ENCYCLOPÉDIE OU DICTIONNAIRE RAISONNÉ
DES SCIENCES, DES ARTS ET DES MÉTIERS

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"632"> est du 3e degré, il divise ces courbes en genres & especes, & en fait l'énumération. Voyez Courbe.

Mais ces écrits, quelque admirables qu'ils soient, ne sont rien, pour ainsi dire, en comparaison de l'immortel ouvrage du même auteur, intitulé, Philosophioe naturalis principia mathematica, qu'on peut regarder comme l'application la plus étendue, la plus admirable, & la plus heureuse qui ait jamais été faite de la Géométrie à la Physique: ce livre est aujourd'hui trop connu pour que nous entrions dans un plus grand détail; il a été l'époque d'une révolution dans la Physique: il a fait de cette science une science nouvelle, toute fondée sur l'observation, l'expérience, & le calcul. Voyez Newtonianisme, Gravitation, Attraction , &c. Nous ne parlons point de l'optique du même auteur, ouvrage non moins digne d'éloges, mais qui n'appartient point à cet article, ni de quelques autres écrits géometriques moins considérables, mais tous de la premiere force, tous brillans de sagacité & d'invention; comme son analysis per oequationes numero terminorum infinitas; son analysis per oequationum series, fluxiones & differentias; la méthode des fluxions; sa méthode differentielle, &c. Quand on considere ces monumens immortels du génie de leur auteur, & quand on songe que ce grand homme avoit fait à vingt - quatre ans ses principales découvertes, on est presque tenté de souscrire à ce que dit Pope, que la sagacité de Newton étonna les intelligences célestes, & qu'ils le regarderent comme un être moyen entre l'homme & elles: on est du - moins bien fondé à s'écrier, homo homini quid proesta! qu'il y a de distance entre un homme & un autre!

L'édifice élevé par Newton à cette hauteur immense, n'étoit pourtant pas encore achevé; le calcul intégral a été depuis extrèmement augmenté par MM. Bernoulli, Cotes, Maclaurin, &c. & par les mathématiciens qui sont venus après eux. Voyez Intégral. On a fait des applications encore plus subtiles, & si on l'ose dire, plus difficiles, plus heureuses & plus exactes de la Géométrie à la Physique. On a beaucoup ajoûté à ce que Newton avoit commencé sur le système du monde: c'est sur - tout quant à cette partie qu'on a corrigé & perfectionné son grand ouvrage des Principes mathématiques. La plupart des mathématiciens qui ont contribué à enrichir ainsi la Géométrie par leurs découvertes, & à l'appliquer à la Physique & à l'Astronomie, étant aujourd'hui vivans, & nous même ayant peut - être eu quelque part à ces travaux, nous laisserons à la postérité le soin de rendre à chacun la justice qu'il mérite: & nous terminerons ici cette petite histoire de la Géométrie; ceux qui voudront s'en instruire plus à fond, pourront consulter les divers auteurs qui ont écrit sur ce sujet. Parmi ces auteurs il en est qui ne sont pas toûjours exacts, entr'autres Wallis, que sa partialité en faveur des Anglois, doit faire lire avec précaution, voy. Algebre. Mais nous croyons qu'on trouvera tout ce qu'on peut desirer sur ce sujet dans l'histoire des Mathématiques que prépare M. de Montucla, de l'académie royale des Sciences & des Belles - Lettres de Prusse, déjà connu par son histoire de la quadrature du cercle, publiée en 1754, & que nous avons citée au mot Duplication.

L'histoire abrégée que nous venons de donner est plus que suffisante dans un ouvrage tel que le nôtre, où nous devons principalement nous attacher à faire connoître les inventeurs, non les inventeurs en détail à qui la Géométrie doit quelques propositions particulieres & isolées, mais les esprits vraiment créateurs, les inventeurs en grand qui ont ouvert des routes, perfectionné l'instrument des découvertes, & imaginé des méthodes. Au reste en finissant cette histoire, nous ne pouvons nous dispenser de remarquer à l'honneur de notre nation, que si la Géométrie nouvelle est principalement dûe aux Anglois & aux Allemands, c'est aux François qu'on est redevable des deux grandes idées qui ont conduit à la trouver. On doit à Descartes l'application de l'Algebre à la Géométrie, sur laquelle le calcul différentiel est fondé; & à Fermat, la premiere application du calcul aux quantités différentielles, pour trouver les tangentes: la Géométrie nouvelle n'est que cette derniere méthode généralisée. Si on ajoûte à cela ce que les François actuellement vivans ont fait en Géométrie, on conviendra peut - être que cette science ne doit pas moins à notre nation qu'aux autres.

Objet de la Géométrie. Nous prierons d'abord le lecteur de se rappeller ce que nous avons dit sur ce sujet dans le Discours prélimin. Nous commençons par considérer les corps avec toutes leurs propriétés sensibles; nous faisons ensuite peu - à - peu & par l'esprit la séparation & l'abstraction de ces différentes propriétés; & nous en venons à considérer les corps comme des portions d'étendue pénétrables, divisibles, & figurées. Ainsi le corps géométrique n'est proprement qu'une portion d'étendue terminée en tout sens. Nous considérons d'abord & comme d'une vûe générale, cette portion d'étendue quant à ses trois dimensions; mais ensuite, pour en déterminer plus facilement les propriétés, nous y considérons d'abord une seule dimension, c'est à - dire la longueur, puis deux dimensions, c'est - à - dire la surface, enfin les trois dimensions ensemble, c'est - à - dire la solidité: ain si les propriétés des lignes, celles des surfaces & celles des solides sont l'objet & la division naturelle de la Géométrie.

C'est par une simple abstraction de l'esprit, qu'on considere les lignes comme sans largeur, & les surfaces comme sans profondeur: la Géométrie envisage donc les corps dans un état d'abstraction où ils ne sont pas réellement; les vérités qu'elle découvre & qu'elle démontre sur les corps, sont donc des vérités de pure abstraction, des vérités hypothétiques; mais ces vérités n'en sont pas moins utiles. Dans la nature, par exemple, il n'y a point de cercle parfait; mais plus un cercle approchera de l'être, plus il approchera d'avoir exactement & rigoureusement les propriétés du cercle parfait que la Géométrie démontre; & il peut en approcher assez exactement pour avoir toutes ces propriétés, sinon en rigueur, au moins à un degré suffisant pour notre usage.

On connoît en Géométrie plusieurs courbes qui s'approchent continuellement d'une ligne droite sans jamais la rencontrer, mais qui étant tracées sur le papier, se confondent sensiblement avec cet e ligne droite au bout d'un assez petit espace, voyez Asymptote; il en est de même des vérités géométriques. Elles sont en quelque maniere la limite, &, si on peut parler ainsi, l'asymptote des vérités physiques, le terme dont celles - ci peuvent approcher aussi près qu'on veut, sans jamais y arriver exactement. Mais si les théorèmes mathématiques n'ont pas exactement lieu dans la nature, ces théorèmes servent du - moins à trouver avec une précision suffisante pour la pratique, la distance inaccessible d'un lieu à un autre, la mesure d'une surface donnée, le toisé d'un solide; à calculer le mouvement & la distance des astres; à prédire les phénomenes célestes. Pour démontrer desvérités en toute rigueur, lorsqu'il est question de la figure des corps, on est obligé de considérer ces corps dans un état de perfection abstraite qu'ils n'ont pas réellelement: en effet, si on ne s'assujettit pas, par exemple, à regarder le cercle comme partait, il faudra autant de théorèmes différens sur le cercle, qu'on imaginera de figures différen es plus ou moins approchantes du cercle parfait; & ces figures elles - mêmes pourront être encore absolument hypothétiques & [p. 633] n'avoir point de modele existant dans la nature. Les lignes qu'on considere en Géométrie, ne sont ni parfaitement droites ni parfaitement courbes, les surfaces ne sont ni parfaitement planes ni parfaitement curvilignes: mais plus elles approcheront de l'être, plus elles approcheront d'avoir les propriétés qu'on démontre des lignes exactement droites ou courbes, des surfaces exactement planes ou curvilignes. Ces réflexions suffiront, ce me semble, pour répondre à deux especes de censeurs de la Géométrie: les uns, ce sont les Sceptiques, accusent les théoremes mathématiques de fausseté, comme supposant ce qui n'existe pas réellement, des lignes sans largeur, des surfaces sans profondeur; les autres, ce sont les physiciens ignorans en Mathématique, regardent les vérités de Géométrie comme sondées sur des hypothèses inutiles, & comme des jeux d'esprit qui n'ont point d'application.

Division de la Géométrie. On peut diviser la Géométrie de différentes manieres:

1°. En élémentaire & en transcendante. La Géométrie élémentaire ne considere que les propriétés des lignes droites, des lignes circulaires, des figures & des solides les plus simples, c'est - à - dire des figures rectilignes ou circulaires, & des solides terminés par ces figures. Le cercle est la seule figure curviligne dont on parle dans les élémens de Géométrie; la simplicité de sa description, la facilité avec laquelle les propriétés du cercle s'en déduisent, & la nécessité de se servir du cercle pour différentes opérations très - simples, comme pour élever une perpendiculaire, pour mesurer un angle, &c. toutes ces raisons ont déterminé à faire entrer le cercle & le cercle seul dans les élémens de Géométrie. Cependant quelques courbes, comme la parabole, ont une équation plus simple que celle du cercle; d'autres, comme l'hyperbole équilatere, ont une équation aussi simple, V. Equation & Courbe: mais leur description est beaucoup moins facile que celle du cercle, & leurs propriétés moins aisées à déduire. On peut rapporter aussi à la Géométrie élémentaire la solution des problèmes du second degré par la ligne droite & par le cercle. Voyez Construction, Courbe, & Équation

La Géométrie transcendante est proprement celle qui a pour objet toutes les courbes différentes du cercle, comme les sections coniques & les courbes d'un genre plus élevé. Voyez Courbe.

Cette Géométrie s'occupe aussi de la solution des problèmes du troisieme & du quatrieme degré & des degrés supérieurs. Les premiers se résolvent, comme l'on sait, par le moyen de deux sections coniques, ou plus simplement & en général par le moyen d'un cercle & d'une parabole; les autres se résolvent par des lignes du troisieme ordre & au - delà. V. Courbe, & les art. déjà citès. La partie de la Géométrie transcendante qui applique le calcul différentiel & intégral à la recherche des propriétés des courbes, est celle qu'on appelle plus proprement Géométrie transcendante, & qu'on pourroit nommer avec quelques auteurs modernes, Géométrie sublime, pour la distinguer non - seulement de la Géométrie élémentaire, mais de la Géométrie des courbes qui n'employe pas les calculs différensiel & intégral, & qui se borne ou à la synthèse des anciens, ou à la simple application de l'analyse ordinaire. Par - là on auroit trois divisions de la Géométrie; Géométrie élémentaire ou des lignes droites & du cercle; Géométrie transcendante ou des courbes; & Géométrie sublime ou des nouveaux calculs.

2°. On divise aussi la Géométrie en ancienne & moderne. On entend par Géométrie ancienne, ou celle qui n'employe point le calcul analytique, ou celle qui employe le calcul analytique ordinaire, sans se servir des calculs différentiel & intégral; & par Géométrie moderne, on entend ou celle qui em<cb-> ploye l'analyse de Descartes dans la recherche des propriétés des courbes, ou celle qui se sert des nouveaux calculs. Ainsi la Géométrie, entant qu'elle se borne à l'analyse seule de Descartes, est ancienne ou moderne, suivant les rapports sous lesquels on la considere; moderne par rapport à celle d'Apollonius & d'Archimede, qui n'employoient point le calcul; ancienne, par rapport à la Géométrie que nous avons nommée sublime, que Leibnitz & Newton nous ont apprise, & que leurs successeurs ont perfectionnée.

Des élémens de Géométrie. On a donné au mot Élémens des Sciences, des principes qui s'appliquent naturellement aux élémens de Géométrie: on y a même traité des questions qui ont un rapport particulier à ces élémens; par exemple, si on doit suivre dans les élémens d'une science l'ordre des inventeurs; si on y doit préférer la facilité à la rigueur exacte, &c. c'est pourquoi nous renvoyons à l'article Élémens. Nous observons seulement que dans la liste d'élémens de Géométric donnée par M. de la Chapelle, on a oublié ceux de M. Camus, de l'académie des Sciences, composés pour l'usage des ingénieurs, & qui méritent qu'on en fasse une mention honorable; ainsi que la Géométrie de l'officier, de M. le Blond, un de nos collegues, & les élémens de Géométrie du même auteur. Ajoûtons ici quelques réflexions qui pourront n'être pas inutiles, sur la maniere de traites les élémens de Géométrie.

Nous observerons d'abord, & ceci est une remarque peu importante, mais utile, que la division ordinaire de la Géométrie élémentaire en Longimétrie, Planimétrie, & Stéreométrie, n'est point exacte, à parler à la rigueur, puisqu'on y mesure non - seulement des lignes droites, des plans, & des solides, mais aussi des lignes circulaires & des surfaces sphériques: mais nous ne pouvons qu'approuver la division naturelle de la Géométrie élémentaire en géométrie des lignes droites & des lignes circulaires, géométrie des surfaces, géométrie des solides.

On peut voir au mot Courbe, ce que nous pensons sur la meilleure définition possible de la ligne droite & de la ligne courbe. Quoique la ligne droite soit plus simple que la circulaire, cependant il est à propos de traiter de l'une & de l'autre, ensemble & non séparément, dans des élémens de Géométrie; parce que les propriétés de la ligne circulaire sont d'une utilité infinie pour démontrer d'une maniere simple & facile ce qui regarde les lignes droites comparées entr'elles quant à leur position. La mesure d'un angle est un arc de cercle décrit du sommet de l'angle comme rayon. On a vû au mot Degré, pp. 761 & 762 du IV. vol. pourquoi le cercle est la mesure naturelle des angles. Cela vient de l'uniformité des parties & de la courbure du cercle; & quand on dit que la mesure d'un angle est un arc de cercle décrit du sommet, cela signifie seulement que si deux angles sont égaux, les arcs décrits de leur sommet & du même rayon seront égaux: de même, quand on dit qu'un angle est double d'un autre, cela signifie seulement que l'arc décrit du sommet de l'un est double de l'arc décrit du sommet de l'autre: car l'angle n'étant, suivant sa définition, qu'une our erture simple, & non pas une étendue, on ne peut pas dire proprement & abstraction faite de toute considération d'étendue, qu'un angle soit double d'un autre; parce que cela ne se peut dire que d'une quantité comparée à une autre quantité homogene, & que l'ouverture de deux lignes n'ayant point de parties, n'est pas proprement une quantité. Quand on dit de même qu'un angle à la circonférence du cercle a pour mesure la moitié de l'arc compris entre ses côtés, cela signifie que cet angle est égal à un angle dont le sommet seroit au centre, & qui renfermeroit la moitié de cet arc; & ainsi du reste.

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