ENCYCLOPÉDIE OU DICTIONNAIRE RAISONNÉ
DES SCIENCES, DES ARTS ET DES MÉTIERS

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"138"> combien de façons la nature s'est diversifiée dans la partie des mines de fer. Sans entrer dans le détail des variétés infinies qui naissent des différens alliages, nous chercherons à nous en faire une distinction par les combinaisons des choses que nous y connoissons, & qui peuvent nous diriger dans leur travail. Il y a des pierres, des terres & du fer pur, avec son phlogistique. Les pierres & les terres sont ou apyres, ou calcaires, ou vitrescibles. Combinez toutes ces substances de toutes les manieres possibles avec le fer pur, & vous aurez autant de mines à traiter diversement.

Ces corps joints à la mine sont ou terre seule, ou terre & pierre également; ou beaucoup de terre & peu de pierres accrochées foiblement; moins de terre & plus de pierres liées très - étroitement; ou pierre très - solide, jointe très - fortement à la mine. La distance de chaque degré est remplie d'une infinité de modifications, par les différentes especes de terre, de pierre, leur mélange, leur adhésion, leur figure: de - là les différentes couleurs, formes, difficulté à la fusion.

La terre qui fait ordinairement corps avec une mine propre à la susion, est communément remplie de parties calcaires ou argilleuses; la pierre, de parties vitrescibles & apyres: les unes & les autres combinées sont fusibles.

Nous appellons arbue & castine, les deux substances ou fondans que nous employons spécialement à la fusion des mines.

Vous discernerez l'arbue du meilleur usage, lorsque l'espece d'argile, connue dans les forges sous ce nom, n'est point mélangée d'autres corps; qu'au toucher elle est douce; que la couleur n'en est point d'un rouge trop foncé; que pétrie avec peu d'eau elle devient bien compacte, seche à l'ombre sans crevasse, & résiste long - tems au feu. L'arbue que la charrue a travaillée est la plus nerveuse, la plus douce & huileuse, soit parce que les plantes ont pompé une partie des sels, soit que le soleil & la végétation ne laissent que les parties les plus nerveuses des engrais, comme moins propres à la sublimation. L'attraction des parties de certains fumiers la rendent plus grasse, plus compacte, plus tenue, & par conséquent plus en état de résister au feu.

La bonne castine se connoît aisément au microscope, par toutes les parties qui en sont transparentes & propres à la calcination. Ne vous y trompez pas, & ne prenez pas pour de la castine des pierres qui portent des grains brillans, & réfléchissant la lumiere comme le grès. L'arbue qui, mêlée à la mine, résiste le plus long - tems au feu, & la castine qui cause le plus aisément la fusion, sont de la meilleure espece; l'arbue se connoît à sa vitrescibilité; la castine, à sa nature calcaire.

Il est innombrable de voir combien il y a de diversité dans l'arbue & dans la castine; elle est aussi grande, que la possibilité d'être mélangée avec différentes matieres. Dans un siecle où tous les Arts sont honorés, enrichis des lumieres des savans, ne s'en trouva - t - il point un qui daigne tourner son travail sur les manufactures des fers, où il y a tant à rectifier? C'est une vieille matiere toute neuve à traiter; ce qui seroit peut - être déjà arrivé, si le fer ne naissoit que dans le Pérou. Que d'obligations n'auroi - on pas à une analyse des différentes mines, arbue & castine, qui déterminât exactement les degrés de chaleur & de mélange? Nous sommes réduits à aller en tâtonnant; si chaque pays produisoit également & séparément la mine, l'arbue & la castine, on pourroit établir par les faits connus, des regles fondées sur des mélanges uniformes ou gradués.

Mais une observation importante, soit pour l'éclaircissement de cet article, soit pour l'intelligence des maîtres de forge, qu'on sera dans le cas de consulter; c'est que la nature des matieres, telles que la castine & l'arbue qu'on mêle aux mines, soit pour les rendre fusibles, soit pour donner de la qualité aux fers, peut varier à l'infini; & que par conséquent le seul moyen d'avoir des idées réelles, c'est de prendre ces substances, & d'en faire l'analyse chimique: c'est ainsi que nous nous sommes assûrés que la castine dont on parle dans cet article est une pierre calcaire; & l'arbue un mélange vitrescible d'argille, de glaise, de terre calcaire, & d'un peu de fer.

Art. III. Maniere de tirer les mines. Nous avons dit que les corps joints à la mine étoient terre seule, premiere espece; terre & pierre en petits volumes également, deuxieme; beaucoup de terre & peu de pierre accrochées foiblement, troisieme; moins de terre & plus de pierre liées plus étroitement, quatrieme; pierre très - solide jointe très - fortement à la mine, cinquieme: ces différentes especes sont ou sur la surface, ou dans certaine profondeur de la terre, ou exposées à beaucoup d'eau.

Si elles sont proches la surface de la terre, la traite en est aisée; & pour les trois premieres especes, il n'y a autre chose qu'à les séparer en les tirant des terres qu'on voit n'en être point imprégnées, & à les voiturer sur les atteliers destinés à les nettoyer.

La quatrieme espece demande plus de précaution, soit en laissant sur l'attelier les plus grosses pierres, détachant les parties de mine mêlées de terre, ou laissant le tout ensemble. Si les pierres sont fort chargées de mine, ou que ces pierres soient en grande quantité, sans être en trop gros volume, elles seront portées à l'attelier convenable.

La cinquieme espece sera tranchée dans les bancs comme la pierre dans les carrieres, cassée à bras d'homme & coups de masse en morceaux de trois ou quatre livres, & de - là voiturées à l'attelier destiné à faire le reste de la division. Il y en a d'assez riches dont il ne faut que réduire les morceaux en d'autres morceaux plus petits, & qu'on porte ainsi au fourneau. Quand les bancs sont extrèmement solides, ainsi que nous le supposons; comme il n'est pas essentiel d'avoir des morceaux tranchés nettement, & d'une telle dimension, vous avancerez l'ouvrage en vous servant, lorsque le banc sera découvert au - delà d'un déjoint, s'il y en a, d'un morceau de fer rond d'environ un pouce de diametre, finissant en langue de serpent, bien acéré, aiguisé, & trempé, de la longueur d'un pié. Il faut être muni d'un compagnon, d'un maillet de bois, de sable en poudre & d'eau; l'un tient le foret, verse un peu d'eau & de sable; & l'autre touche à petits coups, ayant soin de changer la position du tranchant, en se relayant l'un l'autre: en très - peu de tems vous aurez un trou cylindrique de la profondeur que vous souhaitez. Ce trou ou plusieurs, pour un plus grand effet, s'emplissent de poudre à canon au tiers, l'ouverture se ferme avec une cheville de bois chassée fortement, dans laquelle on perce un petit trou pour loger une meche lente à brûler, ou de la poudre humectée, pour avoir le tems de se retirer: bien - tôt vous aurez une grande quantité de quartiers détachés, & deux hommes en fourniront ainsi plus que dix à trancher.

Si les mines sont à plusieurs degrés de profondeur, pour tirer celles des trois premieres especes, pratiquez des trous cylindriques de quatre piés de diametre; ayez un tour, un cable, des paniers, & deux hommes à chaque ouverture, ils viendront aisément à - bout de ce travail; ils changeront d'occupation une ou deux fois le jour, & en peu de tems ils arriveront à la mine. Si le banc est assez épais, pour y entrer, ils feront plusieurs galeries, laissant de bons & forts piliers; iront au loin chercher la mine avec des [p. 139] brouettes, & la conduiront au milieu du puits pour la tirer avec le tour, jettant dans les galeries vuides les pierres & autres corps étrangers.

Il y a des minieres où au bout de quelques années, toutes les galeries vuides s'effondrent, ce qui est aisé à connoître; alors il n'y a aucun danger de tirer les piliers qui deviendront alors galeries.

Quand les mines ne sont pas bien à sond, on se contente de faire une ouverture quarrée fort large; descendu de quelques piés, on ménage un repos; arrivé à la mine, l'ouvrier du bas jette la mine sur le repos, & son compagnon du repos la jette sur le sol.

Les minieres en roches solides demandent une ouverture beaucoup plus grande pour la commodité du travail, il faut armer le cylindre du tour d'une roue très - élevée, afin de se procurer de plus longs leviers, & enlever les plus gros quartiers, qu'on travaille plus aisément dehors. On conçoit que dans les mines en roche, l'effondrement est moins à craindre que dans les autres, & que la solidité doit regler la largeur des galeries & l'épaisseur des piliers.

Il est difficile dans les mines à fond de n'avoir pas à vuider au moins les eaux de la suinte de la terre; mais il peut arriver qu'en n'y travaillant que dans les saisons les plus seches, le tour & les seaux suffisent pour en débarrasser: sinon il n'y a pas à hésiter, il faut établir une ou plusieurs pompes. Voyez Pompe. Pour cet effet vous serez un puits assez large pour la placer, & pour travailler sans être gêné: si le bassin de la pompe est beaucoup plus profond que la miniere, les eaux s'y rendront de toutes les galeries. Quand on en est réduit - là, il ne faut pas espérer de travailler, ni pendant les pluies & les fontes de neiges, ni pendant les fortes gelées: choisissez le tems le plus sec, moitié de l'eté & moitié de l'automne, & assûrez - vous d'un assez grand nombre d'ouvriers pendant ce tems, pour faire vos provisions pour l'année. N'oublions pas de dire qu'il y a des minieres, au fond desquelles il se trouve un banc de marne, sous lequel passe l'eau, que la marne t'ent si fort comprimée; que si vous avez l'imprudence de le percer, vous vous jetterez dans un épuisement dont vous ne pourrez venir à - bout qu'à grands frais, ou qui vous forcera à abandonner le travail. il faut alors examiner si on ne pourroit pas ouvrir une galerie de côté, qui par sa pente débarrasât de toutes les eaux.

Art. IV. Droits sur la mine & réglemens. On distingue le droit sur les mines & celui sur la traite, parce que le premier appartient au domaine de la couronne, & le second aux propriétaires des héritages où se trouvent les minieres. La confusion que mettent ceux - ci dans leurs prétentions à ce sujet, donne lieu journellement à des contestations, & occasionne des décisions de cours souveraines opposées entr'elles: quelques - unes même paroissent s'éloigner des intérêts du roi & du bien public. Pour jetter quelque lumiere sur cette partie, il faut jetter l'oeil sur les ordonnances qui distinguent clairement le droit du roi, celui du public, & celui du propriétaire.

Le réglement au sujet des mines, de Charles VI. du 30 Mai 1413, rappellant ceux des rois prédécesseurs, confirmé par Louis XII. le 20 Novemb. 1498, & par François premier en Décembre 1515, est conçû en ces termes: « Avons, par maniere d'édit, statut, loi ou ordonnance royale, irrévocable, dit, décerné & déclaré.... que nul seigneur spirituel ou temporel, de quelque état, dignité ou prééminence, condition ou autorité, quel qu'il soit, en notredit royaume, n'en aura ne doit avoir, à quelque titre, cause, occasion quelle qu'elle soit, pouvoir ne autorité de prendre, reclamer ne deman<cb-> der esdites mines, ni en autres quelconques, assises en notredit royaume, la dixieme partie, ni autre droit de mines, mais en seront par notredite ordonnance & droit, forclos; car à nous seuls, & par le tout à cause de nos droits & majesté royaux, appartient la dixieme & non à autres...... Voulons.... que les hauts - justiciers, moyens & bas, sous quelque jurisdiction & seigneurie que lesdites mines soient situées & assises, baillent & délivrent auxdits ouvriers, marchands & maîtres desd, mines, moyennant & par payant juste & raisonnable prix, chemins & voies, entrées, issues, par leurs terres & pays, bois, rivieres, & autres choses nécessaires auxdits faisants l'oeuvre & ouvriers, lieux plus profitables pour l'ouvrage faire, & le moins dommageable pour lesdites seigneuries..... Voulons........que tous mineurs & autres, puissent querir, ouvrer & chercher mines par tous les lieux où ils penseront en trouver, & icelles traire & faire ouvrer, payant à nous notre dixieme franchement, & en faisant certification ou contenter à celui ou à ceux que lesdites choses seront ou appartiendront au dire de deux prudhommes....Que dorénavant les marchands, maîtres faisant l'oeuvre, & lesdits ouvriers qui esdites mines ouvrent & s'occupent, & font résidence sur le lieu du martinet, ou mines, ou leurs députés pour eux, auroient....un juge, bon & convenable commissaire, & tel comme nous leur ordonnerons, lequel connoîtra & déterminera de tout cas mû & à mouvoir, qui esdits marchands, maîtres & ouvriers pourra toucher, & auxquels seront baillé nos ordonnances » ...... S'ensuit la franchise des tailles & autres subsides, avec défenses de molester les mineurs du royaume ........ « Considérez qu'ils vaquent continuellement au bien de nous & de la chose publique ».....

Ordonnance d'Henri II. du 30 Septembre 1548... « Avons aussi permis & permettons, qu'il puisse prendre aux lieux plus prochains qui lui sembleront être propres à ce, tant terres, héritages, ruisseaux, en les payant raisonnablement aux propriétaires, ou le dommage & intérêt qui leur seroit fait pour le regard de la valeur desdites terres seulement, & non des mines y étant »....

Dans celle donnée à Reims le 10 Octob. 1552.... « N'entendons ni ne voulons, les ouvrages desdites mines ou minieres, être retardés, ains continués, & notre droit de dixieme être mis à part.....de la recette duquel ils seront crûs sur leur livre ordinaire, & serment sur ce fait » .... Ces ordonnances regardent entr'autres le fer, puisque plus bas il est dit: ... « Quant aux autres métaux, comme cuivre, étain, plomb, potin & fer en fontes communes, duquel fer ne prendront qu'un dixieme de celui qui sera tiré sur nos terres & seigneuries..... sans que lesdits propriétaires puissent prétendre aucun droit esdites mines, & demander autres intérêts que la récompense des terres, superficie ou incommodité d'icelles; encore qu'en icelles lesdites mines soient tirées......quoique soit après que par - devant notaire ou justice, il aura actuellement & à deniers découverts, fait offre aux propriétaires de leur récompense, telle qui sera arbitrée par gens à ce connoissans, à faute d'accorder par eux & icelle consignée ».....

Extrait de l'ordonnance de François II. du 29 Juillet 1560.... « En s'accommodant avec ceux à qui appartiendront lesdits héritages, & les satisfaisant de gré à gré suivant l'avis & estimation de gens experts & arbitres de juges, sans toutefois que ledit prix s'en puisse aucunement augmenter pour raison de l'utilité qui se pourra tirer à cause desdites mines »....

Autres ordonnances de Charles IX. du 6 Juillet

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