles se servent de ce vêtement, joint au poids des jupons & des paniers liés fortement & suspendus sur les hanches, pour empêcher autant qu'il est possible, le ventre de grossir en - avant, & de leur gâter la taille; ce qui ne peut que gêner la matrice dans sa dilatation, l'empêcher de prendre une forme arrondie, rendre sa cavité moins ample, déranger la situation naturelle du foetus & de ses enveloppes, rendre ses mouvemens moins libres, &c. d'où doivent s'ensuivre bien des desordres, tant par rapport à l'enfant, que par rapport à la mere, dont tous les visceres du bas - ventre trop pressés entre eux, ne lui permettent pas de prendre des alimens, d'augmenter le volume de l'estomac, sans empêcher ultérieurement le jeu, l'abaissement du diaphragme, & disposer à la suffocation; embarrassent le ventricule & les intestins dans leurs fonctions, en détruisant la liberté du mouvement péristaltique; dérangent les digestions, la distribution du chyle; resserrent la vessie, le rectum; causent des rétentions d'urine, des constipations ou des évacuations forcées; exposent en un mot la mere à un grand nombre d'accidens qui augmentent considérablement les dérangemens de sa santé, qui peuvent même occasionner des avortemens: attendu que le foetus se ressentant de tous ces desordres par les vices qui en résultent dans le cours & la qualité des humeurs qu'il reçoit de sa mere, est d'ailleurs exposé à des compressions qui nuisent à sa conformation & à son accroissement; & tous ces funestes inconvéniens ont lieu, sans que les femmes y gagnent autre chose que l'apparence d'un peu moins de rotondité; tandis qu'elles augmentent par - là réellement les défectuosités qui résultent de la grossesse pour leur ventre, qui en est ensuite plus ridé, plus mou, plus pendant, à - proportion que les enveloppes, c'est - à - dire les tégumens ont été plus forcés à se recourber en en - bas, à s'étendre sous les busques, pour donner au bas - ventre dans un sens ou dans un autre, la capacité qui lui est nécessaire pour loger les visceres & tout ce que la matrice contient de plus qu'à l'ordinaire.

M. Winslow a écrit en général sur les abus des corps, des busques, dont se servent les femmes: on peut le consulter sur ce qui a plus particulierement rapport aux femmes grosses, à cet égard, pour avoir un détail qui ne peut pas trouver sa place ici.

Grossesse (Page 7:964)

Grossesse (maladies dépendantes de la). Les femmes enceintes sont sujettes à des desordres plus ou moins considérables dans l'économie animale, qui ne proviennent absolument que des changemens qu'y occasionne la grossesse.

La plûpart des lésions de fonctions qu'elles éprouvent dans les commencemens, dans les premiers mois, ne doivent être attribuées qu'à la suppression du flux menstruel, à la pléthore, qui résulte de ce que cette évacuation n'a pas lieu comme auparavant, à cause que les effets de la conception ont excité une sorte d'érétisme dans la matrice, qui en a fermé l'orifice & resserré tous les pores, par lesquels se faisoit l'excrétion du sang utérin; d'où s'ensuit le reflux dans la masse des humeurs, de la portion surabondante de ce sang qui auroit été évacuée: reflux qui subsiste tant que le foetus & ses dépendances contenues dans la matrice ne sont pas suffisans pour consumer, pour employer à leur accroissement cette portion de la masse des humeurs qui est destinée à en fournir les matériaux.

Les indispositions qui surviennent dans des tems plus avancés de la grossesse, proviennent du volume & de la masse du foetus & de ses dépendances, qui en distendant la matrice, en pressant les parties ambiantes, en opérant sur elles, gênent leurs fonctions, y font obstacle au cours des humeurs, y causent des dérangemens qui se communiquent souvent à toute la machine, soit en augmentant le renversement d'équilibre dans les fluides, soit en augmentant la sensibilité, l'irritabilité des solides qui en sont susceptibles par la communication de proche en proche, de ces qualités que possede plus éminemment la matrice, à - proportion qu'elle souffre une plus grande distension dans ses parois.

Ainsi les maladies de la grossesse commençante & de ses premiers tems, sont les nausées, les vomissemens, le dégoût ou la dépravation de l'appétit, les défaillances, les vertiges, les douleurs que la plûpart des femmes ressentent alors aux reins, aux aînes, aux mammelles, la pesanteur, la lassitude, la difficulté de respirer, & souvent des dispositions aux fausses - couches, des symptomes qui en sont les avant - coureurs. Et comme toutes ces lésions sont les effets d'une même cause, c'est - à - dire du reflux dans la masse des humeurs, du sang surabondant dans la matrice, on réussit ordinairement à y remé<pb->

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