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Le Roi ordonne en conséquence, qu'à l'avenir les évêques d'Orléans à leur entrée pourront donner aux prisonniers en ladite ville, pour tous crimes commis dans le diocese & non ailleurs, leurs lettres d'intercession & déprécation; sur lesquelles le roi fera expédier des lettres de grace sans frais; qu'en signifiant les lettres déprécatoires, il sera sursis pendant six mois, sauf l'instruction qui sera continuée.
L'édit excepte de ces lettres, l'assassinat prémedité, le meurtre ou outrage & excès, ou recousse des prisonniers pour crime, des mains de la justice, commis ou machiné par argent ou sous autre engagement; le rapt commis par violence; les exces ou outrages commis en la personne des magistrats ou efficiers, huissiers & sergens royaux exerçans, faisant ou exécutant quelque acte de justice; les circonstances & dependances desaits crimes, telles qu'elles sont prévûes & marquées par les ordonnances, & tous autres forfaits & cas notoirement réputés non graciables dans le royaume.
Pour ce qui est des regles que l'on observe par rapport aux lettres d'abolition, rémission, pour dons & autres lettres de grace; en général il faut observer que tous les juges auxquels les lettres d'abolition sont adressées, doivent les entériner incessamment, si elles sont conformes aux charges & imformations: les cours souveraines peuvent cependant faire des remontrances au roi, & les autres juges representer à M. le chancelier ce qu'ils jugent à - propos sur l'atrocité du crime.
On ne doit pas accorder de lettres d'abolition pour les duels, assassinats prémédités, soit pour ceux qui en sont les auteurs ou complices, soit pour ceux qui à prix d'argent ou autrement, se louent & s'engagent pour tuer, outrager, excéder ou retirer des mains de la justice les prisonniers pour crime, ni à ceux qui les auront loués ou induits pour ce faire, quoiqu'il n'y ait eu que la seule machination & attentat sans effet; pour crime de rapt commis par violence, ni à ceux qui ont excédé ou outragé quelque magistrat, officier, huissier, ou sergent royal, faisant ou exécutant quelque acte de justice.
L'arrêt ou le jugement de condamnation doit être attaché sous le contre - scel des lettres de rappel de ban ou de galeres, de commutation de peine, ou de réhabilitation, à peine de nullité; & toutes ces lettres doivent être entérinées, quoiqu'elles ne soient pas conformes aux charges & informations: si elles sont obtenues par des gentilshommes, ils doivent y exprimer nommément leur qualité, à peine de nullité.
Pour obtenir des lettres de revision, on présente
requête au conseil, laquelle est renvoyée aux maîtres
des requêtes pour donner leur avis; ensuite duquel
intervient arrêt qui ordonne que les lettres seront
expédiées. Voyez
Les lettres de grace obtenues par les gentilshommes, doivent etre adressées aux cours souveraines qui peuvent néanmoins renvoyer l'instruction sur les lieux, si la partie civile le requiert. L'adresse en peut aussi être faite aux présidiaux, si la compétence y a été jugée.
Les lettres obtenues par les roturiers, s'adressent aux baillis & sénéchaux des lieux où il y a siege présidial; & dans les provinces où il n'y a point de présidial, l'adresse se fait aux juges ressortissans nuement aux cours.
On ne peut présenter les lettres d'abolition, rémission, pardon, & pour ester à droit, que l'accuse ne soit actuellement en prison, & il doit y demeurer pendant toute l'instruction, & jusqu'au jugement définitif; & la signification des lettres ne peut suspendre les decrets ni l'instruction, jugement & exécution de la contumace, si l'accusé n'est dans les prisons du juge auquel les lettres auront été adressées.
On doit présenter les lettres dans les trois mois de leur date; mais comme l'accusé est ordinairement absent, & même souvent qu'il ignore qu'on ait obtenu pour lui des lettres, on en a accordé quelquefois de nouvelles apres les trois mois expirés.
Les charges & informations avec les lettres, même les procedures faites depuis l'obtention des lettres, doivent être incessamment apportées au greffe des juges auxquels l'adresse des lettres est faite; & l'on ne peut procéder à l'entérinement, que toutes les charges & informations n'ayent été apportées & communiquées avec les lettres aux procureurs du roi, quelque diligence que les impétrans ayent faite pour les faire apporter, sauf à décerner des exécutoires & autres peines contre les greffiers négligens.
Les lettres doivent être signifiées à la partie civile, pour donner ses moyens d'opposition; & le procureur du roi & la partie civile peuvent, nonobstant la presentation des lettres de rémission & pardon, informer par addition, & faire recoller & confronter les temoins.
Les demandeurs en lettres d'abolition, rémission & pardon, sont tenus de les présenter à l'audience tête nue & à genoux sans épec; & après qu'elles ent été lûes en leur présence, ils doivent assirmer qu'ils ont donné charge d'obtenir ces lettres, qu'elles contiennent vérité, qu'ils veulent s'en servir: après quoi ils sont renvoyés en prison, & ensuite sont interrogés par le rapporteur du procès.
De telle nature que soient les lettres de grace, ceux quiles ont impetrées doivent être interrogés sur la sellette, & l'interrogatoire rédigé par écrit par le greffier, & envoyé en cas d'appel avec le procès.
Si les lettres sont obtenues pour des cas qui ne soient pas graciables, ou si elles ne sont pas conformes aux charges, l'impétrant en est debouté; parce qu'on suppose que le roi a été surpris, son intention n'étant de faire grace qu'autant que le cas est graciable. Voyez l'ordonnance de 1670, tit. xvj. (A)
Graces expectatives (Page 7:804)
Cette maniere de conférer les bénéfices n'étoit
point pratiquée par les premiers papes, & elle a toûjours
été reprouvée en France, a l'exception de l'expectative des indultaires & de celle des gradués. Voy.
Fevret, tr. de l'abus, liv. II. ch. vij. & ci - apr.
Grace principale (Page 7:804)
Grace (Page 7:805)
Un homme bien - fait, dont le maintien est mal assûré ou gêné, la démarche précipitee ou pesante, les gestes lourds, n'a point de grace, parce qu'il n'a rien de doux, de liant dans son exterieur.
La voix d'un orateur qui manquera d'inflexion & de douceur, sera sans grace.
Il en est de même dans tous les arts. La proportion, la beaute, peuvent n'être point gracieuses. On ne peut dire que les pyramides d'Egypte ayent des graces. On ne pouvoit le dire du colosse de Rhodes, comme de la Venus de Cnide. Tout ce qui est uniquement dans le genre fort & vigoureux, a un mérite qui n'est pas celui des graces. Ce seroit mal connoitre Michel - Ange & le Caravage, que de leur attribuer les graces de l'Albane. Le sixieme livre de l'Éneide est sublime: le quatrieme a plus de grace. Quelques odes galantes d'Horace respirent les graces, comme quelques - unes de ses épîtres enseignent la raison.
Il semble qu'en général le petit, le joli en tout genre, soit plus susceptible de graces que le grand. On loueroit mal une oraison funebre, une tragedie, un sermon, si on leur donnoit l'épithete de gracieux.
Ce n'est pas qu'il y ait un sevl genre d'ouvrage qui puisse être bon en étant opposé aux graces. Car leur opposé est la rudesse, le sauvage, la sécheresse. L'Hercule Farnese ne devoit point avoir les graces de l'Apollon du Belvedere & de l'Antinoüs; mais il n'est ni sec, ni rude, ni agreste. L'incendie de Troye dans Virgile n'est point décrit avec les graces d'une elégie de Tibulle. Il plaît par des beautés fortes. Un ouvrage peut donc être sans graces, sans que cet ouvrage ait le moindre desagrement. Le terrible, l'horrible, la description, la peinture d'un monstre, exigent qu'on s'eloigne de tout ce qui est gracieux: mais non pas qu'on assecte uniquement l'opposé. Car si un artiste, en quelque genre que ce soit, n'exprime que des choses affreuses, s'il ne les adoucit pas par des contrastes agreables, il rebutera.
La grace en peinture, en sculpture, consiste dans la mollesse des contours, dans une expression douce; & la peinture a par - dessus la sculpture, la grace de l'union des parties, celle des figures qui s'ani<cb->
Les graces de la diction, soit en eloquence, soit en poésie, dépendent du choix des mots, de l'harmonie des phrases, & encore plus de la délicatesse des idées, & des descriptions riantes. L'abus des graces est l'affeterie, comme l'abus du sublime est l'empoulé; toute perfection est pres d'un défaut.
Avoir de la grace, s'entend de la chose & de la personne. Cet ajustement, cet ouvrage, cette semme, a de la grace. La bonne grace appartient à la personne seulement. Elle se presente de bonne grace. Il a sait de bonne grace ce qu'on attendoit de lui. Avoir des graces, depend de l'action. Cette femme a des graces dans son maintien, dans ce qu'elle dit, dans ce qu'elle fait.
Obtenir sa grace, c'est par métaphore obtenir son pardon: comme faire grace est pardonner. On fait grace d'une chose, en s'emparant du reste. Les commis lui prirent tous ses effets, & lui firent grace de son argent. Faire des graces, répandre des graces, est le plus bel apanage de la souveraineté, c'est faire du bien: c'est plus que justice. Avoir les bonnes graces de quelqu'un, ne se dit que par rapport à un supérieur; avoir les bonnes graces d'une dame, c'est etre son amant favorise. Etre en grace, se dit d'un courtisan qui a été en disgrace; on ne doit pas faire dépendre son bonheur de l'un, ni son malheur de l'autre. On appelle bonnes graces, ces demi - rideaux d'un lit qui sont aux côtés du chevet. Les graces, en latin charites, terme qui signifie aimables.
Les Graces, divinités de l'antiquité, sont une des
plus belies allegories de la mythologie des Grecs.
Comme cette mythologie varia toujours tantôt par
l'imagination des Poëtes, qui en furent les theologiens,
tantôt par les usages des peuples, le nombre,
les noms, les attributs des Graces changerent touvent.
Mais enfin on s'accorda à les fixer au nombre
de trois, & à les nommer Aglaé, Thalie, Euphrosine, c'est - à - dire brillant, fleur, gaieté. Elles etoient
toujours aupres de Venus. Nul voile ne devoit couvrir
leurs charmes. Elles presidoient aux bienfaits,
à la concorde, aux rejoüissances, aux amours, à
l'eloquence même; elles etoient l'embleme sensible
de tout ce qui peut rendre la vie agreable. On les
peignoit dansantes, & se tenant par la main; on
n'entroit dans leurs temples que couronné de fleurs.
Ceux qui ont insulté à la mythologie fabuleuse, devoient
au - moins avoüer le merite de ces sictions
riantes, qui annoncent des vérités dont résulteroit la
selicite du genre humain. Art. de
Grace (Page 7:805)
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