ENCYCLOPÉDIE OU DICTIONNAIRE RAISONNÉ
DES SCIENCES, DES ARTS ET DES MÉTIERS

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"584"> & dans la Philosophie par la méthode. Il y a des momens où il sauve sa patrie, qu'il perdroit dans la suite s'il y conservoit du pouvoir. Les systèmes sont plus dangereux en Politique qu'en Philosophie: l'imagination qui égare le philosophe ne lui fait faire que des erreurs; l'imagination qui égare l'homme d'état lui fait faire des fautes & le malheur des hommes.

Qu'à la guerre donc & dans le conseil le génie semblable à la divinité parcoure d'un coup d'oeil la multitude des possibles, voye le mieux & l'exécute; mais qu'il ne manie pas long - tems les affaires où il faut attention, combinaisons, persévérance: qu'Alexandre & Condé soient maîtres des évenemens, & paroissent inspirés le jour d'une bataille, dans ces instans où manque le tems de délibérer, & où il faut que la premiere des pensées soit la meilleure; qu'ils décident dans ces momens où il faut voir d'un coup - d'oeil les rapports d'une position & d'un mouvement avec ses forces, celles de son ennemi, & le but qu'on se propose: mais que Turenne & Marlborough leur soient préférés quand il faudra diriger les opérations d'une campagne entiere.

Dans les Arts, dans les Sciences, dans les affaires, le génie semble changer la nature des choses; son caractere se répand sur tout ce qu'il touche; & ses lumieres s'élançant au - delà du passé & du présent, éclairent l'avenir: il dévance son siecle qui ne peut le suivre; il laisse loin de lui l'esprit qui le critique avec raison, mais qui dans sa marche égale ne sort jamais de l'uniformité de la nature. Il est mieux senti que connu par l'homme qui veu; le définir: ce seroit à lui - même à parler de lui; & cet article que je n'aurois pas dû faire, devroit être l'ouvrage d'un de ces hommes extraordinaires* qui honore ce siecle, & qui pour connoître le génie n'auroit eu qu'à regarder en lui - même.

Genie (Page 7:584)

Genie, (le) s. m. (Art. milit.) ce mot signifie proprement dans notre langue la science des Ingénieurs; ce qui renferme la fortification, l'attaque & la défense des places. Voyez Fortification, Attaque, Défense . Il signifie aussi le corps des Ingénieurs, c'est - à - dire des officiers chargés de la fortification, de l'attaque & de la défense des places. Voyez Ingenieur.

C'est à M. le maréchal de Vauban que l'on doit l'établissement du génie ou du corps des Ingénieurs.

« Avant cet établissement rien n'étoit plus rare en France, dit cet illustre maréchal, que les gens de cette profession. Le peu qu'il y en avoit subsistoit si peu de tems, qu'il étoit plus rare encore d'en voir qui se fussent trouvés à cinq ou six siéges. Ce petit nombre d'ingénieurs obligé d'être toûjours sur les travaux étoit si exposé, que presque tous se trouvoient ordinairement hors d'état de servir dès le commencement ou au milieu du siége; ce qui les empêchoit d'en voir la fin, & de s'y rendre savans. Cet inconvénient joint à plusieurs autres défauts dans lesquels on tomboit, ne contribuoit pas peu à la longueur des siéges, & autres pertes considérables qu'on y faisoit ». Attaque des places par M. le maréchal de Vauban.

Un général qui faisoit un siége avant l'établissement des corps des Ingénieurs, choisissoit parmi les officiers d'infanterie ceux qui avoient acquis quelqu'expérience dans l'attaque des places, pour en conduire les travaux; mais il arrivoit rarement, comme le remarque M. de Vauban, qu'on en trouvât d'assez habiles pour répondre entierement aux vûes du général, & le décharger du soin & de la direction de ces travaux. Henri IV. avoit eu cependant pour ingénieur Errard de Barleduc, dont le traité de fortification montre beaucoup d'intelligence & de capacité dans l'auteur. Sous Louis XIII. le

* M. de Voltaire, par exemple.
chevalier de Ville fervit en qualité d'ingénieur avec la plus grande distinction. Son ouvrage sur la fortification des places, & celui où il a traité de la charge des gouverneurs, font voir que ce savant auteur étoit également versé dans l'artillerie & le génie; mais ces grands hommes qui ne pouvoient agir par tout trouvoient peu de gens en état de les seconder.

Dans le commencement du regne de Louis XIV. le comte de Pagan se distingua beaucoup dans l'art de fortifier. Il fut le précurseur de M. le maréchal de Vauban, qui dans la fortification n'a guere fait que rectifier les idées générales de ce célebre ingénjeur; mais qui a par - tout donné des marques d'un génie supérieur & inventif, particulierement dans l'attaque des places, qu'il a portée à un degré de perfection auquel il est difficile de rien ajoûter.

Le chevalier de Clerville paroît aussi, par les différens mémoires sur les troubles de la minorité du roi Louis XIV, avoir eu beaucoup de réputation dans l'attaque des places. M. de Vauban commença à servir sous lui dans plusieurs siéges; mais il s'éleva ensuite rapidement au - dessus de tous ceux qui l'avoient précédé dans la même carriere.

Par l'établissement du génie, le roi a toûjours un corps nombreux d'ingénieurs, suffisant pour servir dans ses armées en campagne & dans ses places. On ne fait point de siége depuis long - tems qu'il ne s'y en trouve trente - six ou quarante, partagés ordinairement en brigades de six ou sept hommes, afin que dans chaque attaque on puisse avoir trois brigades, qui se relevant alternativement tous les vingt quatre heures, partagent entr'eux les soins & les fatigues du travail, & le font avancer continuellement sans qu'il y ait aucune perte de tems.

C'est à l'établissement du génie que la France doit la supériorité qu'elle a, de l'aveu de toute l'Europe, dans l'attaque & la défense des places sur les nations voisines.

Le génie a toûjours eu un ministre ou un directeur général, chargé des fortifications & de tout ce qui concerne les Ingénieurs. Voyez Directeur ou Inspecteur général des Fortifications

L'Artillerie qui avoit toûjours formé un corps particulier sous la direction du grand - maître de l'Artillerie, vient, depuis la suppression de cette importante charge, d'être unie à celui du génie. Par l'ordonnance du 8 Décembre 1755, ces deux corps n'en doivent plus faire qu'un seul sous la dénomination de corps royal de l'Artillerie & du Génie. (Q)

GENIES (Page 7:584)

GENIES en Architecture, figures d'enfans avec des aîles & des attributs, qui servent dans les ornemens à représenter les vertus & les passions, comme ceux qui sont peints par Raphaël dans la galerie du vieux palais Chigi à Rome. Il s'en fait de bas - reliefs, comme ceux de marbre blanc dans les trente - deux tympans de la colonnade de Versailles, qui sont par grouppes, & tiennent des attributs de l'amour, des jeux, des plaisirs, &c. On appelle génies fleuronés, ceux dont la partie inférieure se termine en naissance de rinceau de feuillages, comme dans la frise du frontispice de Néron à Rome. Voyez nos Planch. d'Archit.

On se sert aussi du mot de génie, pour désigner le feu & l'invention qu'un architecte, un dessinateur, décorateur, ou tous autres Artistes mettent dans la décoration de leurs ouvrages; c'est une partie très nécessaire dans l'Architecture. Un homme sans génit, quoique muni des préceptes de son art, va rarement loin: la diversité des occasions & le detail immense d'un bâtiment, exigent absolument des dispositions naturelles, qui soient aidées d'un exercice labotieux & sans relâche; qualités essentielles à un architecte pour mériter la confiance de ceux qui lui abandonnent leurs intérêts. Voyez Architecte.

Genie (Page 7:584)

Genie en Peinture. Voyez Peinture. [p. 585]

GENIOGLOSSE (Page 7:585)

GENIOGLOSSE, adj. pris s. en Anatomie, se dit d'une paire de muscles qui prennent leur origine de la partie interne de la symphise du menton, au - dessous des génio - hyoïdiens; ils s'élargissent ensuite, & vont s'attacher à la base de la langue. Voyez Langue, Menton. (L)

GENIO - HYOIDIEN (Page 7:585)

GENIO - HYOIDIEN, adj. en Anatomie, se dit d'un muscle de l'os hyoïde, qui aussi - bien que son pareil est court, épais & charnu; ils prennent leur origine de la partie interne de la machoire inférieure qu'on appelle menton; ils sont larges à leur origine; ils se retrécissent ensuite, & vont s'attacher à la partie supérieure de la base de l'os hyoide. Voyez Hyoide. (L)

GENIO - PHARYNGIENS (Page 7:585)

GENIO - PHARYNGIENS, en Anat. se dit d'une paire de muscles du phar ynx qui viennent de la sympnise du menton, au - dessous des muscles genio - glosses, & qui s'attachent aux parties latérales du pharynx. Voyez Pharynx. (L)

GENIPANIER (Page 7:585)

GENIPANIER, s. m. (Hist. nat. bot.) genipa, genre de plante observé par le P. Plumier; la fleur est monopétale, campaniforme, évasée; il sort du calice un pistil qui entre dans la partie postérieure de la fleur; le calice devient un fruit qui a ordinairement la figure d'un oeuf, qui est charnu & partagé en deux sortes de loges, & qui renferme des semences plates pour l'ordinaire. Tournef, rei herb. appendix. Voyez Plante. (I)

GENISTELLE (Page 7:585)

GENISTELLE, s. f. genistella, (Hist. nat. bot.) genre de plante qui differe du genêt en ce que ses feuilles naissent l'une de l'autre, & sont comme articulées ensemble. Tournef. inst. rei herb. & élémens de Botanique. Voyez Plante. (I)

GENITA - MANA (Page 7:585)

GENITA - MANA, (Mythol.) déesse qui présidoit aux enfantemens; les Romains lui sacrifioient un chien, comme les Grecs en sacrifioient un à Hécate. On faisoit à cette déesse une priere conçue en termes fort singuliers: on lui demandoit la faveur que de ce qui naîtroit dans la maison rien ne devint bon. Plutarque dans ses questions romaines, quest. 52, donne deux explications de cette façon de parler énigmatique; l'une est de ne pas entendre la priere des personnes, mais des chiens, Alors, dit - il, l'on demandoit à la déesse que ces animaux qui naîtroient dans la maison, ne fussent pas doux & pacifiques, mais méchans & féroces; ou bien, selon Plutarque, en appliquant la priere aux personnes, le mot devenir bon signifioit mourir; dans ce dernier sens l'on prioit la déesse qu'aucun de ceux qui naitroient dans la maison, ne vînt à mourir dans cette même maison. Cette derniere explication, ajoûte - t - il, ne doit pas paroître étrange à ceux qui savent que dans un certain traité de paix conclu entre les Arcadiens & les Lacédémoniens, il fut stipulé qu'on ne feroit bon, c'est - à - dire, selon Aristote, qu'on ne tueroit personne d'entre les Tégates pour les secours qu'ils auroient pû prêter aux Lacédémoniens. (D. J.)

GENITAL (Page 7:585)

GENITAL, adj. dans l'économie animale, c'est ce qui appartient à la génération. Voyez Génération.

Parties génitales dénotent les parties qui servent à la génération dans les deux sexes. Voyez Verge, Testicule, Clitoris, Hymen , &c. & les Planches anatomiques.

GENITES (Page 7:585)

GENITES, adj. pl. pris sub. (Théolog.) c'est - à - dire engendrés; nom qui parmi les Hébreux signifioit ceux qui descendoient d'Abraham sans aucun mélange de sang étranger, c. à d. dont tous les ancêtres paternels & maternels étoient israëlites, & issus en droite ligne d'autres israëlites en remontant ainsi jusqu'à Abraham. Les Grecs distinguoient par le nom des genites, les Juifs nés de parens qui ne s'étoient point alliés avec les Gentils pendant la captivité de Babylone. Chambers. (G)

GENITIF (Page 7:585)

GENITIF, s. m. c'est le second cas dans les lan<cb-> gues qui en ont reçu: son usage universel est de présenter le nom comme terme d'un rapport quelconque, qui détermine la signification vague d'un nom appellatif auquel il est subordonné.

Ainsi dans lumen solis, le nom solis exprime deux idées; l'une principale, désignée sur - tout par les premiers élemens du mot, sol, & l'autre accessoire, indiquée par la terminaison is: cette terminaison présente ici le soleil comme le terme auquel on rapporte le nom appellatif lumen (la lumiere), pour en déterminer la signification trop vague par la relation de la lumiere particuliere dont on prétend parler, au corps individuel d'où elle émane; c'est ici un détermination fondée sur le rapport de l'effet à la cause.

La détermination produite par le génitif peut être fondée sur une infinité de rapports différens. Tantôt c'est le rapport d'une qualité à son sujet, fortitudo regis; tantôt du sujet à la qualité, puer egregioe indolis: quelquefois c'est le rapport de la forme à la matiere, vas auri; d'autre fois de la matiere à la forme, aurum vasis. Ici c'est le rapport de la cause à l'effet, creator mundi; là de l'effet à la cause, Ciceronis opera. Ailleurs c'est le rapport de la partie au tout, pes montis; de l'espece à l'individu, oppidum Antiochioe; du contenant au contenu, modius frumenti; de la chose possédée au possesseur, bona civium; de l'action à l'objet, metus supplicü, &c. Partout le nom qui est au génitif exprime le terme du rapport; le nom auquel il est associé en exprime l'antécédent; & la terminaison propre du génitif annonce que ce rapport qu'elle indique est une idée déterminative de la signification du nom antécédent. Voyez Rapport.

Cette diversité des rapports auxquels le génitif peut avoir trait, a fait donner à ce cas différentes dénominations, selon que les uns ont fixé plus que les autres l'attention des Grammairiens. Les uns l'ont appellé possessif, parce qu'il indique souvent le rapport de la chose possédée au possesseur, proedium Terentii; d'autres l'ont nommé patrius ou paternus, à cause du rapport du pere aux enfans, Cicero pater Tuilioe: d'autres uxorius, à cause du rapport de l'épouse au mari, Hectoris Andromache. Toutes ces dénominations péchent en ce qu'elles portent sur un rapport qui ne tient point directementà la signification du génitif, & qui d'ailleurs est accidentel. L'effet général de ce cas est de servir à déterminer la signification vague d'un nom appellatif par un rapport quelconque dont il exprime le terme; c'étoit dans cette propriété qu'il en falloit prendre la dénomination, & on l'auroit appellé alors déterminatif avec plus de fondement qu'on n'en a eu à lui donner tout autre nom. Celui de génitif a été le plus unanimement adopté, apparement parce qu'il exprime l'un des usages les plus fréquens de ce cas; il naît du nominatif, & il est le générateur de tous les cas obliques & de plusieurs especes de mots: c'est la remarque de Priscien même, lib. V. de casu: Genitivus, dit - il, naturale vinculum generis possidet, nascitur quidem à nominativo, generat autem omnes obliquos sequentes; & il avoit dit un peu plus haut, Generalis videtur esse hic casus genitivus, ex quo ferè omnes derivationes, & maximè apud Groecos, solent fieri. En effet les services qu'il rend dans le système de la formation s'étendent à toutes les branches de ce système. Voyez Formation.

I. Dans la dérivation grammaticale, le génitif est la racine prochaine des cas obliques; tous suivent l'analogie de sa terminaison, tous en conservent la figurative. Ainsi homo a d'abord pour génitif hom - inis, où l'on voit o du nominatif changé en in - is; is est la terminaison propre de ce cas, in en est la figurative: or la figurative in demeure dans tous les

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