ENCYCLOPÉDIE OU DICTIONNAIRE RAISONNÉ
DES SCIENCES, DES ARTS ET DES MÉTIERS

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"454"> & de lumiere, je jugeois indiscrettement & sans examen du mérite d'une opinion, sur la foi du nom & de la réputation de son auteur. Voyez le nouv. Newkastle, édit. 1744. Conclure du changement qui résulte de la véhémence du trot, que cette action est le principe du galop, c'est avancer & soûtenir que la célérité seule en est la base: or rien de plus faux que cette maxime. Nous voyons en effet, que quelque lente que soit l'allure de l'animal, pourvû qu'elle soit soûtenue, elle est plus prochaine du degré requis pour le porter à ce mouvement prompt & pressé, que celle qui étant abandonnée, est dans un plus grand degré de vîtesse. Supposons, par exemple, un cheval dans l'action tardive d'un pas parfaitement écouté, ou d'un trot exactement uni; il est incontestable que, malgré la lenteur de la progression dans l'un & dans l'autre de ces cas, ses forces se trouvant rassemblées, il sera plus libre & plus disposé à passer de ces mouvemens à une action rapide & diligente, que du pas alongé ou de campagne, ou que d'un trot simplement déterminé: il faut donc nécessairement convenir que le fondement & la condition réelle d'un vrai galop se rencontrent principalement dans le point d'union d'où naît la possibilité & la plus grande facilité que l'animal a de percuter & de s'enlever, & non dans une célérité qui l'éloignant de cet ensemble, ne sauroit produire qu'une action basse, rampante, & également précipitée sur les épaules & sur l'appui.

C'est sur cette vérité que porte évidemment la regle qui nous prescrit de ne point galoper un cheval qu'il ne se présente aisément & de lui - même à cette allure, & qui fixant d'une maniere positive les progrès qui dans l'école doivent précéder cette leçon, nous astreint à ne l'y exercer qu'autant qu'il a acquis la franchise, la souplesse & l'obéissance qui doivent en favoriser l'intelligence & l'exécution: il est tems alors de l'y solliciter, l'action du galop étant infiniment moins coûteuse & moins pénible à l'animal par le droit, qu'en tournant on le travaillera d'abord sur des lignes droites.

La difficulté qu'il éprouve sur des cercles, est néanmoins une ressource dont un homme de cheval profite habilement dans une foule d'occurences. Il est des chevaux naturellement ardens, qui s'animent toûjours de plus en plus en galopant, qui s'appuient & qui tirent de maniere qu'à peine le cavalier peut les maîtriser; il en est encore, qui doüés de beaucoup d'agilité & de finesse, se desunissent souvent: plusieurs, non moins fins & non moins sensibles que ceux - ci, mais dont le corps peche par trop de longueur, communément falsifient; quelques - uns ne partent jamais du pié qui doit mener. Le moyen d'appaiser la vivacité des premiers, de donner aux seconds l'habitude de la justesse des hanches, & aux autres celle de la justesse des épaules, est de les entamer préférablement sur un rond dont l'espace soit toûjours relatif à leur aptitude & aux vûes que l'on se propose; parce que la piste circulaire exigeant une plus grande réunion de forces, & occupant, pour ainsi parler, toute l'attention de l'animal, en modere la fougue, & captive tellement ses membres, qu'il ne peut que ressentir une peine extrème, lorsqu'il veut se livrer aux mouvemens desordonnés d'une allure fausse & desunie. Après qu'ils ont éte exercés ainsi, & lorsqu'ils sont parvenus au point desiré de tranquillité & d'assûrance, il est bon de les galoper devant eux, de même que de porter insensiblement sur les cercles ceux que l'on a commencé par le droit; car l'aisance & la perfection de cette action dans un cheval qui d'ailleurs y a été préparé, dépend véritablement de la succession & même du mélange éclairé des leçons sur ces terreins diversement figurés.

Le trot a paru en général, eû égard aux premieres instructions, l'allure la plus propre & la plus conve<cb-> nable pour partir, & pour enlever l'animal: elle est telle en effet, quand elle est soûtenue; parce que la vîtesse & l'ensemble étant alors réunis, pour peu que les aides ajoûtent au degré de percussion que l'une & l'autre suscitent, le cheval est bien - tôt & facilement déterminé. Il importe cependant d'en mesurer & d'en régler avec art la véhémence & le soûtien; elle ne doit être abandonnée dans aucun cas: mais relativement à des chevaux qui tiennent du ramingue, ou qui sont pourvus d'une union naturelle, ou qui n'ont pas une certaine finesse, elle doit être plus ou moins alongée; sa célérité ne pouvant que combattre la disposition qu'ils ont à se retenir, & suppléer dans ceux qui n'ont point assez de sensibilité, à la force que l'on seroit obligé d'employer, pour les résoudre à l'action qu'on leur demande. S'il s'agit de chevaux chargés d'épaules, ou bas du devant, ou longs de corps, ou qui ont de l'ardeur, & qui sont conséquemment enclins, les uns à s'appuyer considérablement sur la main, les autres à s'étendre & à peser, & les derniers à tirer, à s'échapper & à fuir; il faut qu'elle soit proportionnément racourcie. Il arrive souvent, j'en conviens, que l'impatience & la vivacité de ceux - ci leur rendant insupportable la contrainte la plus legere, ils se gendarment & s'enlevent continuellement & plusieurs fois à la même place, sans se porter en avant. On ne peut pas néanmoins favoriser, en les pressant, leur penchant à se dérober: mais il est essentiel, dans ces momens de défense, de rendre la main avec assez de délicatesse & de subtilité pour les engager à suivre l'action entamée du galop; à - moins qu'on ne les parte de l'allure modérée du pas, plûtôt que du trot, dont la promptitude les anime toûjours davantage; cette voie étant la meilleure & la plus courte pour les tenir dans le calme, & pour obtenir d'eux l'application qui en assûre l'obéissance.

C'est sur la connoissance de la méchanique du galop, que doit être fondée la science des aides, qui peuvent en suggérer & en faciliter les moyens. Renfermez le cheval en arrondissant la main, & en tournant les ongles en haut; ce qui opérera une tension & un racourcissement égal des deux rênes; & approchez dans le même instant vos jambes du corps de l'animal: vous déterminerez infailliblement l'une & l'autre de ses extrémités à un mouvement contraire: car le devant étant retenu, & le derriere étant chassé, l'antérieure sera nécessairement détachée de terre, tandis que l'extrémité postérieure. occupée du poids de la masse, sera baissée & pliera à raison de ce même poids; l'antérieure est en l'air: mais les foulées des deux jambes qui la recevront dans sa chûte, doivent être successives & non simultanées; l'action de votre main & de vos jambes, action que vous avez dû proportionner au plus ou moins de sensibilité, au plus ou moins de souplesse du cheval, & à la réunion plus ou moins intime de ses membres, lors de l'instant qui précédoit le partir, sera donc subitement suivie du port de votre réne droite à gauche, & de votre rêne gauche à vous, s'il s'agit d'un galop à droite; ou de votre rêne gauche à droite, & de votre rêne droite à vous, s'il s'agit d'un galop à gauche. L'effet des unes ou des autres de ces rênes s'imprime sur l'épaule à laquelle elles répondent. Or l'épaule de dedans étant mûe sur le côté où la main la conduit, & celle de dehors étant arrêtée, le devant se trouve retréci, & la retombée en sera incontestablement fixée sur la jambe de dehors, dont la battue précedera celle de la jambe de dedans, qui, attendu le rejet de l'épaule sur le dehors, sera forcée dans la progression d'entamer, c'est - à - dire de devancer l'autre; en même tems que le retrécissement du devant a lieu, l'élargissement du derriere s'effectue; l'extrémité antérieure ne pouvant [p. 451B] être portée d'un côté, que l'extrémité postérieure ne se meuve du côté contraire; & les hanches en étant sollicitées dans cette circonstance, non - seulement par l'opération des rênes dont l'impression s'est manifestée sur l'épaule de dehors & sur celle de dedans, mais par l'appui de votre jambe de dehors, dans laquelle le premier degré de force a dû subsister dans son entier, à la différence de celui qui résidoit dans l'autre, & qui a dû sensiblement diminuer. De cette détermination de la croupe dans un sens opposé à celle de l'avant - main, il résulte que la jambe de derriere de dehors est gênée, & que celle de dedans étant en liberté, accompagnera exactement celle avec laquelle elle forme un bipede latéral; de maniere que les deux jambes de dehors ne pouvant qu'être chargées, & celles ci mener ensemble la précision & la justesse, en ce qui concerne l'arrangement & l'ordre successif des membres, seront inévitables.

Considérons - le encore cet arrangement. L'épaule de dedans est beaucoup plus avancée que celle de dehors, & la jambe de dehors de l'extrémité postérieure, beaucoup plus en - arriere que celle de dedans. La premiere de ces jambes est toûjours occupée du fardeau de la masse; l'autre, au moment du renversement de l'épaule, s'est approchée de la direction du centre de gravité; elle a été déchargée de celui qu'elle supportoit, & n'a pû en être chargée de nouveau, vû son extrème flexion; aussi les suites de leur percussion sont - elles différentes. Celle de la jambe de dehors, qui d'ailleurs est invitée par l'aide de la jambe du cavalier à une extension subite & violente, s'exécutera d'abord; mais par elle le corps du cheval sera porté seulement en - avant, tandis que la seconde pereussion opérée par l'appui de la jambe de dedans sur le sol élevera ce même corps, & donnera une noavelle vîtesse au mouvement progressif qu'il a dejà reçû; après quoi les deux jambes de devant, qui, dès que vous rendrez legerement la main & que vous passerez à l'appui doux, percuteront à leur tour & effectueront à chaque battue, le soûtien du corps lors de sa chûte, & la relevée de l'avantmain après cette chûte tombant, alternative nent, toute l'action se trouvera pleinement accomplie. Sa durée dépendra, non de l'application constante de toutes les forces étrangeres qui l'ont produite, puisqu'elle peut se soûtenir sans ce continuel secours, mais de la fermeté liante de votre corps, dont l'équilibre doit être tel que l'avant & l'arere - main dans leur élévation se chargent eux - mêmes de son poids, & de l'adresse avec laquelle vous préviendrez dans l'animal le ralentissement des efforts des parties qui en conséquence du premier mouvement imprimé, se pressent mutuellement & sont contraintes d'accourir en quelque façon pour étayer successivement la machine. Soyez à cet effet attentif au moment de la descente des épaules, & sur - tout à l'instant préeis où les piés atteignent le sol; si dans ce même mstant le cheval est legerement renfermé, & si vos rénes apissent en raison du tems de la percussion de chacun des membres qu'elles dirigent, la relevée du devant étant aidée, la masse sera plus sûrement & plus facilement rejettée sur le derriere, & les flexions étant par conséquent entretenues & occasionnant toûjours une vélocité à - peu - près égale dans les détentes, vous serez dispensé d'employer sans cesse vos jambes, dont l'usage non interrompu endurcit l'animal, & dont l'approche réitérée n'est réellement utile & nécessaire que sur des chevaux mous, pesans, foibles, paresseux, indéterminés, & qui trainent leur allure.

La leçon du galop bornée à une seule & unique main, ne rempliroit pas toutes nos vûes. Le cheval n'est propre aux différens airs, qu'autant qu'il est en quelque façon ambidextre, c'est - à - dire qu'autant qu'il a une même souplesse, une même legereté, & une même liberté dans les deux épaules & dans les deux hanches. On ne doit donc pas se contenter de le travailler sur une même jambe, & nous sommes indispensablement obligés de lui faire entamer le chemin tantôt de l'une, & tantôt de l'autre. Après l'avoir quelque tems exercé à droite, & lorsqu'il s'y présente avec quelque franchise, on peut, ou le partir à main gauche, ou le conduire de la premiere sur celle - ci. Les chevaux qui demandent à être partis, sont ceux en qui l'on observe, lorsqu'on les galope à droite, un penchant extrème à la falsification & à la desunion; on les y confirmeroit en les faisant changer de pié dans le cours & dans la suite de l'action; & l'on doit attendre qu'ils commencent à être assûrés aux deux mains, avant d'exiger d'eux qu'ils y fournissent sans interruption. Nous avons au surplus suffisamment expliqué les moyens de ce départ, & l'on se rappellera que pour le galop à gauche, la rêne gauche par son croisement opere le renversement de l'épaule sur le dehors; la rêne droite retient l'épaule contraire, & la jambe droite du cavalier aide principalement.

Les conditions du changement méritent que nous nous y arrêtions. Ce seroit trop entreprendre que de le tenter d'abord sur la ligne droite parcourue. On l'abandonnera pour en décrire une diagonale plus ou moins longue, d'une seule piste, & au bout de laquelle l'animal passant à l'autre main, tracera une ligne semblable à celle qu'il a quittée. Ici la rêne gauche agira; elle déterminera le cheval à droite & sur cette diagonale, mais il est à craindre que le port de cette rêne en - dedans charge les parties droites, & désivrent les parties gauches de la contrainte dans laquelle elles sont; or, obviez à cet inconvénient par une action semblable, mais plus legere de l'autre rêne, où par l'action mixte & suivie de la premiere que vous croiserez & que vous mettrez à vous d'un seul & même tems; & soûtenez, s'il en est besoin, de votre jambe de dehors, le tout pour contenir le derriere & pour le resserrer; car dès que vous gênerez la croupe & que vous l'empêcherez de tourner, de se jetter, & de sortir, il est certain que, consequemment au rapport, à la relation intime, & à la dépendance mutuelle de la hanche & de l'épaule gauche, ou même des deux épaules & des hanches, les jambes gauches demeureront asservies, & dans cet état de sujétion qui leur ravit la faculté de devancer & de mener. Ce principe doit vous être présent encore au moment où parvenu à l'extrémité de la ligne dont il s'agit, vous chercherez à gagner l'autre, & à effectuer le passage médité. Saisissez l'instant qui precede la chûte du devant, pour detourner l'épaule avec la rêne de dehors, & pour retenir celle de dedans avec la rêne droite, & substituez votre jambe du même côté à la jambe gauche qui aidoit; l'épaule & la hanche qui étoient libres, cesseront infailliblement de l'être, & les autres membres seront indispensablement astieints à entamer.

Soit que les changemens de main s'exécutent sur les cercles, ou d'une ligne droite sur une autre ligne pareille, ou sur un terrein quelconque plus ou moins vaste & plus ou moins limité; les aides doivent être les mêmes. Je sai que des écuyers qui ne pratiquent & n'enseignent cependant que d'après une routine, qui ne leur a procuré qu'une connoissance très - superficielle de ces opérations, m'objecteront qu'elles tendent à traverser le cheval, & à provoquer par conséquent une allure défectueuse, puisque dèslors le derriere sera tellement élargi, que la jambe de dedans qui en dépend se trouvera écartée de l'autre, & hors de la piste de celle avec laquelle elle mene, tandis que leurs battues & leurs foulées devroient

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