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Quelques cartésiens mitigés attachés aux tourbillons,
sans l'être aux conséquences que Descartes en
a tirées, ont cherché à raccommoder de leur mieux
ce qu'ils trouvoient de défectueux dans l'explication
que leur maître avoit donnée du flux & du reflux:
mais indépendamment des objections particulieres
qu'on pourroit faire contre chacune de ces explications,
elles ont toutes un défaut général, c'est de
supposer l'existence chimérique des tourbillons:
ainsi nous ne nous y arrêterons pas davantage. Les
principes que nous espérons donner aux mots
La meilleure méthode de philosopher en Physique,
c'est d'expliquer les faits les uns par les autres, &
de réduire les observations & les expériences à certains
phénomenes genéraux dont esles soient la conséquence.
Il ne nous est guere permis d'aller plus
loin, les causes des premiers faits nous étant inconnues: or c'est le cas où nous nous trouvons par rapport
au flux & reflux de la mer. Il est certain par toutes
les observations astronomiques, voyez
Mettant donc à part toute hypothèse, nous poserons
pour principe, que comme la lune pese vers
la terre, voyez
Kepler avoit conjecturé il y a long - tems, que la gravitation des parties de la terre vers la lune & vers le soleil, étoit la cause du flux & reflux.
C'est ainsi que pensoit ce grand astronome, dans son introd. ad theor. mart. & ce soupçon, car ce n'étoit alors rien de plus, se trouve aujourd'hui vérifié & démontré par la théorie suivante, déduite des principes de Newton.
Théorie des marées. La surface de la terre & de la
mer est sphérique, ou du moins étant à - peu - près
sphérique, peut être ici regardée comme telle. Cela
posé, si l'on imagine que la lune A (
Par conséquent l'eau en E doit s'élever vers la lune, & la mer doit s'enfler en E.
Par la même raison, l'eau en G étant la plus éloignée de la lune, doit peser moins vers cette planete que ne fait aucune autre partie de la terre ou de la mer, dans l'hémisphere F G H.
Par conséquent l'eau de cet endroit doit moins s'approcher de la lune, que toute autre partie du globe terrestre; c'est - à - dire qu'elle doit s'élever du côté opposé comme étant plus legere, & par conséquent elle doit s'enfler en G.
Par ces moyens, la surface de l'Océan doit prendre nécessairement une figure ovale, dont le plus long diametre est E G, & le plus court F H; de sorte que la lune venant à changer sa position dans son mouvement diurne autour de la terre, cette figure ovale de l'eau doit changer avec elle: & c'est - là ce qui produit ces deux flux & reflux que l'on remarque toutes les vingt - cinq heures.
Telle est d'abord en général, & pour ainsi dire en gros, l'explication du flux & reflux. Mais pour faire entendre sans figure, par le seul raisonnement, & d'une maniere encore plus précise, la cause de l'élévation des eaux en G & en E, imaginons que la lune soit en repos, & que la terre soit un globe solide en repos, couvert jusqu'à telle hauteur qu'on voudra d'un fluide homogene, rare & sans ressort, dont la surface soit sphérique; supposons de plus que les parties de ce fluide pesent (comme elles font en effet) vers le centre du globe, tandis qu'elles sont attirées par le soleil & par la lune; il est certain que si toutes les parties du fluide & du globe qu'il couvre, étoient attirées avec une force égale & suivant des directions paralleles, l'action des deux astres n'auroit d'autre effet, que de mouvoir ou de déplacer toute la masse du globe & du fluide, sans causer d'ailleurs aucun dérangement dans la situation respective de leurs parties. Mais suivant les lois de l'attraction, les parties de l'hémisphere supérieur, c'est - à - dire de celui qui est le plus près de l'astre, sont attirées avec plus de force que le centre du globe; & au contraire les parties de l'hémisphere inférieur sont attirées avec moins de force: d'où il s'ensuit que le centre du globe étant mû par l'action du soleil ou de la lune, le fluide qui couvre l'hémisphere supérieur, & qui est attiré plus fortement, doit tendre à se mouvoir plus vîte que le centre, & par conséquent s'élever avec une force égale à l'excès de la force qui l'attire sur celle qui attire le centre; au contraire le fluide de [p. 904]
On explique par - là avec la derniere évidence, comment l'élévation & l'abaissement des eaux de la mer se fait aux mêmes instans dans les points opposés d'un même méridien. Quoique ce phénomene soit une conséquence nécessaire du système de M. Newton, & que ce grand géometre l'ait même expressément remarqué, cependant les Cartésiens soûtiennent depuis un demi - siecle, que si l'attraction produisoit le flux & reflux, les eaux de l'Océan, lorsqu'elles s'élevent dans notre hémisphere, devroient s'abaisser dans l'hémisphere opposé. La preuve simple & facile que nous venons de donner du contraire sans figure & sans calcul, anéantira peut - être enfin pour toûjours une objection aussi frivole, qui est pourtant une des principales de cette secte contre la théorie de la gravitation universelle.
Le mouvement des eaux de la mer, au moins celui
qui nous est sensible & qui ne lui est point commun
avec toute la masse du globe terrestre, ne provient
donc point de l'action totale du soleil & de la
lune, mais de la différence qu'il y a entre l'action de
ces astres sur le centre de la terre, & leur action sur
le fluide tant supérieur qu'inférieur: c'est cette différence
que nous appellerons dans toute la suite de
cet article, action, force, ou attraction solaire ou lunaire.
M. Newton nous a appris à calculer chacune
de ces deux forces, & à les comparer avec la pesanteur.
Il a démontré par la théorie des forces centrifuges,
& par la comparaison entre le mouvement
annuel de la terre & son mouvement diurne (Voyez
Il est au moins certain, tant par les phénomenes
des marées que par d'autres observations (Voyez
Nous avons vû que les eaux doivent s'élever en même tems au - dessous de l'endroit où est la lune, & au point de la terre diamétralement opposé à celui - là; par conséquent à 90 degrés de ces deux points, ces eaux doivent s'abaisser: de même l'action solaire doit faire élever les eaux à l'endroit au - dessus duquel est le soleil, & au point de la terre diamétralement opposé; & par conséquent les eaux doivent s'abaisser à 90 degrés de ces points. Combinant en<cb->
En général dans les conjonctions & oppositions du soleil & de la lune, la force qui fait tendre l'eau vers le soleil, concourt avec la pesanteur qui la fait tendre vers la lune. Car dans les conjonctions du soleil & de la lune, ces deux astres passent en même tems au - dessus du méridien; & dans les oppositions, l'un passe au - dessus du méridien, dans le tems que l'autre passe au - dessous; & par conséquent ils tendent dans ces deux cas à élever en même tems les eaux de la mer. Dans les quadratures au contraire, l'eau élevée par le soleil se trouve abaissée par la lune; car dans les quadratures, la lune est à 90 degrés du soleil; donc les eaux qui se trouvent sous la lune sont à 90 degrés de celles au - dessus desquelles se trouve le soleil; donc la lune tend à élever les eaux que le soleil tend à abaisser, & réciproquement; donc dans les syzygies l'action solaire conspire avec l'action lunaire à produire le même effet, & au contraire elle tend à produire un effet opposé dans les quadratures: il faut par conséquent en général, & toutes choses d'ailleurs égales, que les plus grandes marées arrivent dans les syzygies, & les plus basses dans les quadratures.
Dans le cours de chaque jour naturel, il y a deux flux & reflux qui dépendent de l'action du soleil, comme dans chaque jour lunaire il y en a deux qui dépendent de l'action de la lune, & toutes ces marées sont produites suivant les mêmes lois; mais celles que cause le soleil sont beaucoup moins grandes que celles que cause la lune: la raison en est, que quoique le soleil soit beaucoup plus gros que la terre & la lune ensemble, l'immensité de sa distance fait que l'action solaire est beaucoup plus petite que l'action lunaire.
En général, plus la lune est près de la terre, plus son action pour élever les eaux doit être grande; & il en est de même du soleil. C'est une suite des lois de l'attraction, qui est plus forte à une moindre distance.
Faisant abstraction pour un moment de l'action du
soleil, la haute marée devroit se faire au moment
du passage de la lune par le méridien, si les eaux
n'avoient pas (ainsi que tous les corps en mouvement) une force d'inertie (Voy. Next page
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