ENCYCLOPÉDIE OU DICTIONNAIRE RAISONNÉ
DES SCIENCES, DES ARTS ET DES MÉTIERS

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"919"> MM. Stahl & Cramer, ont été embarrassés d'expliquer pourquoi une mine de fer étoit attirable par l'aimant après la calcination: ce phénomene cependant s'explique par celui qui précede; mais le feu instrument & le feu principe sont - ils le même? Le fer qui fait exception dans ce cas avec tous les corps connus, semble l'insinuer: sont - ils différens? c'est ce qui paroit par la réduction des autres chaux métalliques. On a beau les tenir dans un creuset fermé toutes seules, elles ne prennent pas, comme le fer, la matiere du feu qui passe à - travers un creuset: il leur faut le contact d'un corps charbonneux; & elles veulent être tenues dans les vaisseaux fermés. La considération de ces phénomenes porteroit à croire que le fer ne s'accommode que d'un phlogistique pur, tandis que les autres corps métalliques semblent demander un phlogistique uni à un autre corps, dont la présence ne peut être que soupçonnée. Mais si l'on admettoit cette conjecture, comment la concilier avec ce qui se passe dans la calcination du plomb? La chaux de plomb pese plus qu'il ne pesoit auparavant; & il n'y a pas d'apparence que le phlogistique qu'on soupçonne uni à un autre corps, pese moins que le phlogistique pur qui paroît chasser le premier, pour s'introduire à sa place sous une différente combinaison, & peut - être selon celle qui se fait dans le fer: car le fer converti en acier par lui - même augmente de poids; il est vrai qu'il n'a pas été préalablement calciné. Parlons du feu comme instrument.

Nous avons placé le feu à la tête des fondans; c'est en effet l'instrument qui divise les corps, les résout, & les rend par - là miscibles avec les autres. Tous les fondans sont des menstrues secs, c'est - à - dire des corps durs composés de parties liées entre elles, & formant un tout qui résiste à sa séparation: ils ne peuvent agir sur les autres, tant qu'ils resteront sous cette forme; il leur faut donc un agent qui change cet état, & leur donne une division & une atténuation capables de leur faire pénétrer les pores de ceux qu'ils peuvent dissoudre; cet agent c'est le feu: appliqué aux sels & aux métaux avec la force requise pour chacun d'eux en particulier, & selon l'art que nous détaillerons aux articles Fourneau & Vaisseau; il s'insinue à - travers leurs pores, les dilate, desunit leurs molécules intégrantes, & souvent les principes constituant ces molécules, & les fait rouler les unces sur les autres, comme celles d'un fluide auquel ils ressemblent pour lors. En pareille circonstance, il faut le regarder comme un fluide actif qui se mêle intimement & uniformément avec les corps qu'il pénetre, & qui en est divisé mutuellement: on ne peut mieux comparer sa présence dans un corps qu'il rend fluide, qu'à celle d'un grain d'or qu'on a fondu avec cent mille grains d'argent pur. La Docimastique nous démontre que chaque grain de cet argent contient une quantité d'or proportionnelle, c'est - à - dire un cent - millieme de grain d'or: la division de cet or sera encore plus grande, si on le mele avec une plus grande quantité d'argent; & l'on n'en connoît point les bornes: il faut que le feu réduise cet or à ses molécules intégrantes; ces molécules doivent être d'une finesse extraordinaire, pour qu'elles puissent se distribuer uniformément dans toute la masse de l'argent. Quelle doit donc être la finesse du corps qui a eu la faculté de les desunir, & de les porter par toute la masse qu'il a parcourue, ébranlée & bouleversée? Mais il n'est pas nécessaire, pour que cette distribution uniforme du feu dans le corps le plus dur, ait lieu, que ce corps en soit dissous, c'est - à - dire que ses élémens soient séparés les uns des autres, pour lui laisser le passage libre: il est aussi uniformément distribué dans celui qu'il ne commence qu'à échauffer au - dessus du degré de la glace. Quelle prodigieuse finesse ne suppose pas, à plus for<cb-> te raison, cette liberté du passage qu'il se fraye dans les pores resserrés de ces corps? Cette derniere considération porte à croire que rien n'échappe à son action.

Il est vrai que les molécules des métaux les plus durs résistent à leur desunion; & la preuve en est tirée de la figure globuleuse qu'ils s'efforcent de garder, comme le mercure, dans le tems même que le feu produit l'action contraire: mais l'exercice de cette force est au moins diminué, pour ne pas dire absolument interrompu, tant que dure la même violence du feu. Il n'est pas possible de méler intimement deux ou plusieurs masses quelconques, qu'elles ne soient dissoutes en leurs molécules intégrantes. Que devient donc cette prétendue cohérence qu'on avoit soupçonnéerésister à la séparation des élémens, quand un corps divisé & poussé par l'activité du feu, se glisse avec un autre entre des parties dans lesquelles on avoit soupçonné une résistance à leur séparation?

C'est donc au feu, comme seul instrument de la division des corps, qu'on doit attribuer l'exercice de cette disposition qu'ils ont à se dissoudre les uns les autres: c'est à lui qu'on doit la production de ces phénomenes merveilleux qui naissent de la combinaison de plusieurs substances. Qui pourroit refuser le titre d'agent universel de la nature, à cet être qui en est le principe vivifiant?

L'expérience a appris que tous ou presque tous les sels étoient des fondans: ainsi le borax, le nitre, le sel ammoniac, le sel gemme, ou le sel marin, les vitriols, le mercure sublimé corrosif, les deux alkalis fixes, le soufre & son foie, le sel de Glauber, le tartre vitriolé, le sel fusible de l'urine, & enfin la plûpart des sels composés d'acides devenus concrets par une base quelconque, sont des fondans. Voyez Sel. Les uns ne mettent en fonte que quelques substances connues jusqu'ici; les autres y en mettent plusieurs: ceux - ci agissent par un de leurs principes seulement, ceux - là par tous les deux. Ils exercent leurs actions sur les terres, les pierres, les verres, les demi - métaux, les métaux, leurs chaux, leurs précipités, leurs verres, & toutes ces matieres sur elles - mêmes. De ce nombre prodigieux de substances il naît une foule de combinaisons dont on peut s'assûrer qu'on ne connoît encore que le plus petit nombre, quelque grand que soit celui qui a été tenté jusqu'ici. Mais si l'on ne connoît que la moindre partie des combinaisons qui peuvent être faites sur les substances connues, quelle espérance de parvenir à la connoissance de celles qui existent peut - être inconnues dans le sein de la nature, & de celles que l'art peut produire? On trouve un grand nombre de ces combinaisons dans différens ouvrages, & particulierement dans la Lithogéognosie, si on les considere en elles - mêmes, & par le travail qu'elles ont dû coûter. Mais si on vient à les comparer avec ce qui reste à faire, la carriere est immense; & ces ouvrages, & principalement celui de M. Pott, semblent n'exister que pour accuser la briéveté de la vie. Quelle foule de réflexions accablantes ne doit pas offrir l'exercice de plusieurs genres, si un seul suffit pour cela?

Il y a des corps qui se fondent par eux - mêmes, & dont l'addition d'un autre corps ne fait qu'accélérer & faciliter la fusion: tels sont tous les métaux & demi - métaux, les métaux parfaits dont l'aggrégation seroit rompue en molécules, à - travers lesquelles il n'y auroit aucune impureté, la plûpart des sels, toutes les terres & les pierres vitrescibles; bien entendu que cette addition change leur nature, si elle s'unit avec eux: on peut conséquemment s'en passer.

D'autres n'entrent en fonte que par un intermede absolument nécessaire: dans ce rang on place les métaux parfaits, dont l'aggrégation est rompue, & dont les molécules ne peuvent avoir de contact mu, [p. 920] tuel, en conséquence de ce que leur surface est couverte de quelques ordures, comme de poussiere, de cendres, ou de ce qu'elles sont unies aux acides. Dans le premier cas, on employe le borax, le nitre, le sel ammoniac, & le sel marin: le flux blanc & l'alkali fixe servent dans le second. Il est à remarquer que comme le borax donne à l'or une pâleur qu'on ne lui enleve que par le nitre ou le sel ammoniac, on mêle ordinairement le borax & le nitre, pour lui servir de fondant, ou le borax & le sel ammoniac, mais jamais le nitre & le sel ammoniac, parce qu'ils détonnent ensemble. On employe aussi quelquefois ces sels avec les métaux imparfaits & leurs chaux: mais ils en calcinent une partie, & même la vitrisient. Comme il arrive de la part du borax, bien loin de réduire la chaux qui peut s'y trouver. Voyez les Flux. Ainsi donc on n'en peut faire aucun usage dans les essais, sans tomber dans l'erreur. Ces sels, le borax, le nitre, le sel ammoniac, le sel marin, l'alkali fixe, & le flux blanc, nettoyent la surface des molécules des impuretés qui s'y trouvent, & favorisent ainsi la réunion en un régule, de celles qui sont en fonte. L'alkali fixe & le flux blanc, que nous regardons presque comme les mêmes, outre ces propriétés, ayant presque plus de rapport que ces métaux avec les acides qui leur restent unis après la précipitation ou concentration, les leur enlevent, & favorisent par la même raison la réunion de leurs molécules: ainsi en pareil cas, ils ont un autre effet que celui de fondant; c'est celui d'absorbant. Ce premier effet, qui n'est que de surérogation dans la conjoncture présente, n'empêche pourtant pas qu'ils n'ayent aussi celui qui y est propre. L'expérience a appris que le feu ne se communique ni avec la même rapidité, ni avec le même degré d'intensité, aux corps divisés qu'aux corps continus. Les sels, par l'interposition de leurs molécules fondues, remplissent les vuides, & communiquent le feu de proche en proche aux molécules métalliques, qu'ils aident à la fusion. Mais il faut encore leur reconnoître une qualité particuliere par laquelle ils agissent sur certaines substances; d'où il suit qu'ils ont une triple action: c'est par les deux dernieres que le borax est en usage pour souder l'or, l'argent, & le cuivre. Les artistes qui sont occupés du travail de ces métaux, appliquent le plus exactement qu'ils peuvent, les plans de contact avivés des pieces qu'ils veulent unir. Ils mettent tout - autour des paillons de soudure pour l'or & pour l'argent, & de la soudure en grenaille pour le cuivre; ils saupoudrent cette soudure de borax, & portent leurs pieces au feu, ou se servent de la lampe de l'émailleur. Les métaux qu'ils veulent souder étant de plus difficile fusion que la soudure, celle - ci entre en fonte la premiere à la faveur du borax, & fond la partie du métal à laquelle elle est appliquée. C'est - là le point que les bons artistes savent bien saisir pour retirer leurs pieces du feu: car sans cette attention, la partie soudée ne tarde pas à tomber dans le feu en gouttes métalliques, & l'on a perdu son tems & ses peines. On connoît que la fusion en est à son point, quand on voit que la surface de l'endroit soudé a l'éclat du miroir, & réfléchit de même les objets. Les scories legeres qui se forment en même tems à la surface du métal, & qui s'opposent à l'action de la soudure & du fondant, sont fondues & vitrifiées par le borax: il s'ensuit que dans les circonstances où on a à essayer un ustensile d'or ou d'argent, on ne doit jamais en couper un essai dans les endroits soudés; parce que la soudure pour l'or étant un alliage d'or, d'argent, & quelquefois de cuivre, celle de l'argent, un alliage de ce métal avec le cuivre, l'ustensile essayé se trouvera toûjours fort au - dessous de son titre réel.

On employe aussi quelquefois les sels avec les mé<cb-> taux imparfaits & leurs chaux; mais ils en calcinent une partie, & même la vitrifient; sans compter que leurs particules divisées se calcinent bien toutes seules, & résistent par - là à leur réunion: ainsi ils ne doivent jamais être traités par ces fondans, sur - tout dans ces essais, où ils causeroient des erreurs considérables. Voyez les Flux. Le borax ne fait pas même exception à cette regle, quoique ce soit le corps qui de tous accélere le plus la fusion, & que par - là il ait été regardé comme un flux réductif. Si l'on veut dépouiller, par exemple, un alliage d'or & d'argent du cuivre qu'ils contiennent, on y ajoûte du borax: ce sel met la masse en fonte non - seulement, mais attaque encore les molécules des scories cuivreuses qui surnagent, où l'or est niché comme dans les pores d'une éponge; il a la propriété de les résoudre, de s'unir avec elles, & de les convertir en un verre qui surnage le régule composé du culot principal & de l'accessoire des molécules qui étoient éparses dans les scories.

Mais il y a une troisieme espece de corps qui étant absolument réfractaires par eux - mêmes, se fondent avec d'autres de même nature: tels sont le spath alkalin avec l'argille, la craie avec la même argille.

C'est sur la propriété qu'a la litharge, & conséquemment le plomb, de fondre les terres & les pierres, & tous les métaux & demi - métaux, qu'est fondé le travail des mines dont on retire l'or, l'argent, & le cuivre par son moyen: quand elle est mélée bien intimement par la vitrification avec la masse de ces corps composés, une addition de phlogistique la réduit en un régule qui se précipite au fond par son plus grand poids spécifique, emportant avec lui les métaux précieux dont elle a dépouillé la masse de scories qui la surnagent: il y en reste un peu à la vérité, mais on peut le retrouver en partie. Voyez les Flux, & les articles OEuvre, Liquation, & Essai.

On n'a soin de bien fermer les vaisseaux où l'on fond les verres tirés des métaux, que pour empêcher la chûte des charbons: on conçoit à - présent qu'ils y porteroient un principe inflammable qui ne manqueroit pas de réduire en régule une portion du métal qu'on a eu en vûe de vitrifier: cet inconvénient n'est guere à craindre, quand la surface de la matiere vitrifiable est couverte de nitre. Ce sel, qu'on employe ordinairement comme fondant, détonne avec le charbon qu'il détruit en s'alkalisant. Voyez Nitre fixe par les charbons. Les pailles, les cheveux, les menus brins de bois, & enfin tous les corps réductifs ou qui peuvent le devenir, dont nous avons parlé, produisent le même phénomene.

Parmi les fondans, on en trouve qui se séparent des corps après qu'ils ont exercé leur action sur eux. On conçoit aisément encore que tel fondant qui reste uni à un corps après la fusion, se séparera d'un autre après cette opération, ou sous quelqu'autre condition. Les corps qui ne restent point unis ensemble, quand l'un a servi de fondant à l'autre, sont le plomb um à l'or & à l'argent, quand le grand feu a vitrifié le premier, ou scorifié sa litharge sur une coupelle qui la boit avec les autres métaux imparfaits, s'il s'en trouve dans l'alliage (Voyez Essai & Affinage); parce que pour lors ils ne peuvent plus faire d'union avec des métaux qui n'ont pû subir le même état. L'étain est obligé d'abandonner le plomb, quand on donne à leur alliage un feu assez fort pour calciner le premier qui surnage. Le régule d'antimoine & sa mine se séparent de l'or & de l'argent, quand on les calcine & qu'on les fait fumer. Voyez faire fumer l'antimoine. Le zinc ne s'unit jamais au bismuth. L'alkali fixe, le sel marin, le nitre, le sel ammoniac, & le borax, se séparent de l'or & de l'argent dont ils

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