ENCYCLOPÉDIE OU DICTIONNAIRE RAISONNÉ
DES SCIENCES, DES ARTS ET DES MÉTIERS

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Le sens accidentel est celui qui résulte de la différence des relations des mots à l'ordre de l'énonciation. Ces diverses relations sont communément indiquées par des formes différentes, telles qu'il plait aux usages arbitraires des langues de les fixer: de - là les genres, les cas, les nombres, les personnes, les tems, les modes (voyez Accident & tous les mots que nous venons d'indiquer). Les différentes lois de l'usage sur la génération des formes qui expriment ces accidens, constituent les déclinaisons & les conjugaisons. Voyez Déclinaison & Conjugaison.

3°. L'Etymologie des mots est la source d'où ils sont tirés. L'étude de l'étymologie peut avoir deux fins différentes.

La premiere est de suivre l'analogie d'une langue, pour se mettre en état d'y introduire des mots nouveaux, selon l'occurrence des besoins: c'est ce qu'on appelle la formation; & elle se fait ou par dérivation ou par composition. De - là les mots primitifs & les dérives, les mots simples & les composés. Voyez Formation.

Le second objet de l'étude de l'étymologie, est de remonter effectivement à la source d'un mot, pour en fixer le véritable sens par la connoissance de ses racines génératrices ou élémentaires, naturelles ou étrangeres: c'est l'art étymologique, qui suppose des moyens d'invention, & des regles de critique pour en faire usage. Voyez Etymologie & Art Etymologique

Tels sont les points de vûe fondamentaux auxquels on peut rapporter les principes de la Lexicologie. C'est aux dictionnaires de chaque langue à marquer sur chacun des mots qu'ils renferment, les décisions propres de l'usage, relatives à ces points de vûe. Voyez Dictionnaire, & plusieurs remarques de l'article Encyclopédie.

II. L'office de la Syntaxe est d'expliquer tout ce qui concerne le concours des mots reunis, pour exprimer une pensée. Quand on veut transmettre sa pensee par le secours de la parole, la totalité des mots que l'on réunit pour cette sin, fait une proposition; la syntaxe en examine la matiere & la forme.

1°. La matiere de la proposition est la totalité des parties qui entrent dans sa composition; & ces parties sont de deux especes, logiques, & grammaticales.

Les parties logiques sont les expressions totales de chacune des idées que l'esprit apperçoit nécessairement dans l'analvse de la pensee, savoir le sujet, l'attribut, & la copule. Le sujet est la partie de la proposition qui exprime l'objet dans lequel l'esprit apperçoit l'existence ou la non existence d'une modification; l'attribut est celle qui exprime la modification, dont l'esprit apperçoit l'existence ou la nonexistence dans le sujet; & la copule est la partie qui exprime l'existence ou la non - existence de l'attribut dans le sujet.

Les parties grammaticales de la proposition sont les mots que les besoins de l'énonciation & de la langue que l'on parle y font entrer, pour constituer la totalité des parties logiques. Voyez Sujet & Copule.

Les différentes manieres dont les parties grammaticales constituent les parties logiques, font naître les différentes especes de propositions; les simples & les composées, les incomplexes & les complexes, les principales & les incidentes, &c. Voyez Proposition, & ce qui en est dit a l'article Construction.

2°. La forme de la proposition consiste dans les inflexions particulieres, & dans l'arrangement respectif des différentes parties dont elle est composée. Par rapport à cet objet, la svntaxe est différente dans chaque langue pour les details; mais toutes ses regles, dans quelque langue que ce soit, se rapportent à trois chefs généraux, qui sont la Concordance, le Régime, & la Construction.

La Concordance est l'uniformité des accidens communs à plusieurs mots, comme sont les genres, nombres, les cas, &c. Les regles que la syntaxe prescrit sur la concordance, ont pour fondement un rapport d'identité entre les mots qu'elle fait accorder, parce qu'ils expriment conjointement un même & unique objet. Ainsi la concordance est ordinairement d'un mot modificatif avec un mot subjectif, parce que la modification d'un sujet n'est autre chose que le sujet modifié. Le modificatif se rapporte au subjectif, ou par apposition, ou par attribution; par apposition, lorsqu'ils sont réunis pour exprimer une seule idée précise, comme quand on dit, ces hommes savans: par attribution, lorsque le modificatif est l'attribut d'une proposition dont le subjectif est le sujet, comme quand on dit, ces hommes sont savans. Toutes les langues qui admettent dans les modificatifs des accidens semblables à ceux des subjectifs, mettent ces mots en concordance dans le cas de l'apposition, parce que l'identité y est réelle & nécessaire; la plûpart l'exigent encore dans le cas de l'attribution, parce que l'identité y est réelle: mais quelquesunes ne l'admettent pas, & employent l'adverbe au lieu de l'adjectif, parce que dans l'analy se de la proposition elles envisagent le sujet & l'attribut comme deux objets séparés & différens: ainsi pour dire ces hommes savans, on dit en allemand, diese gelehrten manner, comme en latin, hi docti viri; mais pour dire ces hommes sont savans, on dit en allemand, diese manner sind gelehrt, comme on diroit en latin, hi viri sunt doctè, ou cum doctrinâ, au lieu de dire sunt docti. L'une de ces deux pratiques est peut - être plus conforme que l'autre aux lois de la Grammaire générale; mais entreprendre sur ce principe de réformer celle des deux que l'on croiroit la moins exacte, ce seroit pécher contre la plus essentielle des lois de la Grammaire générale même, qui doit abandonner sans reserve le choix des moyens de la parole à l'usage, Quem penès arbitrium est & jus & norma loquendi. Voyez Concordance, Apposition, & Usage

Le Régime est le signe que l'usage a établi dans chaque langue, pour indiquer le rapport de determination d'un mot à un autre. Le mot qui est en régime sert à rendre moins vague le sens général de l'autre mot auquel il est subordonné; & celui - ci, par cette application particuliere, acquiert un degre de précision qu'il n'a point par lui - même. Chaque langue a ses pratiques différentes pour caractériser le regime & les différentes especes de régime: ici c'est par la place; là par des prépositions; ailleurs par des terminaisons; par - tout c'est par les moyens qu'il a plû à l'usage de consacrer. Voyez Régime & Détermination.

La Construction est l'arrangement des parties logiques & grammaticales de la proposition. On doit distinguer deux sortes de construction: l'une analytique, & l'autre usuelle.

La construction analytique est celle où les mots sont rangés dans le même ordre que les idées se presentent à l'esprit dans l'analyse de la pensée. Elle appartient à la Grammaire générale, & elle est la regle invariable & universelle qui doit servir de base à la construction particuliere de quelque langue que ce soit; elle n'a qu'une maniere de procéder, parce qu'elle n'envisage qu'un objet, l'exposition claire & suivie de la pensée.

La construction usuelle, est celle où les mots sont rangés dans l'ordre autorisé par l'usage de chaque langue. Elle a differens procédes, à cause de la diversité des vûes qu'elle a à combiner & à concilier: elle ne doit point abandonner totalement la succession analytique des idées; elle doit se prêter à la succession pathétique des objets qui intéressent l'ame; & elle ne doit pas négliger la succession eu<pb-> [p. 845] phonique des expressions les pius propres à flater l'oreille. Ce mélange de vûes souvent opposées ne peut se faire sans avoir recours à quelques licences, sans faire quelques inversions à l'ordre analytique, qui est vraiment l'ordre fondamental: mais la Grammaire générale approuve tout ce qui mene à son but, à l'expression fidele de la pensée. Ainsi quelque vrais & quelque nécessaires que soient les principes fondamentaux de la Grammaire générale sur l'énonciation de la pensée; quelque conformité que les usages particuliers des langues puissent avoir à ces principes, on trouve cependant dans toutes, des locutions tout - à - fait éloignées & des principes métaphysiques & des pratiques les plus ordinaires; ce sont des écarts de l'usage avoués même par la raison. La construction usuelle est donc simple ou figurée: simple, quand elle suit sans écart le procédé ordinaire de la langue; figurée, quand elle admet quelque façon de parler qui s'éloigne des lois ordinaires. On donne à ces locutions particulieres le nom de figures de construction, pour les distinguer de celles dont nous avons parlé plus haut, & qui sont des figures de mots, les unes relatives au matériel, & les autres au sens. Celles ci sont les diverses altérations que les usages des langues autorisent dans la forme de la proposition. (voy. Figure & Construction) C'est communément sur quelques - unes de ces figures, que sont fondés les idiotismes particuliers des langues, & c'est en les ramenant à la construction analytique que l'on vient à - bout de les expliquer. C'est l'analyse seule qui remplit les vuides de l'ellipse, qui justifie les redondances du pléonasme, qui éclaire les détours de l'inversion. Voilà, nous osons le dire, la maniere la plus naturelle & la plus sûre d'introduire les jeunes gens à l'intelligence du latin & du grec. Voyez Construction, Idiotisme, Inversion, Méthode

On voit par cette distribution de l'Orthologie, quelles sont les bornes précises de la Grammaire par rapport à cet objet. Elle n'examine ce qui concerne les mots, que pour les employer ensuite à l'expression d'un sens total dans une proposition. Faut - il reunir plusieurs propositions pour en composer un discours? Chaque proposition isolée sera toûjours du ressort dela Grammaire, quant à l'expression du sens que l'on y envisagera; mais ce qui concerne l'ensemble de toutes ces propositions, est d'un autre district. C'est à la Logique à decider du choix & de la force des raisons que l'on doit employer pour éclairer l'esprit: c'est à la Rhetorique à régler les tours, les figures, le style dont on doit se servir pour émouvoir le coeur par le sentiment, ou pour le gagner par l'agrément. Ainsi la Logique enseigne en quelque sorte ce qu'il faut dire; la Grammaire, comment il faut le dire pour être entendu; & la Rhetorique, comment il convient de le dire pour persuader.

De l'Ortographe. Les Arts n'ont pas été portés du premier coup à leur perfection; ils n'y sont parvenus que par degrés, & après bien des changemens. Ainsi quand les hommes songerent à commuriquer leurs pensées aux absens, ou à les traettre à la postérité, ils ne s'aviserent pas d'abo des signes les plus propres à produire cet effet. Ils commencerent par employer des symboles representatifs des choses, & ne songerent à peindre la parole même, qu'après avoir reconnu par une longue expérience l'insuffisance de leur premiere ptatique, & l'inutilité de leurs efforts pour la perfectionner autant qu'il convenoit à leurs besoins. Voyez Ecriture, Caracteres, Hieroglyphes .

L'écriture symbolique fut donc remplacée par l'écriture ortograpl: que, qui est la représentation de la parole. C'est cette derniere seule qui est l'objet de la Grammaire; & pour en exposer l'art avec methode, il n'y a qu'à suivre le plan même de l'Ortholo<cb-> gie. Or nous avons d'abord considéré à part les mots qui sont les élemens de la proposition, ensuite nous avons envisagé l'ensemble de la proposition; ainsi la Lexicologie & la Syntaxe sont les deux branches générales du traité de la parole. Celui de l'écriture peut se diviser également en deux parties correspondantes que nous nommerons Lexicographie & Logographie. R. R. LEZIS2, vocabulum; LOGOS2, sermo; & GRAFIA, scriptio: comme si l'on disoit ortographe des mots, & ortographe du discours. Le terme de Logographie est connu dans un autre sens, mais qui est éloigné du sens étymologique que nous revendiquons ici, parce que c'est le seul qui puisse rendre notre pensée.

I. L'office de la Lexicographie est de prescrire les regles convenables pour représenter le matériel des mots, avec les caracteres autorités par l'usage de chaque langue. On considere dans le matériel des mots les élémens & la prosodie; de - là deux sortes de caracteres, caracteres élémentaires, & caracteres prosodiques.

1°. Les caracteres élémentaires sont ceux que l'usage a destinés primitivement à la représentation des élemens de la parole, savoir les sons & les articulations. Ceux qui sont établis pour representer les sons, se nomment voyelles; ceux qui sont introduits pour exprimer les articulations, s'appellent consonnes: les uns & les autres prennent le nom commun de lettres. La liste de toutes les lettres autorisées par l'usage d'une langue, se nomme alphabet; & on appelle alphabétique, l'ordre dans lequel on a coûtume de les ranger (voyez Alphabet, Lettres, Voyelles, Consonnes ). Les Grecs donnerent aux lettres des noms analogues à ceux que nous leur donnons: ils les appellerent STOIXEIA, élémens, ou GRAMMATA, lettres. Les termes d'élémens, de sons & d'articulations, ne devroient convenir qu'aux élémens de la parole prononcée; comme ceux de lettres, de voyelles & de consonnes, ne devroient se dire que de ceux de la parole écrite; cependant c'est assez l'ordinaire de confondre ces termes, & de les employer les uns pour les autres. C'est à cet usage, introdait par la maniere dont les premiers Grammairiens envisagerent l'art de la paroie, que l'on doit l'etymologie du mot Grammaire.

2°. Les caracteres prosodiques sont ceux que l'usage a établis pour diriget la prononciation des mots écrits. On peut en distinguer de trois sortes: les uns reglent l'expression même des mots ou de leurs elemens; tels que la cedille, l'apostrophe, le tiret, & la diérèse: les autres avertissent de l'accent, c'est à - dire de la mesure de l'élévation du son; ce sont l'accent aigu, l'accent grave, & l'accent circonflexe: d'autres enfin fixent la quantité ou la mesure de la durée du son; & on les appelle longue, breve, & douteuse, comme les svllabes mêmes dont elles caracternent le son. Voyez Prosodie, Accent, Quantité , & les mots que nous venons d'indiquer.

II. L'office de la Logographie est de prescrire les regles convenables pour représenter la relation des mots à l'ensemble de chaque proposition. & la relation de chaque proposition à l'ensemble du discours.

1°. Par rapport aux mots considéres dans la phrase, la Logographie doit en général fixer le choix des lettres capitales ou courantes; indiquer les occasions où il convient de varier la forme du caractere & d'employer l'italique ou le romain, & prescrire les lois usuelles sur la maniere de représenter les formes accidentelles des mots, relatives à l'ensemble de la proposition.

2°. Pour ce qui est de la relation de chaque proposition à l'ensemble du discours, la Logographie doit donner les moyens de distinguer la difference des sens, & en quelque sorte les différens degrés de leur mutuelle dépendance. Cette partie s'appelle

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